#1061 – CD Antofagasta : el Puma

Le puma. Mascotte du club qui apparaît également sur son blason, l’animal dépasse simplement son rôle de surnom pour être un marqueur de l’identité du CD Antofagasta. Le club fut fondé le 14 mai 1966, fortement encouragé par l’Asociación Nacional de Fútbol Profesional, la ligue professionnelle chilienne. La ville du Nord du pays n’était pas représentée dans l’élite professionnelle et l’un de ses clubs, Unión Bellavista, s’adressa en 1965 à la fédération pour obtenir le statut professionnel. Mais sa demande fut rejetée. Son rival, Portuario Atacama, tenta la même démarche mais également en vain. L’ANFP poussa les deux clubs à s’unir pour créer une force capable de s’imposer face aux structures professionnelles existantes. Il fallut la médiation du Maire de la cité ainsi que toute la pression de l’ANFP pour enfin parvenir à la création du Club de Deportes Antofagasta Portuario.

En 1968, le nouveau club évoluait en seconde division (mais s’apprêtait à remporter ce championnat et enfin accéder à l’élite). La presse de la capitale publiait le classement de la première division chaque semaine sous le titre « Así van los Leones » (Ainsi vont les Lions). Lisant cela, le journal d’Antofagasta, « La Estrella del Norte », prit la même habitude pour présenter le classement de la seconde division. Toutefois, pour différencier les deux étages professionnels, le journal changea d’animal et l’intitulait « Así van los Pumas » (Ainsi vont les Pumas). Alors que la référence animalière s’appliquait à l’ensemble des équipes, les lecteurs de « La Estrella del Norte », qui supportaient Antofagasta Portuario, crurent qu’il s’agissait d’un surnom pour leur équipe favorite. Il faut dire que le nom Antofagasta Portuario était peu plébiscité (tout comme son abréviation AP) par les fans et donc le surnom puma se diffusa rapidement. Se rendant compte de son adoption par les supporteurs, « La Estrella del Norte » entretint le phénomène et en particulier son journaliste Hugo Rivera Quiroga qui accompagnait ses commentaires de caricatures avec un puma portant le maillot de l’équipe. Puis, les autres médias locaux reprirent également le surnom.

#1043 – HUS Agadir : لغزالة السوسية

La gazelle de Souss. Ville portuaire et station balnéaire du Sud du Pays, Agadir se trouve aussi être le chef lieu de la région administrative de Souss-Massa et une des principales cités de la région historique de Souss. Cette dernière recouvre l’aire de l’ethnie berbère des Chleuhs. Ces derniers demeurent la principale ethnie berbère (population estimée entre 8 et 10 millions de personnes) avec une culture forte (danse aḥwac, musique, costumes et fêtes traditionnelles) et une langue commune, le tachelhit. Cette dernière a gagné son statut officiel dans le Royaume chérifien en 2011. La légende veut que les Chleuhs descendent des Atlantes mais ils sont certainement un amalgame des tribus originelles du Souss, les Masmoudas, avec les peuples ayant immigrés dans le Souss, les Sanhadja et Guezoula, qui adoptèrent la culture des Masmoudas. La région du Souss et les Chleuhs connurent leur âge d’or sous l’Emirat Tazeroualt au XVIIème siècle qui jouissait d’une certaine autonomie et tirait ses richesses du commerce de l’or et du sucre avec les marins européens.

Fondé par des nationalistes marocains en 1946, le club est l’étendard sportif de cette région historique du peuple berbère, trouvant ainsi des relais et des partisans dans toute la région (qui n’a pas d’autre représentant sportif dans l’élite) et au niveau national. Son surnom puise donc ses racines dans un des animaux emblèmes de la région, la gazelle. Petite antilope, cet animal se trouve principalement dans la savane africaine, en Asie du Sud ainsi que dans le sud Maghreb, au Sahara. A 60 km d’Agadir, une réserve naturelle couvrant une superficie de 33 800 hectares fut créée en 1991 pour protéger la faune et la flore locale. Aujourd’hui, elle abrite 275 espèces d’oiseaux (dont l’ibis chauve) et une quarantaine de mammifères. Deux réserves animalières (Roken et Arrouais) ont été aménagées dans le parc pour permettre la sauvegarde et la protection de 4 antilopes sahariennes : Gazelle dama mhorr, gazelle dorcas (la gazelle la plus répandue dans la région), Addax (disparues du Maroc en 1956) et gazelles Oryx (disparues du Maroc en 1973).

