#1328 – FK Železiarne Podbrezová : Železiari

Les forgerons, les ferronniers, les hommes du fer. Avec ses 3 500 âmes, le petit village de Podbrezová, qui se compose en réalité de 6 hameaux réunis au XIXème siècle, compte un club de football au sein de l’élite slovaque depuis le début des années 2010. Et le développement de la ville comme celui de son équipe sportive ont été modelés par l’usine métallurgique, Železiarne Podbrezová.

Au bord de la rivière Hron, qui coule à Podbrezová, les ressources de minerais de cuivre et de fer furent exploitées dès l’Antiquité, en raison de leur facilité d’extraction (en surface). A partir du XVème siècle, la région devint un des principaux centres d’extraction de minerais du pays. Naturellement, une industrie s’implanta près des mines, notamment des usines sidérurgiques à la fin du XVIIème siècle (les premiers hauts-fourneaux furent construits en 1692 à Eubietova et en 1710 à Hnilec). Puis, au début du XVIIIème siècle, « Hrončiansky železářský », le plus important centre de production de fer de toute la Hongrie, vit le jour dans la ville voisine de Hronec. Enfin, en 1840, débutèrent les travaux d’un nouveau complexe industriel à Podbrezová qui allait devenir l’un des plus grands du royaume de Hongrie. La nouvelle usine qui incluait des laminoirs, se concentra sur la construction de rails pour l’Empire Austro-Hongrois (2 374 tonnes de rails produites en 1855). À la fin du XIXème siècle, les usines sidérurgiques de Podbrezová comptaient parmi les plus prospères de Hongrie et la production s’était diversifiée vers les armatures en acier pour la construction, la tôle, les tuyaux et la vaisselle émaillée qu’elle exportait dans tout le royaume et les pays voisins. Dans les années 1970, l’ensemble de l’administration des usines sidérurgiques de la Slovaquie (dont celles de Hronec) fut soumis à l’usine de Podbrezová. La nouvelle entité fut privatisée au début des années 1990 pour devenir Železiarne Podbrezová. Spécialisée dans la fabrication de tube en acier sans soudure, sa production annuelle s’élève aujourd’hui à 160 000 tonnes, ce qui en fait l’un des principaux fabricants de tubes en acier en Europe et l’un des plus gros employeurs de Slovaquie centrale, avec quelque 3 200 salariés. L’entreprise forme ses employés dans ses propres lycées (1 professionnel et 1 généraliste) et a toujours porté une attention particulière aux activités sociales, culturelles (l’entreprise a financé la construction de l’église catholique romaine du village en 1892) et sportives de ses employés.

Donc, naturellement, la vie du club a été intimement liée à l’usine sidérurgique. Dès les années 1940, grâce au soutien matériel et financier de l’entreprise, le club progressa dans les ligues slovaques. Dans les années 1950, la direction de l’usine sidérurgique décida la construction d’un nouveau stade de football (ainsi qu’une piscine d’été) qu’elle mit à disposition du club. En 2006, la société favorisa le rapprochement des clubs de Podbrezová et de Brezno pour former le ŽP Sport Football Club, qui changea de nom pour l’actuel en 2017. La société métallurgique était jusqu’en 2021 l’unique actionnaire du club et depuis possède encore 35% du capital.

#1323 – AC Sparta Prague : Železná Sparta

Le Sparta de fer. Fondé en 1893, le club pragois se remit difficilement de la Première Guerre mondiale, comme tous les clubs tchèques qui avaient cédé leurs joueurs aux champs de bataille et qui avaient été désorganisé durant cette période. Mais, de nombreux anciens joueurs du Sparta revinrent vivants du front et rapportèrent leurs talents mais surtout un état d’esprit combatif. L’attaquant Václav Pilat avait servi dans l’armée française en tant que fantassin puis de pilote. Par deux fois, il fut grièvement blessé, au point que les médecins comme sa famille le crurent mort. Finalement, en 1918, à la surprise générale, il rejoua à la tête de l’attaque du Sparta et emmena dans son sillage toute l’équipe, pour en faire une machine phénoménale qui n’eut pas son égale non seulement en Tchéquie mais aussi en Europe. La façon dont elle écrasait ses adversaires lui a valu le surnom de železná mašina (la machine de fer) qui devint železná sparta.

