#1235 – Cordoue FC : los Califas

Les califes. 3ème ville de la région de l’Andalousie avec ces plus de 320 000 habitants, après Séville et Malaga, la cité de Cordoue possède une longue et riche histoire. En 169 avant J.-C. ou en 152 avant J.-C., le proconsul Claudius Marcellus fonda une colonie sous le nom de Colonia Patricia Corduba. De par sa position stratégique face à des peuples Ibères peuplant la vallée du Guadalquivir et sa forte activité économique grace aux mines de la Sierra Morena, à l’élevage de moutons et à l’exportation d’huile d’olive, Cordoue devint la capitale de la province romaine d’Hispanie. Après la chute de l’Empire Romain au Vème siècle, les Wisigoths occupèrent la ville puis au début du VIIIème siècle (711), les musulmans envahirent la cité et tout le Sud de l’Espagne.

Dans la lignée de l’époque romaine, les maures en firent un de leur principal centre politique et économique d’Al-Andalus. En 756, Abd al-Rahman Ier, prince omeyyade, conquit la cité et se proclama émir (commandant en chef). Cet émirat, dont Cordoue était la capitale, gagna son indépendance du califat Abbasside de Bagdad en 773. Puis, en 929, l’émir Abd al-Rahman III s’octroya le titre de calife (successeur de Mahomet), rompant alors avec les Abbassides et fit de Cordoue la capitale de son califat. Sous le règne des califes de 929 à 1031, Cordoue connut sa période la plus faste. La ville compta entre 250 000 et 350 000 habitants, plus de six cents mosquées et sept cents bains publics. Elle possédait une célèbre université et une bibliothèque publique contenant quelque 400 000 livres ainsi que 27 écoles gratuites destinés aux populations pauvres. La grande mosquée de Cordoue, qui avec une superficie de plus de 23 000 m2 était la deuxième plus grande du monde musulman, comme les nombreux somptueux palais, dont celui d’Al-Zahra dont la construction dura 25 ans et sollicita 10 000 ouvriers, magnifiaient la ville. Elle rivalisait par sa puissance alors avec Constantinople, capitale de l’Empire Romain d’Orient. Après la mort d’Almanzor, le déclin Cordoue débuta, la reléguant dans la hiérarchie en ville secondaire.

#1006 – JS Kairouanaise : فريق الأغالبة

L’équipe Aghlabide. Ville du centre de la Tunisie, Kairouan est présenté comme la 4ème ville sainte de l’Islam et la première du Maghreb. 4ème ville construite par les musulmans après Bassorah, Koufa et Al Foustat en 670 par le conquérant Oqba Ibn Nafi, la cité constitue le berceau de l’Islam au sein de l’Ifriqiya et joua un rôle majeur religieux et politique jusqu’au XIème siècle. Cette influence provint de l’affirmation de la dynastie Aghlabides qui gouverna l’émirat de l’Ifriqiya (qui s’étendait depuis les rivages tripolitains jusqu’à l’Ouest du Constantinois) entre 800 et 909. Nommé par le calife abbasside, en échange d’un tribut annuel, Ibrahim ibn al-Aghlab, né à Kairouan en 756, obtint la suzeraineté de la région afin de l’assagir et fonda la dynastie des Aghlabides. Pour son émirat, il choisit Kairouan comme capitale. A compter de 828, l’émirat Aghlabide entreprit la conquête de la Sicile au dépend de Byzance. Sous le règne d’Ahmed ibn Mohammed al-Aghlabi (856-863), l’émirat atteint son apogée. Grâce à son agriculture fertile, sa présence de chaque côté de la Méditerranée, et son subtil équilibre entre les berbères et les arabes, le royaume s’imposa comme une plaque tournante du commerce (notamment des esclaves) entre le monde islamique, Byzance et le sud de l’Europe de l’Ouest.