Au delà d’être un animal endémique de la région et l’un de ses emblèmes, la gazelle est aussi un animal rapide (pouvant atteindre des pointes à 100 km/h), une vertu inspirante pour l’équipe de football.

#1041 – Casa Sports : Essamay

Le lion. En dialecte Diola, la langue de l’ethnie majoritaire dans la région de la Casamance, Essamay signifie un leader, un homme courageux. Et deux animaux symbolisent cet esprit et trouvent également leur traduction dans essamay : la panthère et le lion. Dans la danse des masques de la culture diola, l’essamay, la panthère, est un danseur portant un masque et une tenue faite avec les sacs de pommes de terre. Il détient également un long bâton au bras et danse pendant les cérémonies traditionnelles. Mais, l’essamay est donc aussi le lion, symbole du club. Il représente le courage, la force et la noblesse de l’équipe. D’autres associations de la Casamance reprennent essamay comme symbole.

Il s’agit d’un des symboles de la culture de la Casamance. Et ce n’est pas un hasard pour Casa Sports. Fondé le 14 Septembre 1969 par la fusion de plusieurs clubs (Foyer-Casamance, US Casamance, Galia Club, Trésor), le club se dénomma tout d’abord Casamance Sporting Club avec pour objectif d’être la référence du sport pour la Casamance et son représentant national. Situé au Sud du pays, la région de la Casamance a un statut à part par rapport au reste du Sénégal. Par exemple, elle est habitée principalement par les Diola au contraire des autres régions où les Wolof sont majoritaires. Ou encore ses habitants sont principalement catholiques face au reste du Sénégal musulman. De part sa position géographie (à plus de 500 km de la capitale Dakar et à la frontière avec la Guinée Bissau, la Gambie et la Guinée), la Casamance s’est souvent sentie délaissée voire abandonnée par le pouvoir central. Résultat, son identité diffère et a conduit à la naissance d’un sentiment identitaire porté par un mouvement indépendantiste depuis 1982. Casa Sports devait donc porté cette identité et reprendre ses symboles. L’un des plus grands joueurs formés par le club est le regretté Jules Bocandé (passé par Metz et Nice principalement) qui avait également hérité de ce surnom d’essamay.

#1033 – Stormer’s SC : el Lobo

Le loup. Plus connu simplement sous le nom de Stormer’s, ce dernier est un club de football basé dans la ville de Sucre, la capitale de la Bolivie. Le football commença à se répendre en Bolivie entre 1905 et 1909, les expatriés britanniques l’apportant avec eux. Rapidement, ce nouveau sport séduisit les jeunes étudiants des écoles privées de la capitale et des premières équipes se montèrent. Le 25 janvier 1914, au sein du collège « Sagrado Corazón » (Sacré-Cœur), une poignée de prêtres, d’enseignants et d’étudiants furent motivés pour fonder un nouveau club, le Stormer’s SC.

Le collège « Sagrado Corazón » était une institution d’enseignement appartenant à la Compagnie de Jésus (Jésuite). La Compagnie est une congrégation catholique fondée principalement par Ignace de Loyola, François Xavier et Pierre Favre en 1539, approuvée en 1540 par le pape Paul III. Luttant contre la Réforme protestante, l’ordre catholique s’était fixé pour objectif d’évangéliser et d’éduquer les populations (même si pour ce dernier point il s’agissait aussi d’inculquer la « bonne parole » de l’Église catholique). Résultat, les prêtres de la congrégation émigrèrent dans les nouvelles colonies pour fonder églises et écoles. Le principal fondateur de l’ordre, Ignace de Loyola, était un basque d’une famille de la petite noblesse. Les armes de sa famille comprennaient deux loups rampant et se tenant à une marmite. Résultat, le collège « Sagrado Corazón » reprit dans son blason les loups présent dans les armes de Loyola. Le surnom de l’équipe est un hommage aux origines du club.

