#1091 – CA Douglas Haig : los Fogoneros

Les chauffeurs. Prendre pour nom celui d’une personne célèbre demeure une tradition principalement sud-américaine (CA San Lorenzo de Almagro en Argentine, CD Jorge Wilstermann en Bolivie, Colo Colo et CD Arturo Fernández Vial au Chili, General Caballero SC et Club General Díaz au Paraguay, Coronel Bolognesi au Pérou) et les héros militaires constituent la principale source d’inspiration. Ce club argentin ne fait pas exception mais cette fois, la référence est étrangère.

Le monde ferroviaire constitua le terreau favorable à l’émergence de ce club en 1918. A cette époque, la masse des ouvriers constituait un vivier important qui avait besoin de se divertir après de longues semaines de travail. Le sport en faisait parti. Puis, le réseau ferroviaire se développa en Amérique Latine avec le soutien des experts en la matière, les britanniques. Nombre d’ingénieurs et de cheminots anglo-saxons émigrèrent dans les contrées sud-américaines et emmenèrent avec eux leur savoir-faire et leurs nouveaux loisirs tels que le football. Ainsi, 18 Novembre 1918, un groupe de cheminots de la compagnie ferroviaire Ferrocarril Central Argentino décidèrent de fonder le club. La Ferrocarril Central Argentino était une entreprise britannique qui avait obtenu du gouvernement argentin la concession du réseau ferré entre Santa Fé et Cordoba. A Pergamino, la compagnie était dirigée par le britannique Ronald Leslie qui soutint la fondation du club à la condition que ce dernier se nomma en l’honneur du général britannique Douglas Haig qui s’illustra durant la Première Guerre mondial (le club était fondé seulement 1 semaine après l’armistice).

Le fogonero était le chauffeur dans une locomotive à vapeur. Son rôle était d’alimenter en charbon et en eau la chaudière de la locomotive. Le surnom rappelle le lien fort du club avec le monde ferroviaire.

#1069 – CA Chaco For Ever : Albinegro

Les blanc et noir. Le club argentin de la ville de Resistencia, située dans la province du Chaco, fut fondé le 27 juillet 1913, par des jeunes qui décidèrent de quitter le CA Sarmiento et de créer une nouvelle institution sportive. Depuis, les deux clubs sont les grands rivaux de Resistencia. Le choix du nom était important pour les fondateurs car ils voulaient qu’il soit agréable et s’inscrive dans le temps. Une connaissance des fondateurs, d’origine anglaise et surnommée « Mister King », il suggéra « Chaco for Ever » (Chaco – le nom de la province – pour toujours), un cri identitaire et fière. Le choix des couleurs releva finalement du hasard. En effet, un jour, l’équipe fut rejoint par un étudiant en droit nommé Maistegui. Il se présenta sur le terrain avec un maillot rayé noir et blanc qui fit forte impression auprès des autres joueurs. Il s’agissait d’un maillot du club CA Estudiantes de Buenos Aires. Tous les joueurs décidèrent d’opter pour ce maillot qu’ils considéraient élégant mais aussi dont les couleurs rappelaient les richesses de la province : le blanc pour la culture du coton et le noir pour le charbon.

L’agriculture constitue une des principales activités de la province du Chaco. En particulier, la filière du coton. Historiquement (culture développée dès le début du XXème siècle), le Chaco était le principal producteur national de coton depuis les années 1950 même si sa position fut remise en cause ces dernières années avec la réduction de la surface cultivée de coton en raison de la concurrence des céréales et des oléagineux (principalement maïs, tournesol et soja …). Toute la filière (égreneurs, filatures, ateliers de tissage, fabrication de produits textiles) s’est développée dans le Chaco. La culture s’étend dans pratiquement toute la province et les égreneurs représentent 60 % de la capacité argentine. En 2019-2020, la superficie plantée était de 185 000 hectares, avec une production de 338 000 tonnes, principalement tournée vers le marché intérieure, soit respectivement 42% et 32% de la part nationale. En 2021-2022, la production monta à 379 000 tonnes. L’industrie textile représentait 21,3% de l’emploi total de l’industrie manufacturière. En 2019, 36 usines d’égrenage étaient en activité, avec une capacité totale d’égrenage de 890 500 tonnes.

