#1273 – Olympique Safi : les Sardines

Le long de la côte marocaine donnant sur l’Atlantique, la vieille cité de Safi s’étire et s’est développée au fil des siècles entre terre et mer. Son arrière-pays est riche de terres agricoles où sont cultivés des céréales (principalement de l’orge), des légumineuses, des fruits (les agrumes, l’abricot, le raisin, la pomme) et du maraîchage (câpres), et regorge de phosphate, exploité par le groupe public OCP. A l’opposé, l’Océan Atlantique et ses rives offrent ses richesses à la ville et ses habitants. Au-delà de ses plages réputés et de sa vague, spot de surf prisé, la pêche demeure l’un des piliers de l’activité économique de la ville.

Comptoir phénicien, Safi devint à compter du XIIème siècle un port important, débouché naturelle sur la mer de Marrakech, capitale de l’Empire Almohade puis Chérifien. Et les différentes influences et dominations ne firent que renforcer son importance commerciale. Au XXème siècle, le port prit une nouvelle dimension avec la pêche industrielle à la sardine. En effet, la fraîcheur du courant des Canaries rendirent les eaux de Safi foisonnantes de sardines et de thons. Couplé avec un savoir-faire qui donne un produit fini sans peau et sans arêtes, entièrement préparées à la main, Safi développa toute la filière de la pêche à la conserve. Dans les années 1950-1960, il était le premier port sardinier mondial en tonnage, avec jusqu’à 130 bateaux ramenant 100 000 tonnes de poissons par an. Douze mille personnes travaillaient alors dans la filière, qui comptait 38 conserveries. Au milieu des années 70, le port abritait près de 75 conserveries. A compter des années 1980, l’activité déclina avec la raréfaction de la ressource et le déplacement des zones de pêche au sud d’Agadir. En 2019, la production s’établissait à 42 000 tonnes et en 2022, il restait une vingtaine d’unités de traitement de poissons seulement (19 conserveries, 4 usines de valorisation de déchets de poisson, 2 unités de congélation). Malgré tout, selon un rapport de l’organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), le port de Safi occupe le 13ème rang à l’échelle internationale dans la production mondiale de poisson et encore 15% des habitants travaillent dans le secteur maritime au sens large (marins, chantier de construction naval …).

L’abondance de sardines permit à ce poisson de s’imposer dans la cuisine locale et aujourd’hui, les Safiots en consomment au moins une fois par semaine. Il s’imposa également sur le logo du club et donna son surnom à l’équipe.

#986 – FC Dieppois : les Harengs

La cité normande est surnommée « la ville aux quatre ports » car elle accueille un port de passagers (ferry transmanche), un port de commerce, un port de pêche et un port de plaisance. La présence de tant de ports témoigne du lien privilégié entre la cité et la mer. Même s’il existait un camp romain à proximité de la ville actuelle, ce sont surtout l’implantation de vikings vers 910 qui démarra l’histoire de Dieppe. L’emplacement présentait un environnement privilégié, au bord d’une rivière « profonde », la Tella, qui se jetait dans la Manche. Une digue naturelle de galets permettait aussi d’accéder au port à marée haute comme à marée basse. La ville fut officiellement fondée en 1015 par le duc de Normandie Richard II, avec l’objectif de s’offrir une débouchée marine. Comme souvent au Moyen-Âge, pour les villes de la Manche, de la Mer du Nord et de la Mer Baltique, la pêche et le commerce du hareng devinrent l’activité principale. En particulier, chaque année d’octobre à décembre, les harengs migrent de la Mer du Nord vers l’Atlantique et, au large et au proche des côtes Normandes, entre Fécamp et Dieppe, les harengs se reproduisent. Les pêcheries et salines s’installèrent donc rapidement dans la région et leur production s’expatria sur les étals parisiennes et rouennaises grâce aux chasse-marées. Au XVIIIème siècle, à Dieppe, la flotte consacrée à la pêche aux harengs fut la plus importante de la côte avec 60 bateaux. Le poisson, qui fut surnommé « poisson roi » fit la richesse de la ville jusqu’au XXème siècle. Aujourd’hui, le port de pêche se concentre avant tout sur la coquille Saint Jacques, avec 3 000 tonnes débarquées chaque année. La ville célèbre cette tradition ancestrale avec la Foire aux Harengs et à la Coquille Saint-Jacques, tous les troisièmes week-ends de novembre.

D’autres versions viennent expliquer ce choix ou plus exactement renforcent le surnom. Ainsi, au début du XXème siècle, les joueurs étaient connus pour leur agilité et leur vitesse sur le terrain. Les supporteurs comparèrent ce style de jeu aux mouvements des harengs dans l’eau. Une autre théorie suggère que le surnom fut inspiré par le traditionnel maillot du club. Ce dernier est rayé bleu et blanc (on retrouve les rayures sur le blason du club), qui ressemble au hareng (bleu sur le dos et blanc argenté sur le ventre).