Aujourd’hui, la mascotte du club est représentée par un loup nommé « Stuhi », qui en albanais signifie « Tempête ».

#1013 – Club Tijuana : les Xolos, Xolaje

Diminutif du nom du club, Club Tijuana Xoloitzcuintles de Caliente. Le club de la ville frontière de Tijuana est assez jeune, sa fondation remontant à 2007. Pour le tournoi d’ouverture 2006, la Fédération mexicaine de football décida que chaque équipe de l’élite devait avoir une filiale dans la division de promotion. Ainsi, un groupe d’hommes d’affaires de Tijuana racheta le club de Gallos Blancos, afin de créer le Club Tijuana (surnommé le Gallos de Caliente) une filiale de Querétaro. Mais, un an plus tard, Gallos de Caliente déménagea à Celaya, laissant Tijuana orphelin de football. A peine quelques mois plus tard, un groupe d’hommes d’affaires de Tijuana racheta le club des Guerreros de Tabasco et le rebaptisa Club Tijuana. La ville frontière retrouvait un club.

Pour faciliter l’identification au club, la direction décida de prendre comme surnom un animal endémique de la région, le Xoloitzcuintle. Plus connu dans nos géographies comme le chien nu mexicain, il s’agit d’une race canine rare originaire du Mexique et intégrée dans la culture locale. Son nom Xoloitzcuintle vient du nahuatl Xoloitzcuintli et, basé sur le nom du dieu Xolotl, signifie littéralement « chien de compagnie ». Dans la mythologie aztèque, les xoloitzcuintles accompagnaient les âmes des défunts lorsqu’ils se rendaient à Mictlán, le monde souterrain. Avec ou sans poil, variant entre 4 kg et 20 kg, le Xoloitzcuintle est un chien de garde intelligent, joueur et fidèle, adopté par des artistes comme Diego Rivera et Frida Kahlo. A l’époque coloniale, le terme xolo signifiait un chien bâtard et s’utilisait péjorativement pour désigner un mulâtre. Mais, pour le club, il s’agit d’une symbole, aujourd’hui mascotte et apparaissant sur son écusson.

#978 – RCC Schaerbeek : les Ânes

Dans la capitale belge, le football est monopolisé par le grand Sporting (Royal Sporting Club d’Anderlecht) qui truste les trophées. Mais, évidemment, d’autres clubs existent et ont connu quelques heures de gloires. Le Crossing Schaerbeek est peut-être le plus méconnu des clubs bruxellois mais, à la fin des années 1960, après une fusion avec un autre club de la banlieue, le Crossing Molenbeek, accéda à la seconde division belge, en comptant dans ses rangs, la légende tchécoslovaque Josef Masopust. L’accumulation des dettes conduisit malheureusement le club à redescendre rapidement dans les divisions inférieures. En 1983, le club fusionna avec le club d’Elewijt et déménagea dans cette ville. Orphelin de leur club, un nouveau Crossing apparait en 2011 pour ranimer l’histoire. La jeune association grimpa petit à petit les étages pour enfin revenir à l’échelon national en 2021. Avec ce retour, la décision fut prise de revenir au blason historique, pour le grand bonheur des supporteurs. Celui-ci présente un âne avec une cerise entre ses dents.

