#820 – CS Luqueño : El Chanchón, Kure Luque

En espagnol sudaméricain, le cochon peut être désigné par le terme chancho et, dans la ville de Luque, chanchón se rapporte au cochon, voire à un gros porc. Le second est du guarani et désigne la ville de Luque comme celle du cochon (kure = cochon). Clairement deux surnoms qui tournent autour de cet animal signifient sans aucun doute que ce club réside dans une ville connue pour sa production porcine. Cette banlieue d’Asunción accueille de nombreux abattoirs et d’usine de charcuterie. La société Itabo Agropecuaria, leader dans la vente de produits issus du porc, ouvre cette année une nouvelle usine et un réfrigérateur nommés La Porkcina à Luque. Pour 10 millions de dollars US d’investissement, l’usine sera en capacité de traiter 35 tonnes par jour et abattre 120 animaux par heure, soit plus ou moins 1 000 animaux par jour. La réputation de la charcuterie de Luque n’est plus à faire dans le pays et chaque année depuis près de 10 ans, la municipalité organise le kure aka (le jour du cochon), une feria traditionnelle et gastronomique autour du cochon, qui rassemble plus de 50 000 personnes. Toutefois, Luque est aussi très connu (voire même plus connu) pour l’orfèvrerie (bijoux en or et argent particulièrement, la ville étant le lieu de résidence de nombreuses bijouteries), ainsi que pour la fabrication d’instruments de musique tels que la harpe et la guitare. Alors pourquoi le porc, animal peu valorisant, a pris le pas sur les autres activités.

La légende raconte que la charcuterie fabriquée à Luque était acheminé vers Asunción par le train. Or, les wagons qui accueillaient ces produits servaient également à transporter les supporteurs ainsi que les joueurs pour aller jouer dans la capitale. Les fans adverses ne mirent pas longtemps à appeler les joueurs et les supporteurs de Luque, les cochons. Ils criaient alors « Allí vienen los Kure Luque » (Voici le Kure Luque).

Pour l’anecdote, il faut savoir que le siège de la Conmebol, la fédération sudaméricaine, se trouve à Luque.

#729 – CS Sedan : les Sangliers

Le 27 mai 1956, la 39e édition de la Coupe de France proposa en finale un affrontement entre deux équipes de la région Champagne-Ardennes : Sedan face à Troyes. Sedan s’imposa 3 buts à 1 et au côté des joueurs et de la Coupe, sur la photo, un sanglier, dénommé Dudule, prit la pose. Pour les finales de 1961 et 1965, la laie Dora remplaca Dudule et Césarine reprit le rôle pour les finales de 1999 et 2005. La mascotte sedannaise était donc un sanglier et pour tout connaisseur de la région, c’était tout sauf une surprise (même si au début des années 1950, le club était représentait par un bulldog nommé Whiski). Le sanglier apparût à la même période sur le blason du club pour ne plus le quitter. Le club et l’animal était devenu indiscociable et son intronisation ne résulta pas du hasard ou d’une rencontre dominicale lors d’une partie de chasse d’un des membres de la direction du club. Le sanglier était en réalité endémique de Sedan et de la région des Ardennes.

En effet, dans la forêt des Ardennes, l’animal pullule et s’impose donc dans toute la culture de la région. Depuis, le 8 août 2008, un sanglier en méral de 8 mètres de haut et pesant 50 tonnes se dresse sur l’aire d’autoroute de Saulces-Monclin sur l’A34 (autoroute reliant Reims à Sedan). Il s’affiche, depuis la Première Guerre mondiale, sur les armoiries du département des Ardennes. Plusieurs régiments militaires de la région le prirent pour symbole (dont les résistants du maquis ardennais). Surtout il orne celles de Sedan depuis le XVIème siècle. Le seigneur souverain de Sedan, Henri-Robert de La Marck dota en 1568 la ville d’armoiries (où le sanglier y est représenté au pied d’un chêne) qui mettaient à l’honneur un de ses ancêtres surnommé le « Sanglier des Ardennes », Guillaume de La Marck. Ce liégois, acoquiné à Louis XI, gagna une réputation de barbare et d’assassin. Outre le fait, avec sa bande de ravager des villages en détruisant des récoltes et en violant des filles, Guillaume de La Marck ne cessa tout sa vie de susciter des troubles et d’ourdir des intrigues. Il écrivit sa légende noire en assassinant lachement lors d’une embuscade le prince-évêque de Liège, Louis de Bourbon, qui pourtant suppliait sa pitié. Pour se distinguer, il portait un habit rouge avec une hure de sanglier brodée sur la manche, ce qui lui valut le surnom de Sanglier des Ardennes. L’animal jouissait d’une certaine réputation depuis la nuit des temps dans les pays celtes en symbolisant la force et le courage.

