#1350 – The Strongest : el Derribador de Campeones

Le destructeur de champions. Dans les années 1940, le football bolivien demeurait en retard par rapport à ses voisins. Un championnat national professionnel existait depuis 1931 en Argentine, 1932 pour l’Uruguay, 1933 au Chili et 1935 pour le Paraguay. Au Brésil, l’immensité du pays et sa pauvreté ne favorisèrent pas l’émergence d’une ligue nationale mais les championnats régionaux étaient forts et les clubs adoptèrent le professionnalisme en 1937. En Bolivie, la situation était bien différente avec des ligues régionales ou interrégionales amateures (le premier championnat national ne verra le jour qu’en 1950) et toutes les régions du pays ne comptaient pas de fédération pouvant organiser une compétition (la fédération du département de Pando ne verra le jour qu’en 1997 !). Ceci ne concourrait pas à faire croître les clubs du pays.

Le 9 novembre 1941, le club argentin d’Independiente arriva à La Paz pour disputer un match amical face à The Strongest. L’équipe argentine venait de terminer une série de 15 matchs sans défaite et affichait deux titres de champion d’Argentine conquis en 1938 et 1939. L’équipe comptait dans ses rangs les piliers de l’équipe nationale argentine, Vicente de la Mata, José Battagliero et Juan Maril, et surtout le paraguayen star, Arsenio Erico, meilleur buteur du championnat argentin en 1937, 1938 et 1939 (130 buts en 96 matchs). The Strongest paraissait à côté un petit poucet mais devant 25 000 spectateurs et avec 5 attaquants, l’équipe bolivienne délivra une prestation légendaire et remporta le match 3 buts à 1. Avec cette victoire, le club bolivien reçut le surnom de Derribador de Campeones par la presse et les supporters. Car ce succès ne fut pas sans lendemain. Pendant toute l’année qui suivit, d’autres champions nationaux ou équipes renommées comme Universitario de Lima (champion du Pérou en 1939 et 1941), Wanderers (Chili), Cerro Porteño (triple champions du Paraguay en 1939, 1940 et 1941) et Nacional (champion du Paraguay en 1942), Banfield et Estudiantes de la Plata (Argentine).

L’histoire remonte à mathusalem et pourtant le surnom est toujours utilisé. Car, le club s’est forgé un grand prestige en remportant des matchs contre des équipes de renom et à chaque victoire, il est ressorti par la presse et les supporteurs.

#1304 – CA River Plate : la Máquina, la Maquinita

La machine, la petite machine. 2 surnoms pour 2 époques différentes de River mais qui traduisent une certaine suprématie de son équipe. La première période se déroula au cours des années 1940 où River remporta 10 titres et imprima un jeu qui inspira l’équipe nationale hongroise des années 1950 et le football total des hollandais des années 1970. L’histoire débuta lors de la saison 1941 qui se solda par 3 titres nationaux et 1 continental. River remporta au nez et à la barbe de San Lorenzo le championnat argentin, en gagnant 4 des 5 derniers matchs, dont un superclásico (face à Boca Junior) par le score fleuve de 5 buts à 1 le 19 octobre 1941. Dans la foulée, River s’adjugea les deux coupes nationales (celle dénommée Doctor Carlos Ibarguren et l’autre Adrián C. Escobar) ainsi que la Coupe Aldao où il était opposait au champion d’Uruguay, le Nacional.

Au début de la saison 1942, River enchaina 8 matchs consécutifs sans défaite (dont 7 victoires et 28 buts marqués). A l’issu du 8ème match, après une victoire 6 buts à 2 face à Chacarita, le célèbre journaliste d’ « El Gráfico » , Ricardo Lorenzo Rodríguez plus connu sous le nom de Borocotó, titra son résumé du match par « Jugó como una máquina el puntero » (Le favori jouait comme une machine). En effet, les permutations des attaquants, qui affola la défense adverse, étaient réglées comme une horloge, une machine. Au delà de la quintette d’attaquants, le 2-3-5 de l’entraineur Renato Cesarini impliquait l’ensemble de l’équipe dans ce jeu offensif. Au final, River roula sur son deuxième championnat et une nouvelle Copa Ibarguren. Après quelques années moins favorables, l’équipe rempota deux nouveaux championnats en 1945 et 1947 et deux Coupes Aldao les mêmes années.