La présence de cet équidé rappelle que la ville de Schaerbeek est surnommé la cité des ânes. En 1136, la ville de Schaerbeek comptait de nombreux meuniers et maraîchers, en particulier des producteurs de cerises. Le Duc de Brabant autorisa ces derniers à venir vendre leur production à Bruxelles en la transportant à dos d’ânes. Les cerises de Schaerbeek étaient fameuses car leur goût aigrelet contribuait au succès de la kriek lambiek, une bière typiquement bruxelloise. Ainsi, chaque matin, une caravane d’ânes lourdement chargés quittaient Schaerbeek pour rejoindre le centre de Bruxelles, via une voie qui se dénommait l’Ezelweg (le chemin des ânes). Seulement, ce troupeau dont les sabots heurtaient le pavé réveillaient les bruxellois qui s’écriaient, avec un peu de mépris, « Hei! doë zên die êzels van Schoerebeik » (en dialecte flamand de Bruxelles : Tiens, voilà les ânes de Schaerbeek !). Cette tradition déteind sur la devise de la ville « Pertinax sed Fructifer » (Obstiné et Fertile) : Obstiné comme l’âne et Fertile comme la terre sur laquelle poussent les cerisiers.

#973 – Aston Villa : the Lions

Les lions. L’écusson du club de Birmingham affiche un lion rampant depuis quasiment la création de l’association en 1874. Il s’agit d’un des marqueurs de l’identité des villans. L’animal est un symbole commun en héraldisme et véhicule certaines valeurs de force, de noblesse et de bravoure. Mais, pour Aston Villa, le roi des animaux créait un lien avec la population écossaise qui joua un rôle important dans les premières années de la vie d’Aston Villa.

Le club fut fondé en 1874 par quinze joueurs, principalement de l’équipe de cricket de Villa Wesleyan Chapel, afin de s’occuper pendant les mois d’hiver. Entre 1760 et 1850, les années centrales de la révolution industrielle, Birmingham devint un des plus importants centres industriels et financiers de l’Angleterre. L’industrie métallurgique, textile, chimique, ferroviaire et de construction navale supportèrent le développement de la cité. Naturellement, la croissance de l’activité industrielle nécessita une importante main d’oeuvre. Entre 1800 et 1900, la population de la ville passa d’environ 100 000 personnes à 600 000. Ces ouvriers et ingénieurs venaient des autres contrées de l’Angleterre mais égaiement des autres régions britanniques, principalement de l’Ecosse et de l’Irlande. Ainsi, à la fin du XIXème siècle, une grande communauté écossaise vivait à Birmingham. Elle participa naturellement à la structuration du club comme à former le gros des troupes de supporteurs du club. Les deux principaux acteurs écossais qui menèrent le club au succès furent William McGregor et George Ramsay.

Né dans le Perthshire en 1846, William McGregor déménagea de l’Écosse à Birmingham pour créer une entreprise de draperie en 1870. La présence de trois Écossais dans l’équipe d’Aston Villa éveilla son intérêt pour le club qu’il rejoignit en 1877. En 1881, il devint administrateur du club et le servit pendant près de 20 ans, notamment en tant que président. Né à Glasgow en 1855, Georges Ramsay intégra Aston Villa en 1876. La légende raconte que Georges passait devant une séance d’entraînement de l’équipe lorsqu’il fut invité à venir la compléter pour faire le nombre. Son talent éclata aux yeux des joueurs qui, une fois la session terminée, lui demandèrent de rejoindre le club, et quelques mois plus tard, il en devint le capitaine. En 1882, Ramsay prit sa retraite en raison d’une blessure au genou, et en 1886, il fut nommé entraîneur, le premier professionnel dans le pays. Manager jusqu’en 1926, il forgea l’identité de jeu du club (basée sur des mouvements rapides et des passes courtes tels que les écossais pratiquaient le football) et lui fit connaître son age d’or, avec 6 titres de champion et 6 FA Cups. D’autres écossais occupèrent également des postes sur le terrain ou dans les sphères de direction. Fergus Johnstone fut vice-président pendant que McGregor était président. Son fils, Charles, joua pour Aston Villa et devint plus tard également vice-président dans les années 1920. Né à Peterhead en Ecosse en 1834, George Kynoch fut président d’Aston Villa de 1887 à 1888. Il était également un homme d’affaires local et un député. Enfin, sur le terrain, l’écossais Archie Hunter fut aussi un des maîtres à jouer de l’équipe et son capitaine (après le retrait de Ramsay). Il joua pour le club pendant 12 ans et était une idole des fans. Fiers de ce lien, McGregor et Ramsay en 1878 insistèrent pour que le club ait un blason qui intègre le lion, symbole de l’Ecosse. Ils savaient aussi que l’animal attirerait les écossais de Birmingham dans les travées du stade.