L’épopée débuta en 1919 lorsque l’équipe du Sparta vainquit le Slavia en finale de la Coupe sur le score de 4 buts à 1. Sur sa lancée, le Sparta gagna le championnat de Bohême centrale puis le tournoi final du championnat de Tchécoslovaquie, en marquant 17 buts contre 0 encaissé en 3 matchs. Puis, de 1920 à 1923, le Sparta s’adjugea 4 nouveaux championnats de Bohême centrale, qui, en l’absence d’un tournoi final nationale, était considéré comme la meilleure ligue et son vainqueur, le champion officieux du pays. Une exception en 1922 où un nouveau tournoi national fut organisé et gagné par le Sparta. La domination du club ne s’exprima pas seulement dans ses 5 titres acquis d’affilée. Durant cette période, le Sparta joua 59 matchs et les remporta tous sauf un (en 1919 une défaite contre l’Union Žižkov). Surtout, l’équipe marqua 235 buts pour seulement 46 encaissés. A ce palmarès s’ajouta 4 Coupe de Bohême centrale (1920, 1923, 1924, 1925) ainsi que deux nouveaux championnats de Tchécoslovaquie en 1926 et 1927.

Sur le plan continental, l’absence de Coupe d’Europe n’empêchait pas l’organisation de matchs amicaux ou de trophées qui en faisait office. Pour son premier scalp, le Sparta s’offrit le FC Barcelone, vainqueur du championnat de Catalogne depuis 3 ans (1919 à 1921) et de la Coupe d’Espagne (1920), sur le score de 3 buts à 2, le 25 Décembre 1921 à Barcelone. Les écossais du Celtic Glasgow, référence comme toute équipe britannique et déjà dominante en écosse (16 championnats remportés sur les 32 disputés), passèrent aussi à la trappe le 2 mai 1922. Devant 26 000 pragois, Pilát et Janda marquèrent les deux buts pour la victoire du Sparta, qui réédita l’exploit lors de la revanche. Après les espagnols et les écossais, le Sparta s’attaqua à l’Everest allemand, le FC Nuremberg, surnommé der club (cf. #521) pour sa domination sur le football outre-Rhin. Mais, le 16 août 1922, Nuremberg ne résista pas à la tempête pragoise, balayé 5 buts à 2. Après l’Europe, il ne restait plus que le monde. Motivée par l’excellente performance de l’équipe nationale d’Uruguay lors des JO de 1924, dont la base était composée de joueurs du Nacional Montevideo, cette dernière entama une grande tournée en Europe, qui se déroula de Février à Août 1925, dans 9 pays, 23 villes pour 38 matchs. Le 14 Mai 1925, le Nacional affronta le Sparta Prague devant plus de 30 000 spectateurs, dont certains étaient montés sur les toits des maisons voisines pour apercevoir la rencontre. Et sur les 38 matchs disputés, le Nacional ne perdit que 5 fois, dont la rencontre disputée contre le Sparta (1-0).

L’équipe reposait sur le grand František Peyr, orfèvre de profession, et gardien de but, spécialiste des arrêts de pénalty. La défense pouvait compter sur le prolifique Antonín Hojer (18 ans au Sparta, 483 matchs et 123 buts) et Miroslav Pospíšil. František Kolenatý (au Sparta depuis l’age de 12 ans, 517 matchs et 54 buts à son actif), Antonín Fivébr et Karel Káďa (20 ans au Sparta, 727 matchs et 28 buts) formaient un milieu de terrain exceptionnel, sans équivalent en Europe continentale. Antonín Perner compléta ce trio à gauche, ultérieurement. Dans l’attaque menée par Pilát, Josef Sedláček opérait à droite tandis que Otto Škvajn dit Mazal évoluait à gauche. Cette réputation déteignit sur l’équipe nationale. En 1920, les Jeux olympiques se déroulaient à Anvers et l’équipe nationale tchécoslovaque, composée de 10 joueurs du Sparta, atteint la finale face aux Belges.