Le jeu offensif de cette équipe était porté par Juan Carlos Muñoz, José Manuel Moreno, Ángel Labruna et Félix Loustau auquel il fallait ajouter le fabuleux Adolfo Pedernera. Ils sidéraient leurs adversaires et obtinrent le surnom « los caballeros de la angustia » (les chevaliers de l’apocalypse). Puis, les jeunes Alfredo Di Stéfano (27 buts en 30 matchs de championnat) enrichit la nouvelle ligne d’attaque et gagna le surnom « La Eléctrica » (la ligne électrique).

Ce surnom marqua donc une génération de supporteurs et aurait pu disparaître saison après saison. Mais, en 2007, les journaux britanniques « Le Telegraph » et « le World Soccer Magazine » la désignèrent parmi les plus grandes équipes de tous les temps. En outre, à peine quelques années après, une nouvelle période dorée s’ouvrit pour River entre 1950 et 1957. Emmenée par les anciens de la Maquina, Ángel Labruna et Félix Loustau, la nouvelle ligne d’attaque intégra Santiago Vernazza, Eliseo Prado et Walter Gómez. Cette période se conclut par 5 championnats argentins (1952, 1953, 1955, 1956 et 1957), une Coupe Ibarguren (1952), une Coupe Eva Perón (1957) et une Coupe Aldao (1957) ainsi que par des tournées réussies en Europe et en Amérique.

#1291 – Fluminense : Time de Guerreiros

L’équipe des guerriers. La fin des années 2000 fut mouvementée pour le club de Rio. Tout démarra bien. En 2007 , Fluminense remporta la Copa do Brasil, signant ainsi son retour en Copa Libertadores après 23 ans d’absence. Puis, en 2008, le club attint la finale de la Copa Libertadores, perdue contre les équatoriens du LDU Quito. Mais, une première alerte apparut, Fluminense terminant à la quatorzième place du championnat brésilien cette saison là, à seulement un point du premier club reléguable.

En 2009, 27 joueurs furent recrutés, et bien que l’équipe comptait quelques bons joueurs (l’ancien attaquant lyonnais Fred, l’ailier Marquinho, le milieu Thiago Neves et l’argentin Dario Conca), la mécanique ne prit pas et l’équipe se trainait au classement. La direction usa 4 entraineurs (René Simões, Carlos Alberto Parreira, Vinícius Eutrópio et Renato Gaúcho) pour redresser les résultats. Seulement, à la 23ème journée, Fluminense stationnait à la dernière place du championnat brésilien, avec seulement 20 points, 4 victoires et à 5 points du premier non-relégable. Dans ce contexte, la direction rappela à la tête de l’équipe Cuca, qui officiait déjà en 2008, mais il fallut un peu de temps pour que la mayonnaise prît. Après 4 matchs, Fluminense demeurait toujours en queue de peloton et les statistiques donnaient 2% de chance de se maintenir. En clair, Fluminense était promis à la relégation malgré les dix matchs restant. Cuca décida de se débarrasser de certains des joueurs les plus expérimentés et donna sa chance aux jeunes. Fluminense alla gagner à Santo André, un autre relégable, à la 29ème journée puis enchaina 2 matchs nuls. Le 29 Octobre, à domicile, Flu remporta la rencontre face à l’Atlético Minero, lui permettant de remonter à la 17ème place et de se lancer dans une série de 7 victoires d’affilée. 66 884 supporters assistèrent au Maracanã à la victoire 1-0 contre Palmeiras le 8 novembre, 55 030 la semaine suivante, lors de la victoire 2-1 contre l’Atlético Paranaense et 55 083 lors de la victoire 4-0 contre l’EC Vitória le 29 novembre. A 3 journées de la fin, Fluminense sortait de la zone de relégation et terminait finalement à la 16ème place.

