#1327 – CS San Lorenzo : el Rayadito

Le rayé. Son écusson comme son maillot laisse peu de place au doute. Ils sont tous deux barrés de verticales rouges et blanches, qui ont donné l’identité et le surnom du club de la 3ème ville du pays. Dans cette dernière, le football s’imposa rapidement et plusieurs clubs virent le jour au début du XXème siècle (Club Juvenil Sudamérica en 1902, FC ​10 de Agosto en 1907, 13 de Junio ​​​​de Reducto le 10 juin 1910 et le Club Cerro Corá en 1916). Mais, l’histoire du CS San Lorenzo débuta plus tardivement. Le 17 avril 1930, le club de Tacuary Sport fut créé au domicile de M. Félix Rolón. Mais, tout ce mouvement sportif fut interrompu par la Guerre du Chaco, qui déstabilisa une nouvelle fois le Paraguay. Lorsque le conflit prit fin, un groupe d’athlètes de San Lorenzo décida de recréer un club sur les cendres du Tacuary Sport, le 16 août 1936, en le nommant Sportivo San Lorenzo.

Si le nouveau club s’inscrivait dans la continuité du Tacuary, les membres choisirent toutefois de nouveaux symboles dont les couleurs du maillot. Mais, deux versions s’affrontent. L’une des histoires raconte que M. Cecilio González proposa le bleu et le rouge, similaires au maillot du Club Cerro Porteño, qui avait été champion du Paraguay l’année précédente. La motion fut acceptée et une personne fut désigné pour se rendre à Asunción et acquérir ces tenues auprès du magasin d’articles de sport, Casa Ferro. Malheureusement, ce dernier ne disposait pas de suffisamment de maillots correspondant à la demande et proposa des chemises à rayures rouges et blanches, en lui indiquant qu’elles étaient en solde. A l’époque les alternatives étant limitées et les voyages difficiles et couteux, le représentant du club acheta ces vêtements et retourna à San Lorenzo. Cette tenue ravit les membres du club car, d’une part, le mariage des deux couleurs la rendait éclatante et originale. D’autre part, le rouge et le blanc étaient les teintes de la bannière de la cité.

L’autre version indique que les couleurs furent choisies pour rendre honneur à celui qui donna son nom à la cité, Saint Laurent. Ce dernier, diacre du pape Sixte II, fut brulé vif à Rome en l’an 258. Il est généralement représenté avec un costume de diacre, composé d’une aube blanche et d’une dalmatique rouge. En outre, le rouge rappelle le sang versé ainsi que la couleur du feu qui a consumé Saint Laurent. Les rayures du maillot représenteraient même le gril de fer rougi au feu sur lequel il brula vif.

A noter qu’une autre résolution du conseil d’administration indiqua que ce maillot devait être accompagné d’un shot bleu. La tenue du club ressemble alors à celle de l’équipe nationale et arbore les 3 couleurs du drapeau. Peut-être une petite piqure nationaliste après la victoire dans la Guerre du Chaco.

#1326 – SA Spinalien : les Boutons d’Or

A Epinal, il semble que les jeux d’enfants aient la côte. Oui, rappelez vous vos jeunes années quand vous preniez dans un champ un bouton d’or (appelé également bassin d’or, pied de poule ou de son petit nom scientifique Ranunculus repens) et le tendiez sous le menton d’un camarade en lui disant « Tu aimes le beurre ? ». La réponse était indéniablement « oui » avec pour explication « scientifique » que le jaune de la fleur se reflétait sur sa peau. Cette fleur a donc donné sur le nuancier la couleur « Bouton d’or », un jaune vivace, tirant légèrement sur l’orangé. Et naturellement, vous comprenez que, les joueurs du club des Vosges portant des tenues intégralement jaune, cette teinte inspira le surnom.

Le football s’installa à Epinal au début du XXème siècle lorsque Louis Lapicque, étudiant en Angleterre, donna le virus au jeunes spinaliens en 1906 en ramenant un ballon. Puis, le Club Sportif Spinalien vit le jour le 20 février 1909. Il changea deux fois de nom (Union sportive spinalienne en 1921 et Athlétic Club Spinalien en 1928). D’autres clubs émergèrent et notamment, dans le quartier de Saint-Michel, où en 1916 le Stade Saint-Michel fut fondé. Mais, en pleine Seconde Guerre mondiale, les deux clubs comprenaient la nécessité d’unir leurs forces pour gagner en puissance et bénéficier de meilleures infrastructures. Les mécènes respectifs des deux clubs, deux industriels du textile, le catholique Max Prud’homme pour Saint-Michel, et le protestant Georges Laederich pour l’AC Spinalien, parvinrent à la fusion le 15 Janvier 1941. Max Prud’homme imposa les couleurs du club de Tennis dont il était également le président, le jaune et le bleu.