Aujourd’hui, le surnom est toujours vivace. En 2013, pour les 190 ans du club, un livre sur l’Histoire du Sparta fut édité avec comme titre ce surnom. Le groupe de rock, Alkehol, enregistra en 1992 l’hymne du club qui s’intitule železná sparta.

#1295 – Vasas SC : Vasas

Ceux du fer, les métalleux, les ferreux. Ne cherchez pas une ville dénommée Vasas sur une carte de la Hongrie. Au mieux, dans un livre d’histoire, vous pourriez lire quelques lignes sur un ancien village annexé par Pécs en 1954. Mais, tout ceci n’a pas de lien avec le club éponyme … du moins pas directement. Selon une tradition populaire de 1865, une petite quantité de minerai de fer fut trouvée pour la première fois dans les montagnes près du village, ce qui donna le nom « vasas » qui dérive de vas (le fer en hongrois).

Et le fer est bien la base du club. Le 16 mars 1911, à l’initiative de la direction locale de Budapest et des sportifs du syndicat des ouvriers du fer et de la métallurgie, un club omnisports fut fondé sous le nom Vas-és Fémmunkások Sport Clubja (Club sportif des ouvriers du fer et de la métallurgie). Le syndicat s’efforçait d’offrir aux travailleurs des activités sportives pour occuper dignement leur temps libre. Ce syndicat, qui se nomme Vasas et qui existe encore aujourd’hui, est l’un des plus anciens et les plus importants de Hongrie, regroupant principalement les travailleurs des industries lourdes et de l’automobile.

En 1877, dans un environnement industriel bouillonnant, les ouvriers du fer et du minerai tentèrent de former une association professionnelle pour défendre leur intérêt. Ce fut le point de départ de l’organisation syndicale. En 1884, le syndicat organisait la grève des forgerons. En 1902, il comptait 600 adhérents dans les différents métiers du fer comme des orfèvres, des ferblantiers, des forgerons, des chaudronniers, des serruriers, des installateurs de gaz d’éclairage et de conduites d’eau, des tailleurs de limes et des tourneurs de fer. Le syndicat se structura en 1905 et prit une dimension nationale. À l’été 1905, 25 000 ouvriers métallurgistes de Budapest menèrent une grève de 5 semaines. À la suite d’une manifestation de grande ampleur en 1908, le ministre de l’Intérieur suspendit le syndicat, mais la solidarité et le courage des ouvriers empêchèrent la dissolution de l’organisation.

Le club de football prit les couleurs du syndicat (rouge et bleu) et changea en 1925 son nom en Vasas SC. Il demeure encore aujourd’hui lié, au moins par l’esprit, avec le syndicat.

#1159 – Degerfors IF : Bruket

Aujourd’hui, Bruket est le nom d’un quartier à l’Est de la ville de Degerfors, qui en fur le cœur économique, car Bruket désigne aussi une usine sidérurgique. Le Degerfors IF a été fondée le 13 Janvier 1907, principalement avec l’appuie des employés et ouvriers de l’usine sidérurgique de la ville. Parmi les initiateurs de ce projet figuraient l’étudiant de l’époque, puis le directeur de l’usine H. v. Kantzow ainsi que l’ingénieur BD Enlund. Dans les premières années, l’athlétisme et le ski de fond dominaient les activités sportives mais la pratique du football y était développée.

Sur la rive orientale de la rivière Letälven, deux forges furent construites par l’entrepreneur Georg Camitz. Originaire de la Silésie autrichienne, Georg Camitz fut recruté en 1648 pour gérer des usines de fonte de Björkborn et Bofors. Puis, il quitta ses fonctions en 1659 pour lancer sa propre activité à Degerfors. Il reçut le privilège de construire une forge à Degerforsen (Nedre Degerfors), près de l’embouchure du Letälven dans le lac Möckeln. Puis, 6 ans plus tard, il reçut le privilège pour une autre forge au sud, appelée Övre Degerfors. Elles constituèrent deux usines sidérurgiques distinctes, exploitées séparément. La famille Camitz posséda Övre Degerfors jusqu’en 1809 et Nedre Degerfors jusqu’en 1855. Un haut fourneau fut mis en service en 1862 puis plusieurs laminoirs furent ajoutés par la suite. Les usines passèrent dans de nombreuses mains au fil des années pour être détenues par le groupe finlandais Outokumpu Oyj aujourd’hui. En Août 2023, les italiens de Cogne Acciai Speciali reprirent une partie des activités. Autour de ces deux usines, toute une ville se construisit au XIXème siècle avec des logements ouvriers, des écoles … qui donna la base de la nouvelle municipalité de Degerfors.

