#1144 – Motor Lublin : Motorowcy

Les hommes des moteurs. Je vous accorde que le nom du club est assez explicite pour comprendre le surnom de l’équipe. Tout a commencé en 1950 quand plusieurs ouvriers employés à la construction de l’usine de construction automobile de Lublin, Fabryka Samochodów Ciężarowych (FSC), fondèrent le club en remplacement d’un ancien club dénommé Metalowca Lublin. Au départ, le club prit le nom Stal Lublin (Stal signifiant Acier, en référence au prédécesseur Metalowca, qui était lié à l’usine métallurgique de la ville). En 1952, la société FSC intégra le club dans son giron et le nom du club devint Stal FSC. Enfin, le Stal FSC changea de nom pour Robotniczy Klub Sportowy Motor Lublin en 1957.

Avant la Seconde Guerre mondiale, des investissements furent réalisés dans le quartier Tatary de Lublin pour établir une usine de la société Lilpop, Rau i Loewenstein afin produire des composants pour voitures et camions sous licence de l’américain Chevrolet. Mais, la guerre mit un terme à ce projet. En 1945, la reprise de l’activité fut envisagée par les nouvelles autorités communistes et en 1950, la construction de l’usine fut entreprise, avec l’aide du grand frère soviétique. Le constructeur soviétique GAZ forma d’ailleurs les premiers employés de l’usine. Le 7 novembre 1951, le premier GAZ 51 (dénommé pour la Pologne, Lublin 51) sortit des chaînes de montage. L’installation de l’usine eut un impact fort dans la ville de Lublin, qui était en reconstruction. Le développement des quartiers résidentiels voisins de Tatary et Bronowice étaient directement liés à la croissance de l’usine. De nouvelles voies routières furent également établies pour faciliter la circulation vers le site industriel. En quelques années, ce dernier devint le plus grand établissement de la région de Lublin et, dans les années 1970, le FSC représentait l’un des plus grands centres automobiles de Pologne. L’usine produisait des camions, voitures et véhicules blindés de transport de troupes. A la fin des années 1970, la société employait environ 11 à 12 000 personnes et le pic fut atteint en 1981 avec 14 000 collaborateurs. Le produit star de FSC à Lublin fut la camionette Zuk. En 1972, 110 000 Żuks avaient été produits, dont 40 000 étaient exportés vers 16 pays. L’apogée de la production fut atteint en 1977, avec 250 000 camionettes, dont 85 000 étaient exportées. En 1976, le département des véhicules utilitaires représentait 50 % de la production de l’usine. Avec la fin du communisme, la production déclina et en 1995, le coréen Daewoo racheta l’usine. Il fit faillite en 2001 et le repreneur revendit par morceau l’usine. Aujourd’hui, après plusieurs changements de propriétaire, l’usine ne fabrique plus que les tracteurs Ursus et les utilitaires Honker.

Le bouquetin qui apparaissait sur le logo de FSC se retrouve sur le blason du club.

#837 – BATE Borisov : жоўта-блакітныя

Les jaune et bleu. Ville de près de 145 000 habitants, à 70 km au nord-est de la capitale Minsk, Baryssaw accueille le football depuis le début des années 1900. A l’aube de la Première Guerre Mondiale, la ville comptait déjà quatre clubs de football. Par la suite, le football dans la ville connut des hauts et des bas et dans les années 1950 et 1960, deux clubs la représentaient dans le championnat de la République Soviétique Biélorusse : Торпедо et Строителя. Строителя constituait une équipe solide de la ligue et en 1968, elle était un candidat sérieux au titre. Mais, des problèmes financiers eurent raison de ses ambitions et le club fut dissout avant même la fin du championnat de cette même année. La passion pour le football dans la cité était forte et cette dernière ne pouvait rester sans représentant. Comme les finances avaient été le point faible de Строителя, toute nouvelle organisation qui voulait devenir l’étendard footballistique de la ville devait s’adosser à un mécène. Nikolai Busel, le directeur de l’usine BATE (Барысаўскі завод аўтатрактарнага электраабсталявання – Usine de Borisov d’équipements électriques pour automobiles-tracteurs), qui était un des grands employeurs de la ville, fonda un nouveau club de football au sein de l’entreprise en 1973. Ce dernier prit donc le nom de son sponsor (BATE) et également le logo de l’entreprise qui devint son blason (et donc les couleurs jaune et bleu de la société). Disparu en 1984, BATE réussit tout de même en une décennie à remporter 3 titres de champion de Biélorussie (1974, 1976 et 1979). Sous le patronage de l’entrepreneur Anatoly Kapsky, qui était également le directeur de l’usine BATE, l’équipe renaquit de ses cendres en 1996 pour de nouveau ramener la ville de Baryssaw sur le devant de la scène. Et ce fut fait et de quelle manière ! Depuis 1996, BATE a gagné 15 titres de champions (dont 13 d’affilés entre 2006 et 2018, ce qui signifie avoir conquis 70% des titres de champion depuis l’indépendance de la Biélorussie) et 5 Coupes nationales. Il est aussi le premier club biélorusse à intégrer la phase de groupes de la Ligue des champions (2009) et de la Ligue Europa (2010).

