#894 – CA San Lorenzo : los Matadores

Les tueurs. Pour un club né sous le patronage d’un prêtre salaisien, ce surnom n’apparaît pas digne des préceptes du Christ. Mais, évidemment, ici point de mort réel, ni de joueurs sanguinaires. Il met en valeur l’exploit de l’équipe de 1968, qui proposa en outre un style élégant et efficace. Cette année-là (et jusqu’en 1985), le championnat argentin se jouait lors de deux tournois. D’un côté, le championnat dénommé Metropolitano qui représentait véritablement la première division argentine, avec des clubs directement affiliés à la fédération nationale (AFA). De l’autre, un tournoi supplémentaire, appelé le Nacional, auquel participaient également des équipes de certains championnats régionaux. En 1968, le Metropolitano se composait de deux poules de 11 équipes, avec un système de play-off pour déterminer le champion. CA San Lorenzo se présentait pour cette saison avec une équipe de joueurs talentueux (le gardien Carlos « Batman » Buttice, le défenseur uruguayen Sergio Villar recruté pour 10 millions de pesos, les défenseurs Antonio Rosl, Oscar Calics et Rafael Albrecht, les milieux Alberto Rendo, Victorio Cocco et Carlos Toti Veglio), renforcés par des jeunes loups formés au club (Roberto Telch, Pedro González, Rodolfo Fisher, Narciso Doval). L’entraineur brésilien Elba de Padua Lima fut le chef d’orchestre qui réussit à polir ces pièces pour réaliser la future performance parfaite.

Pendant la phase de poule, San Lorenzo réalisa une campagne exceptionnelle. Sur 22 matchs, l’équipe en remporta 14 pour 8 nuls, marqua 45 buts et n’en encaissa que 10 (réussissant à conserver sa cage inviolée pendant 13 matchs). Avec un tel parcours, San Lorenzo termina logiquement à la première place avec 12 points d’avance sur le second, Estudiantes. En demi-finale, le club affronta River et la remporta 3 buts à 1 devant plus de 50 000 spectateurs. La finale se joua contre Estudiantes le 4 août au stade Monumental. Le match fut âpre et démarra de la meilleure des manières pour Estudiantes qui marqua deux minutes après le début de la seconde mi-temps, grâce à un but de Verón. Toti Veglio égalisa pour San Lorenzo une vingtaine de minutes plus tard. Il fallait jouer des prolongations pendant lesquelles Fischer réussit le but de la victoire définitive de San Lorenzo. C’était le 8ème titre de champion d’Argentine du club. Surtout, depuis la création du professionnalisme, en 1931, aucun champion n’avait été couronné en étant invaincu. Cette équipe de San Lorenzo fut donc la première à devenir championne sans défaite, en produisant un jeu élégant, démoralisant les équipes adverses. Un véritable rouleau compresseur qui apparaissait comme un tueur.

Dans la foulée, avec cette équipe, San Lorenzo connut une période dorée en remportant 3 nouveaux championnats. Elle fut même la première à réaliser le doublé MetropolitanoNacional en 1972.