#940 – RFC Seraing : les Métallos

S’il y a deux pays européens dont le football national a souffert ces 20 dernières années, ce sont la Roumanie et la Belgique. Nombre de clubs, notamment des historiques, s’évanouirent dans leurs gouffres financiers. Mais, leurs prestiges et une vie locale orpheline conduisirent à tenter de les ressusciter au travers de fusion, de rachat de licence et d’acquisition du nom/marque qui donna lieu à de nombreux imbroglios juridiques et à l’existence parallèle de club réclamant le même héritage. La ville de Seraing en est un exemple en Belgique. Le club historique naquit entre 1900 et 1904 et obtint le matricule 17 lorsque la fédération tint son registre officielle. Après une première faillite en 1984, le club fut abandonné par son président en 1996 qui le « céda » à son voisin du Standard de Liège. Un autre club, Royale Union Liégeoise (matricule 23), profita du vide pour s’installer à Seraing et endosser l’héritage du précédent club, avec la bénédiction de la municipalité. Toutefois, en 2014, le club de Seraing se fit une nouvelle fois absorbé par une union de 3 autres clubs de la région, entérinant une nouvelle fois la disparition du football à Seraing. Dans la ville de Boussu, le club local était en difficulté financière et se trouva en 2014 racheté par le propriétaire du FC Metz. Voyant le club de Seraing disparaître, le club de Boussu (matricule 167) s’exila alors à Seraing pour occuper la place vacante et bénéficier de l’aura des précédents clubs. Après quelques changements de nom et quelques débats avec la fédération, il récupéra le nom du RFC Seraing. Mais, même s’il s’appropria de nombreux attributs (nom, couleurs, surnom), les supporteurs historiques ne lui reconnaissent pas l’héritage de l’ancien RFC. Toujours club satellite du FC Metz, le RFC Seraing a retrouvé cette année le chemin de l’élite belge et peut-être retrouvé tous ses supporteurs.