En même temps que l’incroyable remontada en championnat, Fluminense réussit un magnifique parcours en Copa Sudamericana, les conduisant en finale. La seconde finale continentale en deux ans et toujours face à LDU Quito. Ce fut toutefois une nouvelle défaite. Cette belle dynamique se poursuivit l’année suivante et en 2010, Flu remporta le championnat brésilien pour la troisième fois de son histoire, 26 ans après le second.

Pour réaliser ce sauvetage en si peu de matchs, il fallait adopter un certain état d’esprit, qui fut qualifié de guerrier par la presse. Ce qui donna le surnom. La brasserie Cervejaria Brahma rendit hommage à cette équipe en faisant fabriquer une cuirasse dorée, frappée de l’écusson de Fluminense et en 2016, le club remplaça son ancienne mascotte par une nouvelle, dénommée Guerreirinho, représentant un guerrier.

#1262 – RC Ferrol : los Diablos Verdes

Les diables verts. Ferrol, ville de Galice, se situe sur une péninsule vers l’estuaire du Ferrol. Son port, ses chantiers navals ainsi que son arsenal avec la présence des forces marines sont les moteurs de sa région depuis des siècles. Au XIXème siècle, ces activités attirèrent des ingénieurs et techniciens britanniques ainsi que des marins de la marine marchande britannique qui faisaient escale au port de Ferrol. Cette forte présence anglaise influença la ville et notamment permit l’importation et le développement rapide du football. Ainsi, au cours des premières années du XXème siècle, différentes équipes de football tournaient dans la ville : Arsenal, Giralda, Ferrol FC, Alfonso XIII, Unión Club de La Graña, Circulo Rojo et Jaime I. En 1919, des joueurs et supporters de plusieurs associations se réunirent pour créer un club puissant, capable de rivaliser avec les prestigieuses équipes régionales. Ainsi, Giralda FC et Jaime I FC s’unirent pour donner naissance au Racing Club de Ferrol.

Les succès du Racing de Ferrol ne tardèrent pas à venir et, en 1928, ils furent proclamés champions de Galice, battant le Deportivo La Corogne en finale. L’équipe fut alors admis en Coupe du Roi pour la première fois de son histoire. Au premier tour, Ferrol élimina les basques d’Alavés. Au tour suivant (huitième de finale), une nouvelle formation basque mais bien plus prestigieuse s’opposait à Ferrol, l’Athletic Bilbao. Au match aller, Ferrol tint le choc et obtint le nul, un but partout. Au match retour, à San Mamés, ce fut une défaite, sur un score excessif de 4 buts à 0. Malgré tout, la vaillance des joueurs galiciens comme Gorostiza, Gerardo Bilbao ou Manuel Rivera de Ferrol fut remarquée par la presse basque qui les qualifièrent de diablos verdes.

Mais que diable jouaient-ils en vert ? Tout au long de son histoire, le Racing Club de Ferrol a joué avec un maillot vert (accompagné d’une short blanc), l’intensité de sa teinte dépendant des années et des équipementiers. La raison réside dans la forte présence militaire dans la ville. Ferrol accueille une base navale, abritant aujourd’hui le 31ème Escadron d’escorte, un corps des marines et deux écoles spécialisées. A l’époque, elle était déjà une destination courante pour les recrues appelées au service militaire. Ces jeunes hommes portaient généralement des chemises vertes.

#1256 – CR do Flamengo : o Mais Querido do Brasil

Le préféré du Brésil, le plus aimé du Brésil. Tout en nuance et modestie pour l’un des clubs brésiliens les plus connus. Flamengo s’est constitué au fil des années un des plus beaux palmarès du Brésil, avec notamment 7 titres de Champion, 5 coupes nationales, une coupe intercontinentale, 3 Copa Libertadores, 1 Recopa Sudamericana et 1 Copa Sudamericana. Ces trophées, associés à un style de jeu offensif à certaines périodes et à des grandes stars brésiliennes (le pelé blanc, Zico, Bebeto, Júnior, Leonardo, Carlos Mozer, Zizinho et Leônidas), catalysèrent naturellement l’amour des fans.

