#195 – Legia Varsovie : Legioniści

Les légionnaires. Sous l’ère communiste, les clubs sportifs de l’Est étaient souvent associés, sous le patronage voire des émanations des grands corps de l’administration (Armée, Police …) ou des syndicats d’ouvriers (ferroviaire, mineur …). Ce surnom fait donc référence au fait que le club était associé à l’armée polonaise. Mais surtout, cette association remontait avant la période communiste et puise ses origines dans la Première Guerre mondiale.

Au XIXème siècle et au début du XXème, la Pologne se trouvait diviser entre 3 nations : la Russie, la Prusse (puis Allemagne) et l’Empire Austro-Hongrois. Quand le conflit éclata en 1914, les habitants d’origine polonaises se retrouvèrent dans ces armées qui étaient opposées. D’un côté, l’Allemagne et l’Empire Austro-Hongrois. De l’autre, la triple alliance de la France, l’Angleterre et la Russie. Pour gagner leur indépendance, des polonais se réunirent en unités militaires, dénommés Légion, et se joignirent aux forces Austro-Hongroises contre les Russes. En 1915, pour occuper les hommes au front pendant les périodes de calme, des clubs de football se créèrent au sein des brigades polonaises et s’affrontaient. Le Legia fut l’un d’eux et donc fondé en 1916 au sein de la 3ème brigade des légions qui intégraient un grand nombre d’ancien footballeurs sous le nom de Drużyna Sportowa Legia (l’équipe sportive de la Légion).

Après la guerre, le club fut réanimé par les officiers du Château Royal, avec un statut plus ou moins militaire au fil des années. Le nom Légia (Légion) demeura. Avec l’avènement du communisme après la Seconde Guerre mondiale, le club fut rattaché officiellement à l’Armée Populaire Polonaise jusqu’en dans les années 90, où le club sera racheté par des investisseurs privés.

#180 – FAR Rabat : les Militaires

Il n’est pas difficile de comprendre d’où provient de ce surnom. En effet, FAR signifie Forces Armées Royales et le vrai nom du club est Association sportive des Forces armées royales. En 1955, le Maroc mit fin au protectorat français et en 1956, le royaume instaura les Forces Armées Royales. Moulay Hassan, futur Roi Hassan II et alors Prince Héritier, était également Chef des Forces Armées Royales. En 1958, il décida de créer un club omnisports au sein de l’armée en commençant par la section football. Certainement que le cadre de l’armée permettait d’offrir une structure développée à ce club. Ce dernier devait également fédérer et proposer une association sportive aux troupes. Aujourd’hui, le club est l’un des plus titrés du pays, compte 12 sections sportives et est toujours lié aux Forces Armées Royales.

#167 – CSKA Sofia : Армейците

Les militaires. Si le club fut fondé en 1948, ses origines remontent au début des années 1920. Au printemps 1919, un groupe de sportifs se réunirent avec plusieurs officiers actifs et réservistes pour créer l’OSK Sofia (Club des officiers) dans le but d’unir les officiers sur des terrains de sport. En octobre 1923, en raison du besoin de trouver des infrastructures, les clubs de football Athletic Sofia (fondé en 1910) et Slava Sofia (fondé en 1916) fusionnèrent avec l’OSK pour former l’AS-23, abréviation du Club sportifs des officiers Athletic Slava. Ce nouveau club demeura sous le patronage du ministère de la Guerre, qui fournissait les équipements. Le 9 novembre 1944, avec le soutien et à l’initiative de Mihail Mihaylov, comptable au ministère de la Guerre et membre dirigeant du club du Shipka Sofia, un accord fut signé pour fusionner 3 clubs, l’AS-23, le Shipka ainsi que le Spartak pour donner naissance au Chavdar Sofia. Le général Vladimir Stoychev fut mis à sa tête. Malgré ces fusions, le club déclina et fut relégué à l’issue de la saison 1947. En 1948, Mihail Mihaylov œuvra de nouveau pour revigorer le club en le faisant fusionner avec le club de la Maison Centrale des Troupes (une infrastructure sportive de l’Armée au centre de Sofia). Cette fusion fut vue avec bienveillance avec l’avènement du communisme, le rattachement des équipes sportives à des administrations ou des syndicats étant encouragé. A partir de là, le nouveau club dénommé CDV Sofia se confondit de plus en plus avec l’armée. Le club fusionna encore avec d’autre et changea plusieurs fois de nom (Централен дом на народната войска (Maison centrale des troupes populaires), Отбор на софийския гарнизон (Equipe de la Garnison de Sofia), Централен дом на народната армия (Maison centrale de l’armée populaire)). En 1963, le club s’associa avec une autre équipe et donna naissance au ЦСКА Червено знаме (CSKA Drapeau Rouge). Le nouveau club fut détaché de la maison centrale des troupes pour venir directement dans le giron du Ministère de la Défense. CSKA signifie alors Club sportif central de l’armée. Avec l’effondrement du communisme, le club sort du giron de l’Armée et devient un club sportif privé. Mais son long passé avec l’Armée se matérialise encore dans son surnom.