#703 – CD Tenerife : los Chicharreros

Le terme est dérivé du poisson Chicharro qui est le mot insulaire pour désigner une sorte de maquereau. Rien de plus normal pour une équipe qui représente l’île de Tenerife d’avoir pour surnom un poisson. En réalité, ce surnom est devenu depuis le XIXème siècle une sorte de gentilé des habitants de Santa Cruz de Tenerife, qui leur fut attribué péjorativement par ceux vivant dans la ville voisine de San Cristóbal de La Laguna. Au XIXème siècle, San Cristóbal de La Laguna était la capitale de l’île de Tenerife et des Canaries. A l’inverse, Santa Cruz de Tenerife demeurait un petit port où les habitants étaient de modeste condition. Pour vivre, ces derniers péchaient et se nourrissaient principalement de chicharros, une sorte de maquereau, un poisson bon marché. Par décret royal du 28 août 1803, le roi Charles IV accorda au modeste port le droit d’établir son propre conseil municipal, ce qui signifiait son émancipation administrative de la municipalité de San Cristóbal de La Laguna. La rivalité entre les deux cités commença à augmenter. Les habitants hautins de la capitale s’amusaient alors à dénigrer ceux du petit port en les appelant chicharrero. Seulement, une étape décisive fut franchie sous le règne de Ferdinand VII. En 1833, Santa Cruz accéda au statut de capital de la nouvelle province des Canaries, au dépend des villes de San Cristóbal de La Laguna et de Las Palmas. Cette reconnaissance dopa la fierté des habitants de la ville qui transformèrent cette moquerie en une identité. Depuis, chicharrero est donc le gentilé de Santa Cruz qui s’est même étendu à tous les insulaires de Tenerife. Le dictionnaire de l’Académie Royale espagnole considère chicharrero comme un adjectif familier, dont le sens est équivalent à celui de tinerfeño (adjectif qui qualifie les habitants de Tenerife). Pour la petite histoire, la population de San Cristóbal de La Laguna ne lâcha pas le morceau et, à la fin du XXème siècle, trouvèrent un nouveau surnom péjoratif, rambleros. Ce dernier fait référence à la vie nocturne agitée, animée dans la nouvelle capitale et ses ramblas où les discothèques pullulent (l’Avenida de las Asuncionistas, la Rambla Pulido et la partie supérieure de la Calle Ramón y Cajal).

#642 – GAIS : Makrillarna

Les maquereaux. Pour une ville portuaire, la référence à un poisson ne constitue pas une surprise. La pêche est une activité historique de la ville de Göteborg et, depuis 1910 et la construction du port de pêche, la criée de Göteborg est la plus grande criée au poisson de Suède. Comme beaucoup de pays des mers du Nord et Baltique, le hareng constitua la principale ressource jusqu’au début du XIXème siècle où sa pêche se réduisit quasiment à zéro. Pourtant, c’est un autre poisson qui prit la place du symbole pour le club, le maquereau (le maquereau commun pour être précis).

Le maquereau commun est une espèce qui privilégie les eaux froides et tempérées et est présent en mer du Nord et en mer Baltique. Abondant, le maquereau est pêché de manière industrielle, particulièrement en mer du Nord, en mer Baltique, en mer d’Irlande et en Manche. Malheureusement, la surpêche en mer du Nord a conduit à une forte diminution du stock depuis les années 1960.

Si le maquereau s’imposa pour les joueurs de GAIS, c’est plus en raison de son apparence que de l’activité économique qu’il représenta pour la ville. En effet, le maquereau commun est un poisson au corps fuselé, au dos bleu-vert, zébré de raies noires, tandis que son ventre présente des reflets blancs argentés. Or, les joueurs de GAIS portent un maillot rayé vert et noir, ainsi qu’un short et des chaussettes blancs. Une ressemblance frappante. Le choix de ces couleurs par les fondateurs du club n’est pas documenté. A noter tout de même que le maillot n’afficha pas toujours ces couleurs. En 1909, à un moment où le club connut une nouvelle naissance, les membres décidèrent d’opter pour une tenue intégralement noire. Leur motivation aurait été de choisir un équipement qui se salissent moins vite pour le laver moins souvent. Dans les années 1950, l’équipe évolua avec des maillots verts aux manches blanches et un pantalon blanc, dans un style Arsenalesque.

#635 – Arka Gdynia : Śledzie

Les harengs. Le nom complet du club est Morski Związkowy Klub Sportowy Arka Gdynia qui signifie Club Sportif de l’Union Maritime Arka Gdynia et on comprend déjà un peu pourquoi le surnom fait référence à un poisson. En outre, le club, fondé en 1929, se construisit par fusion de plusieurs associations au fil de son histoire, notamment KS Marynarz (Club des Sports des Marins), Rybacki KS MIR (Pêche Club de Sport MIR) ou encore KS przy Urzędzie Morskim i Administracji Portowej (Club des Sports de la Direction Maritime et Portuaire).

L’existence d’autant de clubs de l’univers maritime s’explique par l’ouverture en 1924 d’un port à Gdynia. Situé dans la baie de Gdańsk, le port de Gdynia était devenu le plus grand port de la Mer Baltique et l’un des plus grands ports d’Europe avant la Seconde Guerre Mondiale. Après avoir été bombardé par les alliés (car il était devenu une base de la marine allemande), le port redevint une place maritime importante en Mer Baltique. Les autorités déclarèrent terminer l’année 2020 avec une augmentation de 2,9% de l’activité transbordement, soit 24,6 millions de tonne et une croissance de 1% pour la manutention des conteneurs, soit plus de 900 mille conteneurs EVP.

Mais, avant d’être un port, Gdynia fut dès le XIIIème siècle un village de pécheurs. A cette époque, en Mer Baltique, le hareng était particulièrement gros et facile à pêcher car la zone était son aire de ponte. En outre, salés ou fumés, ils se conservaient aisément. Il fut donc pêché par toutes les villes et villages du Nord de l’Europe et devint même le produit de base des commerçants de La Ligue Hanséatique. Ce passé marin s’affiche sur les armes de la ville où l’on retrouve deux poissons dorés se faisant face.