#409 – Peñarol Montevideo : Manyas

Terme difficilement traduisible mais dont voici l’histoire. Tout est lié avec le joueur uruguayen Carlos Scarone, d’origine italienne et dont toute la famille supportait Peñarol. Scarone joua pour le CURCC (ancêtre de Peñarol). Avant-centre agressif et techniquement brillant, Scarone composa avec un autre jeune joueur, Jose Piendibene, un formidable duo d’attaque qui conduisit Peñarol au titre de champion en 1911. Tenté par une aventure à l’étranger et un beau salaire, Scarone signa pour Boca Juniors en Argentine en 1913. Au bout d’une année, après une maladie contractée en Argentine, il rentrât au pays. Il eut alors deux offres : une de Peñarol et une autre, du club rival de Nacional. Seulement, le second lui offrit des émoluments nettement supérieurs au salaire proposé par Peñarol et également beaucoup d’attention. Scarone n’hésita pas longtemps. Sa famille fut déçu et, lors d’un repas de famille, Carlo Scarone justifia son choix pécunier en déclarant: « ¿ A qué me iba a quedar ?¿ A mangiare merda ? » (pourquoi y aller [à Peñarol] ? pour manger de la merde ?). Cette phrase mélangeant italien et espagnol (le terme mangiare était un mot italien) était typique de la communauté italienne d’Uruguay. Et l’expression « mangiare merda » se contracta et s’espagnolisa pour devenir manyas. Les manyas étaient donc des mange merde.

Quelques mois plus tard (le 26 juin 1914), Carlos Scarone et le Nacional jouèrent le derby face au Peñarol. Ce dernier le remporta 2-1. Pendant tout le match, le milieu de Peñarol, Manuel Varela, empêcha Carlos Scarone de développer son jeu qui lui répondit par des coups de pieds. Excédé, Carlos Scarone déclara avec mépris à son adversaire : « Jueguen ustedes que son unos manyas » (jouez, vous êtes des mangeurs de merde). Sa prestation fut si décevante que le journal « La Razón » écrivit sur Scarone : « jugó más mal que los demás. Se cayó 22 veces en el partido, cuando podía jugar la pelota. Es malo caerse » (Il a joué moins bien que les autres. Il est tombé 22 fois dans le jeu, alors qu’il pouvait jouer le ballon. C’est mauvais de tomber). A la fin du match, le père de Carlos Scarone, qui assistait au match dans les gradins et avait supporté son club de toujours, Peñarol, célébra la victoire et répondit à son fils « perche no juega ahora usted que no es manya » (et pourquoi vous ne jouez pas maintenant puisque vous n’êtes pas des mange merde »).

Par la suite, ce terme désobligeant fut revendiqué avec fierté par les supporteurs de Peñarol. Il signifie maintenant que la fidélité et l’attachement inconditionnel au Peñarol est plus fort que les aspects économiques. Cette mésaventure ne perturba pas Carlos Scarone qui évolua avec le maillot du Nacional pendant 13 saisons (jusqu’en 1927). Il fut huit fois champion d’Uruguay avec Nacional, marquant 152 buts en 227 matchs disputés. Il fut également champion d’Amérique avec l’équipe uruguayenne en 1917 et 1920.

#408 – Blackburn Rovers FC : the Riversiders

Ceux qui longent la rivière. Fondé le 5 Novembre 1875, comme de nombreux clubs de l’époque, l’équipe vagabondera de terrain en terrain. Le premier terrain de Blackburn était à Oozehead Ground, près de l’école St Silas à Preston New Road en 1876. Oozehead n’évoquait pas le football de haut niveau vu les installations rudimentaires (pas de tribune) et la piètre qualité du terrain (presque au milieu du terrain se trouvait un ancien bassin de drainage d’une ferme, qui avait été recouverte de planches de bois et d’herbes). Sans surprise, leur séjour ici fut de courte durée et les membres trouvèrent un nouveau lieu d’accueil en 1877 : le terrain de cricket de Pleasington. Mais ce dernier était en très grande banlieu de Blackburn. D’où, un an plus tard, ils déménagèrent à Alexandra Meadows, proche du premier terrain de Oozehead. Pour la saison 1881-1882, le club loua un nouveau terrain à Leamington Street, non loin du précédent. Le club investit 500 £ pour fournir des installations aux spectateurs. Mais, en 1890, Blackburn fut obligé de changer une nouvelle fois de terrain car les propriétaires du terrain de Leamington Street augmentèrent le loyer de manière exorbitante.

