#1309 – CF Montreal : Impact

Avant d’intégrer la MLS, le club montréalais navigua pendant 20 ans dans les différentes ligues qui faisaient office de deuxième échelon du football nord-américain. Fondé en 1992 par la famille Saputo, après que son prédécesseur dans les rangs professionnels, le Supra, eut disparu en même temps que la Ligue canadienne de soccer, le club prit dès le départ le nom « Impact » pour que la franchise ait un impact sur la ville et la communauté locale du football. Et il fallait avoir un impact et une conviction pour convertir une population acquise au hockey sur glace. De manière générale, le continent nord-américain avait résisté au sport planétaire même avec la défunte NASL qui avait recruté les plus grandes stars des années 1970 et du début des années 1980. Mais, avec l’engouement de la Coupe du Monde 1994, la MLS semblait implanter définitivement le football en Amérique du Nord. Résultat, l’Impact milita pour rejoindre la grande ligue et en 2012, l’Impact fut le 3ème club canadien de la MLS.

Le 14 Janvier 2021, un séisme frappa les supporteurs de l’Impact. Le propriétaire de la franchise, Joey Saputo, déclara que « It’s hard to let go of things you love. But here’s the reality — to make an impact, we need to retire the Impact » (C’est difficile de laisser tomber des choses qu’on aime. Mais la réalité est la suivante : pour avoir un impact, nous devons mettre l’Impact à la retraite). Kevin Gilmore, le président de l’équipe, renchérit « We’ve gone from having an impact to assuming a responsibility as a professional sports team of representing our city and our people » (Nous sommes passés d’un rôle d’impact à celui d’assumer une responsabilité en tant qu’équipe sportive professionnelle représentant notre ville et notre peuple). Et ainsi « Impact » disparût pour le nom plus neutre (mais plus ancré dans les racines européennes du sport) de « Club de Football ». Ce changement de nom s’accompagna de l’abandon de l’écusson du club, de ses couleurs et de sa devise au profit d’une nouvelle identité.

Le mécontentement des fans, attachés à un nom qui avait près de 30 ans, ne tarda pas à s’exprimer. Une pétition en ligne réunit rapidement 2 000 signataires et une manifestation devant le stade conduit à quelques dégradations. Résultat, en Mai 2022, dans un contexte de baisse des ventes de billets, de mécontentement continu et de pression des fans et des médias, la direction fit un peu marche arrière. Le nouvel écusson se rapprochait de celui de l’Impact d’avant le changement de nom. De même, le maillot revint aux couleurs traditionnelles. Mais, même si à demi-mot, elle reconnaissait que le changement de nom était peut-être une erreur, la direction conserva le « Club de Football ». Joey Saputo concéda toutefois que « Impact » pouvait devenir le surnom du club.

#1308 – SV Werder Brême : Sphinx des Nordens

Le Sphinx du nord. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les alliées occupants l’Allemagne firent dissoudre toutes les associations sportives que le régime Nazi avait toléré après leur nettoyage politique du sport allemand. De même, les fédérations et ligues disparurent. Mais, les allemands ne pouvaient rester sans loisirs sportifs et les clubs comme les ligues se reformèrent avec l’aval des autorités alliées. Ainsi, le Werder fut dissous le 10 novembre 1945 mais grâce à la fusion des clubs TV Vorwärts et Freie Schwimmer 1910, interdits à l’époque nazie, le Werder réapparut en Novembre. La même année, les premières ligues régionales élites, celles du Sud et du Sud-Ouest, furent fondées, et deux ans plus tard, celles du Nord et de l’Ouest suivirent. De 1947 à 1963 (date de création de la Bundesliga), le Werder évolua donc dans la « Fußball-Oberliga Nord » au côté notamment de Hambourg SV, FC St. Pauli et Hanovre 96, avec la possibilité de se qualifier pour le tour final du championnat allemand.

Durant ces 16 années, l’Oberliga Nord fut dominé par Hambourg qui la remporta 15 fois. Le Werder ne parvint jamais à la première place de l’Oberliga mais disputa les 16 saisons et obtint la deuxième place au classement cumulé avec 466 matchs joués pour 246 victoires. Ainsi, le Werder était un des grands animateurs du championnat, terminant vice-champion lors des 5 dernières saisons, de 1959 à 1963. Lors des matches face aux cadors de Hambourg ou St. Pauli, l’équipe de Brême s’imposait souvent. En revanche, face à des équipes plus faibles, elle perdait tout aussi régulièrement. Avec ces performances imprévisibles, l’équipe gagna le surnom de Sphinx des Nordens.

Mais, pourquoi le sphinx ? En évoquant le sphinx, l’image de l’immense statue à la tête d’humain et le corps de lion se dressant devant les grandes pyramides du plateau de Gizeh revient. Cette créature légendaire, qui revêtit différentes formes mi-humaine, mi-animal, parfois ailé, s’imposa dans le monde antique. Le terme « sphinx » viendrait du grec ancien Σφίγξ qui signifie « étrangler », lui-même dérivant du sanskrit स्थग, signifiant « dissimulé ». Ce qui corrobore le sens que les égyptiens donnaient à la créature. Placé devant les temples, les sphinx empêchaient le peuple, les non-initiés, de pénétrer dans les sanctuaires et donc d’accéder aux Dieux. Ils perpétraient l’idée que la connaissance des Dieux était entouré de mystères, réservé à des sachants. Au fil des siècles, le sphinx conserva cette imaginaire de mystère. Et, par ces résultats aléatoires, l’équipe de Brême paraissait bien mystérieuse pour ses supporteurs. Quand, de nos jours, le club retombe dans ses travers, ce surnom, un peu poussiéreux, reprend vie.