Située sur la Meuse, en amont de Liège, la cité Seraing est synonyme en Belgique de fumée d’usines, de mines et de classes ouvrières. Au début du XIXème siècle, Seraing était une modeste bourgade de moins de deux mille habitants, principalement tournée vers l’Agriculture mais également l’extraction de houille. Or, cette ressource abondante, qui donnait l’énergie ainsi qu’un minerai appelé coke, essentielle dans la métallurgie, la présence de minerai de fer, couplée avec une voie de circulation, la Meuse, et une population connaissant le travail de la mine et de la métallurgie depuis des siècles, transformèrent le paysage et l’économie local. En 1809, la Fabrique de Fer d’Ougrée, une métallurgie, ouvrit et plusieurs mines, allant au delà de l’extraction en surface, débutèrent leur exploitation. Mais, ce fut surtout l’installation, en 1817, de deux frères britanniques, John et Charles-James Cockerill, qui révolutionna Seraing et ses alentours. Ils commencèrent par ouvrir, dans le le château de Seraing, l’ancienne résidence d’été des princes-évêques de Liège, un atelier où ils construisaient des machines à vapeur. Ayant un schéma industriel intégré, ils fabriquaient également leur propre fonte et fer. Puis, un haut-fourneau à coke, le premier du genre en Belgique, fut mis à feu en 1826. Cockerill y ajouta des fonderies, forges, laminoirs et ateliers de construction mécanique ainsi qu’une filature. Dans son sillon, d’autres s’établirent comme le Charbonnage de Marihaye (à Ougrée, Espérance et Six-Bonniers), des entreprises métallurgiques (l’Espérance, la Fonderie Quiriny-Goreux et la Fabrique de Fer d’Ougrée), ainsi que la cristallerie du Val-Saint-Lambert. La région croqua alors à pleine dent dans la Révolution Industrielle, faisant de la Belgique la deuxième puissance économique du monde, derrière le Royaume-Uni au milieu du XIXème siècle. Jusqu’à l’aube de la Première Guerre Mondiale, la région demeura un des cœurs industriels de l’Europe, grand producteur de fer, d’acier et de verre. Les 21 hauts-fourneaux produisaient près de 40 % de la production belge d’acier en 1914. Après avoir été démantelée durant le conflit par l’occupant allemand, l’outil industriel belge fut reconstruit et jusqu’à la crise énergétique des années 1970, développa encore sa production. Malgré un regain dans les années 1980, les mines et les usines métallurgiques licencièrent puis fermèrent face à la concurrence asiatique. Aujourd’hui, la production d’houille, de fer et d’acier est nulle. Néanmoins, pendant plus d’un siècle, la région viva au rythme de cette activité. Au fil des installations et du développement des usines, la ville de Seraing attira une population ouvrière nombreuse. En 1846, Seraing comptait 10 000 habitants, en 1868, le double et en 1883, le triple. En 1825, 800 ouvriers travaillaient pour Cockerill et dès l’année suivante son nombre d’employés doublait. En 1840, il était estimé que sept ou huit mille personnes dépendaient de ces ateliers. Puis, de 1842 à 1913, le nombre d’ouvriers travaillant pour Cockerill était quasiment multiplié par 5, pour atteindre 10 427 ouvriers. De 1850 à 1899, le nombre de mineurs passait de 3 000 à près de 5 000. Puis, l’immigration italienne, portugaise et polonaise fournit les bras manquant au développement de l’industrie. A la veille de la crise énergétique de 1973, le nombre de travailleurs étaient de 20 000. Autant dire que nombre de familles dépendaient des activités minières et métallurgiques. Naturellement, les luttes ouvrières furent aussi fortes dans le bassin. Enfin, au bord de la Meuse, les usines et les maisons des ouvriers s’installèrent côte à côte et encore aujourd’hui, les deux sont inextricables. Seraing était donc connu comme la ville du fer et ses habitants y étaient viscéralement attachés.

#882 – Tersana SC : الشواكيش

C’est un terme argotique égyptien qui signifie les marteaux. Fondé en 1921 et basé à Gizeh (dans le quartier de Mit Okba) près du Caire, le club naquit sous le régime du protectorat britannique. Or, l’occupation britannique de l’Égypte depuis 1882 importa le football dans la vallée du Nil, via les expatriés anglais travaillant pour la Compagnie du canal de Suez. La création du club fut donc l’oeuvre d’un anglais, le Major E.W. Slaughter. Initialement basé à Boulaq, un des principaux ports de la capitale égyptienne, le club était destiné au personnel de l’administration maritime et des chantiers navals de ce district. Ainsi, l’ensemble des symboles du club se réfèrent au port et à ses activités. Le nom du club « tersana » est l’équivalent en arabe d’arsenal (parmi les constructeurs navals, certains devaient certainement bâtir des navires militaires). Les couleurs bleu et blanc de son maillot rappellent directement la mer. Enfin, son écusson affiche une ancre, symbole de l’univers marin.

