#1266 – FC Porto : Azuis e brancos

Les bleu et blanc. Le football portugais est bien fait car il semblerait que les 3 grands du pays, Benfica, FC Porto et Sporting du Portugal, se soient réparties les couleurs de l’arc en ciel pour faciliter la vie de leurs supporteurs. Benfica joue en rouge, le Sporting en vert et blanc et le FC Porto en bleu et blanc. Et à Porto, à chaque exploit du club, les bannières bleus et blanches décorent les maisons au point d’avoir quasiment remplacées les couleurs officielles vertes et blanches de la ville.

Fondé le 28 septembre 1893, les premières années furent marquées par l’absence d’unité. Un dessin montre que la première équipe de football du club omnisport comprenait huit joueurs : 5 portaient des maillots blancs à col rouge (avec un short noir ou blanc), deux joueurs évoluaient avec des maillots à rayures bleues et blanches (avec un short noir ou blanc) et un joueur (certainement le gardien) était équipé d’un maillot rouge. Tous, en revanche, arboraient une casquette rouge. Peut-être était-ce dû à un manque de moyen financier du club ou de ses joueurs. En tout cas, en 1907, un débat sur les couleurs anima la direction. Certains voulaient que le club adopta les couleurs du club anglais d’Arsenal, rouge et blanc, qui connaissait une petite réputation (Arsenal avait accédé à l’élite en 1904 et avait atteint en 1906 et en 1907 la demi-finale de Coupe d’Angleterre). Porto avait longtemps accueilli une colonie britannique influente, qui favorisait les échanges commerciaux (le vin de Porto contre la morue péchée par les navires anglais). Mais, les membres du club refusèrent cette idée pour ne pas apparaître comme un vassal des anglais. Autre proposition : reprendre les couleurs de la ville, vert et blanc. Seulement, son président, José Monteiro da Costa, déclara « As suas cores devem ser as da bandeira da Pátria [azul e branco naquela altura], e não as cores da bandeira da cidade, que tenho esperança que o futuro clube há-de ser grande, não se limitando a defender o bom nome da cidade, mas também o de Portugal, em pugnas desportivas contra os estrangeiros » (Ses couleurs devraient être celles du drapeau national, et non celles du drapeau de la ville, car j’espère que le futur club sera grand, défendant non seulement le nom de la ville, mais aussi celui du Portugal, dans les batailles sportives contre les étrangers). Et donc, le club prit le bleu et blanc, couleurs du drapeau national, qui était celui de la monarchie. Et même si ce régime était de plus en plus contesté et que Monteiro da Costa était un républicain convaincu, il lui paraissait plus important de dépasser ces limites et que le club prône l’unité et soit le représentant de l’identité portugaise.

Si, comme aujourd’hui, les armoiries du Portugal apparaissaient sur le drapeau national, à l’époque, le fond qui l’accompagnait, affichait une partition bleue et blanche (alors qu’aujourd’hui il s’agit du vert et du rouge). Le premier symbole connu du Portugal apparut vers 1095 et était les armoiries d’Henri de Bourgogne, comte du Portugal, ancêtre de la première famille royale portugaise. Henri portait un bouclier avec une simple croix bleue sur fond argenté (blanc) dans la lutte contre les Maures. Puis au XIIème siècle, la croix fut remplacée par cinq écus bleus comprenant chacun 5 points blancs et disposés en forme de croix. Les écus représentaient la victoire d’Afonso Henriques, fils de Henri de Bourgogne et futur premier Roi du Portugal, sur les cinq rois Maures lors de la bataille d’Ourique en 1139. Les 5 points blancs (qui sont 5 pieces, besant) symbolisaient les 5 plaies du Christ. Aujourd’hui, on retrouve encore ce symbole au cœur des armoiries du Portugal.

#983 – FK Dunav Ruse : Драконите

Les dragons. Fondé en 1957 par la fusion de clubs locaux, le FK Dunav représente la ville de Ruse, dont le surnom est Малката Виена (la petite Vienne), en raison de sa présence le long du Danube. D’où, en 1957, quand les 5 clubs, Torpedo, Septemvri, Drapeau Rouge, SKNA et Spartak, décidèrent de s’unir, la nouvelle association prit le nom de Dunav qui signifie Danube. L’origine de son surnom est très incertaine mais il est très utilisé. Tout d’abord, le football s’implanta en Bulgarie au début du XXème siècle lorsqu’un enseignant suisse, Louis Ayer, contribua au développement du sport en général dans le pays. A Ruse, selon certains, la culture « football » avançait rapidement grâce au Danube qui draguait de nombreux marins étrangers qui tâtaient le ballon dans la ville dès la fin du XIXème siècle. Le premier club serait créé en 1901 sous le nom de Torpedo. En 1911, un premier club dénommé Danube apparaît. Ces origines sont plutôt floues mais, des journalistes avancent que ce premier Dunav fut fondé par la fusion de 3 clubs locaux dont le plus célèbre s’appelait Dragon. Néanmoins, ce Dunav disparaît au gré d’absorption par d’autres associations sportives qui se désagrégèrent pendant la Seconde Guerre Mondiale. Donc, il n’y a pas de lien direct avec le club actuel. Donc il est peu certain que cette explication soit juste.

