#1125 – Étoile Sportive du Sahel : الحمراء

Le rouge. Fondé le 11 mai 1925 dans le lycée franco-tunisien et reconnu par les autorités françaises le 11 juillet 1925, le club de Sousse qui est devenu une icone nationale s’inscrivit d’abord dans le mouvement des nationalistes sahéliens (par opposition aux clubs de Sousse qui regroupaient d’autres communautés : Patriote de Sousse pour les Français, Savoya qui réunissait les Italiens, Red Star pour les Maltais et Maccabi qui regroupait les joueurs de confession israélite). Résultat, le choix fut fait de retenir les couleurs du drapeau de la Tunisie, rouge et blanc.

Suite à la défaite de la flotte ottomane, qui comportait plusieurs navires tunisiens, face à une alliance franco-russo-britannique à la bataille navale de Navarin le 20 Octobre 1827,  Hussein II, Bey de Tunis, décida la création d’un drapeau à destination des bateaux tunisiens, pour les distinguer des autres flottes. Plusieurs pays de la Méditerranée, vassale de l’Empire Ottoman, utilisaient alors un drapeau à dominante rouge s’inspirant du drapeau de la Sublime Porte. Ainsi, la Tunisie étant elle-même un vassale de l’Empire Ottoman, le choix du drapeau se porta en 1831 sur un étendard rouge et comportant, en son milieu, un disque blanc où figure un croissant et une étoile à cinq branches rouges. Depuis cette date, le drapeau tunisien a subi peu de modification. Il y a différentes interprétations sur la symbolique attachée à ce drapeau. Il est communément admis que la couleur rouge exprimerait le sang des martyrs tombés durant la conquête par les Ottomans en 1574. Même couleur qui pour d’autres serait soit le symbole de la résistance contre la suprématie turque (sic), soit elle propagerait la lumière sur le monde musulman. Le blanc symboliserait la paix tandis que le cercle de cette couleur évoquerait le soleil. Le croissant et l’étoile à 5 branches, vieux symboles associés depuis l’Antiquité et devenus aujourd’hui une des images largement répandues du monde musulman, étaient à l’époque présent sur l’étendard de l’Empire Ottoman. La Tunisie le reprit à son compte, le croissant incarnant l’unité de tous les musulmans et les branches de l’étoile les 5 piliers de l’islam. Mais, le croissant pourrait également apporter la chance ou désigner le dernier croissant de Lune, qui marque la fin du mois du ramadan. Il n’empêche que si la Tunisie s’inspira des symboles de l’Empire Ottoman, le croissant et le soleil étaient déjà utilisés par la Carthage Punique (814 av. J.-C. – 146 av. J.-C.), et finalement, ce ne serait qu’un retour aux sources.

#1050 – CA Bizertin : قرش الشمال

Le requin du Nord. Fondé le 12 juillet 1928 par des arabes, le club comptait parmi ses membres du comité de direction principalement des commerçants et des agriculteurs. Pourtant, ses principaux symboles puisèrent dans l’héritage maritime de la ville de Bizerte. Cette dernière est entourée par l’eau, se situant sur la rive nord du canal de Bizerte reliant la mer Méditerranée au lac de Bizerte. Cette situation géographique fut la base de son développement. Son port fut notamment une base arrière de pirates musulmans au XVIIème siècle. Puis, la pêche, facilitée par l’abondance de poissons dans le lac et la mer, se substitua à la piraterie au XIXème siècle. Après la conquête française, les autorités coloniales développèrent le port de Bizerte dont la position était stratégique dans le canal de Sicile à la fin du XIXème siècle (point de passage obligé pour les navires transitant au plus court entre Gibraltar et le canal de Suez). Les travaux d’infrastructure associés firent de la ville une des plus importantes bases navales françaises de Méditerranée. Le port fut également une base militaire pendant la Seconde Guerre mondiale. Aujourd’hui, Bizerte regroupe un port de plaisance, un port de pêche ainsi qu’un port de commerce. Avec ses 1 721 mètres de quai, ce dernier concentre principalement du trafic pétrolier.

