#309 – Espérance Sportive de Tunis : الدم و الذهب

Les sangs et ors. Le plus grand club tunisien évolue dans un maillot rayé sang et or, accompagné souvent d’un short noir. Toutefois, lors de sa première année d’existence, les joueurs portaient un maillot rayé certes, mais vert et blanc. L’Espérance Sportive fut fondé le 15 janvier 1919. A cette époque, la Tunisie se trouvait sous protectorat français et la création d’association sportive par les populations autochtones était un moyen de résistance, le porte drapeau du nationalisme. Ainsi, le Club Africain et l’Etoile du Sahel, les deux autres grands clubs du pays, optèrent à leur création pour les couleurs rouge et blanches, en référence au drapeau national. Mais, l’Espérance choisit le vert et blanc et la raison est inconnue. J’avancerai que dans ce contexte d’affirmation nationaliste, le choix du vert et blanc pouvait mettre à l’honneur les couleurs de l’Islam. Une autre façon d’être nationaliste. Toutefois, un an plus tard, les maillots du club changèrent et passèrent au rouge et jaune. Deux légendes s’affrontent pour la raison de ce troque. La première invoque un concours de circonstances. Suite à une pénurie persistante de maillots verts, les dirigeants en cherchèrent de nouveaux et dénichèrent un stock aux couleurs sang et or. Les joueurs portèrent ces nouvelles couleurs au match suivant et gagnèrent la partie, convainquant la direction de les conserver. L’autre histoire, plus admise, rappelle que lorsque le Dr Chadli Zouiten, dentiste et joueur, rejoignit l’équipe en 1920, il apporta avec lui les équipements de l’équipe scolaire du Tunisia Football Club. En effet, cette association venait d’être dissoute et les managers se partagèrent les biens. Chadli Zouiten récupéra les maillots rouge et jaune et en fit donc don à l’Espérance. Or, de meilleur qualité, notamment plus chaud, ces maillots convainquirent la direction et les joueurs de les adopter définitivement. 100 ans plus tard, ces couleurs sont toujours celles du club.

#300 – Atlético de Madrid : el Pupas

Les maudits. L’acte fondateur de ce surnom remonte à la finale de la Coupe des Clubs Champions de 1974. Après un parcours parfait, l’Atlético affrontait le Bayern Munich au Heysel. Les deux équipes se neutralisèrent jusqu’à la 114ème minute. Sur coup franc, Luis Aragonés trompait Sepp Maier et la coupe tendait alors les bras au club madrilène. Sauf qu’à une poignée de secondes de la fin du match, Schwarzenbeck décrocha une frappe de 30 mètres et le Bayern revint à un partout. Un match d’appuie fut organisé. L’Atlético s’écroula et perdit 4 à 0. Les supporteurs madrilène surnommait ce match « el casi » (le match où l’Atlético fut quasiment champion d’Europe). Le président du club, Vicente Calderón, déclara, lui, après le but de Schwarzenbeck, « somos El Pupas F.C. » (nous sommes le Maudits FC). Cette terminologie négative colle depuis à la peau du club et les supporteurs l’ont adopté à défaut.

Il faut dire que la malchance de 1974 ne fut pas isolé. 40 ans plus tard, l’Atlético arriva une nouvelle fois en finale de la Ligue des Champions. Depuis la 36ème minutes, l’Atlético menait au score grace à un but du défenseur uruguayen Diego Godín. Une fois de plus, la coupe aux grandes oreilles tendaient les bras au club madrilène. Mais, dans les arrêts de jeu (93ème), son adversaire et grand rival, le Real Madrid, obtint un corner et Sergio Ramos parvint à placer sa tête pour égaliser. Lors du temps additionnel, l’Atlético s’écroula une nouvelle fois et le match se termina sur un 4 à 1 en faveur du Real. Deux ans plus tard, les deux clubs se retrouvèrent une nouvelle fois en finale de la Ligue des Champions. Le scénario fut moins cruel mais le résultat fut le même. Une nouvelle défaite de l’Atlético aux tirs au but.

La malédiction s’exprima aussi dans d’autres domaines. Par exemple, Jesus Gil, l’omnipotent président pendant 16 ans, considéra que son centre de formation coûtait trop cher et le supprima. Les jeunes en formation durent trouver de nouveaux clubs et l’un d’eux, qui était le meilleur buteur de l’Atlético au niveau junior, décida de rejoindre le Real Madrid. Ce jeune joueur était Raul Gonzalez, qui porta haut les couleurs de la Casa Blanca pendant 16 ans.