#143 – CA Vélez Sarsfield : el Fortín

Le fort, la forteresse. Le club argentin hérita de ce surnom en juin 1932, quand dans le journal « Crítica » , apparaît un article où le journaliste Hugo Marini décrivit le stade du club, situé aux coins de la rue Basueldo et de la Guardia Nacional dans le quartier de Villa Luro, comme un fort. San Lorenzo devait rendre visite à une équipe de Vélez qui était en pleine forme à domicile. Avant le match, Marini titrait : « ¿San Lorenzo hará rendir mañana el ‘Fortín de Villa Luro’? » (Est-ce que San Lorenzo fera jouer le ‘Fortín de Villa Luro’ demain ?). Pour Marini, le stade de Velez était un fort car il était difficile pour l’équipe adverse d’y gagner un match. En outre, les projecteurs (une rareté pour l’époque) situés au quatre coin du terrain ressemblaient aux tours de guet d’un fort. Bien que ce match se soit soldé par un désastre pour Vélez, qui s’inclina 4-1, les supporteurs trouvèrent un surnom.

Dans ces années, alors que les réseaux sociaux et télévision n’existaient pas et que la radio en était encore à ses premiers balbutiements, la presse écrite disposait d’un immense pouvoir pour accompagner l’explosion de la popularité du football en Argentine. Par ses chroniques drôles et hyperboliques, Hugo Marini en fut l’un des plus importants représentants. Sa chronique « el Sport de cada día » était particulièrement lu et immortalisait un grand nombre d’expressions populaires et surnoms pour le ballon rond.

Malheureusement, suite à la relégation du club en seconde division en 1940, le contrat de location du stade prît fin et Vélez perdit son fort. A la fin des années 40, grâce à la ténacité de José Amalfitani, le club acquit de nouvelles terres dans le quartier de Liniers et y construisit un nouveau stade, qui hérita également le nom d’el Fortín ou Fortín de Liniers.

#138 – FCSB : Roș-albaștrii

Les rouges et bleus. L’un des surnoms principal du Steaua Bucarest correspond aux couleurs du club. Il fut fondé le 7 juin 1947 à l’initiative de plusieurs officiers de la Maison royale roumaine, par un décret signé par le général Mihail Lascăr, ancien commandant suprême de l’armée royale roumaine. Il avait pour but de poursuivre dans un cadre institutionnalisé la vieille tradition de la pratique du sport dans les forces armées roumaine. Les joueurs portaient alors un maillot rouge et jaune accompagné d’un short bleu, ces 3 couleurs étant celles de la Roumanie.