Le blason du club comporta notamment un bateau et des hippocampes. Puis, un dauphin fit son apparition et demeure encore aujourd’hui. Mais, pour le surnom, le requin, animal marin plus effrayant, s’imposa. Même si la concentration de requins est plus forte dans le sud du Pays (la région est connue pour être un habitat important et un lieu de reproduction pour de nombreuses espèces telles que le requin gris et le requin blanc), plusieurs espèces de cet animal ont déjà montré leur queue et leurs dents près de Bizerte, voire plus rarement dans le port de la ville.

Pour terminer, il faut rappeler que Bizerte se trouve à 5 kilomètres du cap Blanc, la pointe septentrionale de la Tunisie et de l’Afrique également. Elle est donc la ville la plus au Nord du pays.

#1006 – JS Kairouanaise : فريق الأغالبة

L’équipe Aghlabide. Ville du centre de la Tunisie, Kairouan est présenté comme la 4ème ville sainte de l’Islam et la première du Maghreb. 4ème ville construite par les musulmans après Bassorah, Koufa et Al Foustat en 670 par le conquérant Oqba Ibn Nafi, la cité constitue le berceau de l’Islam au sein de l’Ifriqiya et joua un rôle majeur religieux et politique jusqu’au XIème siècle. Cette influence provint de l’affirmation de la dynastie Aghlabides qui gouverna l’émirat de l’Ifriqiya (qui s’étendait depuis les rivages tripolitains jusqu’à l’Ouest du Constantinois) entre 800 et 909. Nommé par le calife abbasside, en échange d’un tribut annuel, Ibrahim ibn al-Aghlab, né à Kairouan en 756, obtint la suzeraineté de la région afin de l’assagir et fonda la dynastie des Aghlabides. Pour son émirat, il choisit Kairouan comme capitale. A compter de 828, l’émirat Aghlabide entreprit la conquête de la Sicile au dépend de Byzance. Sous le règne d’Ahmed ibn Mohammed al-Aghlabi (856-863), l’émirat atteint son apogée. Grâce à son agriculture fertile, sa présence de chaque côté de la Méditerranée, et son subtil équilibre entre les berbères et les arabes, le royaume s’imposa comme une plaque tournante du commerce (notamment des esclaves) entre le monde islamique, Byzance et le sud de l’Europe de l’Ouest.

Kairouan connut également son apogée avec les Aghlabides. La cité profita de cette richesse commerciale pour développer une école de droit malikite (droit musulman sunnite), une école scientifique (édifiée sur le modèle de Bagdad, où l’on enseignait la médecine, la théologie, la logique, les mathématiques, la botanique et l’astronomie) et des bibliothèques qui firent sa renommée dans le domaine du droit, de la théologie et de la science. L’ensemble était intégré à la mosquée de Kairouan. Edifiée par Oqba Ibn Nafi, le monument fut remodelé dans sa forme actuelle sous les Aghlabides. A cette époque, la mosquée était l’un des plus grands centres de la civilisation musulmane qui exerçait une influence comparable à l’Université de Paris au Moyen-Age. Elle réunissait d’éminents scientifiques, théologiens et juristes musulmans. Malgré le déclin de la ville à compter du XIIème siècle, la mosquée conserva son rayonnement culturel et spirituel dans le monde musulman. Aujourd’hui, monument emblématique de la ville de Kairouan, la mosquée demeure le sanctuaire le plus ancien et le plus prestigieux de l’Occident musulman.

#955 – Olympique de Béja : اللقالق

Les cigognes. Une belle cigogne s’envole sur le blason du club, que l’on retrouve également sur les armes de la ville de Béja. Par ailleurs, à l’entrée de la ville, en venant de Tunis, le visiteur ne peut pas éviter un important monument, représentant trois cigognes aux ailes entrelacées, gardant un épi de blé surmonté d’un grand nid. L’oiseau est le symbole de cette cité du nord-ouest de la Tunisie. Région verte, Béja était connu dès l’antiquité comme le grenier à blé de Rome en raison de l’abondance de ses cultures. Encore aujourd’hui, il s’agit de la région la plus fertile de Tunisie avec comme cultures principales, les céréales, la vigne et le sucre. En outre, la bonne pluviométrie en fait une zone naturellement irriguée, avec de nombreux mares, cours d’eau et oueds. Cet environnement est donc propice pour les oiseaux migrateurs tels que la cigogne afin de se reproduire. Au mois de février/mars, les males, en provenance d’Europe ou d’Afrique subsaharienne, construisent ou retrouvent leur nid à Béja et ses environs, suivis quelques semaines après par leurs females. Ils cherchent à faire leurs nids, à des fins de sécurité, en hauteur, sur les toits des bâtiments, des minarets ainsi que sur les poteaux électriques. Puis, ils s’accouplent (la female pond entre 2 et 5 oeufs) et élèvent leurs progénitures jusqu’à fin Septembre, moment où ils migrent de nouveau vers l’Europe ou l’Afrique subsaharienne. Les cultures et les cours d’eau de la région fournissent en abondance l’alimentation de cet oiseau carnivore (rongeurs, insectes, batraciens …).