Dans la province du Chaco, la production de charbon ne provient pas de mines car il s’agit de charbon végétal (et non minéral). En effet, la région comprend de vastes forêts de quebracho. Cet arbre, symbole du Chaco, présente un bois extrêmement dur et durable, qui est exploité pour réaliser des meubles, des tanins et du charbon de bois. Dans les années 1950 et 1960, cette production de charbon de bois trouvait un débouché naturel vers la province de Jujuy où étaient situées des usines sidérurgiques en demande de coke. En 1967, le Chaco produisait 11,58% de la production nationale de charbon (environ 50 000 tonnes). Désormais, en 2018, la production de charbon de la province s’élevait à 272 000 tonnes par an et le Chaco représentait 80 % des exportations argentines.

#1000 – Boca Juniors : el Único Grande

L’unique grand. Il y a 3 ans, je démarrais ce site avec Boca Junior et son surnom spécifique de Xeneize. Depuis, de nombreux autres clubs et surnoms l’ont enrichi mais, pour le millième article, je devais revenir à Boca, qui ne manque pas de surnoms, et en présenter un qui soit à la hauteur. Si le club, par ses présidents et ses supporteurs, s’est autoproclamé el Único Grande, il ne s’agit pas d’un vol. Certes, ses détracteurs et rivaux ne manqueront pas d’invalider ce titre non-officiel mais en regardant le palmarès et la popularité de Boca, on ne peut pas dire que ce n’est pas mérité.

De base, Boca fait parti des 5 grands. Dans le football argentin, les clubs de Boca Juniors, Independiente, Racing Club, River Plate et San Lorenzo de Almagro sont considérés comme les cinq principaux clubs du pays. A ce titre, on les nomme los cinco grandes del fútbol argentino (les cinq grands du football argentin). Pour illustrer ce propos, ces 5 clubs ont remporté environ les 2 tiers des championnats d’Argentine et concentre près des 3 quarts des Copa Libertadores gagnés par l’Argentine.

Sur le plan national, Boca n’est pas le champion le plus titré, devancé par son rival de River mais le club affiche tout de même 35 championnats argentins au compteur (le premier gagné en 1919, deuxième détenteur de titres de champion). Surtout, parmi les 5 grandes, et depuis la relégation de River en 2011 et d’Independiente en 2013 en seconde division, il est le seul à ne pas avoir quitté l’élite argentine depuis son accession en 1914. Du côté de la Coupe nationale, Boca remporta la première édition en 1969 et 3 autres suivirent (en 2012, 2015 et 2020), en faisant le recordman de titres. Le club détient aussi le record de SuperCoupe d’Argentine remporté avec deux victoires (2018 et 2022) ainsi que de Coupe de la Ligue avec également deux trophées (2020 et 2022). Sur le plan international, Boca peut se vanter d’avoir conquis 3 Coupes Intercontinental (1977, 2000 et 2003 face respectivement au Borussia Mönchengladbach, au Real Madrid et au Milan AC), 6 Copa Libertadores (1977, 1978, 2000, 2001, 2003 et 2007 auquel s’ajoute 5 finales perdues), 2 Copa Sudamericana (2004 et 2005 – record de la compétition), 4 Recopa Sudamericana (1990, 2005, 2006 et 2008 – record de la compétition), 1 Supercopa Sudamericana (1989), 1 Copa Máster de Supercopa (1992) et 1 Copa de Oro Nicolás Leoz (1993). Boca Juniors est le club sud-américain qui a disputé le plus de finales de compétitions internationales, avec un total de 29 finales. A cela s’ajoute une multitude de tournois régionaux.

Il a été désigné comme le meilleur club d’Amérique du Sud du 21ème siècle par la Fédération internationale de l’histoire et des statistiques du football (IFFHS) en 2011, club le plus mythique de l’histoire de l’Amérique et le huitième plus mythique du monde selon le magazine allemand Kicker en 2014 et club de football le plus emblématique du monde pour le magazine anglais FourFourTwo en 2015. Boca Junior est le club argentin qui compte le plus grand nombre de peñas (clubs de supporters) en Argentine, avec 269 recensés, ainsi que dans divers pays du monde (Brésil, Mexique, États-Unis, Canada, Espagne, Italie, Israël et Japon). Selon de nombreux sondages, le club est le plus populaire d’Argentine, adoré par environ 35%-40% des fans argentins de football, devant River et loin devant les autres.