Régulièrement des sondages sont effectués pour déterminer le club qui compte le plus de supporteurs dans le pays. Ni surprise, ni contestation, Flamengo ressort sondage après sondage à la première place. Le club carioca recueillait 20,1% des suffrages dans l’enquête réalisée par AtlasIntel en Août 2024, loin devant le second (Corinthians 14,5%). Ce résultat demeure en ligne avec tous les autres études réalisées (25% pour CNN Esportes/Itatiaia/Quaest, 21% pour Datafolha). En 2022, le journal « O Globo » et l’institut de sondage « Ipec » estimait que Flamengo comptait 46,5 millions de fans à travers le pays (contre 33,06 millions pour le second, Corinthians). A fin Août 2024, près de 60 millions de personnes suivaient Flamengo sur les grands réseaux sociaux (Facebook, X, Tik Tok, YouTube, Instagram) et le club glanait le titre de l’équipe brésilienne la plus suivie sur chacun des réseaux.

Mais, avant tout ce palmarès et toutes ces études, il y a une petite histoire qui conduit à ce surnom honorifique. Dans l’édition du 1er octobre 1927, le quotidien « Jornal do Brasil » annonçait l’organisation, en partenariat avec l’entreprise d’eau minérale « Salutaris », d’un concours pour déterminer le club le plus aimé du Brésil. Selon le règlement du concours, les supporters devaient voter en écrivant le nom de leur équipe préférée sur l’étiquette d’une bouteille d’eau Salutaris ou sur le coupon imprimé dans le journal, et l’envoyer au siège du quotidien. Les récompenses pour le vainqueur était la Taça Salutaris, un trophée en argent d’environ un mètre et demi de long, ainsi que le titre du club le plus aimé du Brésil. A la fin du premier tour, Flamengo et Vasco da Gama furent sélectionnés en finale et un nouveau vote fut organisé. Dans toute la ville, les deux clubs mobilisèrent leurs fans et leurs supporteurs organisèrent des collectes des bulletins de vote. À la fin du dépouillement, Flamengo obtint 254 850 voix et remporta le titre. Seulement, pour les supporteurs du Vasco, le résultat du concours aurait été faussé suite à des malversations des fans du Flamengo. En effet, des membres du Flamengo occupèrent la porte du siège du journal, déguisés en fans du Vasco. Confiants, les supporteurs des noir et blanc, qui se rendaient chez le quotidien pour y déposer les sacs remplis de bulletins de vote, les donnèrent aux faux sympathisants, qui s’empressaient d’aller les jeter aux toilettes. Pour les fans de Flamengo qui ne renient pas cette histoire, ces manoeuvres ne visaient qu’à compenser la puissance financière de Vasco et ses fans qui pouvaient acheter des milliers de journaux et de bouteilles.

Ce titre contesté fut confirmé bien des années plus tard. En 1973, le magazine « Placar » organisa le même concours que Flamengo remporta une nouvelle fois, ainsi qu’une nouvelle coupe. Les deux trophées sont exposés au siège du club et les supporters de Flamengo aiment afficher dans leur stade des bannières portant les mots O Mais Querido.

#1237 – Dundee United FC : Arabs

Les arabes. La péninsule arabique ne s’est pas répandue jusqu’aux rives orientales de l’Écosse. Mais, il est vrai que les supporteurs du club sont connus comme les arabes et ce sobriquet a déteint sur le club et ses joueurs. D’innombrables keffiehs (turban traditionnel arabe) à la couleur mandarine (teinte du club) coiffent la tête des supporters de United et de nombreux t-shirts annoncent que leur porteur est « proud to be an Arab » (fier d’être arabe). Si vous vous renseignez sur ce surnom, on vous parlera généralement de l’hiver 1962-1963.