#740 – CA Talleres de Córdoba : el Matador

Le tueur. Pas d’Hannibal Lecter dans les supporteurs du club, ni d’hinchada de chasseurs. Une version présente la série de 66 matchs sans défaite d’affillée dans la ligue de Córdoba comme les racines de ce surnom. Toutefois, la version la plus communément admise (et aussi documentée) remonte à une victoire en 1970. 20 septembre 1970, 3ème journée du Nacional (à cette époque, le championnat argentin se divisait en deux tournois distincts : le Metropolitano réunissant les équipes directement affiliées à la fédération et le Nacional, avec les meilleures du Metropolitano et celles qualifiées via des tournois régionaux), Talleres reçevait une superbe équipe de San Lorenzo. Cette dernière avait terminé 3ème du Metropolitano 1970, à deux points du champion Independiente. Les bleus et grenats avaient également conclu une belle tournée en Espagne quelques mois plus tôt. Enfin, la base de l’équipe était constituée des fameux joueurs qui avait remporté le Metropolitano en 1968. Cette année là, San Lorenzo avait été le premier champion invaincu du football argentin de l’ère professionnelle (16 victoires et 8 nuls), avec la meilleure attaque (49 buts marqués) et la meilleure défense (12 buts encaissés). En produisant un football offensif et séduisant lors de ce tournoi et en remportant les matchs face à leurs grands rivaux (Estudiantes, le vainqueur de la Coupe Intercontinentale, Independiente de Brandao, le Boca de Rojitas et Rattin, le Lanús de Silva et Acosta, Huracán de Loayza, et le River de Matosas, Carrizo et l’Onéga), les joueurs de San Lorenzo étaient entrés dans l’histoire comme l’une des équipes les plus brillantes du football argentin et avaient gagné le surnom de Matadores. Même si le match apparaissait déséquilibré, Talleres n’était pas totallement désarmé. Le club avait gagné son ticket pour le tournoi national en remportant 2 matchs âpres face à son grand rival de Belgrano et avait bien débuté le Nacional en triophant lors du match initial contre le Racing Club (2-1) et faisant un match nul 1-1 contre Gimnasia de Mendoza. En première mi-temps, les joueurs de Talleres jouèrent sans complexe et dominèrent leurs adversaires, qui misèrent sur la contre-attaque. Mais, à la mi-temps, San Lorenzo menait 1 but à 0 après un tir de Pedro Alexis González. Au retour des vestiaires, Talleres reprit son jeu et marqua par deux fois avec son attaquant Miguel Patire. L’international Rafael Albrecht de San Lorenzo parvint à égaliser à 2-2 et, alors que l’on se dirigeait vers un match nul qui convenait aux deux équipes, Patire marqua un dernier but pour donner la victoire à Talleres sur le score de 3-2. Le lendemain, afin de résumer un match remarquable où Talleres tint tête et vainquit cette grande équipe de San Lorenzo, le journal La Voz del Interior titra « El Matador fue Talleres » (le tueur était Talleres), une idée reprise par plusieurs autres hebdomadaires. Talleres gagna donc un match et un surnom à vie tandis que los Matadores demeura finalement dans l’histoire de San Lorenzo que comme le surnom attribué à la génération de 1968 qui comprenait Rodolfo Fischer, Victorio Cocco, Roberto Telch et Pedro González, entre autres.

#516 – CA Tigre : los Matadores

Les tueurs. Deux origines sont avancées pour expliquer ce surnom. La première fait référence à l’une des plus belles saisons du club en première division en 1955. Le CA Tigre termina à la 6ème place derrière les 4 grands (River, Racing, Boca et Independiente) et Lanús. Lors des matchs retours, le club réussit à marquer 29 buts, meilleur attaque du championnat devant celle d’Independiente. A l’issu des matchs allers, le club n’avait trouvé les filets adverses que 17 fois. L’attaque de feu était alors composé de Tucho Méndez, de Carlos Lacasia et du franco-argentin Héctor de Bourgoing. Cette performance fit écrire au journaliste Osvaldo Ardizzone dans le magazine El Gráfico que la CA Tigre était une équipe de tueurs. D’autres préfèrent associer la naissance de ce surnom avec le changement du design du maillot du club au début des années 1970. En effet, à cette époque, le club opta pour un nouveau maillot aux couleurs historiques rouge et bleu mais avec des rayures verticales. Il ressemblait alors à celui classique du CA San Lorenzo de Almagro. Or, ce dernier avait récemment gagné son surnom los matadores depuis ces épopées de 1968. Le CA Tigre hérita alors du même surnom. Il se serait définitivement installé après la victoire en championnat en 1979 qui offrit l’accession du club en Première Division.

#288 – CA San Lorenzo : los Cuervos

Les corbeaux. Au début de 1907, un groupe de jeunes garçons enthousiastes dirigé par Federico Monti et Antonio Scaramusso passait des heures à jouer au football à l’intersection des rues México et Treinta y Tres Orientales, dans le quartier de Almagro à Buenos Aires. Lors d’un match, un tramway faillit renverser un des enfants. Jouer au football devenait alors de plus en plus dangereux avec l’augmentation du trafic. L’arrivée du père Salésien Lorenzo Bartolomé Massa dans le quartier fut décisive pour la fondation du CA San Lorenzo de Almagro. En 1908, il fut nommé directeur de l’Oratoire de San Antonio qui se situait rue México et avait un objectif de sortir les enfants des dangers de la rue. Il proposa alors aux enfants de venir jouer dans le jardin de l’Oratoire en échange de leur présence à la messe du Dimanche.