Kairouan connut également son apogée avec les Aghlabides. La cité profita de cette richesse commerciale pour développer une école de droit malikite (droit musulman sunnite), une école scientifique (édifiée sur le modèle de Bagdad, où l’on enseignait la médecine, la théologie, la logique, les mathématiques, la botanique et l’astronomie) et des bibliothèques qui firent sa renommée dans le domaine du droit, de la théologie et de la science. L’ensemble était intégré à la mosquée de Kairouan. Edifiée par Oqba Ibn Nafi, le monument fut remodelé dans sa forme actuelle sous les Aghlabides. A cette époque, la mosquée était l’un des plus grands centres de la civilisation musulmane qui exerçait une influence comparable à l’Université de Paris au Moyen-Age. Elle réunissait d’éminents scientifiques, théologiens et juristes musulmans. Malgré le déclin de la ville à compter du XIIème siècle, la mosquée conserva son rayonnement culturel et spirituel dans le monde musulman. Aujourd’hui, monument emblématique de la ville de Kairouan, la mosquée demeure le sanctuaire le plus ancien et le plus prestigieux de l’Occident musulman.

#909 – US Monastirienne : أبناء الرباط

Les fils du Ribat. Monastir, ville de près de 100 000 habitants, à proximité de Sousse, est située sur la côte méditerranéenne. Son nom est tiré du terme grec monastrion, qui signifie monastère, car à l’époque byzantine, un monastère se dressait dans la cité et en étant même le monument principal. Avec l’invasion arabo-musulmane, le monastère disparut mais un autre monument s’éleva face à la mer et constitue encore aujourd’hui le point de repère et l’image de la ville. Il s’agit du Ribat. Pour faire face aux attaques byzantines, le royaume d’Ifriqiya, dont la capitale était à Kairouan, laissait à des communautés religieuses le soin de défendre la côte. Ces derniers bâtirent des monuments à la fois forteresses défensives et lieux de prière. Une chaîne de ribats s’étendait tout au long de la côte de l’Afrique du Nord. Celui de Monastir fut édifié en 796 probablement par Mohammed ibn Qadim et commandité par le général abbasside, Harthimâ Ibn A’yûn. Petit fortin au départ, il subit plusieurs extensions à son époque médiévale. Du XVème au XVIIIème siècle, les fortifications de l’édifice furent renforcées. avec des tours et des bastions. Aujourd’hui, il s’agit d’une enceinte massive rectangulaire, entrecoupée de tours carrés et rondes, ceinturant deux cours intérieures. Le porche d’entrée est décoré par cinq niches plates coiffées par des arcs outrepassés et surmontés d’une frise à motifs floraux. Les bâtiments intérieures accueillent de nombreuses cellules pour les moines-soldats ainsi que des salles de prières, dont la plus spacieuse accueille, aujourd’hui, une collection d’objets de culte et d’artisanat musulmans d’époque médiévale. Le Ribat est dominé par la tour-vigie (Nadhour), composée d’une centaine de marches en spirales. Le Ribat avait donc cette double fonction de forteresse et de lieu de prière. A ses débuts, il hébergeait des guerriers, des voyageurs, mais aussi des étudiants en religion et parfois des savants illustres. Puis, à la fin du Moyen-Age, il devint un grand centre religieux considéré comme un monastère islamique tandis que la ville de Monastir apparaissait alors comme une ville sainte, une des portes du paradis. Des soufis, mystiques musulmans, habitaient également le ribat. Dès le Xème siècle, un espace fut même réservé pour les femmes. Aujourd’hui, il est l’emblème, le monument phare de la ville. Il apparaît en position central et incontournable sur les armes de la cité comme sur l’écusson du club. Il est considéré comme le ribat le plus ancien et le plus important du Maghreb. Au Xème siècle, le géographe et chroniqueur Mohammed Abul-Kassem ibn Hawqal décrivit l’édifice comme le plus grand ribat de l’Ifriqiya.