Cet hiver là, en Écosse, les températures descendirent très bas (-30°C) et le terrain du club, Tannadice, était gelé et impraticable. Les matchs repoussés s’accumulaient et en conséquence, l’argent ne rentrait plus et les caisses du club se vidaient. En Janvier 1963, le match de Coupe d’Écosse contre Albion Rovers approchait et Jerry Kerr, le manager, se démena pour rendre possible la rencontre. Des braseros furent d’abord utilisés, mais le résultat n’était pas suffisant. William Briggs Sons, constructeurs de routes à la raffinerie Camperdown, proposa d’utiliser un brûleur de goudron pour faire fondre la couche de glace. La glace fondit effectivement mais la pelouse brûla également. Nouveau branle-bas de combat et plusieurs camions vinrent déposer du sable sur le terrain. Le 26, l’arbitre déclara à la surprise générale le terrain praticable, et devant 12.000 spectateurs, Dundee remporta aisément le match 3 buts à 0 (marqués par Doug Smith, Dennis Gillespie et Wattie Carlyle). Le lendemain, la presse souligna que l’équipe « took to the sand like Arabs » (s’était emparé du sable comme des Arabes).

L’histoire est belle mais selon des dernières recherches, il s’agirait d’une légende. Ainsi, la bonne version remonterait également aux années 1960 quand, en imitation du kop de Liverpool, les fans de United se mirent à détourner des chansons pop pour supporter leur équipe. Dans une des travées du stade, il y avait, à chaque match, un homme mince d’âge moyen portant un long manteau et une casquette qui entrainaient les jeunes à chanter. Un jour, il s’adressa à eux en déclarant « I am Nasser and you are my Arabs! » (Je suis Nasser et vous êtes mes arabes). Référence pas si étonnante à cette période. Depuis sa prise de pouvoir en 1956, le leader égyptien, Gamal Nasser, était devenu une icone dans le monde arabe, en promouvant sa doctrine socialiste et pan-arabique. Son influence sur les peuples arabes et son aura internationale s’accrurent quand il défia l’occident lors de la crise du Canal de Suez et lorsqu’il unifia la Syrie à l’Egypte, au sein de la République Arabe Unie. Au point d’atteindre l’enceinte de Dundee.

#1220 – SC Corinthians : Timão

La grande équipe ou barre (de gouvernail). Deux traductions car il existe deux versions à l’un des surnoms les plus connus de l’équipe de São Paulo. Si vous circulez dans les travées de l’Arena Corinthians, vous entendrez l’explication des supporteurs. En 1933, sous la présidence d’Alfredo Schurig, l’aviron fut intégré dans la palette des sections sportives des Corinthians et, connaissant un certain succès dans les sports nautiques, le club rajouta en 1939 dans son blason une bouée (entourant le cercle central), ainsi qu’une paire d’avirons croisée et une ancre. Avec ces nouveaux attributs marins, la barre de gouvernail comme surnom semble logique. Surtout que les supporteurs voient dans la composition de ces trois attributs, le dessin d’une barre de gouvernail à roue.