Pour rappel, le lion rampant constitua les armoiries et l’étendard royal d’Ecosse du XIIème siècle (certainement la première fois sous le règne de Guillaume Ier, dit William the Lion) jusqu’à l’unification des couronnes en 1603.

#961 – Almere City FC : de Zwarte Schapen

Le mouton noir. Almere est une équipe relativement jeune (70 ans d’existence) mais avec une histoire bien compliquée. Tout commence le 1er juin 1954 avec la fondation de l’équipe du BVC Amsterdam par l’homme d’affaires Dingemans Stoop. En 1958 , BVC Amsterdam fusionna avec DWS, un autre club de la capitale néerlandaise. Mécontents, les supporters créèrent leur propre club, dénommé De Zwarte Schapen (les moutons noirs), le 20 avril 1959. Les deux clubs vivront chacun leur vie. DWS fusionna en 1972 avec Blauw Wit et en 1974 avec De Volewijckers pour donner naissance au FC Amsterdam. Ce dernier disparut en 1982. En revanche, le club des supporteurs connut une plus longue histoire. En premier lieu, le club déménagea en banlieue à Diemen pour trouver son public et des donateurs. Après 5 promotions consécutives et avoir atteint la seconde division, Zwarte Schapen fusionna en 1978 avec AVV Argonaut pour apparaître sous le nom d’Argonaut-Zwarte Schapen (AZS). Entre 1988 et 1992, le club s’appelait FC De Sloterplas (du nom d’un lac situé dans le quartier de Nieuw-West). En 1995, le club déménagea d’Amsterdam pour rejoindre à l’Est la municipalité d’Almere, de l’autre côté du lac de Gooimeer. En 1997, le club changea de nom pour Sporting Flevoland, nom de la province. La municipalité ambitionna de créer un grand club omnisport et réunit plusieurs associations sportive de la ville sous le nom de Omniworld. Le Sporting Flevoland devint ainsi le FC Omniworld. Le club reprit son indépendance en 2011 et prit alors le nom d’Almere City FC.

Dans tous ces déménagements et changements de nom, un élément resta immuable : le mouton noir. Que ce soit au travers du surnom ou du blason, les clubs successifs et leurs supporteurs conservèrent ce lien avec l’équipe originelle. Dès le 30 août 1954, lors du premier match à domicile (match amical), le club amena sur le terrain comme mascotte un mouton noir. Cet animal apparaissait également sur le blason du maillot des joueurs. Pourquoi ce symbole ? L’explication avancée serait lié à la naissance du club. Depuis 1898, le football néerlandais, chapeauté par la fédération nationale, KNBV, se plaisait dans l’amateurisme. La KNVB voulait garder le sport aussi accessible que possible et s’assurer qu’aucun autre intérêt, comme l’argent, influença le sport. Pour cela, elle n’hésitait pas à se priver pour son équipe nationale des footballeurs néerlandais qui cédaient au professionnalisme à l’étranger. Mais, la pression devenait de plus en plus grande et en 1953, un groupe de sportifs et d’hommes d’affaires d’Amsterdam créèrent la fédération professionnelle des Pays-Bas, NBVB, en concurrence frontale avec la KNBV. 10 clubs, dont le BVC Amsterdam, furent fondés pour intégrer cette nouvelle ligue, que l’on surnomma Wilde pour la qualifier de sauvage. Club de la ville qui supporta cette « abomination », il aurait alors hérité du surnom de de Zwarte Schapen, comme un vilain petit canard. Pour la petite histoire, la saison de la NBVB débuta en Septembre 1954 tandis qu’en réponse, la KNBV constitua sa propre ligue semi-professionnelle à la même date. 3 mois plus tard, les deux ligues fusionnèrent.