Même si leur présence sur les poteaux électriques provoquent des pannes du réseau, les habitants de la région apprécient les cigognes. Ils sont connus localement sous le nom de Hajj Qassem ou Al-Balraj. La légende raconte que la cigogne était tout d’abord un homme pieux dénommé Hajj Qassem. Ce nom signifiait que lorsqu’il voyait des convois de pèlerins faisant le hajj, il les accompagnait et devenait intime avec eux. Faisant ses ablutions avec du lait, l’homme fut transformé par Dieu en cet oiseau aux plumes blanches et bouts noirs. Aujourd’hui, la population locale pense que l’absence de l’oiseau signifie qu’il s’agit de la période du hajj et que tous les oiseaux suivent les pèlerins. En revanche, les habitants de la région de Béja accueillent avec enthousiasme la venue des cigognes, qui est une message d’une bonne saison agricole. Plus basiquement, les cigognes sont un prédateur des nuisibles des cultures et les agriculteurs les protègent.

#909 – US Monastirienne : أبناء الرباط

Les fils du Ribat. Monastir, ville de près de 100 000 habitants, à proximité de Sousse, est située sur la côte méditerranéenne. Son nom est tiré du terme grec monastrion, qui signifie monastère, car à l’époque byzantine, un monastère se dressait dans la cité et en étant même le monument principal. Avec l’invasion arabo-musulmane, le monastère disparut mais un autre monument s’éleva face à la mer et constitue encore aujourd’hui le point de repère et l’image de la ville. Il s’agit du Ribat. Pour faire face aux attaques byzantines, le royaume d’Ifriqiya, dont la capitale était à Kairouan, laissait à des communautés religieuses le soin de défendre la côte. Ces derniers bâtirent des monuments à la fois forteresses défensives et lieux de prière. Une chaîne de ribats s’étendait tout au long de la côte de l’Afrique du Nord. Celui de Monastir fut édifié en 796 probablement par Mohammed ibn Qadim et commandité par le général abbasside, Harthimâ Ibn A’yûn. Petit fortin au départ, il subit plusieurs extensions à son époque médiévale. Du XVème au XVIIIème siècle, les fortifications de l’édifice furent renforcées. avec des tours et des bastions. Aujourd’hui, il s’agit d’une enceinte massive rectangulaire, entrecoupée de tours carrés et rondes, ceinturant deux cours intérieures. Le porche d’entrée est décoré par cinq niches plates coiffées par des arcs outrepassés et surmontés d’une frise à motifs floraux. Les bâtiments intérieures accueillent de nombreuses cellules pour les moines-soldats ainsi que des salles de prières, dont la plus spacieuse accueille, aujourd’hui, une collection d’objets de culte et d’artisanat musulmans d’époque médiévale. Le Ribat est dominé par la tour-vigie (Nadhour), composée d’une centaine de marches en spirales. Le Ribat avait donc cette double fonction de forteresse et de lieu de prière. A ses débuts, il hébergeait des guerriers, des voyageurs, mais aussi des étudiants en religion et parfois des savants illustres. Puis, à la fin du Moyen-Age, il devint un grand centre religieux considéré comme un monastère islamique tandis que la ville de Monastir apparaissait alors comme une ville sainte, une des portes du paradis. Des soufis, mystiques musulmans, habitaient également le ribat. Dès le Xème siècle, un espace fut même réservé pour les femmes. Aujourd’hui, il est l’emblème, le monument phare de la ville. Il apparaît en position central et incontournable sur les armes de la cité comme sur l’écusson du club. Il est considéré comme le ribat le plus ancien et le plus important du Maghreb. Au Xème siècle, le géographe et chroniqueur Mohammed Abul-Kassem ibn Hawqal décrivit l’édifice comme le plus grand ribat de l’Ifriqiya.