Avec ce soutien, le 1er Avril 1908, le club fut fondé. En l’honneur du prête, les membres souhaitèrent donner au club son nom mais l’ecclésiastique refusa. Après quelques débats, le prête et les membres validèrent le nom de San Lorenzo en hommage au saint San Lorenzo (Saint Laurent de Rome) et à la bataille éponyme (l’un des combats les plus importants pour l’indépendance de l’Argentine qui se déroula le 3 Février 1813 qui se déroula là où se tint désormais la ville de San Lorenzo, dans la province de Santa Fe, à 30 kilomètres de Rosario). San Lorenzo rendait également indirectement hommage au Père Lorenzo Massa mais mettait officiellement en valeur le Saint, qui était également le saint patron des charbonniers, métiers qu’exerçaient la plupart des parents des jeunes membres fondateurs du club.

Né sous le patronage d’un prête, les adversaires commencèrent à surnommer le club los Cuervos car les corbeaux avaient une robe noire, similaire à la soutane que portaient les prêtes. Evidemment ce terme était utilisé dans un sens péjoratif, l’oiseau véhiculant une image de nuisible. Mais les supporteurs de San Lorenzo se l’approprièrent et il est devenu depuis un des surnoms populaires du club.

#47 – CA San Lorenzo : el Ciclón

Le club est surnommé le cyclone. Il existe deux versions à ce surnom. La plus répandue veut qu’il fut créé par le journaliste Hugo Marini en 1932. Alors que les réseaux sociaux et télévision n’existaient pas et que la radio en était encore à ses premiers balbutiements, la presse écrite disposait d’un immense pouvoir pour accompagner l’explosion de la popularité du football en Argentine. Par ses chroniques drôles et hyperboliques, Hugo Marini, journaliste à « Crítica », en fut l’un des plus importants représentants et surtout inventa et immortalisa un grand nombre d’expressions populaires et surnoms pour le ballon rond. Il est à l’origine de « douzième homme » et des surnoms entre autre “Millonarios” pour River, “Los Gauchos de Boedo” pour San Lorenzo et “El Fortín” pour Velez. A l’origine de la création du championnat professionnel au début des années 1930, San Lorenzo en était l’un des principaux protagonistes et produisait un superbe football offensif, basé sur le mouvement et la vitesse. Pour souligner ce style de jeu et les nombreuses raclées affligées par San Lorenzo à ses adversaires, Marini utilisa le terme ciclón.

L’autre version s’attache au principal rival du CA San Lorenzo, le CA Huracán. Les deux clubs sont les représentants des quartiers sud du centre ville de Buenos Aires. Issu en 1908 de la réunion d’une association de jeunes du quartier voisin de Nueva Pompeya et d’étudiants du Colegio San Martín, du Parque Patricios, Huracán s’établit dans ce dernier quartier pour en devenir aujourd’hui le symbole sportif. Légèrement au Nord du Parque Patricio, la même année (1908), sous l’impulsion d’un prêtre, des jeunes des quartiers limitrophes de Caballito et Almagro fondèrent le CA San Lorenzo. Almagro accueillit leur stade El Gasómetro jusqu’en 1979 et aujourd’hui, de nombreuses installations et bureaux du club s’y situent toujours. Cette rivalité géographique donne lieu au célèbre derby du clásico porteño et les deux clubs et leurs supporteurs construisirent leurs identités aussi au travers de cet affrontement. Résultat, les supporteurs de San Lorenzo baptisèrent leur club « cyclone » pour embêter et surclasser leur rivaux d’Huracan, qui signifie ouragan. Dans leur imaginaire, un cyclone était plus violent qu’un ouragan. Pourtant, d’après les météorologues, un typhon, un cyclone et un ouragan correspondent à seule et même réalité météorologique : un phénomène tourbillonnaire des régions tropicales accompagné de vents violent. Simplement, en fonction de leur emplacement géographique, le phénomène prend un nom différent.