#1191 – Cobh Ramblers FC : the Claret and Blue Army

L’armée bordeaux et bleue. Situé à une quinzaine de kilomètres de Cork, la petite ville côtière de Cobh est connue pour avoir été le point de départ de la moitié des 6 millions d’Irlandais qui émigrèrent en Amérique du Nord au XIXème et XXème siècle et également la dernière escale du Titanic le 11 avril 1912 avant de traverser l’Atlantique pour son voyage vers New York. Dans cet environnement maritime et invitant au départ semble-t-il, le club de football de Cobh survit dans les divisions superieures de l’élite irlandaise depuis 1922. A la fin des années 1980, il accueillit dans ses rangs et par un heureux hasard (il avait signé chez le grand voisin de Cork mais ce dernier tarda à enregistrer son contrat) le jeune Roy Keane (18 ans) avant qu’il n’aille effrayer les pelouses de Premier League.

Mais retournons au début du XXème siècle lorsque l’Irlande était soumise au Royaume-Uni. Des troupes de l’armée britannique stationnaient à Cobh et dans leur moment de loisirs, affrontaient les habitants de la ville dans des matchs de football. En 1921, l’Irlande gagna son indépendance et, au retrait des troupes royales de Cobh, les habitants fondèrent alors le club de Cobh Ramblers pour poursuivre l’aventure football. Malgré les combats sanglants lors de l’indépendance, qui attisèrent les rivalités entre les deux peuples, les fondateurs du club prirent pour modèle les couleurs d’un club anglais : Burnley. En 1919-1920, Burnley avait été sacré vice-champion d’Angleterre. Lors de la saison suivante, le club du Lancashire remporta son premier titre de champion d’Angleterre après un parcours formidable. En effet, la saison débuta par 3 défaites, mais l’équipe parvint par la suite à enchainer 30 matchs sans défaite. Un record qui éblouit donc au-delà des frontières anglaises et tint jusqu’à la saison 2003-2004 d’Arsenal (cf. #941).

#1190 – Partizan Belgrade : Парни ваљак

Le rouleau compresseur. Belgrade accueille l’un des derbys les plus intenses d’Europe, qui divise la capitale serbe, même un pays, et qui se nomme le Derby éternel. Fondés la même année, les deux clubs se partagent les 2/3 des championnats de Yougoslavie et tous les championnats de Serbie (à l’exception d’un). Leur rivalité s’exprime dans de nombreux sports (les deux clubs étant omnisports) et, en football, a rassemblé souvent des audiences au stade de plus de 90 000 personnes. Le premier match en championnat entre les deux équipes de football se déroula le 5 janvier 1947 et vit la victoire de l’Étoile Rouge (4-3). Le Partizan prit sa revanche lors du derby suivant le 27 avril 1947 avec une victoire 1 but à 0. Au 20 avril 2024, 173 derbys avaient été disputés, 68 ayant été remportés par l’Étoile Rouge contre 48 pour le Partizan.

Le 6 Décembre 1953, les deux équipes se rencontraient pour le 13ème derby de leur histoire dans le cadre du championnat de Yougoslavie. Le match se déroulait dans le stade du Partizan, Stadion Jugoslovenske narodne armije. Pendant la pré-saison, le 9 Août 1953, le Partizan gagnait un match amical face à l’Étoile Rouge, 2 buts à 1, et donc, quand le derby arriva en Décembre, les joueurs de l’Étoile Rouge voulaient prendre leur revanche. Toutefois, le Partizan demeurait sur une série de 7 victoires consécutives en championnat (9 au total sur 12 matchs disputés). Très vite, les joueurs du Partizan mirent la main sur le match et asphyxièrent leur rivaux. A la 5ème minute, le célèbre attaquant du Partizan, Stjepan Bobek, ouvrit le score. 7 minutes plus tard, Kosta Tomašević permit à l’Étoile Rouge d’égaliser et de faire illusion quelques instants. Juste avant la mi-temps, Zebec et Mihailović donnèrent deux buts d’avance au Patizan. La seconde mi-temps fut à sens unique avec 4 nouveaux buts pour le Partizan (marqués par Herceg (2x), Mihailović et Zebec). Le Partizan remporta le derby 7 buts à 1. Le lendemain, le journal « Sport » titra en une « Парtи3ahob beлиkи дah, « Парни ваљак » пpeгa3иo 3be3дy, 7:1 » (Le grand jour du Partizan, un « rouleau compresseur » bat l’Étoile 7:1). Dans l’article, le journaliste Milan Kovačević décrivit le Partizan comme un rouleau compresseur, avançant irrésistiblement et écrasant tout sur son passage. Le surnom fut immédiatement adopté par les fans. Le Partizan remporta également le match retour (2 à 0, le 2 Mai 1954) mais termina à la seconde place du championnat (devant l’Étoile, derrière le Dinamo Zagreb).