D’autres avancent que le club a souvent battu de grosses cylindrés, à l’image d’un dragon qui dévorait ses adversaires. Néanmoins, cette version semble tiré du phantasme de certains supporteurs. En effet, le palmarès du club est assez famélique avec seulement une finale de Coupe de Bulgarie en 1962 et peu de saison parmi l’élite. En cherchant bien, il m’a été impossible de retrouver de grands matchs ou épisodes où Dunav s’imposa face aux grands clubs bulgares. Le Dunav met d’ailleurs encore maintenant en avant un seul grand match : son premier tour de Coupe de l’UEFA en 1975 quand il battit l’AS Roma à domicile (1 but à 0), sachant que la Roma avait remporté le match aller 2 buts à 0.

Enfin, un journaliste, Georgi Hristov, donna sa vérité dans un article du journal YTPO. Le surnom serait apparu en 1992, quand après la chute du communisme, les clubs bulgares auraient adopté les traditions occidentales en adoptant un surnom (même si certains en possédaient déjà un avant). Le directeur du journal Русенски новини demanda à ses journalistes de chercher un surnom pour le club de Ruse. Georgi Hristov indique qu’il chercha un club qui évoluait dans les mêmes couleurs de Dunav (bleu et blanc) et il pensa à Porto. Or, l’emblème de Porto est le dragon (cf. #6). Selon lui, le surnom eut du mal à s’imposer car si les supporteurs l’aimaient bien, la presse ne voulut pas l’utiliser pour ne pas donner un écho à une innovation d’un concurrent. Finalement, le surnom serait réapparut il y a une dizaine d’année par nostalgie.

#239 – FC Porto : Tripeiros

Les mangeurs de tripes. Il y a les tripes à la mode de Caen, les callos a la madrilena (tripes à la madrilène) et donc la recette de Porto. Les tripes à la mode de Porto sont un plat typique de la gastronomie de la ville, au point d’en être même l’identité et le trait de caractère des Portuans. D’ailleurs, le terme tripeiros désigne les habitants de la ville, plus que simplement les joueurs de l’équipe de football. La recette contient des tripes, de l’oreille et de la queue de porc ou des lardons, du chorizo, des tomates et des haricots blancs. Remontant 1415, elle est donc étroitement liée à l’histoire de la ville du Porto et de ses habitants.

Donc en 1385, le Portugal vit monter sur le trône une nouvelle dynastie avec le couronnement de de Jean Ier. Mais, le royaume s’enlisait dans les crises. Tout d’abord, la peste noire qui engendra une profonde crise démographique et économique. Puis, son indépendance avait été menacée entre 1383 et 1385. Le prédécesseur de Jean Ier mourut sans descendant mâle et la Castille voisine espérait alors récupérer le trône, de par ses alliances maritales avec sa fille. En résistance, les Cortes portugais élurent sur le trône Jean Ier et s’ensuivit alors une guerre avec la Castille, que Jean Ier, avec l’aide des Anglais, remporta. Dans cet Etat instable politiquement et pauvre économiquement, Jean Ier se devait pour légitimer son pouvoir de donner une perspective. Il confia alors à son fils, Henri le Navigateur, de conquérir de nouvelles terres et donc de nouvelles richesses.

Tout débuta avec la conquête de la ville de la Ceuta, sur la côte marocaine, en 1415. La Ceuta était à la fois une place stratégique pour le contrôle de la navigation sur la côte africaine mais également un symbole politique, puisqu’il fallait reprendre la ville à la dynastie mérinide, les maures qui avaient occupé le Portugal pendant des siècles. Cette expédition fut un succès et marqua la renaissance du pays. Et la ville portuaire de Porto joua un rôle important dans cette conquête en tant que centre logistique. La flotte royale venait s’approvisionner dans la ville, qui lui donna un important stock de nourriture, en particulier de viande. Cette fourniture d’aliments assécha la ville en vivre. Après le départ de la flotte, les habitants durent se contenter des provisions restantes qui étaient principalement des abats, dont les tripes. Les abats étaient difficiles à emporter et conserver lors des expéditions. Depuis cette date, les tripes sont devenues un pilier de la gastronomie de Porto.