#984 – Instituto AC Córdoba : la Gloria

La gloire. Le club, qui a vu passé à leurs débuts Mario Kempes et Osvaldo Ardiles ou plus récemment Paulo Dybala, retrouve cette saison l’élite argentine, qu’il ne connut que 17 ans sur ces 104 ans d’existence. Son palmarès demeure limité, avec seulement des titres de seconde division nationale (1999, 2004). Mais, si l’Instituto possède ce surnom, c’est qu’il traversa au moins une période faste.

Fondé le 8 août 1918 par un groupe de cheminots des Ferrocarril Central Córdoba, le club s’affilia immédiatement à la Liga Cordobesa de Fútbol et débuta en seconde division. L’ascension du nouveau club fut rapide puisque en 1919 et en 1920, il remportait déjà l’antichambre de l’élite de Córdoba. Puis, l’équipe de l’Instituto mit la main sur le football local, en remportant le championnat de première division de la Liga Cordobesa de Fútbol, 4 année du suite (de 1925 à 1928). Après le premier titre de 1925, l’équipe le conserva la saison suivante en étant invaincue (11 victoires et 3 nuls). Lors de cette campagne, à l’avant dernière journée, l’Instituto restait à 5 points de Talleres mais comptait 3 matchs de retard. Il remporta ces 4 derniers matchs pour s’adjuger le titre. Le 3ème titre, en 1927, fut le plus difficile à gagner. A l’issue des 16 matchs de championnat, l’équipe comptait 10 victoires, 5 nuls et 1 défaite (avec 39 buts pour et 17 contre) mais se retrouvait pourtant à égalité avec Talleres à la tête du championnat. Le match pour les départager se joua le 6 novembre 1927 et l’Instituto écrasa Talleres 4 buts à 1. Enfin, la campagne de 1928 fut certainement la plus aboutie et facile. Le club termina avec 7 points d’avance sur le second, Talleres, remportant 14 matchs sur 16 (dont 7 d’affilée), soit 29 points sur 32 possible. Cette domination à Córdoba convainquit plusieurs des meilleurs clubs du pays à affronter l’Instituto. En 1927, Newell’s Old Boys réussit, ce qui semblait impossible, à vaincre l’Instituto 6-3 à Córdoba. Mais au match retour, l’Instituto prit sa revanche avec une victoire 4-2 à Rosario. En 1928, à Rosario, le club les battit à nouveau 5 buts à 2.

Ces quatre titres ont conduit Instituto à recevoir le surnom de Los Gloriosos, simplifier plus tard en La Gloria. De cette époque glorieuse, les noms de José María Lizondo, Pedro Saldaño, Manuel Zárate, Atilio Pedrotti, Rosendo Cepeda, Félix Pacheco, Roberto Devoto et Tomás Tapia ressortent.

#974 – CA Chacarita Juniors : Tricolor

Le tricolor. Surnom qui n’a rien d’étonnant étant donné que les joueurs du club arborent un maillot avec 3 couleurs, rouge, noir et blanc. Précisément, il s’agit d’une tunique rayée de ces 3 couleurs. Le dessinateur et écrivain argentin, Roberto Fontanarrosa, passionné de football et supporteur de Rosario Central, exprimait dans son livre référence sur le football argentin « No te vayas campeón » son amour pour le maillot de Chacarita « Qué linda es la camiseta de Chacarita. Es más, si algún día me hacen uno de esos tontos reportajes llamados “ping-pong”, cuando me pregunten por “una camiseta”, diré: “La de Chacarita”. Es la que más me gusta (…) la de Chacarita tiene, si se quiere, un toque de sofisticación, de ingenio. Y yo creo que ese toque reside en esa línea finita, blanca, que se ha colado entre las rojas y las negras, más anchas y prepotentes. Esa línea delgada y blanca aporta un trazo de distinción, brinda luz, relieve, cierto brillo. » (Qu’elle est belle la chemise de Chacarita. D’ailleurs, si un jour ils font un de ces interviews « ping-pong » à la con, quand ils me demanderont « une chemise », je dirai : « Celle de Chacarita ». C’est celle que j’aime le plus (…) Chacarita’s a, si vous voulez, une touche de sophistication, d’ingéniosité. Et je pense que cette touche réside dans cette fine ligne blanche, qui s’est glissée entre les lignes rouge et noire, plus larges et plus imposantes. Cette fine ligne blanche apporte une touche de distinction, de lumière, de relief, un certain éclat.).

