#1232 – Djurgårdens IF : Apor

Les singes. Dans les années 1980, les supporteurs adverses, en particulier ceux des rivaux de l’AIK et de Hammarby IF, avaient pris l’habitude de jeter aux joueurs et aux fans de Djurgårdens des bananes, les comparant ainsi aux primates. Evidemment que ce geste était insultant mais se basait sur une réalité du quartier insulaire de Stockholm. En effet, l’île de Djurgården accueille depuis la fin du XIXème siècle le musée en plein air de Skansen, qui abrite également un parc zoologique. Alors que la Suède connaissait de profonds changements, Artur Hazelius, craignait que la culture populaire suédoise disparût et créa ainsi en 1891 un musée réunissant des pièces de la vie quotidienne. Plus de 140 bâtisses typiques furent ainsi reconstruites pierre par pierre dans ce parc. Dans les premières années, le musée hébergea également des espèces présentes en Suède comme des rennes, des chiens, des poules, des oies et des canards. Puis, il fut reconnu comme un zoo en 1924 lorsqu’il reçut les fonds nécessaires pour construire la maison des singes, appelée Djurhuset. A compter de cette date, le cheptel d’animaux comprenait ceux endémiques de la Suède ainsi que des exotiques comme des perroquets, tortues, poissons et donc aussi des babouins, gibbons et petits singes. Ainsi, depuis plus d’un siècle, le quartier de Djurgården est connu pour ce musée et sa montagne aux singes.

Comme souvent avec des surnoms ironiques, les fans moqués se l’approprient et le tournent alors en fierté. Et donc les supporteurs de Djurgården n’hésitent pas aujourd’hui à afficher des primates et les tiffos affichant un gorille (un gorille est plus impressionant et moins amusant qu’un singe) ne sont pas rares. Le club lui-même joue sur cet aspect en vendant des t-shirts où le logo de l’entreprise Chiquita, un des plus grands producteurs de bananes au monde, était confondu avec celui du club et le slogan « Ge oss bananer » (donnez nous des bananes) apparaissait en dessous. Résultat, beaucoup dans les tribunes pensaient que la tradition du lancer de bananes était innocente et était un élément folklorique de la rivalité historique entre les supporters des trois grands clubs de Stockholm.  Toutefois, elle trouva ses limites quand, au début des années 2000, le gardien de Djurgårdens IF était le gambien Pa Dembo Touray. Le folklore empruntait alors le chemin de manifestations racistes et finit donc par disparaitre. En revanche, le surnom résista à cette prise de conscience du public.

#1094 – Hartlepool United FC : the Monkey Hangers

Les pendeurs de singe. Ce surnom apparaît peu flatteur et il est vrai qu’il fut au départ utilisé pour se moquer des habitants de la ville et en conséquence des supporteurs du club de la ville. Et comme souvent, les locaux se sont appropriés ce sobriquet pour en faire un élément de différenciation, d’identité. Il en faut pour ce club, certes plus que centenaire (1908) et ayant adopté le statut professionnel dès sa fondation, qui ne jouit pas ni d’une grande aura, ni d’un palmarès.

La légende remonte au XIXème siècle, lors des guerres napoléoniennes. A cette époque de forte rivalité entre la perfide Albion et l’Empire Français, les britanniques craignaient une invasion française et l’opinion publique était très préoccupée par la possibilité d’infiltrations d’espions français. Il s’avéra qu’un bateau français (certainement un navire marchand) qui luttait contre les éléments coula au large d’Hartlepool. Le seul survivant était un singe vêtu d’un uniforme militaire (probablement pour divertir les marins). Malheureusement, l’inculture des habitants de la cité anglaise était telle qu’ils s’imaginèrent que l’animal était un espion français. Pour les excuser, il est souvent raconter qu’à l’époque, les journaux britanniques peignaient les français comme des créatures ressemblant à des singes avec des queues et des griffes. Un procès s’improvisa et la peine capitale (la mort) fut déclarée à l’encontre du singe. Le mât d’un bateau de pêche constitua la potence et le singe fut pendu. Malheureusement, il se peut que le singe fusse un enfant. Sur les bateaux, le terme powder-monkey (singe à poudre) était couramment utilisé pour désigner les enfants employés sur les navires de guerre pour amorcer les canons avec de la poudre à canon.

Cette image de pendeur de singe est nettement répandue dans la culture populaire et les références sont nombreuses dans les chansons, films, bandes dessinés et romans britanniques (et même parfois étrangers). La première chanson mentionnant cette légende, « The Monkey Song », remonte au XIXème siècle et était interprétée par l’artiste comique Ned Corvan. Les statuts de singes se multiplièrent également dans la cité. Au niveau sportif, 2 des six clubs de rugby de la ville utilisent des variantes du singe dans leurs symboles. Le club de Hartlepool United capitalisa également sur cette histoire en créant une mascotte appelée « H’Angus the Monkey » en 1999. Enfin, de manière inattendue, Stuart Drummond, qui fit campagne vêtu du costume de H’Angus et en utilisant le slogan électoral « free bananas for schoolchildren » (bananes gratuites pour les écoliers), fut élu Maire en 2002.

#494 – AA Ponte Preta : Macacas

Les macaques. Le surnom ne paraît pas flatteur et pourtant il est porté avec fierté par le club et ses supporteurs. En fait, le club choisit volontairement ce singe comme mascotte, qui donna naissance au surnom. D’une part, il permit de se distinguer des autres mascottes habituelles qui reprenaient des animaux inspirant la puissance, tels que le lion et le tigre. D’autre part, cette mascotte était aussi un moyen de se moquer du racisme des adversaires. Club doyen du Brésil avec sa fondation en 1900, il est également celui qui a favorisé l’intégration des noirs dans le football. Au début du XXème siècle, le football était monopolisé par l’élite blanche, souvent récemment immigrée d’Europe. Leurs clubs avaient des règles qui interdisaient explicitement la présence de noirs. Ponte Preta était fondé par des étudiants qui jouaient dans un terrain vague avec des balles de chiffon. Parmi eux, Miguel do Carmo, un homme noir, né en 1885, 3 ans avant l’abolition de l’esclavage au Brésil. Fondateur, il fut surtout le premier footballeur noir au sein d’un club. Il évolué à Ponte Preta jusqu’en 1904 au moment de son transfert à Jundiaí. Comme la couleur de la peau n’était pas un élément différenciant pour le club, des historiens supposent que d’autres joueurs du club en 1900 étaient également noirs. En outre, le quartier de Ponte Preta où le club naquit était composé d’ouvriers et de cheminots, dont une grande partie étaient noirs. Ainsi, sur le terrain comme dans son stade, les noirs, mulâtres et blancs se côtoyaient sans distinction. Le club Ponte Preta joua un rôle fondamental dans l’affirmation de la démocratie raciale (une théorie qui défendait l’idée que le Brésil aurait échappé au problème des préjugés raciaux) qui marqua l’histoire brésilienne au début du XXème siècle. Mais, le racisme était bel et bien réel à cette époque. En effet, l’équipe était harcelé en raison de la forte présence de noirs et de mulâtres dans l’équipe et parmi les fans. Dans les stades où Ponte Preta se déplaçait, ses joueurs étaient régulièrement reçus par des cris de singes et de macaques. C’est ainsi que le club opta pour le singe comme symbole.