#6 – FC Porto : Dragões

Le dragon, animal mythique, liée à la terre et au feu, symbole de la puissance des forces naturelles, devient naturellement un emblème pour de nombreux clubs. C’est le cas du FC Porto qui l’affiche fièrement sur son écusson comme dans le nom de son stade (Estádio do Dragão) et de son complexe sportif adjacent (Dragão Arena). Son principal groupe de supporteurs s’appelle depuis sa création en 1986 Super Dragões (les Super Dragons), qui était une émanation d’un autre groupe dénommé Dragões Azuis. Son programme de formation des jeunes talents se nomme Dragon Force et son magazine, Dragões. Evidemment, ses mascottes sont un couple de dragons nommé Draco et Viena. Enfin, l’association récompense ses meilleurs employés et sportifs d’un Dragãos de Ouro (Dragon d’or). L’animal fantastique est si imbriqué dans la vie du club que l’expression Chama do Dragão (le feu du dragon) est souvent utilisé pour parler du club.

Ce dragon est apparu sur l’écusson du club en 1922 sur proposition du joueur Augusto Baptista Ferreira. Fondé 29 ans plus tôt, FC Porto adoptait alors son emblème actuel, qui est l’imbrication des armoiries de la ville (un dragon surmontant une couronne ducale) à l’emblème original du club (un ballon de football bleu antique avec les lettres FCP en blanc). Par une ordonnance du 25 avril 1940, la dictature de Antonio de Oliveira Salazar imposa de nouvelles normes héraldiques avec la volonté d’effacer tous les symboles libéraux et monarchiques des armoiries des municipalités et des paroisses. Ainsi, la couronne ducale et le dragon disparurent des armoiries de la cité de Porto et furent remplacés par une couronne surmontée de cinq châteaux. Dans une sorte de résistance, certaines institutions de Porto (l’orchestre municipale, les pompiers de la ville, la ligue de football, la chambre de commerce et d’industrie de Porto) conservèrent le dragon. Le FC Porto suivit également cette mouvance et n’abandonna pas le dragon (et la couronne ducale).

La présence du dragon sur les armes de la ville fut concédée par la reine Marie II, en reconnaissance de la résistance héroïque de la ville. Revenons aux origines. En 1828, le Roi Michel Ier monta sur le trône et tenta de restaurer un pouvoir absolue, au grand dam de la population. Son frère, Pierre Ier, alors Empereur du Brésil et libéral, rentra au Portugal et recruta une armée aux Açores. Les deux frères aux conceptions politiques contraires, s’affrontèrent à Porto. Pierre Ier et ses 7 500 hommes occupaient Porto tandis que les 40 000 soldats de Michel Ier encerclèrent la cité. Pendant un an, de juillet 1832 à août 1833, Porto fit face à un siège terrible (bombardement quotidien, épidémies de cholera et typhus, manque de nourriture). Mais, les forces de Pierre Ier n’abdiquèrent pas et les habitants de Porto apportèrent leur soutien à ces soldats et demeurèrent stoïques. A la fin du conflit en 1834 remporté par Pierre Ier, ce dernier décida de récompenser la ville et ses habitants pour leur héroïsme et leur soutien inépuisable. Il promit d’offrir son cœur à la ville et décerna la plus haute décoration, Ordem Militar da Torre e Espada, do Valor, Lealdade e Mérito (Ordre Militaire de la Tour et de l’Epée, de la Valeur, de la Loyauté et du Mérite) aux habitants. Il ordonna également la construction d’une bibliothèque (Biblioteca Pública Municipal do Porto), d’un musée (l’actuel Museu Nacional Soares dos Rei) et un jardin (Jardim de São Lázaro). Il attribua à la ville le titre – unique parmi les autres villes du Portugal – d’Invicta Cidade do Porto (« la ville invaincue de Porto »), qui est la devise du club également. Enfin, il décréta que que le second fils du roi du Portugal portera le titre de duc de Porto, avec pour armes « Dessa coroa sobressai um dragão negro das antigas armas dos senhores reis destes reinos » (De cette couronne, un dragon noir émerge des armes séculaires des seigneurs et rois de ces royaumes). Sa fille, la reine Marie II, exécuta ses volontés, et le 14 janvier 1837, accorda à la ville un nouveau blason (qui comprenait la couronne ducale, et donc la figure du dragon). L’animal mythologique représentait le caractère invincible, résistant et indomptable de la ville de Porto. Par ailleurs, il était aussi un symbole de la Deuxième maison de Bragance, dont étaient issus Pierre Ier et Marie II.