La tradition raconte que ces couleurs faisaient référence à leurs origines. Le club fut fondé le jour de la fête du travail, le 1er mai 1906, par une bande d’amis, dans les bureaux de la section 17 du Parti Socialiste local. Dans ce quartier populaire, les membres étaient tous proches des idées socialistes d’où le choix du rouge. Le noir pourrait laisser penser à une autre tendance politique de gauche, l’anarchisme de la puissante Federación Obrera Regional Argentina (Fédération Ouvrière Régionale Argentine – FORA), rattachée à la Première Internationale. Mais, il est plus communément admis que le noir représenterait le cimetière qui rythme la vie du quartier de Chacarita depuis le XIXème siècle et demeure l’un des plus grands du monde (cf. #855). Enfin, le blanc signifierait la pureté qui caractérise la jeunesse, le lien avec le terme « junior » dans le nom du club.

Toutefois, initialement, le club n’évolua pas dans ces couleurs devenues traditionnelles. Tout débuta avec un maillot bleu ciel avec une bande blanche horizontale sur la poitrine. Mais, à partir de 1911, certains des joueurs désertèrent vers d’autres clubs voisins et la section football perdit de sa splendeur. En 1919, une nouvelle direction décida de donner une nouvelle impulsion avec une « refondation » . Cette renaissance serait passée par le nouveau maillot tricolore. Toutefois, aucun document ou témoignage permet de prouver les raisons de ce changement, ni de le dater. D’ailleurs, l’acte de refondation ne mentionnait ni les couleurs ni les maillots.

Avant même le maillot bleu ciel, selon l’un des fondateurs, José Manuel Lema, le premier équipement porté par l’équipe consistait en une veste blanche avec un petit bouclier en guise de poche et était un cadeau de la sœur d’un des membres, Alfredo Palacios. Le 18 avril 1907, le journal « La Argentina » publiait un article qui décrivait le maillot du club comme rouge et blanc accompagné d’un pantalon blanc. Le 2 mai 1908, le journal « El Mundo » rapportait un changement de tenue avec une chemise rayée verte et blanche ainsi qu’un short bleu marine. Le 9 août 1922, le journal « La República » mentionnait un match entre Chacarita Juniors et Vida y Acción où le club évoluait avec une tenue bleue. Finalement, le fameux tricolore serait apparu en 1924. Le 12 avril de cette année, une publication de « Última hora » annonçait que Chacarita changeait ses couleurs. Selon le journal, Chacarita Juniors s’était fourni auprès d’une entreprise européenne après que les dirigeants de l’institution décidèrent ce changement afin de se distinguer des nombreux clubs qui portaient du bleu. Ces 3 couleurs proviendraient d’un maillot porté par l’un des acteurs de la refondation, Nicodemo Perticone. Selon son fils, le tissu de ce maillot aurait été offert à la mère de Nicodemo par une autre immigrée d’origine arabe sur le bateau qui les emmenaient vers l’Argentine. Mais, le tissu étant trop coloré pour la mode de l’époque, la mère de Nicodemo aurait confectionné un maillot pour que son fils pût jouer au football. Nicolás Caputo, un autre pionner de la refondation, fut séduit par les couleurs originales du maillot de son compère et les proposa à la direction.

#970 – CA Palmira : Jarillero

Larrea, une famille de plante originaire du continent américain et dont les espèces d’Amérique du Sud se dénomme localement jarilla. Que vient faire cette plante pour ce club de la ville de Palmira ? Comme souvent, l’industrie ferroviaire constitua un terreau fertil pour l’éclosion et le développement du football. La construction de chemins de fer permit à de nombreux ingénieurs et ouvriers anglais d’exporter le football à travers le monde. Puis, l’entretien et l’exploitation de ces lignes nécessitaient de nombreux cheminots qui devaient bien s’occuper pendant leur temps libre. En 1912, un groupe de cheminots décidèrent de passer du loisir à un club de football qu’ils dénommèrent Tracción Talleres (Ateliers de traction). Le premier terrain de l’équipe se situait naturellement proche d’une voie ferrée. Seulement, lorsque les trains passaient, les rejets de la locomotive à vapeur polluaient l’environnement du terrain et notamment la terre. Résultat, le gazon ne réussissait pas à pousser. Néanmoins, un buisson dur et sec parvenait à résister et avait envahi le terrain et ses alentours, le jarilla.