Pour autant, le surnom du club, الشواكيش, ne le relie pas directement au monde maritime. Il existe différentes explications pour ce surnom. La première raconte que ce terme décrivait la rudesse et la force de l’équipe, qui frappait ses adversaires comme un marteau. La deuxième histoire, qui est la plus connue de toute, indique qu’à une époque, Tersana avait recruté dans ses rangs un certain nombre d’anciens fedayins. Dans les années 1940, des nationalistes égyptiens appelés fedayins formaient des petits commandos dont l’objectif étaient d’harceler les troupes britanniques qui défendaient le canal de Suez. Le marteau pouvait donc symboliser leurs actions coup de poing et leurs duretés. Enfin, la dernière version se rapproche des origines du surnom des anglais de West Ham United (cf article #313). Certains des membres initiaux travaillaient sur les chantiers navals de Boulaq. C’était pour la plupart des ouvriers qui travaillaient l’acier pour construire les navires. Le marteau était un symbole qui les représentait bien. Il semble en tout cas que le surnom fut popularisé par les célèbres commentaires sportifs, Abdul Majid Noman, écrivant pour le journal « Al Goumhoria » , et Najib Almstkawi, du quotidien national « Al Ahram » . Ayant attribué des surnoms à la plupart des clubs égyptiens, ils auraient affublé « hammers » à Tersana à la suite d’une intervention rugueuse du défenseur Fouad Gouda, qui provoqua la blessure au pied du joueur adverse, Saleh Selim.

#805 – RKS Raków Częstochowa : Hutnicy

Les métallurgistes. En 1921, soutenu par l’Organisation de la jeunesse de la Société universitaire des travailleurs, affiliée au Parti Socialiste Polonais (PPS), le club de sport et de football vit le jour sous le nom de Klub Sportowo-Footballowy Racovia. Dans une Pologne qui venait de retrouver son indépendance (1918) et qui s’opposait déjà à ses voisins (Guerre soviéto-polonaise de 1919-1921), la jeune démocratie était fragile et les partis politiques cherchaient à s’imposer par tous les moyens. L’encadrement de la jeunesse était un des moyens de diffuser ses idées. Ainsi, le PPS favorisa l’emergence de ce club dans l’une des grandes villes ouvrières du sud du pays. Le club fut rapidement fréquenté par les adhérents du PPS et par ceux de la section locale du syndicat des métallurgistes. Sous le patronage de ces deux institutions, le club bénéficia des aides également des usines sidérurgiques et métallurgiques de la ville. Le premier terrain fut construit sur un emplacement mis à disposition par la direction de l’aciérie de Częstochowa en échange de son entretien. En 1935, le directeur de l’aciérie de Częstochowa alloua des fonds pour acheter des équipements et aménager le terrain. Mais ce soutien n’était pas inconditionnel. Pendant la grande crise économique, le club connut des difficultés financières et les joueurs devaient acheter leurs tenues et financer par leurs propres moyens leurs déplacements. Pour les aider, un groupe de musique et de théâtre fut créé pour collecter des fonds. Avec l’avènement d’une démocratie populaire après la Seconde Guerre Mondiale, le club demeura évidemment sous le patronage du syndicat de la métallurgie. Le blason traduisit cette appartenance avec les cheminées fumantes des hauts fourneaux qui rappelaient les rayures du maillot. Le nom même du club intégra le terme « acier » (stal) pendant quelques années.

Selon certaine recherche archéologique, la cité de Częstochowa fut un centre de métallurgie dès l’age du bronze. Evidemment la présence en abondance de minerai de fer (ainsi que de charbon et de rivières) en Silésie favorisa le développement de l’industrie métallurgique. Dans la région de Częstochowa, la première forge fut construite en 1374. Dès 1577, 32 forges existaient déjà et les usines locales étaient alors devenues les leaders de la métallurgie polonaise, tant en termes de technologie que d’organisation. Au début du XVIIème siècle, l’un des premiers hauts fourneaux polonais fut établi dans la région de Częstochowa et en 1782, il y en avait 5 autres de plus. En 1840, douze hauts fourneaux fonctionnaient, produisant près de 8 000 tonnes de fonte par an. A partir de la seconde moitié du XIXème siècle, l’industrie métallurgique déclina face à la concurrence des aciéries de Zagłębie Dąbrowskie (Cracovie). En 1878, le haut-fourneau de Mijaczów fut fermé suivi en 1881 par celui de Panki, en 1891 de Przystajnia, en 1895 de Poręba Mrzygłodzka et en 1901 ceux de Stara Kuźnica et Blachownia. L’arrêt de ces derniers hauts fourneaux était lié à la construction d’une grande usine sidérurgique moderne à Raków près de Częstochowa en 1896-1901 employant bientôt environ 2 500 ouvriers. Même si la métallurgie était désormais supplantée par l’industrie textile, elle demeurait une activité majeure de la région. Une grande partie du minerai de fer extrait en Silésie tchèque était d’ailleurs encore exporté vers Częstochowa. La région en elle-même était devenue la plus grande région d’extraction de minerai de fer de Pologne. Aujourd’hui, cette industrie demeure présente. Construite en 1896, l’usine Huta Częstochowa à Raków fonctionne toujours et constitue l’une des plus grandes aciéries et le plus grand fournisseur de tôles fortes en Pologne. Une cokerie subsiste aussi (Koksownia Częstochowa Nowa).