En outre, pour les celtes, il était un lien vers l’au-delà en représentant une autorité spirituelle (contrairement à l’ours qui était une autorité temporelle). D’ailleurs, dans une chanson de geste au Moyen-Âge, une autre filiation se tisse entre les Ardennes et le sanglier. Par deux fois, dans « Chanson des quatre fils Aymon » (également intitulée « Chanson de Renaud de Montauban »), des vers présentent Renaud, chevalier d’Ardenne, sous les traits d’un sanglier le temps d’un songe (moment où l’esprit rejoint un monde mystérieux, parallèle). Pour certains, cette association résulte des terres d’origine de Renaud, l’Ardenne (qui correspond à la forêt et en partie au département français des Ardennes), dont les racines étymologiques puisent dans l’indo-européen commun u̯erdʰ qui signifie « pousser, poindre, se lever » et se partagent avec le grec ὀρθός et le latin orior qui signifient « se lever » (ce dernier donnant le terme arduus (se dresser)). Or, ce qui est à l’origine, au commencement et qui se dresse correspond à une autorité spirituelle (représenté donc par un sanglier). Les bois denses et mystérieux de la forêt Ardenne viendront renforcer ce côté sacré.

#679 – CD Mirandés : los Jabatos

Les marcassins. Fondé en 1927, ce club familial espagnol, souvent petit poucet de la Coupe d’Espagne, réside dans la ville de Miranda de Ebro. Ville de 35 000 habitants, Miranda de Ebro est une ville anonyme et froide du nord de l’Espagne, rattachée à la province de Burgos et à la communauté de Castilla León mais qui historiquement appartient au Royaume de Navarre et se sent basque (Vitoria est à seulement 30 km).

Outre être un nœud ferroviaire qui permit le développement industriel, la région de Miranda de Ebro est aussi connue pour les sangliers qui peuplent ses montagnes boisées et sont devenus son symbole. Animal sauvage, le sanglier compense sa petite taille en faisant de preuve de robustesse et de bravoure face aux dangers. Forcément, ces qualités séduisirent la direction du club et ses supporteurs qui souhaitaient que l’équipe défendent les mêmes valeurs (l’esprit de lutte, de courage et de sacrifice). En 1972, Alejandro Almarcha et Melquiades Mariñán conçurent un sanglier comme mascotte du club, qu’ils surnommèrent el Jabato et qui depuis vient animer les mi-temps des matchs au stade du club.

#126 – SE Palmeiras : Porcos

Les porcs. Vous vous doutez que ce surnom n’était pas apprécié par les supporteurs du club car il s’agissait d’une insulte donnée par les adversaires. Même s’il est consommé, le cochon a souvent eu une image dégradée dans nos cultures. Du fait que l’animal pouvait manger ses petits, qu’il était porteur de certaines maladies transmissibles à l’homme, qu’il apprécie de se vautrer dans la boue et qu’il se nourrit d’ordures et de charognes, il fut associé, chez les Egyptiens, au dieu mauvais Seth et les religions juives et musulmanes le proscrivirent de la nourriture. Chez les Romains, Pline l’Ancien le considéra comme le plus stupide des animaux. Au Moyen Âge, les autorités religieuses virent le cochon comme un attribut du diable car ce dernier grogne et se vautre dans l’ordure comme l’animal. Pourtant, avec le temps, il est devenu un symbole, un élément de l’identité du club et de ses supporteurs.

Au Brésil, dans le langage populaire, le terme désignait déjà et de manière péjorative les descendants des Italiens qui vivaient à São Paulo. Or, Palmeiras était le club de la communauté italienne de São Paulo. Il avait été fondé en 1914 par 4 italiens et s’était initialement nommé Societá Sportiva Palestra Italia, en reprenant comme couleurs celles du drapeau italien (vert, blanc, rouge). Si l’immigration italienne en Argentine est très connue (cf. #1 et #1335), elle fut quasiment tout aussi importante au Brésil (point culminant entre 1874 et 1930, avec environ 1,6 million d’immigrants), et en particulier dans l’État de São Paulo. Aujourd’hui, les différentes études démontrent qu’entre 10% et 20% de la population brésilienne est d’origine italienne. L’ambassade d’Italie au Brésil a estimé qu’en 2013 30 millions de brésilien étaient des descendants d’immigrants italiens (environ 15 % de la population brésilienne), dont la moitié dans l’État de São Paulo.