#946 – CA Aldosivi : el Tiburón

Le requin, qui, dans un style simplifié, trône fièrement sur la gauche du blason. Ce club argentin de Mar el Plata a une connexion particulière avec la France. Le gouvernement argentin lança le 12 décembre 1909 un appel d’offres pour la construction d’un port à Mar del Plata et, le 26 novembre 1910, ce fut la solution des ingénieurs entrepreneurs français Allard, Dolfus, Sillard et Wirriot qui remporta ce concours. Leurs ouvriers décidèrent de créer un club de football pour s’adonner à leur nouveau loisir. Pour le nom de leur association, ils prirent les premières lettres de leur employeur ALlard, DOlfus, SIllard et WIrriot.

Le surnom du club est tiré à la fois de la situation géographique de la ville de Mar el Plata ainsi qu’au tempérament prétendu ou réel de l’équipe. Située sur la côte Atlantique, au bord de la Mer d’Argentine, Mar el Plata est un important port et une station balnéaire renommée. L’objectif initial de ce port était d’exporter la production des riches plaines fertiles de l’intérieur du pays vers les pays consommateurs européens. Aujourd’hui, il est principalement tourné vers les activités de pêche (en 2007, 44 000 tonnes de poissons transitaient dans le port) tandis que le transport de céréales et l’importation de pétrole demeurent des activités secondaires. Le tourisme s’est également développé. Ainsi, le port accueille une réplique de la grotte de Lourdes. Surtout, une réserve d’otaries, située sur une plage de la côte intérieure de la digue sud, abrite une colonie de 800 spécimens mâles. Le conseil municipal déclara l’animal « monument historique » de Mar del Plata. Mais, pour représenter le lien de la ville, de son club de foot avec la mer, l’otarie apparaissait peut-être trop gentil. Ce fut donc un autre animal maritime et endémique qui inspira le surnom, le requin. En effet, en Mer d’Argentine, il existe une trentaines d’espèces de requins, présents à la fois sur les côtes, en pleine mer et dans les profondeurs. Beaucoup d’entre eux sont migrateurs. Les plus communs sont le requin épineux et la roussette, qui peut atteindre un mètre et demi. Les plus grands sont le requin cuivre, requin-taureau ou le requin plat-nez, avec environ 3 mètres de long.

Le surnom apparût en 1975 quand le club remporta 3 titres consécutifs dans la ligue régionale (1973, 1974 et 1975) et joua ces 3 mêmes saisons en première division. Lors de cette dernière saison, il remporta même un match face à Boca Junior, 2 buts à 1. Le surnom devait donc se rapporter au port mais surtout le requin est le roi des mers (comme le lion l’est sur terre). Or, l’équipe semblait dévorer ses adversaires comme le requin.

Aujourd’hui, si le requin apparaît sur l’écusson, le club possède également une réplique de requin de 20 mètres de long qui se ballade sur le terrain à chaque match à domicile. En outre, en 2015, l’équipementier du club sortit un maillot gris, avec pour motif, la peau d’un requin.