#960 – K Berchem Sport : de Leeuwen van ‘t stad

Les lions de la ville. Dans la ville d’Anvers, le football se réduit souvent au doyen du Royal Anvers (#139) et au club de Beerschot (#685) mais un troisième, souvent oublié ou négligé, a su aussi marquer l’histoire sportive de la ville. Basé dans le quartier de Berchem, le club connut son heure de gloire après la guerre, en terminant 3 fois de suite vice-champion de Belgique (1949, 1950 et 1951).

Au début du XXème siècle, un groupe d’amis, qui se nomment eux-même Vlaamsche Vrienden (amis flamands) souhaitaient pratiquer des sports tout en ne se fondant pas dans les clubs existants à l’époque qui rassemblaient les communautés francophones ou anglophones de la ville. En outre, ces derniers étant plutôt élitistes, ces amis voulaient une association sportive ayant un caractère populaire. Ainsi, le 13 août 1906, dans le café Limburgia situé à la Beernaertstraat, ils fondèrent un club de lutte et d’athlétisme (la section football apparu en 1908). Cette identité flamande se traduisit dans le choix des couleurs, jaune et noir, celles de la Flandre. En effet, les armes de la Flandre sont ornées d’un lion noir sur fond jaune. Probablement que ce lion, symbole des flamands, donna son surnom au club qui se revendiquait être le club flamand d’Anvers (Anvers est surnommé ‘t stad).

Selon la légende, le lion apparaît sur les armes du Comté de Flandre pour la première fois à compter du XIIème siècle. Lors de la troisième croisade, Philippe d’Alsace, comte de Flandre, aurait combattu Nobilion, roi d’Abilene et de Syrie et, après l’avoir tué, aurait pris ses armes avec le lion dessus. Toutefois, le lion (ou un « animal courageux ») serait apparu sur le blason de Philippe dès 1162, soit quelques années avant la croisade (1177). Ainsi, l’autre version serait que le comte Philippe adopta le lion rampant (ie debout) des armoiries de Guillaume d’Ypres, dont Philippe voulait s’accaparer le titre et les terres au détriment du fils de Guillaume. Guillaume aurait peut-être hérité de son père, Philippe d’Ypres, ces armes où le lion était toutefois marchant. Une autre hypothèse prétend que Guillaume se serait inspiré du lion marchant de son oncle, Geoffrey Plantagenêt (fondateur de la Maison Plantagenet qui régna sur le Royaume d’Angleterre), qu’il combattit en 1137. Enfin, une autre hypothèse avance qu’il ramena ce lion d’Angleterre où il émigra après avoir été banni de ses terres flamandes. En tout cas, dès sa première représentation en couleur, au XIIIème siècle, le lion flamand était entièrement noir sur fond jaune. Quand le Comté de Flandre devint une possession d’autres maisons (Bourgogne, Habsbourg, Espagne …), le lion flamand s’intégra dans les armes de ces maisons (le lion figura dans les armoiries des rois d’Espagne jusqu’en 1931). En 1816, le lion flamand devint une partie des armoiries des provinces de Flandre orientale et de Flandre occidentale qui couvraient la majeure partie du territoire de l’ancien comté. En outre, au XIXème siècle, le mouvement nationaliste flamand s’appropria des symboles historiques, dont le lion, comme un instrument de ralliement, de construction d’une identité flamande. En 1838, Hendrik Conscience rédigea un roman historique populaire titré « De leeuw van Vlaanderen » (Le lion de Flandre). Dans cet oeuvre, il fit de la Bataille de Courtrai (1302), également connue sous le nom de bataille des éperons d’or, où les troupes flamandes anéantirent les soldats du Roi de France, une incarnation de la résistance flamande contre l’oppression étrangère. Cette Bataille de Courtrai entre les flamands et les français était une allégorie parfaite pour traduire les tensions entre la France et la jeune Belgique (indépendante en 1830) au XIXème siècle. Ce même contexte conduisit en 1847 Hippoliet van Peene à écrivir l’hymne « De Vlaamse Leeuw » (le lion flamand). Comme pour « la Marseillaise », « De Vlaamse Leeuw » est une chanson de combat nationaliste. À la fin du XIXème siècle, les partisans du mouvement flamand hissaient le drapeau au lion noir sur fond jaune chaque 11 juillet, date anniversaire de la bataille de Courtrai.