#753 – Club Africain : الأفريقي

L’africain. Tiré de son nom, le sobriquet comme le nom demeure singulier pour un club qui représente avant tout la capitale tunisienne. Et même si son aura est grande, elle ne dépasse guère les frontières tunisiennes. Mais, avant de rentrer dans ce débat, repartons au début des années 1920, en évitant une autre discussion qui anime la Tunisie du football. En effet, sous protectorat français dont le représentant s’accaparait les différents pouvoirs, la Tunisie connaissait au début du XXème siècle un mouvement nationaliste qui devait naturellement s’exprimer dans le sport également. Les clubs sportifs en Tunisie personnifiaient les différentes communautés française (Racing Club de Tunis, Sporting Club de Tunis, Stade Gaulois), italienne (Italia de Tunis, Savoia de Sousse), maltaise (Mélita-Sports) et juive (Stade Tunisois, Maccabi) mais les indigènes musulmans ne se sentaient pas représenter. Toutefois, certains clubs intégraient des musulmans comme le Stade africain. En 1918, un match qui opposait le Stade Africain et le Stade tunisois tourna à l’émeute. Pour sanction, les autorités françaises dissolvaient les deux associations. Cette disparition d’un club, où elle pouvait jouer, encouragea la communauté musulmane, dans cette dynamique nationaliste, à essayer de fonder une association dédiée. L’une de ces initiatives s’inscrivait dans la tradition du Stade Africain, en reprenant notamment le nom. Toutefois, en 1919, le premier essai des fondateurs du club échoua car le nom choisit, Club islamique africain, ne passa pas la censure des autorités (ces dernières ne souhaitaient pas voir le sentiment nationaliste se crystaliser au sein d’une quelconque association). Quelques mois plus tard, les fondateurs essayèrent une nouvelle fois avec toujours la volonté d’affirmer leur racine indigène. Ainsi, le président du club était tunisien, le choix des couleurs se porta sur celles du drapeau tunisien (rouge et blanc) et l’écusson affichait les symboles musulmans, croissant et étoile. Enfin, le fait de nommer « africain » un projet sportif d’ordre national ne pouvait être le fruit du hasard ni dénué de sous-entendus. Comme le continent africain était sous domination coloniale, ce choix avait une valeur symbolique et politique, voire était une cri de ralliement pour l’ensemble des indigènes. Mais, cette référence au continent était aussi un rappel aux racines de la Tunisie. Au Moyen-Âge, la partie du territoire qui s’étendait du Nord-Est de l’Algérie au Nord-Ouest de la Libye, en passant par la totalité de la Tunisie, se dénommait Ifriqiya, qui donna plus tard le mot Afrique.