#910 – CA Argentino Rosario : los Salaítos

Les petits salés. Honneur au nouveau champion du monde argentin. Son leader technique, Lionel Messi, et son jeune mais fédérateur sélectionneur, Lionel Scaloni, sont parvenus à venir à bout de la France après une finale qui restera dans les annales. Outre le fait de porter le même prénom, les deux ont une autre particularité : ils ont tous deux effectué leur apprentissage dans le club du Newell’s Old Boys. Pour leur rendre hommage, il serait donc logique d’évoque un des surnoms de Newell’s. Mais les deux seuls connus ont déjà été traités (cf. #104 et #340). Je ne pouvais pas en revanche faire un article sur un surnom de son rival de Rosario Central. Comme les deux Lionel sont originaires de la ville de Rosario (où réside le club de Newell’s), je me suis reporté sur le 3ème club de la ville de Rosario, CA Argentino. D’autant plus que son nom met en valeur le pays et son surnom est plutôt original et distinctif. Aucun autre équipe porte un surnom équivalent (bien que finalement, on peut trouver un lien avec celui d’Everton cf. #97). Pour connaître la raison de ce surnom, il faut remonter aux premières années d’existence de ce club centenaire (sa fondation ayant eu lieu le 15 janvier 1912). Autour de l’ancien terrain du club, un marchand ambulant espagnol appelé José Pernía avait l’habitude de vendre des graines de lupins et des biscuits salés. De sa voix grave et très particulière, il criait « A los altramuces ! salaítos los tengo ! » (Lupins ! Petits salés, je les ai – altramuces est l’autre nom hispanique pour lupin). Puis, un après-midi, alors qu’un match décisif se jouait devant une foule compacte, lorsqu’Argentino marqua un but, l’épouse du marchand scanda : « vivan los Salaitos y dulces » (vive les petits salés et les douceurs). C’est ainsi que l’institution fut baptisée. Plutôt ironique sachant que le club naquit dans l’ancien quartier populaire de Refineria (Raffinerie), nommé ainsi car une raffinerie y avait été construite.

#900 – CA River Plate : la Banda, la Banda Roja

La bande, la bande rouge. Possédant l’un des plus beaux palmarès (si ce n’est pas le plus beau) d’Argentine, le CA River Plate est connu dans le monde entier pour sa rivalité avec Boca Junior mais surtout pour son célèbre maillot blanc barré d’une bande diagonale de couleur rouge. Cette particularité que peu de club au monde affiche remonte aux premières années du club. Tout d’abord notons cette anecdote « amusante » . Le club fut créé par la fusion de deux entités rivales, La Rosales, qui s’appelait auparavant Juventud Boquense, et Santa Rosa, toutes deux issues du quartier de La Boca. Ce dernier, proche du centre de Buenos Aires et près du port, vit aussi la naissance de son rival de Boca Junior et où se situe encore son stade de La Bombonera.

River Plate naquit le 25 mai 1901, date hautement symbolique puisqu’elle marquait le 91ème anniversaire de l’indépendance de Buenos Aires et de sa région de la domination espagnole. Pour le choix du nom, les présidents de chacun des deux clubs s’étaient accordés qu’il fallait l’angliciser, afin de se rattacher à la patrie créatrice du football. Livio Ratto, le président de Santa Rosa, proposa Club Atlético Forward, les qualités d’attaque étant celles souvent appréciées. Pedro Martínez, son homologue de La Rosales, préférait Club Atlético River Plate. Ce nom lui vint suite à une visite du port où il vit des caisses qui étaient marqués « River Plate », anglicisation approximative de Río de la Plata, le fleuve et embouchure qui berce la capital argentine et dans lequel son port mouille.

Pour le maillot, la couleur blanche fut choisie, sans autre artifice. Finalement, à la fin 1904, la diagonale rouge fut cousue sur le maillot uni blanc par Catalina Salvarezza, la mère de Luis et Enrique Salvarezza, membre fondateur du CA River Plate. Lors du carnaval, cinq jeunes garçons remarquèrent à l’arrière du char Los habitantes del Infierno (les habitants de l’enfer) un ruban de soie rouge pendre. Ils le subtilisèrent mais avec l’objectif de rajouter un détail de couleur à la chemise de River Plate. Leur proposition fut adoptée. C’est ainsi que ce célèbre maillot est né.

Evidemment au côté de cette version certainement romancée existe des versions plus rationnelles. Les couleurs blanches et rouges rappelleraient celles de la ville italienne de Gênes. En effet, cette dernière hisse pour bannière la croix de Saint Georges (croix rouge sur fond blanc). Or, le quartier de La Boca abritait une grande population d’immigrés italiens qui pour beaucoup venaient de Gênes. D’ailleurs, parmi les fondateurs du club se trouvaient principalement des personnes originaires d’Italie (mais aussi une minorité de créoles et des enfants ou petits-enfants d’immigrés britanniques). Autre explication possible. La bande rouge pourrait figurer le Río de la Plata. En tout cas, ce changement intervint au moment où le club commença à se structurer et les joueurs à pratiquer le football au-delà du loisir. En effet, en 1905, le président du club, Leopoldo Bard, inscrivit River Plate à l’Association argentine de football, avec pour but de participer aux compétitions officielles.