#881 – MC Oran : المولودية

Le mouloudia. Au début du XXème siècle, les clubs sportifs musulmans furent l’un des premiers moyens de rassembler la communauté arabe et d’expression des nationalistes au Maghreb. Après la Seconde Guerre Mondiale, un certain nombre de clubs avait disparu mais l’indépendantisme algérien connut un nouvel élan, suite aux évènements de Sétif le 8 mai 1945. Ainsi, sous l’impulsion des oulémas représentés par Cheïkh Saïd Zemmouchi, cinq nationalistes, Ali Bentouati, Mohamed Bessoul, Boumefraa, Omar Rouane Serrik et Mahmoud Sayah Miloud Bendraou, se réunirent chez le coiffeur Si Ahmed Al Mahaji, dans le quartier El Hamri (à l’époque quartier Lamur), pour fonder le nouveau club de football d’Oran. Le choix du nom était un marqueur identitaire important pour un club nationaliste. Cette réunion de fondation se tint dans la nuit du 14 mai 1946, la veille de l’anniversaire de la naissance du prophète Mahomet, fête connu sous le nom de ليلة أل مولد (laylat al mawlid, veille du mouloud). Le mouloud (المولد – en arabe dialectal mûlûdiyya) est le jour de l’anniversaire de Mahomet, le 12 Rabi-el-aouel (dans le calendrier hégirien). En Algérie, cela constitue une fête centrale de l’année qui dure 7 nuits. Durant ces sept nuits, les écoles sont décorées et des poèmes en l’honneur du prophète (appelés مولدي Mawlidiyya) sont déclamés. En l’appelant Mouloudia, les fondateurs rappelaient le lien du club avec la culture algérienne dont l’Islam était estimé être le socle. Cela attestait d’un geste de déférence envers le prophète mais également une revendication identitaire vis-à-vis des européens de religion chrétienne.

Il est souvent raconté que le MC Oran avait un prédécesseur du nom de Mouloudia Club Musulman Oranais, fondé le 1er janvier 1917. Si cette dernière association a bien existée, l’affiliation entre les deux clubs est contestée. Certains avancent que le MCM Oranais n’avait pas de section sportive et son activité se réduisait à une fanfare. D’autres estiment que ce dernier club n’exista que deux ans et qu’il ne participa jamais à une compétition officielle. Le club présente généralement sa fondation en 1946 même si la tentation d’afficher une filiation avec un club plus ancien est forte.

#753 – Club Africain : الأفريقي

L’africain. Tiré de son nom, le sobriquet comme le nom demeure singulier pour un club qui représente avant tout la capitale tunisienne. Et même si son aura est grande, elle ne dépasse guère les frontières tunisiennes. Mais, avant de rentrer dans ce débat, repartons au début des années 1920, en évitant une autre discussion qui anime la Tunisie du football. En effet, sous protectorat français dont le représentant s’accaparait les différents pouvoirs, la Tunisie connaissait au début du XXème siècle un mouvement nationaliste qui devait naturellement s’exprimer dans le sport également. Les clubs sportifs en Tunisie personnifiaient les différentes communautés française (Racing Club de Tunis, Sporting Club de Tunis, Stade Gaulois), italienne (Italia de Tunis, Savoia de Sousse), maltaise (Mélita-Sports) et juive (Stade Tunisois, Maccabi) mais les indigènes musulmans ne se sentaient pas représenter. Toutefois, certains clubs intégraient des musulmans comme le Stade africain. En 1918, un match qui opposait le Stade Africain et le Stade tunisois tourna à l’émeute. Pour sanction, les autorités françaises dissolvaient les deux associations. Cette disparition d’un club, où elle pouvait jouer, encouragea la communauté musulmane, dans cette dynamique nationaliste, à essayer de fonder une association dédiée. L’une de ces initiatives s’inscrivait dans la tradition du Stade Africain, en reprenant notamment le nom. Toutefois, en 1919, le premier essai des fondateurs du club échoua car le nom choisit, Club islamique africain, ne passa pas la censure des autorités (ces dernières ne souhaitaient pas voir le sentiment nationaliste se crystaliser au sein d’une quelconque association). Quelques mois plus tard, les fondateurs essayèrent une nouvelle fois avec toujours la volonté d’affirmer leur racine indigène. Ainsi, le président du club était tunisien, le choix des couleurs se porta sur celles du drapeau tunisien (rouge et blanc) et l’écusson affichait les symboles musulmans, croissant et étoile. Enfin, le fait de nommer « africain » un projet sportif d’ordre national ne pouvait être le fruit du hasard ni dénué de sous-entendus. Comme le continent africain était sous domination coloniale, ce choix avait une valeur symbolique et politique, voire était une cri de ralliement pour l’ensemble des indigènes. Mais, cette référence au continent était aussi un rappel aux racines de la Tunisie. Au Moyen-Âge, la partie du territoire qui s’étendait du Nord-Est de l’Algérie au Nord-Ouest de la Libye, en passant par la totalité de la Tunisie, se dénommait Ifriqiya, qui donna plus tard le mot Afrique.