#614 – CS Sfaxien : يوفنتوس العرب

La Juventus des Arabes. En 1912 et en 1922, des tentatives furent menées pour créer le premier club réservé aux musulmans en Tunisie. Mais, alors sous protectorat de la France, l’accord des autorités ne fut pas obtenu et les activités gelées. A compter de 1925, Zouhair Ayadi, journaliste à La Tunisie Nouvelle, déposa plusieurs demandes pour fonder un club musulman. Finalement, le 28 mai 1928, le club fut autorisé. Le journal La Tunisie Nouvelle était un hebdomadaire indépendantiste à caractère national (ie bien qu’il soit publié à Sfax, il couvrait la Tunisie dans son ensemble) et Zouhair Ayadi était un nationaliste actif. Résultat, le nouveau club avait pour vocation d’être un étendard de la cause nationaliste et devait donc arborer des symboles tunisiens. Tout d’abord, le nom était Club Tunisien pour représenter l’ensemble des musulmans du pays et revendiquer l’unité de la Tunisie. Ensuite, les couleurs retenues furent le rouge et le vert. Selon certains, le rouge évoquait le sang des martyrs et le vert, la nature tunisienne. Tandis que d’autres avancent que ces couleurs étaient celles de la bannière arborée par la résistance sfaxienne lors de son affrontement en 1881 avec l’armée française (couleurs qui étaient aussi en symbiose avec les couleurs du drapeau du Bey de Tunis). Ces choix demeurèrent jusqu’en 1962 où il fut décidé de changer de nom et de couleur à l’issue d’une session extraordinaire du comité directeur du club sous la tutelle directe du maire de Sfax. Pourquoi changer ? Personne ne sait aujourd’hui. Selon certains acteurs de l’époque, il semble que le président tunisien, Habib Bourguiba, aurait agit directement ou indirectement pour faire changer le nom et les couleurs du club. La raison demeure encore inconnue aujourd’hui mais il semblerait que la décision de Bourguiba fut prise après une défaite du Club Tunisien face à une équipe du FLN algérien. Le Club Tunisien devint le Club Sportif Sfaxien. Quand aux couleurs noires et blanches, elles furent proposés par l’entraineur Milan Kristić. Entraineur du club entre 1961 et 1966, ce dernier fut déterminant dans les succès futurs du CSS. Ayant carte blanche du président, il était l’entraineur de toutes les équipes, des minimes aux seniors. Il professionnalisa l’organisation du club, structura la formation des joueurs et leurs hygiènes de vie et insuffla un style de jeu offensif et spectaculaire. Son influence était donc grande et il n’eut pas de mal à imposer ces couleurs. Etant yougoslave, il importa peut-être les couleurs noires et blanches d’une des équipes yougoslaves telles que le Partizan Belgrade. Avec un maillot rayé (donc blanc et noir) et un joli palmarès qui s’est constitué à partir des années 1970, l’analogie avec le club italien de la Juventus se fit naturellement et donna le surnom de la Juventus des Arabes.

La comparaison avec la Juventus ne fut pas la seule pour le CSS. En 1970, le CSS perdit la finale de la Coupe du Maghreb des clubs champions face au club algérien CR Belcourt au tir aux penalties. Malgré la défaite, les spectateurs furent ravis par le jeu développé par le club tunisien. Le président du CR Belcourt dit à son homologue tunisien : « Si l’on pouvait partager la coupe en deux, nous l’aurions fait » . Résultat, le commentateur de la télé algérienne qualifia le CSS de Real Madrid du Maghreb.

#602 – Stade Tunisien : النادي الملكي

Le club beylical (ou royale). Dans ce surnom, il est rappelé que ce club de Tunis était lié au Bey de Tunis, ie le monarque tunisien. En 1947, la ville du Bardo, à quelques kilomètres de Tunis, connaissait une forte progression de sa démographie. De 968 habitants en 1936, plus de 7 000 personnes y vivaient 10 ans plus tard. Ce dynamisme entraina la création de structures culturelles et sportives, notamment l’Association culturelle de la jeunesse musulmane, dirigée par Cheikh Salah Ennifer. En Juillet 1947, Cheikh Ennifer et d’autres membres de l’association décidèrent de créer un nouveau club de football prénommé Stade Tunisien. En se nommant ainsi, le club souhaitait promouvoir la cause nationaliste tunisienne. Mais, les autorités françaises refusèrent et souhaitaient que le club changea de nom pour Club Tunisois (ne faisant ainsi référence qu’à la ville de Tunis et non à un pays). Cheikh Ennifer chercha alors la protection du Docteur Mohamed Ben Salem pour obtenir gain de cause, en lui proposant de prendre la présidence du club. Docteur Ben Salem était acquis à la cause nationaliste et était surtout le gendre de Lamine Bey, le Roi de la Tunisie à cette époque, après avoir épousé la princesse Zakia en 1944. Grace à ce soutien, le club put alors s’enregistrer sous le nom de Club Tunisien. Puis, le Roi concéda le terrain du Bardo Sports à la municipalité du Bardo afin d’y édifier les terrains d’entrainement du nouveau club. Si le Bey et sa famille couvèrent autant le club, c’est que ce dernier naquit dans la ville du Bardo, où se situait le principal palais du Bey. Edifié dès le XVème siècle, le palais logea les différents familles régnantes qui l’agrandirent et l’embellirent au fil du temps. Le Bardo constitua une véritable cité royale et encore aujourd’hui, la ville caractérise le cœur de la vie politique du pays (le parlement siège dans l’ancien palais beylical). Ainsi, le club devint à jamais le club aristocratique de la capitale.