#1325 – Alianza Universidad : los Azulgranas

Les bleu et grenat. Dans la ville de Huánuco, le football se divise principalement entre Alianza Universidad et León de Huánuco. Mais, depuis quelques années et son retour dans l’élite péruvienne, Alianza semble dominer le football huanuqueño. De toute évidence, la résurgence de cette équipe traditionnelle s’explique par le soutien de l’Université privée de Huánuco, qui fournit à l’équipe des infrastructures et un soutien logistique (comme des bourses aux joueurs et à l’équipe technique) et dont l’Université veut en faire son représentant. Mais, l’histoire de l’Alianza ne démarra pas avec l’Université.

En 1938, l’équipe dénommée Jorge Chávez, provenant du quartier d’Izcuchaca Dulce, et celle nommée Miguel Grau, du quartier de Tingo, décidèrent de former une équipe commune qui effectua une tournée dans la ville de Huancayo, à 300 km de Huánuco. Mais, cette initiative ne plut guère à la Ligue qui n’avait pas été consultée et donc encore moins donnée son autorisation. Résultat, l’instance sportive décida de punir les deux clubs en déliant leurs joueurs de leurs obligations contractuelles. Ils étaient donc libres de s’engager où ils voulaient. Pour répondre à cette injustice, les deux clubs, qui entretenaient des liens fraternels étant donné que certains joueurs ou familles se partageaient entre les deux associations, choisirent de fusionner pour donner naissance le 1er Janvier 1939 au Club Social Deportivo Alianza Huánuco. Pour le maillot, le choix fut consensuel en combinant le bleu (la teinte de Miguel Grau) et le rouge (la couleur de Jorge Chávez) dans une chemise de type Blackburn. Rapidement, un nouveau maillot rayé verticalement bleu et grenat s’imposa pour devenir l’uniforme désormais traditionnel du club.

#1324 – Cove Rangers FC : the Toonsers

Comme si l’accent écossais n’avait pas suffit à dérouter plus d’un anglophone, plusieurs dialectes locaux viennent encore un peu plus écorcher la langue de Shakespeare. Au Nord-Est du pays, dans la région d’Aberdeen, le Doric se parle et, dans ce dialecte, Toonsers est un mot qui désigne un habitant de la ville (par opposition à Teuchter qui est un gars de la campagne). Et la compréhension de ce surnom peut se rechercher dans différentes sources.

Fondé en 1922, le club a longtemps évolué dans les ligues amateurs locales (jusqu’en 1985) puis pendant 33 ans dans la Highland Football League (5ème niveau nationale, regroupant les régions des Highlands ainsi que le Moray, les régions d’Aberdeen et de Dundee, l’Angus et certaines parties du Nord du Perthshire. Ce championnat accueille donc des équipes de petits villages du Nord de l’Ecosse. Or, Cove Rangers détonnait dans ce paysage car il représentait le petit village de Cove Bay, mais qui fut absorbé par la ville d’Aberdeen en 1975. Et Aberdeen est non seulement la 3ème plus grande ville d’Ecosse, avec ses 220 000 habitants, mais aussi une riche cité, avec son économie florissante (papier, textile, construction navale et maintenant l’extration pétrolière). D’où, Cove Rangers et ses joueurs étaient le symbole de la grande ville contre les petites équipes de la campagne.

Mais, la distinction pourrait aussi apparaît au sein même d’Aberdeen. En effet, Cove Bay est un quartier plutôt cossu d’Aberdeen, accueillant une petite bourgeoisie ayant réussi dans le commerce ou l’industrie. Cela opposait la ville et son équipe aux autres quartiers d’Aberdeen, plutôt représentant de la classe ouvrière qui œuvrait dans les usines textiles ou au port, dans la construction navale. Dire que ces derniers étaient des teuchters les dégradaient par opposition aux habitants de Cove Bay, qui apparaissaient comme de riches citadins.

#1323 – AC Sparta Prague : Železná Sparta

Le Sparta de fer. Fondé en 1893, le club pragois se remit difficilement de la Première Guerre mondiale, comme tous les clubs tchèques qui avaient cédé leurs joueurs aux champs de bataille et qui avaient été désorganisé durant cette période. Mais, de nombreux anciens joueurs du Sparta revinrent vivants du front et rapportèrent leurs talents mais surtout un état d’esprit combatif. L’attaquant Václav Pilat avait servi dans l’armée française en tant que fantassin puis de pilote. Par deux fois, il fut grièvement blessé, au point que les médecins comme sa famille le crurent mort. Finalement, en 1918, à la surprise générale, il rejoua à la tête de l’attaque du Sparta et emmena dans son sillage toute l’équipe, pour en faire une machine phénoménale qui n’eut pas son égale non seulement en Tchéquie mais aussi en Europe. La façon dont elle écrasait ses adversaires lui a valu le surnom de železná mašina (la machine de fer) qui devint železná sparta.