Le tricolore bleu, jaune et rouge comme drapeau de la nation roumaine apparaît au début du XIXème siècle, lors de la période appelée « Renaissance culturelle roumaine ». Ce mouvement culturel et philosophique, qui se développa en Transylvanie, en Moldavie et en Valachie, fut le terreau de l’identité et du nationalisme roumain pour parvenir à l’indépendance du pays en 1859. Le drapeau tricolore se basa sur les couleurs que partageaient les 3 régions historiques. Entre le XVIIIème et le XIXème siècle, leurs drapeaux évoluèrent régulièrement mais ces 3 couleurs y étaient souvent présentes (soit une, soit une paire, voire les 3). En 1821, le drapeau utilisait par les insurgés roumains en Valachie et en Moldavie affichait déjà ces 3 couleurs, auxquelles on leur attribua un sens : Liberté (le bleu du ciel), Justice (le jaune des champs), Fraternité (le rouge du sang). En 1859, le tricolore s’imposa comme le drapeau nationale suite à l’union de la Moldavie et de la Valachie.

Seulement, lorsque le pays sombra dans le communisme à la fin de l’année 1947, la structure fut évidemment poursuivie par la nouvelle armée roumaine. Le Ministre de la Défense roumain décida de s’aligner sur le grand frère soviétique et son club de l’armée, le CSKA Moscou. L’écusson du Steaua devint une copie de celui du CSKA. De même, dans les années qui suivent, le jaune fut supprimé pour ne retenir, comme couleurs du club, que le rouge et bleu, teintes de l’armée roumaine et du CSKA. Le rouge est la couleur des forces terrestres tandis que le bleu représente les forces navales et aériennes. Finalement, en 1961, le jaune revint dans l’ensemble chromatique du club.

#89 – CSKA Moscou : конями

Les chevaux. Il existe trois versions pour l’origine de ce surnom. La plus généralement admise est que le stade Peschanoe où évolua le club fut construit sur une partie de l’hippodrome de Moscou. Ce stade a été détruit au début des années 2000 pour laisser place à la nouvelle enceinte du CSKA, la VEB Arena, en 2016. L’autre version est très proche. Simplement, au lieu du stade, elle parle du siège du club. Et plutôt que l’hippodrome de Moscou, il s’agit des anciennes écuries de la famille princière Ioussoupov. Enfin, la dernière version rend hommage à l’un des premiers maréchaux de l’Union soviétique, Semion Boudienny. Il fut le commandant de la première armée de cavalerie de l’Armée rouge pendant la guerre civile russe et également l’un des principaux organisateurs de la cavalerie. Nombreuses fois décorés (8 ordres de Lénine, 3 Médaille d’Or, il reçut le titre de Héros de l’Union Soviétique, al plus haute distinction de l’URSS), il contribua aussi à la naissance de la race équine rustique qui porte son nom. On ne saura peut-être jamais l’origine de ce surnom mais depuis 2008, cet animal est devenu le symbole officiel du club de Moscou. Si les anciens fans du CSKA appréciaient peu ce surnom, maintenant les supporteurs s’appellent fièrement конями (les chevaux) ou пони (poneys). Lors de matchs, dans les gradins du stade, vous pouvez apercevoir de nombreux chevaux gonflables ou en peluche.

#42 – Real Madrid : los Vikingos

Le Real Madrid est connu aussi comme les Vikings. Pourtant, Erik le Rouge ne semble pas avoir déambulé sur Gran Vía. Il existe 3 légendes à propos de ce surnom, moins utilisés de nos jours. La première raconte que dans les années 1960 un journaliste du magazine anglais, Times, compara les madrilènes aux géants du nord. En effet, après la création de la première coupe d’Europe en 1956, le Real Madrid écrasa la concurrence européenne en remportant les 5 premières éditions. Suite à la victoire en finale de la coupe d’Europe 1960 face à l’Eintracht Francfort 7 buts à 3, la 5ème Coupe des Champions remportée par le club, le journaliste écrivit dans son article « Le Real Madrid traverse l’Europe comme les Vikings avaient l’habitude de marcher, détruisant tout sur leur passage ».

La deuxième est née dans les années 1970. Le club du Real Madrid signa à cette époque des joueurs provenant d’Europe du Nord (Allemagne et Scandinavie) tels que Günter Netzer (1973-1976), Paul Breitner (1974-1977), Uli Stielike (1977-1985) ou Henning Jensen (Danemark, 1976-1979), qui affichaient des longues crinières, des moustaches et des visages blancs plutôt nordiques. Leur apparence semblait similaire aux Vikings. Il faut lire également ce surnom en mirroir de celui gagné à la même époque par les rivaux de l’Atlético, les Indiens (cf #269).