#491 – SD Éibar : Armaginak

Les armuriers en basque. Le surnom se dit également en espagnol los armeros. Éibar est une petite municipalité de la région basque de Guipúzcoa, à mi-chemin entre Bilbao et Saint-Sébastien. Sur les rives de l’Ego, proche des Pyrénées riche en minerai de fer, son activité économique s’est tout d’abord développée avec les forges. Puis, de la production de fer, la ville, et la région de Guipúzcoa, se tourna vers des produits manufacturés, particulièrement les armes. La commune voisine de Placencia de las Armas accueillit la fabrique royale d’armes (Real Fábrica de Armas) tandis que cette activité longtemps florissante à Éibar conduisit à la baptiser la villa armera (la ville armurière).

Le premier document faisant référence à la fabrication d’armes à Eibar date de 1482 (écrit décrivant l’envoi au Duc de Medina Sidonia de deux canons). En 1538, une commande de 15 000 arquebuses fut passées, soulignant l’importance prises par Éibar dans la production d’armes. Tout au long du XVIIème siècle, l’industrie se développa considérablement et en 1735, la Real Compañía Guipuzcoana de Caracas (une société qui avait le monopole du commerce entre l’Espagne et le Venezuela) intervint pour organiser la production d’armes et son système corporatiste. En 1865, après différentes reprises, ce système syndicaliste disparaît, avec la révolution industrielle et l’amélioration des techniques, au profit de sociétés indépendantes et concurrentes entre-elles. Au début du XXème siècle, Éibar comptait 1 149 armuriers (fabriquant principalement des armes de poing) et connut une croissance vertigineuse. En 1887, 130 000 pièces furent fabriqués à Éibar, puis 200 000 en 1900 et finalement 484 000 huit ans après. La Première Guerre Mondiale constitua à la fois le pic de l’activité mais également sa chute (la fin de la guerre plus la fermeture de certains marchés réduisant les débouchés). Une partie des armureries se reconvertirent alors en fabriquant de bicyclettes ou de machines à coudre. Les autres poursuivirent leur activité qui se réduisit au fil des années, particulièrement au moment des crises des années 1970 et 1980. Avec la fermeture le 27 mai 1997 de la dernière grande usine d’armes STAR, Bonifacio Echeverría SA, la production locale est devenue rare et se concentre sur les armes de chasse de luxe. Un musée de l’armurerie a ouvert en 2007 et la Escuela de Armería (l’Ecole d’Armurerie), ouverte en 1913, continue d’enseigner ce savoir-faire.

#465 – 1.FC Union Berlin : Eiserne

Les ferreux. Fondé en 1966 pour offrir aux travailleurs de Berlin-Est un club à supporter, l’Union puise ses origines dans le club dénommé FC Olympia Oberschöneweide créé le 17 juin 1906 par l’union de 3 petites associations sportives. Oberschöneweide était alors une municipalité (qui fut intégrée à Berlin en 1920) qui connut un fort développement à la fin du XIXème siècle en raison de son industrialisation. De grandes entreprises, telles qu’AEG ou Niles, achetèrent d’importants terrains alors agricoles, notamment le long des rives de la Spree, pour y construire un ensemble remarquable d’usines à plusieurs étages, de vastes halls de production et de bâtiments administratifs. La ville devint ainsi un important centre industriel, dominé par les entreprises électriques (aussi bien des centrales que des fabricants de matériel électrique), l’industrie métallurgique et la construction mécanique.