Ce fatalisme est traduit différemment par les adversaires. El Pupas devint les pleurnichards, les adversaires considérant que les supporteurs de l’Atlético se plaignent trop souvent de ce manque de chance.

#282 – Deportivo Saprissa : el Monstruo Morado

Le monstre violet/mauve. L’origine remonte à 1987 quand le journal Extra mentionna pour la première fois le mot « monstruo » pour décrire l’ambiance qui régnait dans l’enceinte où jouait le Deportivo Saprissa. Le stade Ricardo Saprissa Aymá était rempli de fans et le média, pour évoquer les mouvements de foule dans les gradins, écrivit « este estadio parecía un monstruo de color morado » (ce stade ressemblait à un monstre de couleur mauve). Le mauve faisait évidemment référence à la couleur du Deportivo. Le choix de cette couleur originale remonte elle à la création du club, en 1935. Le 16 juillet 1935, un groupe d’adolescents se réunit avec l’idée de créer une nouvelle équipe de football avec Roberto Fernández et Fausto Leiva, propriétaires d’un petit magasin de chaussures. Concernant les couleurs, le choix résultat d’une erreur. Les fondateurs décidèrent de donner au club le nom de Don Ricardo Saprissa, un entrepreneur local mais surtout un ancien joueur de football, notamment en Espagne. Ce dernier sponsorisa alors l’équipe en leur offrant leur tenue, qu’il fit confectionner par son usine textile (qu’il dirigeait avec son frère). Deux versions existent sur cette erreur. Don Ricardo aurait repris les couleurs du club de polo de Barcelone, bleu et rouge, la ville espagnole dans laquelle il avait vécu. Ou alors, pour confectionner les maillots, l’entreprise prit modèle sur ceux du club d’Orión FC, rayés bleu et rouge. Le Deportivo Saprissa devait au départ être un club formateur au profit d’Orión. Au final, une erreur conduisit au mélange des deux trames de couleurs et le mauve (bourgogne) apparût. La couleur accidentelle du nouvel uniforme plut finalement à tout le monde. Roberto Fernández décida d’ajouter un grand S sur la poitrine et ainsi la tenue historique du club naquit.

#255 – Maccabi Haifa FC : הירוקים

Les verts. Fondé en 1913, le club évoluait dans les couleurs traditionnelles du mouvement sioniste et sportif, Maccabi, soit le bleu et le blanc. Puis, en 1953, le club changea pour le vert, un peu par hasard. En effet, le club mandata l’un de ses membres, Avigdor Hershkovitz, de faire une tournée de levée de fonds aux Etats-Unis. Le club avait acquis une petite renommée suite à une tournée américaine réalisée en 1927 où le club remporta de nombreux matchs mais perdit la moitié de son effectif qui préféra rester au pays de l’Oncle Sam. Hershkovich rencontra un millionnaire juif qui possédait un magasin de vêtement. Ce dernier lui proposa d’équiper toute l’équipe avec un nouvel uniforme. Hershkovich consulta alors la direction du club pour connaître s’il y avait une couleur particulière souhaitée. Face à cette générosité et ne voulant pas abuser de la situation, la direction indiqua que la couleur n’était pas importante, tant que les uniformes n’étaient pas rouge, la couleur du rival local, l’Hapoel Haifa (qui comme toutes les équipes du mouvement sportif Hapoel portaient des maillots rouges). Finalement, le confectionneur fournit un kit complet de couleurs vert et blanc . Avec ce nouvel uniforme, l’équipe remporta une série de victoires qui convainquit les joueurs et la direction de conserver ces couleurs.

#244 – Gençlerbirliği SK : Alkaralar

Les rouge et noir. Deux versions s’affrontent pour expliquer le choix de ces couleurs. Les étudiants, qui souhaitaient créer un club de football car ils n’avaient pas été retenus par l’équipe de leur lycée, avaient du mal à trouver un mécène. Finalement, le père d’un des fondateurs, député de la province, accepta de soutenir l’équipe et sa première demande fut de trouver un jeu de maillots. Les jeunes se rendirent dans le seul magasin qui en vendaient et les seuls maillots disponibles étaient rouge et noire.