Enfin, la dernière histoire se rapporte à la géographie. Les supporteurs rivaux de l’Atlético de Madrid appelaient ainsi les joueurs du Real car le stade de Bernabeu était au nord du stade Calderón (le stade de l’Atlético). Ils venaient donc du Nord.

#28 – Chelsea FC : Pensioners

Pensioners, les retraités, fait référence aux vétérans de l’armée qui séjournait au Royal Hospital Chelsea à proximité du stade. Cet hôpital est une maison de retraite et de soin pour les vétérans de l’armée britannique. Tout homme ou femme ayant servi dans l’armée et âgé de plus de 65 ans peut prétendre à devenir un Chelsea Pensioner, ie un résident de l’hôpital, qui peut accueillir 300 anciens soldats. Jusqu’au XVIIème siècle, l’État ne prévoyait aucune disposition spécifique pour les soldats âgés et blessés. Les soins aux pauvres et aux malades étaient assurés par les fondations religieuses mais ces hopitaux religieux avaient pris fin suite à la dissolution des monastères sous le règne du roi Henri VIII. En 1681, répondant à la nécessité de s’occuper de ces soldats et s’inspirant des Invalides en France, le Roi Charles II émit un mandat royal autorisant la construction du Royal Hospital Chelsea. L’idée aurait été suggéré par soit par Nell Gwyn, une actrice renommée de l’époque et surtout maîtresse de longue date du Roi, soit par Sir Stephen Fox, Paymaster of the Forces, responsable du financement de l’armée britannique. En 1651, l’idée d’une institution nationale semblait avoir déjà été pensée par la Chambre des Communes qui avait donné des instructions au Council of State pour veiller à ce que les soldats mutilés eussent un lieu salubre pour résidence. Puis, il existait dès 1677 des pensions pour les Reformed Officers (officiers réformés, c’est-à-dire les officiers des régiments dissous) et les soldats mutilés. Le site choisi, adjacent à la Tamise dans la campagne de Chelsea, fut racheté par le Roi à la Royal Society pour 1 300 £. Sir Christopher Wren fut chargé de concevoir et d’ériger le bâtiment. La première pierre de l’hôpital royal fut posée le 17 février 1681 et les bâtiments furent équipés le 28 mars 1689. En mars 1692, les premiers pensionnaires furent 476 sous-officiers et hommes de rang, dont la plupart avaient été blessés lors de la Bataille de Sedgemoor. La chapelle et le cimetière furent tous deux consacrés par Henry Compton, évêque de Londres, le 30 août 1691. Le financement de la construction comme le coût de son exploitation furent assuré par le Roi, quelques généreux bienfaiteurs (dont Sir Stephen Fox) et un prélèvement sur la solde des soldats. Puis, depuis 1847, l’hôpital est entretenu par des fonds directement votés par le Parlement, ainsi que par des dons. Plusieurs rénovations et nouvelles constructions eurent lieues, dont le dernier achèvement en 2009 est l’infirmerie Margaret Thatcher qui abrite sa tombe et celle de son mari ainsi que 100 retraités. En mars 2009, les premières femmes furent admises comme pensionnaires.

Pendant une cinquantaine d’année, l’image d’un Pensioner s’affichait sur l’écusson du club. Mais, en 1952, Ted Drake fut nommé entraîneur et décida de moderniser le club. Il estima que le surnom comme l’image du Pensioners sur le blason du club donnait une mauvaise image, laissant penser que le club était une équipe de retraités. Il fit ainsi changer le blason pour faire apparaître un lion, animal plus terrifiant, à la place du soldat pensioner. Puis, il déclara que le surnom de l’équipe n’était plus les pensioners mais désormais les blues (dont l’origine est expliquée dans l’article #210). Toutefois, les liens avec le Royal Hospital demeurèrent et il n’est donc pas rare de croiser dans les travées du stade de Stamford Bridge des pensioners, portant leur célèbre vareuse écarlate.