En 1909, River Plate et d’autres clubs firent secession de la fédération pour créer un nouveau championnat. A la même époque, le club changea de maillot suite à l’absorption de Club Nacional de Floresta. « Envahi » par l’arrivée des joueurs de ce club, les membres originaux de River tels que Bernardo Messina et Enrique Zanni eurent peurs de perdre leur identité et résistèrent en concédant quelques changements à leur maillot (mais en conservant le rouge et le blanc). Ainsi, la chemise devint composée de rayures verticales blanches et rouges, encadré de noires. Ceci dura jusqu’en 1932, au même moment où le football argentin passa au professionnalisme. Depuis, la diagonale rouge ne quitta plus le maillot de River Plate. En 1986, le président Hugo Santilli décida d’ajouter un lion sur le maillot du club et de supprimer la bande rouge uniquement dans le dos des joueurs. Cette décision déclencha la fureur des supporteurs. Toutefois, le club entama une période riche en trophée avec une Copa Libertadores (1986), un titre de champion d’Argentine (1986), une Coupe Intercontinentale (1986) et une Copa Interamericana (1987). Mais, en 1989, le nouveau président, Alfredo Davicce revint au maillot classique. Certes, le club remporta plusieurs titres nationaux mais connut une disette internationale pendant 10 ans.

#894 – CA San Lorenzo : los Matadores

Les tueurs. Pour un club né sous le patronage d’un prêtre salaisien, ce surnom n’apparaît pas digne des préceptes du Christ. Mais, évidemment, ici point de mort réel, ni de joueurs sanguinaires. Il met en valeur l’exploit de l’équipe de 1968, qui proposa en outre un style élégant et efficace. Cette année-là (et jusqu’en 1985), le championnat argentin se jouait lors de deux tournois. D’un côté, le championnat dénommé Metropolitano qui représentait véritablement la première division argentine, avec des clubs directement affiliés à la fédération nationale (AFA). De l’autre, un tournoi supplémentaire, appelé le Nacional, auquel participaient également des équipes de certains championnats régionaux. En 1968, le Metropolitano se composait de deux poules de 11 équipes, avec un système de play-off pour déterminer le champion. CA San Lorenzo se présentait pour cette saison avec une équipe de joueurs talentueux (le gardien Carlos « Batman » Buttice, le défenseur uruguayen Sergio Villar recruté pour 10 millions de pesos, les défenseurs Antonio Rosl, Oscar Calics et Rafael Albrecht, les milieux Alberto Rendo, Victorio Cocco et Carlos Toti Veglio), renforcés par des jeunes loups formés au club (Roberto Telch, Pedro González, Rodolfo Fisher, Narciso Doval). L’entraineur brésilien Elba de Padua Lima fut le chef d’orchestre qui réussit à polir ces pièces pour réaliser la future performance parfaite.

Pendant la phase de poule, San Lorenzo réalisa une campagne exceptionnelle. Sur 22 matchs, l’équipe en remporta 14 pour 8 nuls, marqua 45 buts et n’en encaissa que 10 (réussissant à conserver sa cage inviolée pendant 13 matchs). Avec un tel parcours, San Lorenzo termina logiquement à la première place avec 12 points d’avance sur le second, Estudiantes. En demi-finale, le club affronta River et la remporta 3 buts à 1 devant plus de 50 000 spectateurs. La finale se joua contre Estudiantes le 4 août au stade Monumental. Le match fut âpre et démarra de la meilleure des manières pour Estudiantes qui marqua deux minutes après le début de la seconde mi-temps, grâce à un but de Verón. Toti Veglio égalisa pour San Lorenzo une vingtaine de minutes plus tard. Il fallait jouer des prolongations pendant lesquelles Fischer réussit le but de la victoire définitive de San Lorenzo. C’était le 8ème titre de champion d’Argentine du club. Surtout, depuis la création du professionnalisme, en 1931, aucun champion n’avait été couronné en étant invaincu. Cette équipe de San Lorenzo fut donc la première à devenir championne sans défaite, en produisant un jeu élégant, démoralisant les équipes adverses. Un véritable rouleau compresseur qui apparaissait comme un tueur.

Dans la foulée, avec cette équipe, San Lorenzo connut une période dorée en remportant 3 nouveaux championnats. Elle fut même la première à réaliser le doublé MetropolitanoNacional en 1972.