#736 – Stirling Albion FC : the Binos

Cela ne signifie rien puisqu’il ne s’agirait que d’un anagrame d’Albion (toutefois sans le A et le L). Pour nous, français, la perfide albion rappelle la Grande-Bretagne et sa capacité à trahir. Alors pourquoi retrouver cette expression synonyme du Royaume dont les Ecossais souhaitent souvent s’affranchir dans le nom d’un club écossais ? Provenant du grecque Ἀλβίων et latinisée en Albiōn, l’utilisation de ce terme remonterait au VIème siècle avant J.C. et semblait désigner déjà la Grande-Bretagne. Au Ier siècle, le nom faisait référence sans équivoque à l’île. Aujourd’hui, Albion est devenu un nom alternatif, poétique pour la Grande-Bretagne. Mais, il ne désigna pas uniquement l’île dans son ensemble puisque son utilisation se restreint uniquement à l’Ecosse, sous la forme gaélique d’Alba. Au IXème siècle, le royaume des Pictes et des Scots réunis se nomma Royaume d’Alba. Pour en revenir au club de football, remontons à sa fondation en 1945. Alors que l’ancienne équipe de football de la ville, King’s Park, n’avait pas survécu à la Seconde Guerre mondiale, Thomas Fergusson, un entrepreneur local dans le charbon, créa le club de Stirling et acheta le domaine d’Annfield pour y construire un stade pour son club. La légende raconte que le nom Albion fut choisi en raison de la marque des camions utilisés par l’entreprise de Fergusson, des Albion Automotive (constructeur écossais d’automobiles et de véhicules utilitaires). En effet, ces camions servaient de tribune au stade d’Annfield et lors d’un tir, le ballon s’arrêta au pied d’un camion et les supporteurs remarquèrent la marque Albion. Néanmoins, la véritable origine serait plus prosaique et reviendrait à la signification originelle d’Albion, la Grande-Bretagne, qui avait une signification pour le fondateur Fergusson.

#639 – CA Belgrano : el Fifito

Fifito est le surnom en Argentine de la Fiat 600. Cette citadine italienne connut un grand succès populaire en Argentine. Les exportations démarrèrent en 1958 mais la demande fut si forte que la production en Italie ne suffit pas. L’usine Fiat de Córdoba en Argentine commença alors la production de la Fiat 600 pour alimenter les marchés sud-américains. Entre le 7 avril 1960 et le 9 avril 1982, cette usine produisit 316 254 exemplaires. Pourquoi se comparer à cette voiture populaire et économique ? Le 15 Avril 2006, le derby de Córdoba se déroula entre le CA Belgrano et Talleres dans le cadre du tournoi d’ouverture de la seconde division. L’attaquant de Talleres, Sebastián Coria, mit de l’huile sur le feu à l’approche du match en déclarant « Comparar a Talleres con Belgrano es lo mismo que comparar una Ferrari con un Fiat 600 » (Comparer Talleres avec Belgrano, c’est la même chose que comparer une Ferrari avec une Fiat 600). En se moquant ainsi de Belgrano, les hostilités étaient lancées et il fallait s’attendre à un retour de flamme en cas de défaite de Talleres. Le match débuta bien pour ce dernier, son attaquant Gonzalo Bustamante marqua après 20 minutes de jeu. Mais, en seconde période, Belgrano renversa le match avec un but de Campodónico à la 57ème minute et un autre d’Aimar à la 68ème minute. Après le coup de sifflet final, toute l’équipe de Belgrano se dirigea vers la tribune sud et contempla les fans faire la fête. A l’issue de la saison, Belgrano accéda à la première division alors que Talleres resta à l’étage inférieur (alors que la montée lui était promise). Sebastián Coria et ses propos devinrent alors la cible des railleries. Pour fêter ce succès, les joueurs et l’entraîneur de Belgrano demandèrent aux fans de défiler avec une fiat 600 de l’Arc de Córdoba jusqu’à leur stade (Gigante de Alberdi) pour ce qui devint la « Caravana del Fitito » .