Mais, dans le musée du club, la version officielle est tout autre. L’équipe de football des Corinthians connut un âge d’or dans les années 1950 en remportant le championnat paulista par 3 fois (1951, 1952 et 1954) et le tournoi Rio-São Paulo également 3 fois (1950, 1953 et 1954). Elle atteignit même le toit du monde en gagnant la Copa Presidente Marcos Pérez Gimenez (également connue sous le nom de Petite Coupe du Monde) de 1953, avec six victoires en six matchs face notamment à des équipes européennes (Roma et Barça). Seulement, après cette période faste, le club fit face à une longue disette, distancée par ses rivaux de Palmeiras, São Paulo FC et Santos (avec un certain Pelé). Pour tenter de redresser la situation, en 1966, le président Wadih Helu alloua des fonds records au département de football, qui se lança dans d’onéreux transferts. L’équipe intégra le défenseur Ditão et le mileu Nair (en provenance de Portuguesa) et surtout recruta l’ailier star, Garrincha (pour un montant équivalent aujourd’hui à 100 000 dollars américains). Ces joueurs venaient épauler le jeune prometteur Roberto Rivellino. Avec un tel effectif,  la presse fut séduite. Le 2 mars 1966, le journal « A Gazeta Esportiva » titra « Voces vão ver como é Ditão, Nair e Mané » (Vous verrez comment sont Ditão, Nair et Mané – le prénom de Garrincha) en allusion à la chanson de samba de Jackson do Pandeiro, composée en l’honneur de l’équipe brésilienne, championne du monde en 1962 « Vocês vão ver como é, Didi, Garrincha e Pelé » (Vous verrez comment sont Didi, Garrincha et Pelé). Dans la foulée, le même journal commença à traiter l’équipe comme la Timão do Corinthians (la grande équipe des Corinthians).

Mais, alcoolique et gêné par ses problèmes au genou, Garrincha n’était plus que l’ombre de lui-même et finalement, l’équipe de « stars » n’obtint pas les résultats espérés. Le club termina a la seconde place du championnat pauliste et remporta le tournoi Rio-São Paulo. Toutefois, pour ce dernier, Corithians termina à la première place ex-aequo avec Botafogo, Santos et Vasco et aucun départage ne fut effectué pour désigner un unique vainqueur. Après seulement 13 matchs et 2 buts, Garrincha partit et la disette de trophées pour les Corithians se poursuivit jusqu’en 1977. Résultat, face à cet echec, les fans adverses scandaient « Cadê Timão, Cadê Timão » (Où est Timão, où est Timão).

#1215 – FK Mačva Šabac : Провинцијски Уругвај

L’Uruguay provincial. Dans la ville de Šabac, dans le district de Mačva, au Nord-Ouest du Pays, se trouve l’un des doyens du football serbe. Fondé en 1919, le FK Mačva Šabac fut un des rares clubs à résister à la réorganisation des clubs sportifs par les autorités communistes après la Second Guerre mondiale et put donc poursuivre son activité jusqu’à nos jours. Ces dernières années, il apparût même de nouveau au sein de l’élite serbe.

Toutefois, le club connut son âge d’or durant l’entre-deux-guerres. Depuis le début des années 1920, le FK Mačva Šabac dominait les ligues du district local et, suite à une victoire sur son rival, Srbija Šabac, intégra une ligue provinciale, celle de Novi Sad. Pour y jouer les premiers rôles, le Mačva réalisa un ambitieux recrutement, en allant notamment débaucher des joueurs dans les clubs de la capitale. Bénéficiant d’un fort soutien populaire, d’infrastructure de qualité (notamment un terrain doté d’une tribune de 400 sièges), et d’une équipe composée de joueurs expérimentés et de jeunes talents, pratiquant un football offensif, le Mačva imprima sa pate dans le championnat provincial et même dans tout le Royaume des Serbes, Croates et Slovènes. En 1927, le club fut sacré champion de Novi Sad. Titre qu’il conserva aisément en 1928 (1 défaite en 8 matchs et après avoir battu son rival et second, Vojvodina Novi Sad, sur un score de 6 buts à 1). L’équipe de Šabac intégra alors le prestigieux championnat de Belgrade et disputa la finale en 1928. La même année, une tournée fut organisée à Salonique et le Mačva battit les deux clubs de la ville, l’Aris (3-1) et l’Iraklis (4-2). Les saisons suivantes, le club assit sa domination dans la ligue de Novi Sad, avec 3 nouveaux titres (1929, 1930 et 1931). Surtout, en 1929, il ne perdit qu’un match sur les 10 disputés et en 1930, il finit invaincu, marquant 60 buts en 10 matches. En Août 1931, le Mačva obtint sa place au sein du championnat national de Yougoslavie, après avoir remporté 11 des 14 matchs de qualification. Malheureusement, cette accession à l’élite marqua le début de la fin.