#921 – Santos FC : o Leão do Mar

Le lion de mer, plus communément appelé l’otarie. Pelé nous a quitté. Le Roi est mort. L’adage voudrait que l’on rajoute « Vive le Roi ». Sauf que son successeur n’est pas encore connu. Il ne suffit pas de s’afficher en photo avec Pelé et de croire sur parole un entourage et une bande de journalistes complaisants pour se réclamer de son héritage. Revenons à notre histoire de surnom. Celui-ci provient de l’un des hymnes du club. J’écris l’un car il existe deux hymnes pour Santos : l’officiel et l’officieux.

En 1955, un an avant que le Roi Pelé intègre les rangs de l’équipe professionnelle, Santos réalisa l’exploit de remporter le championnat de São Paulo. D’une part, peu d’équipe n’appartenant pas à la mégalopole de São Paulo parvenait alors à remporter le championnat de l’Etat. Sur les 53 premières éditions du championnat (sachant qu’il y a eu des saisons où deux ligues coexistaient), seuls deux avaient été remportés par des équipes situées hors des murs de São Paulo (dont une fois Santos en 1935). D’autre part, la victoire de 1955 mettait fin à une disette de succès pour Santos de 20 ans dans le championnat pauliste. Son attaquant Emmanuele Del Vecchio devenait meilleur buteur de la compétition avec 23 buts. Pour célébrer ce titre, une chanson fut commandée. Mangeri Neto écrivit les paroles et la musique fut composée par Mangeri Sobrinho. Elle s’intitula « Leão do Mar » ou « a marchinha Leão do Mar » (la marche du lion de mer).

Agora quem dá bola é o Santos / Maintenant Santos contrôle le ballon
O Santos é o novo campeão / Santos est le nouveau champion
Glorioso alvinegro praiano / Glorieux alvinegro praiano
Campeão absoluto desse ano / Le champion absolu de cette année

Santos, Santos sempre Santos / Santos, Santos toujours Santos
Dentro ou fora do alçapão / Que ce soit à la maison ou à l’extérieur
Jogue o que jogar / Peu importe comment tu joues
És o leão do mar / Tu es le lion de la mer
Salve o nosso campeão / Saluez notre champion

Le choix de cet animal n’est pas documenté mais l’explication la plus logique apparaît être celle-ci. Imposant, dominant, conquérant, le lion est le roi des animaux. L’équipe de Santos devait renvoyer alors cette image d’avoir dominé le championnat et d’être un lion. Or, la ville de Santos a un lien important avec la mer (#142). Donc son lion ne pouvait pas être celui de la savane mais celui de la mer. Cet hymne commença à résonner dans le stade quand deux ans plus tard, en 1957, une autre chanson apparut. Dénommée « Sou Alvinegro da Vila Belmiro » (Je suis Alvinegro de Vila Belmiro), elle fut écrite par Carlos Henrique Paganetto Roma (un ancien conseiller du club issu d’une famille étroitement liée à l’histoire de Santos. Son père, Modesto Roma, et son frère, Modesto Roma Júnior, furent présidents du club, respectivement entre 1975 et 1978 et entre 2015 et 2017) et fut approuvée le 11 juillet 1996 comme hymne officiel du club (13 ans après les décès de son créateur). Néanmoins, la chanson « Leão do Mar » avait déjà conquis le cœur de nombreux supporteurs, pour qui elle rappelait le premier succès qui allait en annoncer d’autres avec le Roi Pelé. Aujourd’hui, si « Sou Alvinegro da Vila Belmiro » est joué dans le stade avant les matchs de Santos, la foule scande encore « Leão do Mar » dans les travées. Certains médias l’utilisent également lors des retransmissions des matchs pour accompagner un but de Santos. Et quand en Septembre, en pleine convalescence, la fille du Roi Pelé donna des nouvelles de son paternel, ce fut un post où on entendait le Roi chantait l’hymne traditionnel, « Leão do Mar » .