Aujourd’hui, cette humiliation subit par l’Étoile Rouge demeure encore la plus large dans un derby. Un vieux rouleau compresseur aux couleurs du Partizan trône dans l’aile sud de l’enceinte du club. En 1975, l’écrivain et supporteur du Partizan, Slobodan Novaković, rédigea l’hymne du club dans lequel il est chanté « Parni valjak neka melje, da ispuni naše želje » (Laissons le rouleau compresseur broyer, pour exaucer nos souhaits).

#1189 – Audax Club Sportivo Italiano : los Itálicos

Les Italiens. Le club de Santiago du Chili représente la communauté italienne depuis ses origines. Quand on parle d’immigration italienne en Amérique du Sud, on pense naturellement à l’Argentine où plus de trois millions d’Italiens émigrèrent en près d’un siècle (entre 1857 et 1940), soit 10% de l’immigration italienne dans le monde. Elle laissa une trace indélébile dans le pays des gauchos. En 2011, plus de 25 millions des Argentins (soit 62,5 % de la population) avaient des origines italiennes. Le football n’y échappa pas (Boca Junior #1, River Plate #900, CS Independiente Rivadavia #1171). Mais, au tournant du XIXème et XXème siècle, l’Argentine ne fut pas la seule terre d’accueil et des italiens se retrouvèrent aux Etats-Unis et dans tous les pays d’Amérique du Sud.

Au Chili, l’immigration démarra timidement puisque le recensement de 1854 établissait qu’il y avait seulement 406 résidents italiens dans le pays. Mais, avec l’industrialisation du Chili et les difficultés économiques et politique de l’Italie, l’immigration italienne s’accéléra fortement entre 1880 et 1930 et le recensement de 1920 dénombrait alors 12 342 italiens au Chili, le chiffre le plus élevé jusqu’à présent, faisant de la colonie italienne la deuxième plus importante après la communauté espagnole. Comme pour l’Argentine, l’Etat Chilien favorisa cette immigration en allant faire directement sa promotion en Europe même (avec l’Agencia General de Colonización de Chile en Europa). Aujourd’hui, en fonction des études, les descendants d’immigrés italiens représenteraient entre 150 000 et 600 000 chiliens.

Originaires principalement du nord de l’Italie (Ligurie et Piémont), les immigrés italiens se répartirent dans tout le pays, à hauteur de 80% dans les zones urbaines, comme Valparaíso et Santiago, et dans les zones agricoles de Capitán Pastene, Parral et La Serena. A Santiago, les italiens vivaient principalement dans le quartier Barrio Italia (ou aussi connu sous le nom de Barrio Santa Isabel). Bien intégrés dans la population et constituant des piliers du développement économique et social du pays, les immigrés italiens fondèrent aussi de solides réseaux sociaux entre eux, servant à créer de la solidarité et à défendre leur identité et leur culture. En 1910, la communauté italienne offrit la statue Monumento al Genio de la Libertad pour célébrer le centenaire du Chili qui fut érigée sur la Plaza Baquedano à Santiago. La même année, 3 de ses membres, Alberto Caffi, Ruggero Cozzi et Amato Ruggieri, décidèrent de créer une institution sportives qui les représenterait. La symbolique du club s’attacha donc à se concentrer sur le rappel des liens avec l’Italie. Le premier écusson présentait une croix blanche sur un champ rouge, qui était l’écu de la Maison de Savoie, qui régnait sur l’Italie depuis son unification. Elle fut remplacée dans les années 1950 par une roue cycliste intégrant en son centre le tricolore italien (vert, blanc et rouge). Pour le maillot, le choix se porta sur le vert, accompagné d’un short blanc, s’inspirant du drapeau italien. En 2020, pour commémorer les 110 ans de la fondation du club, un maillot bleu a été porté par les joueurs, en hommage aux couleurs représentatives de la Maison de Savoie, qui inspira l’uniforme de l’équipe nationale italienne.