#610 – Al-Masry SC : النسور الخضر

Les aigles verts. Ce club égyptien fut fondé le 18 mars 1920 à une époque où la vague nationaliste égyptienne était au plus haut face à l’occupation britannique. Un an auparavant, une révolution (la première comme la nomme les égyptiens) éclata dans le pays qui était sous protectorat britannique depuis 1914 et mènera en 1922 à l’indépendance du pays sous le régime d’une royauté. Dans ce contexte, en 1920, une groupe d’homme de Port-Saïd décidèrent de créer un club de sports représentant les égyptiens de la ville face aux équipes des résidents européens. Il était alors le premier club réservés aux égyptiens et constituait un prolongement sportif du mouvement indépendantiste. Résultat, de nombreux symboles nationalistes furent repris pour le club. Tout d’abord le nom, Al-Masry, qui signifie l’Egyptien en arabe et qui provient d’une chanson patriotique dénommée قوم يا مصري (Kom Ya Masri – les égyptiens) de l’artiste populaire Sayed Darwish. Ensuite, ils optèrent pour le vert et blanc comme couleurs des maillots, qui étaient celles d’un des drapeaux des nationalistes. En effet, durant les manifestation de 1919, les égyptiens brandissaient soit le drapeau rouge avec des croissants blancs introduit par Muhammad Ali au XIXème siècle soit bannière verte portant un croissant et une croix blancs. Ce dernier devint en 1922 le drapeau officiel du nouveau Royaume d’Egypte (avec toutefois le remplacement de la croix par trois étoiles blanches). Le vert de ce drapeau signifierait la nature agricole du pays ou la couleur de la religion prédominante du pays, l’islam. Enfin, dernier symbole important, la référence au passé glorieux des pharaons sur l’écusson. Comme aujourd’hui, il affiche un aigle qui tient le disque solaire au-dessus de sa tête entre ses deux ailes dressées. Ce dessin a été inspiré par le faucon ailé tenant le disque solaire apparaissant sur les bijoux retrouvés dans la tombe de Toutankhamon. Ils étaient le symbole d’Horus, l’un des principaux dieux de la mythologie égyptienne et fortement lié aux souverains égyptiens. Ce symbole exprimait la souveraineté et la force.

#115 – Raja CA Casablanca : l’Aigle Vert

Ces deux éléments, l’animal et la couleur, sont des symboles forts du club, qui l’accompagne depuis la création en 1949. Le club se forgea sous le protectorat français et pour ses fondateurs, dont le Père Jégo (un des promoteurs du football au Maroc), les clubs se devaient d’être des associations nationalistes. L’aigle symbolisait alors la force, le prestige ainsi le combat, la résistance. Au fil des années, et de la domination du Raja sur le football marocain, le club, comme l’aigle, survolait ses adversaires, le championnat. Le vert est également la couleur du club (avec le blanc) depuis sa fondation. Le vert est une des composantes du drapeau marocain. Ce dernier intègre une étoile verte à cinq branches sur un fond rouge. Le rouge est la couleur des Alaouites, la dynastie régnante au Maroc. L’étoile à cinq branches représente le « sceau de Salomon » et le vert symbolise l’espoir et le courage. Les cinq branches représentent aussi les cinq piliers de l’Islam et le vert est la couleur de l’Islam (car elle est censée être la couleur préférée de Mahomet). Quant au blanc, il est associé à la ville de Casablanca que le club représente au Maroc (avec son rival, le Wydad).