L’épopée débuta en 1919 lorsque l’équipe du Sparta vainquit le Slavia en finale de la Coupe sur le score de 4 buts à 1. Sur sa lancée, le Sparta gagna le championnat de Bohême centrale puis le tournoi final du championnat de Tchécoslovaquie, en marquant 17 buts contre 0 encaissé en 3 matchs. Puis, de 1920 à 1923, le Sparta s’adjugea 4 nouveaux championnats de Bohême centrale, qui, en l’absence d’un tournoi final nationale, était considéré comme la meilleure ligue et son vainqueur, le champion officieux du pays. Une exception en 1922 où un nouveau tournoi national fut organisé et gagné par le Sparta. La domination du club ne s’exprima pas seulement dans ses 5 titres acquis d’affilée. Durant cette période, le Sparta joua 59 matchs et les remporta tous sauf un (en 1919 une défaite contre l’Union Žižkov). Surtout, l’équipe marqua 235 buts pour seulement 46 encaissés. A ce palmarès s’ajouta 4 Coupe de Bohême centrale (1920, 1923, 1924, 1925) ainsi que deux nouveaux championnats de Tchécoslovaquie en 1926 et 1927.

Sur le plan continental, l’absence de Coupe d’Europe n’empêchait pas l’organisation de matchs amicaux ou de trophées qui en faisait office. Pour son premier scalp, le Sparta s’offrit le FC Barcelone, vainqueur du championnat de Catalogne depuis 3 ans (1919 à 1921) et de la Coupe d’Espagne (1920), sur le score de 3 buts à 2, le 25 Décembre 1921 à Barcelone. Les écossais du Celtic Glasgow, référence comme toute équipe britannique et déjà dominante en écosse (16 championnats remportés sur les 32 disputés), passèrent aussi à la trappe le 2 mai 1922. Devant 26 000 pragois, Pilát et Janda marquèrent les deux buts pour la victoire du Sparta, qui réédita l’exploit lors de la revanche. Après les espagnols et les écossais, le Sparta s’attaqua à l’Everest allemand, le FC Nuremberg, surnommé der club (cf. #521) pour sa domination sur le football outre-Rhin. Mais, le 16 août 1922, Nuremberg ne résista pas à la tempête pragoise, balayé 5 buts à 2. Après l’Europe, il ne restait plus que le monde. Motivée par l’excellente performance de l’équipe nationale d’Uruguay lors des JO de 1924, dont la base était composée de joueurs du Nacional Montevideo, cette dernière entama une grande tournée en Europe, qui se déroula de Février à Août 1925, dans 9 pays, 23 villes pour 38 matchs. Le 14 Mai 1925, le Nacional affronta le Sparta Prague devant plus de 30 000 spectateurs, dont certains étaient montés sur les toits des maisons voisines pour apercevoir la rencontre. Et sur les 38 matchs disputés, le Nacional ne perdit que 5 fois, dont la rencontre disputée contre le Sparta (1-0).

L’équipe reposait sur le grand František Peyr, orfèvre de profession, et gardien de but, spécialiste des arrêts de pénalty. La défense pouvait compter sur le prolifique Antonín Hojer (18 ans au Sparta, 483 matchs et 123 buts) et Miroslav Pospíšil. František Kolenatý (au Sparta depuis l’age de 12 ans, 517 matchs et 54 buts à son actif), Antonín Fivébr et Karel Káďa (20 ans au Sparta, 727 matchs et 28 buts) formaient un milieu de terrain exceptionnel, sans équivalent en Europe continentale. Antonín Perner compléta ce trio à gauche, ultérieurement. Dans l’attaque menée par Pilát, Josef Sedláček opérait à droite tandis que Otto Škvajn dit Mazal évoluait à gauche. Cette réputation déteignit sur l’équipe nationale. En 1920, les Jeux olympiques se déroulaient à Anvers et l’équipe nationale tchécoslovaque, composée de 10 joueurs du Sparta, atteint la finale face aux Belges.

Aujourd’hui, le surnom est toujours vivace. En 2013, pour les 190 ans du club, un livre sur l’Histoire du Sparta fut édité avec comme titre ce surnom. Le groupe de rock, Alkehol, enregistra en 1992 l’hymne du club qui s’intitule železná sparta.