Lors de cette période, sur le plan international, l’Uruguay incarnait la nation reine du football. Alors que la Coupe du Monde n’était pas encore instituée, les Jeux Olympiques demeuraient le seul tournoi international de football et l’Uruguay avait remporté la médaille d’or en 1924 face à la Suisse et en 1928 face à l’Argentin, devenant la première nation à conserver le titre. Encore aujourd’hui, l’Uruguay considère que ces deux titres sont l’équivalent d’une victoire en Coupe du Monde. D’ailleurs, en 1930, la Céleste devint officiellement championne du monde, en gagnant la première édition de la Coupe du Monde. Enfin, elle avait conquis 6 des 12 Copa América disputées entre 1916 et 1929. Emmenée par des joueurs talentueux comme le buteur Pedro Petrone et le meneur de jeu José Andrade, la Céleste pratiquait un football d’avant-garde et flamboyant, fait de passes courtes et d’occupation intelligente du terrain.

Suite à une victoire face au grand club du Vojvodina Novi Sad le 1er mai 1927, un journaliste du quotidien local « Radikal » utilisa pour la première fois la comparaison avec l’Uruguay pour parler du FK Mačva Šabac. En 1928, le journal « Politika » écrivit après une victoire face au SK Jedinstvo Belgrade « Provincijski Urugvaj – kako popularno nazivaju šabačku Mačvu – opravdao je potpuno, mišljenje koje o igri ovog tima, već ranije, i posle lepih uspeha u provincijskom prvenstvu, a naročito posle turneje po Grčkoj, vlada kod nas » (L’Uruguay provincial – comme on appelle populairement Mačva de Šabac – a pleinement justifié l’opinion qui prévaut dans notre pays sur le jeu de cette équipe, déjà avant et après de bons succès dans le championnat provincial, et surtout après la tournée en Grèce).

Si vous souhaitez plonger dans le détail des aventures du Mačva, je vous invite à lire l’article de Footballski.

#1190 – Partizan Belgrade : Парни ваљак

Le rouleau compresseur. Belgrade accueille l’un des derbys les plus intenses d’Europe, qui divise la capitale serbe, même un pays, et qui se nomme le Derby éternel. Fondés la même année, les deux clubs se partagent les 2/3 des championnats de Yougoslavie et tous les championnats de Serbie (à l’exception d’un). Leur rivalité s’exprime dans de nombreux sports (les deux clubs étant omnisports) et, en football, a rassemblé souvent des audiences au stade de plus de 90 000 personnes. Le premier match en championnat entre les deux équipes de football se déroula le 5 janvier 1947 et vit la victoire de l’Étoile Rouge (4-3). Le Partizan prit sa revanche lors du derby suivant le 27 avril 1947 avec une victoire 1 but à 0. Au 20 avril 2024, 173 derbys avaient été disputés, 68 ayant été remportés par l’Étoile Rouge contre 48 pour le Partizan.

Le 6 Décembre 1953, les deux équipes se rencontraient pour le 13ème derby de leur histoire dans le cadre du championnat de Yougoslavie. Le match se déroulait dans le stade du Partizan, Stadion Jugoslovenske narodne armije. Pendant la pré-saison, le 9 Août 1953, le Partizan gagnait un match amical face à l’Étoile Rouge, 2 buts à 1, et donc, quand le derby arriva en Décembre, les joueurs de l’Étoile Rouge voulaient prendre leur revanche. Toutefois, le Partizan demeurait sur une série de 7 victoires consécutives en championnat (9 au total sur 12 matchs disputés). Très vite, les joueurs du Partizan mirent la main sur le match et asphyxièrent leur rivaux. A la 5ème minute, le célèbre attaquant du Partizan, Stjepan Bobek, ouvrit le score. 7 minutes plus tard, Kosta Tomašević permit à l’Étoile Rouge d’égaliser et de faire illusion quelques instants. Juste avant la mi-temps, Zebec et Mihailović donnèrent deux buts d’avance au Patizan. La seconde mi-temps fut à sens unique avec 4 nouveaux buts pour le Partizan (marqués par Herceg (2x), Mihailović et Zebec). Le Partizan remporta le derby 7 buts à 1. Le lendemain, le journal « Sport » titra en une « Парtи3ahob beлиkи дah, « Парни ваљак » пpeгa3иo 3be3дy, 7:1 » (Le grand jour du Partizan, un « rouleau compresseur » bat l’Étoile 7:1). Dans l’article, le journaliste Milan Kovačević décrivit le Partizan comme un rouleau compresseur, avançant irrésistiblement et écrasant tout sur son passage. Le surnom fut immédiatement adopté par les fans. Le Partizan remporta également le match retour (2 à 0, le 2 Mai 1954) mais termina à la seconde place du championnat (devant l’Étoile, derrière le Dinamo Zagreb).