Pour d’autres, le choix de ces couleurs résulte des fleurs de pavot. Gençlerbirliği fusionna rapidement avec l’équipe du lycée, dont les fondateurs de Gençlerbirliği avaient été exclus et supporté par l’association des professeurs. Lors de la réunion organisée pour l’unification des clubs, en signe de bonne volonté, les lycéens de Gençlerbirliği offrirent un bouquet composé de fleurs de pavot, communes dans les steppes d’Ankara, au directeur du lycée et au président de l’Association des enseignants. Les couleurs rouge-noir de ces fleurs furent alors choisies comme celles du club.

#131 – Fenerbahçe SK : Sarı Lacivertliler

Les jaune et bleu marine. Si aujourd’hui, le club stambouliote évolue dans ces couleurs, ce ne fut pas le cas à la création du club en 1907. Les fondateurs retinrent le jaune et le blanc, comme couleurs du club et du maillot, car elles rappelaient les camomilles qui fleurissaient dans les prés de Fenerbahçe, le club ayant été fondé en Mai 1907. Mais, le premier maillot fut réalisé dans un tissu épais avec des manches longues. Pendant l’hiver 1907, ce fut un avantage. Seulement à l’arrivée de l’été 1908, ces chemises représentaient un handicap pour les joueurs. Le président du club, Ziya Songülen, avança les fonds pour acheter un nouveau maillot à manche courte et se rendit au magasin britannique Baker. Seulement, ces maillots devaient être commandés et fabriqués en Angleterre et leur livraison n’aurait pu être faite qu’après l’été. Le magasin proposa alors un autre maillot qu’il avait en réserve et qui était jaune et bleu foncé. Ziya Songülen les acheta tous, décidant alors de changer les couleurs du club. Aujourd’hui, dans les statuts du Fenerbahçe, il est indiqué que la couleur bleu foncé signifie la « noblesse » et la couleur jaune est l’expression de « l’envie ».

#36 – Juventus Turin : Zebre

Plus rarement utilisé que d’autres surnoms, cet animal n’en est pas moins un symbole du club. Evidemment, Turin ne constitue pas une zone d’habitation du zèbre et ce surnom doit à la couleur et au motif du pelage de l’animal (des rayures noires et blanches) similaires au maillot du club italien. Ce fameux maillot rayé noir et blanc n’a pas été adopté immédiatement par le club. Les premières couleurs du club fut le rose et noir. Aujourd’hui, la couleur rose est devenu à la mode mais à l’époque, ce choix constituait plus qu’une singularité. En réalité, les contraintes financières s’imposèrent aux fondateurs qui durent choisir le tissu le moins onéreux, le vichy rose. Mais la mauvaise qualité des maillots fit qu’au fil des rencontres, le rose devient blanchâtre. En outre, le rose atteignait la virilité du club et de ses joueurs. En 1903, insatisfaits, les dirigeants décidèrent de changer de couleur.

Là, les versions diffèrent. Une légende raconte qu’ils commandèrent à leur fournisseur anglais des maillots rouges semblables à ceux du club de Nottingham Forets, et par malheur, une erreur fit qu’on leur livra des maillots rayés blancs et noirs, de l’autre club de la ville, Notts County. A la réception de la commande, les turinois ne furent pas ravis mais, comme le premier match de championnat était proche, il était trop tard pour les renvoyer.

L’autre version repose sur John Savage, un négociant en gros de produits textiles à Turin et joueur de football. Après avoir joué pour le Torino, il rejoignit la Juventus en 1901. Originaire de Nottingham, John Savage fournit les nouveaux maillots au club, en prenant ceux de son équipe de cœur, Notts County. Ses nouvelles couleurs furent perçues comme un symbole de « simplicité, d’austérité, d’agressivité et surtout, de pouvoir ».

L’association du Zèbre avec le club apparut en 1928. Le 10 octobre 1928, l’hebdomadaire « Guerin Sportivo » sortit dans les kiosques avec en une, un article se proposant de décrire l’héraldisme des équipes de football italiennes. L’humoriste et illustrateur Carlo « Carlin » Bergoglio avait décidé d’associer aux principales équipes un animal qui devait être leur mascotte. Pour la Juve, le choix fut le Zèbre, pour son pelage donc.