#572 – Étoile Sportive du Sahel : جوهرة الساحل

Le joyau de la côte. Le club réside dans la ville de Sousse, capitale du Sahel tunisien, parfois surnommée la « perle du Sahel ». Situé à l’est du Pays, Sousse est une ville portuaire, sur le littoral du Sahel donnant sur la mer Méditerranée. Son club de l’ESS demeure une référence de la région et du pays. Depuis 1950, le club fut sacré champion de Tunisie à dix reprises (1950, 1958, 1963, 1966, 1972, 1986, 1987, 1997, 2007, 2016) et vainqueur également à dix reprises de la Coupe nationale (1959, 1963, 1974, 1975, 1981, 1983, 1996, 2012, 2014, 2015). Sur le plan continental, l’Etoile Sportive de Sahel remporta plus de titres de la CAF que toute autre équipe tunisienne : une Ligue des champions d’Afrique (2007), deux Supercoupe de la CAF (1998, 2008), deux Coupe de la confédération (2006 , 2015), deux Coupe de la CAF (1995, 1999) et deux Coupe d’Afrique des vainqueurs de coupe (1997, 2003). Dans le monde arabe, la moisson fut également importante : Coupe du Maghreb des clubs champions (1973), Coupe du Maghreb des vainqueurs de coupe (1975) et Coupe arabe des clubs champions (2019). Enfin, l’ESS fut la première équipe tunisienne à participer à la Coupe du Monde des Clubs de la FIFA, en 2007, et termina à une honorable 4ème place, le deuxième club du continent africain à atteindre les demi-finales. La CAF a classé le club parmi les clubs de football les plus prestigieux d’Afrique et l’une des équipes les plus soutenues du continent. Son influence à Sousse est telle qu’en 1993, lorsque le club échappa de peu à la relégation en seconde division, les autorités décidèrent de sacrifier tous les autres clubs de la ville (STIA Sousse, Patriote, Avenir sportif de Sousse et Football Club de Zouhour) à l’exception du Stade soussien, afin que toutes les ressources soient consacrées à l’ESS. Pas de doute, il s’agit d’un joyau.

#309 – Espérance Sportive de Tunis : الدم و الذهب

Les sangs et ors. Le plus grand club tunisien évolue dans un maillot rayé sang et or, accompagné souvent d’un short noir. Toutefois, lors de sa première année d’existence, les joueurs portaient un maillot rayé certes, mais vert et blanc. L’Espérance Sportive fut fondé le 15 janvier 1919. A cette époque, la Tunisie se trouvait sous protectorat français et la création d’association sportive par les populations autochtones était un moyen de résistance, le porte drapeau du nationalisme. Ainsi, le Club Africain et l’Etoile du Sahel, les deux autres grands clubs du pays, optèrent à leur création pour les couleurs rouge et blanches, en référence au drapeau national. Mais, l’Espérance choisit le vert et blanc et la raison est inconnue. J’avancerai que dans ce contexte d’affirmation nationaliste, le choix du vert et blanc pouvait mettre à l’honneur les couleurs de l’Islam. Une autre façon d’être nationaliste. Toutefois, un an plus tard, les maillots du club changèrent et passèrent au rouge et jaune. Deux légendes s’affrontent pour la raison de ce troque. La première invoque un concours de circonstances. Suite à une pénurie persistante de maillots verts, les dirigeants en cherchèrent de nouveaux et dénichèrent un stock aux couleurs sang et or. Les joueurs portèrent ces nouvelles couleurs au match suivant et gagnèrent la partie, convainquant la direction de les conserver. L’autre histoire, plus admise, rappelle que lorsque le Dr Chadli Zouiten, dentiste et joueur, rejoignit l’équipe en 1920, il apporta avec lui les équipements de l’équipe scolaire du Tunisia Football Club. En effet, cette association venait d’être dissoute et les managers se partagèrent les biens. Chadli Zouiten récupéra les maillots rouge et jaune et en fit donc don à l’Espérance. Or, de meilleur qualité, notamment plus chaud, ces maillots convainquirent la direction et les joueurs de les adopter définitivement. 100 ans plus tard, ces couleurs sont toujours celles du club.