La direction se pencha sur un lieu, dénommé Ewood situé un peu plus au Sud que leur quartier d’origine. Ewood n’était pas inconnu pour le club car l’équipe y joua 4 fois en 1882. À l’époque, Ewood était un terrain de sport polyvalent qui accueillait du football, de l’athlétisme et des courses de chiens. Ce site avait été construit en 1882 par quatre entrepreneurs locaux. Blackburn loua le terrain pendant dix ans pour commencer, à un loyer annuel de 60 £ pour les cinq premières années et de 70 £ pour le reste. Mais, le coût du déménagement (environ 2 700 £) pesait sur les finances du club, les recettes de match étant peu élevées. En 1893, il fut décidé de racheter le stade d’Ewood pour 2 500 £, chargeant un peu plus le fardeau financier à court terme mais qui devait permettre à long terme d’assurer l’autonomie financière du club. Or, ce stade longe Alum House Brook, un affluent de la rivière Dawen, donnant ainsi l’idée d’un surnom à Blackburn, the Riversiders. Ce surnom était en outre approprié pour la ville car une des hypothèses de l’origine du nom de Blackburn est la rivière Blakewater qui coule au sein de la ville.

#407 – Gazélec FC Ajaccio : le Bistro

Le Gazélec Ajaccio est issu de la fusion de deux club de la ville : le FC Ajaccio (fondé en 1910) et la section football du club omnisports du Gazélec Corse Club (fondée en 1956). Ces deux équipes évoluaient alors au plus haut niveau régional en Division d’Honneur. Même si le club glana quelques titres honorifiques et réalisa des beaux exploits (Champion de France Amateur en 1963, 1965, 1966, 1968, Champion de Corse en 1961, 1965, Coupe de France en 1963, 1967, 1969, un 32ème de finale en Coupe de France en 1962, première fois qu’un club corse atteignait ce niveau de la compétition), la structure demeurait modeste et les moyens limités. Le siège du club fut donc installé au fond d’un bistrot, dénommé « Claridge » (renommé depuis « L’esarc »), sur le Cours Napoléon. Si l’organisation et les structures se sont améliorées depuis (le club est propriétaire de son stade Ange Casanova), le bistro est resté le symbole de ces années amateurs mais belles, sous la direction de l’entraineur Pierre Cahuzac.

#406 – TSV 1860 Munich : die Löwen

Les lions. Les origines du club remontent à la création le 15 Juillet 1848 d’une association de gymnastique dans la Brasserie « Buttleschen Brauerei zum Bayerischen Löwen » (Buttleschen pour le lion bavarois). Ce lion était prémonitoire bien que le nom de la brasserie n’est pas à l’origine du surnom. Les autorités du Royaume de Bavière dissolvaient un an plus tard l’association, comme toutes les autres d’ailleurs, au motif qu’elles étaient les sources des troubles politiques, notamment car elles diffusaient les idées républicaines. La nouvelle tentative en 1860 fut la bonne. Le 17 Juin 1860, le nouveau club sportif de gymnastique fut créé et la section football apparut le 25 Avril 1899. Dans les premières années, le blason du club se résumait à une turnerkreuz, une forme de croix utilisé par le mouvement gymnaste allemand. Rapidement, celle-ci disparut au profit des initiales du club sous différentes écritures. Durant les années 1870, le lion fit son apparition sur les équipements des sportifs. Le 13 mars 1880, le lion fut officiellement admis comme symbole de club. Puis, en 1911, les instances dirigeantes adoptèrent le lion dans le blason officiel du club. Si le lion représentait la persévérance et le courage, il était surtout le symbole héraldique de la Bavière. Les armoiries de la Bavière sont l’héritage de la maison de Wittelsbach, une des plus anciennes et puissantes famille du Saint-Empire romain germanique, qui régna en particulier sur la Bavière (pendant près de huit siècles) et le Palatinat. Le fameux manteau losangé bleu et blanc était les armes de cette famille dès son premier représentant, le Comte Othon Ier de Scheyern. Puis, une des branches de la famille régna en tant que Ducs de Bavière et Comtes palatin du Rhin, réunissant sur le blason le manteau losangé avec le lion du Palatinat du Rhin. Si le blason évolua au fil du temps, des mariages et des différentes familles régnantes, le manteau losangé bleu et blanc ainsi que le lion demeurèrent comme les représentants symboliques de la Bavière. Aujourd’hui, ces deux symboles se retrouvent dans les logos d’entreprises bavaroises : le manteau losangé sur le blason du rival, le Bayern Munich, comme sur l’écusson de la firme automobile, BMW. Le lion pour l’assureur Die Bayerische (sponsor actuel du club) et le brasseur Löwenbräu (ancien sponsor).