#405 – Göztepe SK : Tam 35

Exactement 35. Exactement 35 quoi ? 35 titres. Non. Même si le club fut la première équipe turc à atteindre la demi-finale d’une Coupe d’Europe en 1969, son palmarès stagne avec seulement 2 titres significatifs (2 Coupe de Turquie). 35 ans d’existence ? Non encore. Fondé en 1925, le club n’est pas le plus vieux de la ville d’Izmir où il réside mais il approche petit à petit de son centenaire. Ce surnom fait référence au numéro attribué à Izmir pour les plaques d’immatriculation, le 35. En 1962, de nouvelles plaques furent établies, composées de 2 chiffres, 2 lettres et enfin 2 à 4 chiffres. Les deux premiers chiffres se rattachaient à la province où le véhicule avait été immatriculé. Ainsi, un numéro fut attribué à chacune des 81 provinces. Izmir hérita du 35. Néanmoins, les habitants du quartier de Karşıyak prétendaient que leur quartier était une ville voire un district. Il s’attribuèrent alors un numéro fictif, le 35 et demi, pour leur plaque d’immatriculation. Or, ce quartier est représenté par le club de football de Karşıyaka SK, le rival de Göztepe. Pour agacer leurs supporteurs, ceux de Göztepe revendiquèrent leur appartenance à la ville voire même la confusion totale de leur club avec la ville. Ils étaient donc exactement le 35.

#261 – FC Sochaux : les Lionceaux

La raison de ce surnom est assez logique quand on connaît l’histoire du club franc-comtois. Même si Jean-Claude Plessis, président du club entre 1999 et 2008, déclarait « Peugeot fabrique des voitures, pas des footballeurs. Une victoire en rallye donnera toujours plus de crédibilité à ses voitures » , le club fut longtemps intimement lié au constructeur automobile. Dans une vision paternaliste et publicitaire aussi, assez habituelle à la fin du XIXème siècle, Peugeot supporta la création de plusieurs associations sportives dans ses différentes usines située dans la vallée du Doubs. La principale (Peugeot Cycle) se trouvait dans la banlieue de Sochaux, à Valentigney. Renommé dans toute la Franche-Comté, l’AS Valentigney connut son heure de gloire avec une finale de Coupe de France, perdue en 1926 face à l’Olympique de Marseille.

En 1928, Jean-Pierre Peugeot, président du groupe Peugeot, qui venait de réorganiser toute son outil de production en le centralisant à Sochaux, ne pouvait pas s’appuyer sur la structure amateur de Valentigney pour accueillir son vecteur de publicité de la marque Peugeot. Or, deux salariés de la filiale automobile venaient de créer le FC Sochaux. Jean-Pierre Peugeot décida de soutenir cette structure en en faisant un auxiliaire du constructeur automobile. D’un côté, une équipe professionnelle, comptant de nombreux joueurs étrangers vedettes, pour promouvoir Peugeot (alors que le professionnalisme n’était pas encore accepté par la fédération française). De l’autre, des formations amateures où se soulageaient et se dépensaient les ouvriers de l’usine. D’autres d’entreprises avaient déjà fait de même (Fiat avec Juventus, Casino avec Saint-Etienne, Pommery avec Reims, Philips avec PSV …).

Les symboles du club (blason, couleurs) ne firent pas l’objet de grande discussion. Lié à l’entreprise automobile, le club reprit ses codes. Ainsi, le lion devint l’emblème du club qui figure depuis la création sur son écusson. Mais d’où vient le lion ? Au milieu du XIXème siècle, l’entreprise Peugeot n’était pas encore concentrée dans l’automobile et fabriquait plutôt des outils, en particulier des lames de scie. Les frères Jules et Emile Peugeot demandèrent alors à un orfèvre et graveur de Montbéliard, Justin Blazer, de créer un logo basé sur le lion. Marchant sur ses quatre pattes de profil, ce lion symbolisait « la souplesse de la lame, la résistance des dents, et la rapidité de coupe ». En 1948, le lion prit la posture héraldique, reprenant ainsi alors le design du lion de la Franche-Comté, région où se situe Sochaux, le berceau de Peugeot. Le lion présentait donc l’avantage de rattacher le club à ses origines industrielles comme géographiques. Mais, le 17 juillet 2015, Peugeot se retira du club et Sochaux fut racheté par un groupe chinois. Le lion ne disparaît pas de l’écusson mais il se détache alors du design du groupe automobile.

Mais, pourquoi les lionceaux plutôt que les lions ? Dans les années 1930, le FC Sochaux, avec le soutien financier de Peugeot, recrutait à prix d’or des joueurs reconnus. Mais, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les poches du constructeurs n’étaient plus si pleines et devaient consacrer ses moyens à son développement. Le président du club sochalien, Fortuné Chabrier, eut alors une idée révolutionnaire : repérer des jeunes talents sur tout le territoire français, notamment grace au réseau Peugeot, les rapatrier à Sochaux et les former au football ainsi que leur apprendre un métier au sein des usines de la marque. Concept inédit à l’époque et dénommé « Opération Lionceaux » , il s’agissait du premier centre de formation qui fit tant d’émule un peu partout dans le monde plus tard. Les jeunes joueurs intégrèrent petit à petit l’équipe première et la politique des Lionceaux permit au club de traverser les années 1950 sans quitter l’élite. Le nom de l’opération devint le surnom du club.