Mais, outre ce lien établi avec une communauté raillée, le club a également été directement comparé au cochon suite à un évènement arrivé en 1969. Pendant le championnat pauliste, deux joueurs du club rival des Corinthians moururent dans un accident de voiture. Les Corinthians souhaitèrent les remplacer par ce que l’on appellerait aujourd’hui des « jokers médicaux ». Pour le permettre, il fallait obtenir l’approbation unanime des autres clubs participants. Tous acceptèrent sauf Palmeiras. Les supporteurs des Corinthians considérèrent alors que les dirigeants de Palmeiras avaient un esprit de porc (ce qui signifiait qu’il n’était pas fair play). Lors du derby suivant entre les deux équipes, les supporters de Corinthians lâchèrent un cochon sur le terrain et scandèrent que Palmeiras était des porcs. Après s’être longtemps senti offensé par ce surnom, les supporteurs de Palmeiras acceptèrent ce surnom, aidé par une stratégie élaborée par l’un des directeurs du club, João Roberto Gobatto, directeur du Marketing. Pour faire taire ces moqueries, il eut l’idée dans les années 80 de faire adopter le cochon comme mascotte du club. Les supporteurs emboîtèrent le pas en créant un chant « Hé, Cochon ! Hé, le cochon ! » qui aujourd’hui enflamme le stade. En novembre 2016, juste avant le match contre l’Internacional, Palmeiras donna le nom Gobatto à la mascotte, en hommage à son Directeur Marketing qui eut cette idée de transformé une insulte en force du club.

#29 – Bolton Wanderers FC : Trotters

Les trotteurs ne fait pas référence à une attache du club pour le monde hippique. Son origine est disputée entre plusieurs versions. La première histoire tourne autour du cochon et, là déjà, les déclinaisons sont nombreuses. Tout d’abord, les pieds de porcs ou moutons bouillis, familièrement appelés trotters, sont censés être un met apprécié des habitants de Bolton. Cela rappelle à quelque point l’Angleterre a beaucoup à faire en matière culinaire. Ensuite, les origines de ce surnom pourrait tourner sur la localisation du stade du club et son voisinage, sachant toujours que trotters signifient « pieds de cochon ». Selon une source, le stade de Pike’s Lane (enceinte de Bolton entre 1880 et 1895) se situait près d’une ferme porcine tandis qu’une autre avance que Burden Park (antre du club entre 1895 et 1997), était proche d’une boucherie. Mais, l’influence porcine ne s’arrête pas ici pour les deux versions. En effet, lorsque le ballon sortait des limites de Pike’s Lane, les joueurs devaient « trotter » à travers les enclos à cochons pour récupérer le cuir. Du côté de Burden Park, la boucherie voisine affichait dans sa vitrine ses pieds de porc. Ils auraient créé une telle impression que les Wanderers auraient été immédiatement surnommés les trotters. Plus que séduire les visiteurs du stade, les joueurs avaient aussi pour tradition d’aller se restaurer avant les matchs dans cette charcuterie.

Comme il n’y a pas que le cochon dans la vie, une autre légende, à laquelle l’historien du club, Simon Marland, souscrit, tourne autour du vocabulaire locale. Le terme trotter signifie localement un farceur, plaisantin dont les gens de Bolton ont la réputation d’être. Il est souvent raconté qu’un homme de Bolton défiait les visiteurs à un jeu où le vainqueur était celui qui restait le plus longtemps un pied dans un sceau d’eau chaude. Aucun visiteur ne réussit à vaincre cet habitant de Bolton, jusqu’au jour où on découvrit que ce dernier avait une jambe de bois. Les vaincus devaient eux avoir la gueule de bois. Ce terme a été appliqué aux habitants de toute la ville, et il semble donc tout à fait logique qu’il se soit propagé à l’équipe de football.

Enfin, une dernière version fait état que le terme trotting signifie marcher comme un vagabond (Wanderer).

Il semble que ce surnom ait un peu disparu dans les travées du nouveau stade, University of Bolton Stadium. Dans les années 1930, la marque de cigarette Ogdens intégrait dans ses paquets une carte qui donnait un historique sur un club et son surnom. Pour Bolton, la carte était illustrait avec le dessin d’un clochard et notait « The nickname still survives although it is not as commonly used as some years ago » (Le surnom survit encore bien qu’il ne soit pas aussi couramment utilisé qu’il y a quelques années).