Aujourd’hui, cette humiliation subit par l’Étoile Rouge demeure encore la plus large dans un derby. Un vieux rouleau compresseur aux couleurs du Partizan trône dans l’aile sud de l’enceinte du club. En 1975, l’écrivain et supporteur du Partizan, Slobodan Novaković, rédigea l’hymne du club dans lequel il est chanté « Parni valjak neka melje, da ispuni naše želje » (Laissons le rouleau compresseur broyer, pour exaucer nos souhaits).

#1143 – Ismaily SC : الدراويش

Les derviches. Fondé en 1921 sous le nom de Renaissance de la Jeunesse Egyptienne, le club devint ensuite le Club Ismaïl, du nom du Khédive Ismaïl Pacha. En 1947, le nom fut de nouveau changé pour définitivement devenir Ismaily, du nom de la cité d’Ismaïlia. Le surnom de derviches est certainement l’un des plus célèbres pour le 3ème plus grand club égyptien. Il fait référence à la famille درويش (Darwish) qui dans les années 1960 et 1970, évoluèrent pour Ismaily. Les principaux membres comprenaient Bijou, Amin (dit Mimi) et Hassan. A cette fratrie s’ajoutait également un autre homonyme Mostafa Darwish. Tous participèrent à l’âge d’or du club, qui se conclut par le premier titre de champion d’Egypte du club lors de la saison 1966-1967 (alors que le championnat avait jusque là était remporté que par des clubs du Caire et d’Alexandrie) et surtout la première victoire d’un club égyptien et arabe en coupe d’Afrique des clubs champion en 1969 (empêchant alors le TP Mazembe de réaliser un triplé historique). Les plus célèbres Darwish, Mini et Hassan, étaient des défenseurs élégants et il n’étaient pas rare que, par leurs jeux et leurs dribbles, les Darwish fissent tourner leurs adversaires comme des toupies. A l’image des danseurs derviches. Le journaliste sportif Naguib Al-Mestakawi, qui donnait souvent des surnoms, le fit pour Ismaily en faisant la comparaison entre les Darwish et les derviches.

Les derviches sont des ascètes, membres d’une fraternité soufie. Le nom derviche dériverait du mot perse در (dar – la porte) et signifie « celui qui ouvre la porte » . Mais, il pourrait descendre d’un mot proto-iranien comme drigu- qui désigne un nécessiteux, un mendiant. Les derviches mendiaient en allant de maison en maison et l’abandon des besoins matériels comme les valeurs d’amour et de service sont les bases de leur spiritualité pour atteindre Dieu. Ils sont particulièrement connus en Occident au travers d’une attraction touristique en Turquie, les derviches tournants. Ces derniers, appartenant à l’ordre de Mevlevi, fondé au XIIIème siècle par Jalal al-Din Rumi à Konya, dansent en tournoyant, avec leurs jupes qui se soulèvent, lors d’une cérémonie formelle connue sous le nom de Samā‘. Danse extatique, elle s’accompagne d’une récitation d’une prière islamique dévotionnelle. En Égypte, la pratique du tournoiement soufique est connue sous le nom de التنورة (el-tanoura).