Les habitants étaient alors les ouvriers des usines, les industriels faisant construire près de leurs usines des habitations pour leurs employés. Dans ses premières années d’existence, le FC Olympia Oberschöneweide, initialement composé presque entièrement d’étudiants, s’associa en tant qu’équipe de jeunes à d’autres clubs plus matures. Ainsi, après une première association infructueuse, il se lia avec le récent vainqueur du championnat allemand, le BTuFC Union 1892. Son effectif constitua pendant deux ans la quatrième équipe réserve du BTuFC. En février 1909, l’équipe voulut voler de ses propres ailes et se détacha du BTuFC. Par amitié et afin de les honorer, les joueurs reprirent à la fois le nom (le club devenant désormais Union Oberschöneweide) ainsi que les couleurs bleu et blanc de l’Union 92. Or, ce maillot bleu à parement blanc faisait penser aux bleus de travail des ouvriers qui travaillaient dans l’industrie métallurgique d’Oberschöneweide. Ainsi, le surnom Eiserne s’imposa. En 1998, Nina Hagen, la chanteuse punk, associa sa voix avec le nouvel hymne du club, Eisern Union.

Après la Seconde Guerre mondiale, le club se divisa en deux, une partie en RDA et une autre en RFA. Mais, le club est-allemand était fortement affaibli par la perte de la quasi-totalité de l’équipe première. Pour le maintenir en première division, les autorités communistes l’intégèrent au sein de la structure sportive d’une branche industrielle et le club se retrouva associé à la VEB Transformatorenwerk Karl Liebknecht, un fabricant de transformateur électrique. Les couleurs traditionnelles furent également modifiées : le bleu et blanc du club précédent (et du club frère à l’ouest) furent bannis au profit du rouge et blanc, qui demeure jusqu’à présent.

#313 – West Ham United : the Hammers

Les marteaux. Les joueurs de West Ham ne sont pas plus fous que les autres et les plus marteaux étaient le crazy gang de Vinnie Jones, Dennis Wise et consorts (mais qui évoluaient au milieu des années 80 à Wimbledon). Ici, il est fait plutôt référence aux origines du club. Au XIXème siècle, au bord de la Tamise, au niveau des quartiers de Blackhall et Bow Creek, au sud de West Ham, était érigé l’usine de la Thames Ironworks and Shipbuilding Company, à la fois un chantier naval, spécialisé dans les bateaux construits en fer, et une aciérie. Elle se diversifia également dans tous les ouvrages en fer, tels que dans le génie civil, les moteurs marins, les grues, l’électrotechnique et les automobiles.

En 1895, son directeur général, Arnold Hills, se laissa convaincre par l’un de ses contremaîtres, l’arbitre de football local Dave Taylor, de créer un club de football pour les ouvriers de l’usine. Syd King, ancien joueur et président du club, résuma ainsi la création du club : « In the summer of 1895, when the clanging of « hammers » was heard on the banks of Father Thames and the great warships were rearing their heads above the Victoria Dock Road, a few enthusiasts, with the love of football within them, were talking about the grand old game and the formation of a club for the workers of the Thames Iron Works Limited. There were platers and riveters in the Limited who had chased the big ball in the north country. There were men among them who had learned to give the subtle pass and to urge the leather goalwards » (À l’été 1895, lorsque le bruit des « marteaux » se fit entendre sur les rives de Father Thames et que les grands navires de guerre élevaient leurs têtes au-dessus de Victoria Dock Road, quelques passionnés, avec l’amour du football en eux, parlaient sur le vieux grand jeu et la formation d’un club pour les travailleurs de la Thames Iron Works Limited. Il y avait des plaqueurs et des riveteurs dans la Limited qui avaient chassé la grosse balle dans le nord du pays. Il y avait parmi eux des hommes qui avaient appris à donner la passe subtilement et pousser les cuirs vers le but). Les marteaux étaient un des outils principaux de ces ouvriers qui fondèrent West Ham et on retrouve aujourd’hui cet instrument sur l’emblème du club.

Par ailleurs, outre la référence à l’activité de l’enterprise dont est originaire le club, le mot hammers présente aussi l’avantage d’apparaître comme une extension du nom du quartier de West Ham.