#1188 – CD Morón : el Gallo, Gallito

Le coq. Avec près de 100 000 habitants, la cité de Morón s’inscrit dans le Grand Buenos Aires et se fait connaître populairement comme « la capitale de l’ouest » de Buenos Aires. Elle est également fortement identifiée avec la figure du coq. Mais, contrairement à de nombreuses autres histoires de symbole, ce n’est pas la ville qui a influencé le club de football mais l’inverse. En effet, en 1957, après 10 ans d’existence, un coq fit son apparition sur le maillot du club. En 1959, un coq comme mascotte fut apporté sur le terrain. Puis, en 1962, le club l’adopta officiellement comme symbole dans ses statuts. 

Par fierté pour le club à la popularité importante, la municipalité adopta également l’animal. Ainsi, en 1963, elle fit hérisser une statue du coq sur la Plaza San Martín, œuvre du sculpteur Amado Armas. En 1968, elle établit le prix du Gallo de Morón (le coq de Morón), une statuette qui distingue des personnes ou des institutions aux réalisations en faveur du bien-être social ou en soutien à l’art ou la science.

Mais, d’où vient cette idée du coq ? Pour beaucoup, le nom de la ville en serait à l’origine car la cité argentine s’appelle comme une ville andalouse, Morón de la Frontera, dont sa renommée dépasse ses frontières grâce à un coq. Selon la légende, vers 1500, deux clans de la ville andalouse se disputait et un conciliateur, dénommé Don Juan Esquivel, fut nommé par la cour pour régler le différent. Déclarant régulièrement que « no cantaba otro gallo en el sitio que él cantaba » (aucun autre coq n’a chanté à l’endroit où il chantait), ses bravades et son arrogance épuisèrent la patience des habitants de Morón de la Frontera qui le surnommèrent el gallo. Ces derniers s’unirent pour le mettre nu et lui infliger une raclée. Le juge Esquivel partit en hurlant qu’il ne reviendrait jamais dans la ville. De cette histoire, un proverbe espagnol naquit « Anda que te vas quedando como el Gallo de Morón sin plumas y cacareando  » (Allez, tu restes comme le coq de Morón sans plumes, ni chant) qui s’utilisent pour caractériser une personne qui se retrouve sans argent et qui crie ou proteste. Or, ce coq s’imposa à Morón de la Frontera mais également dans les autres villes du monde se dénommant Morón (Morón à Cuba, Morón au Venezuela et Morón à Haïti).

Seulement, pour les argentins, l’image renvoyée par le coq de Morón de la Frontera n’est pas valorisante car il est déplumé et pleutre. Donc une autre histoire tente d’expliquer l’origine de ce coq. A l’époque coloniale, les combats de coq avaient les faveurs des paysans du coin et les coqs du Morón argentin avaient une certaine réputation. D’ailleurs, d’autres rajoutent qu’un grand-père des frères Cadó (qui participèrent à la fondation du club) élevaient des coqs de combat en provenance d’Uruguay. Ce coq plus combatif et fier trouve naturellement un meilleur écho auprès des fans.

#1187 – FC Machida Zelvia : Zelvia

L’aventure du football dans la ville de Machida, l’une des principales villes de le banlieue de la capitale japonaise, débuta dans les écoles de la cité en 1977. Les professeurs des écoles primaires enseignaient le football aux élèves, estimant que ce sport était un bon moyen de développer le sens de l’équilibre des enfants. Une sélection des meilleures scolaires fut réunit sous l’égide d’un nouveau club, appelé Machida FC. Le club adulte vit le jour plus tard en 1989 sous le nom du FC Machida Top. En 1997, le club attint le sommet de la pyramide amateur de la ligue tokyoïte et, en prévision de l’accession à la Première Division de la Ligue de Tokyo, il changea de nom pour FC Machida Zelvia.

Le club créa un mot valise rassemblant les deux principaux symboles de la cité de Machida. D’un côté, l’arbre dénommé zelkova. De l’autre, la fleur salvia. Depuis le 15 juin 1972, ces deux éléments de la flore sont devenus des symboles officiels de Machida. Originaire du Japon, le zelkova (aussi connu sous le nom de keyaki (欅)) est un arbre majestueux pouvant atteindre 30 mètres de hauteur, caractérisé par un tronc court et un faisceau de branches formant une tête large et ronde. Sa croissance rapide avec ses branches s’étendant vers le ciel collait bien alors à l’image que voulait donner la municipalité à sa cité en pleine croissance. L’arbre est particulièrement populaire au Japon, où il orne de nombreux parcs et avenues, et notamment à Machida. Originaire du Brésil et venue au Japon en 1895, la salvia (ou sauge rouge, connu sous le nom de Higoromosou (緋衣草)) se caractérise par des fleurs rouges vives, donnant une apparence énergique qui représente la jeunesse et la vitalité de la ville. On retrouve cette fleur dans de nombreux parterres dans toute la ville et est très appréciée des citoyens.

#1186 – 1. FC Nuremberg : der Altmeister

Le vieux maître. Depuis quelques décennies, dans la Bundesliga, le Bayern Munich concoure quasiment sans rival. Certes, le Bayer a réussi une superbe saison 2023-2024 et remporté avec brio le championnat allemand. Dortmund titille régulièrement l’arrière-train du club bavarois. Mais, fondamentalement, le Bayern demeure le maître de l’Allemagne et possède un palmarès à faire pâlir bien des clubs européens (33 Championnats d’Allemagne (record national, dont 32 à l’ère Bundesliga et 11 d’affilé), 20 Coupes d’Allemagne (record national), 10 Super Coupes d’Allemagne (oui encore record national) et 6 Coupes de la Ligue (faut-il préciser qu’il possède le record national)). Bien que le Bayern remporta quelques titres avant la Seconde Guerre mondiale, son hégémonie démarra à la fin des années 1960. Auparavant, le club dominant se trouvait également en Bavière mais à Nuremberg.

Fondé en mai 1900 par 18 lycéens en tant que club de rugby, le FC Nuremberg se concentra rapidement sur le football et se constitua un palmarès (ponctué par 3 titres de champion de Bavière et 2 titres de Champion d’Allemagne du Sud) et une certaine réputation avant le déclenchement des hostilités de la Première Guerre mondiale. Mais, la période faste du club bavarois débuta au début des années 1920 et s’étendit jusqu’au début de la Seconde Guerre mondiale. Entre juillet 1918 et février 1922, l’équipe resta invaincue lors de 104 matches officiels. En 1919, à son jeu déjà développé, le club ajouta une touche raffinée hongroise, avec l’ailier gauche Péter Szabó et l’avant-centre Alfréd Spezi Schaffer. Puis, en 1921, en provenance du rival du SpVgg Fürth, Hans Sutor renforça l’équipe, alors portée par le milieu Hans Kalb et le gardien Heinrich Stuhlfauth. Le titres s’enchainèrent : champion d’Allemagne en 1920, 1921, 1924, 1925, 1927 et 1936 (et vice-champion en 1934 et 1937), vainqueur de la coupe d’Allemagne en 1935 et 1939 auxquels s’ajoutèrent de nombreux championnat et ligues régionaux. Cette décennie des années 1920 marqua l’histoire du club comme le football allemand. En remportant 5 des 9 championnats en jeu sur cette période, le FC Nuremberg était le maître du football allemand. Dans cette décennie, Nuremberg fournit parfois la moitié de l’équipe nationale allemande. Seuls le rival du SpVgg Fürth et l’équipe d’Hambourg SV réussirent à se hisser quelque fois au niveau du club bavarois dans la lutte pour le championnat allemand.