#194 – Club de Regatas Vasco da Gama : Almirante

L’amiral, à la fois le surnom du club et le nom de sa mascotte. Ce surnom fait évidemment référence au nom du club qui rappelle celui du célèbre navigateur Vasco de Gama. A la fin du XIXème siècle, l’aviron était un sport en vogue au Brésil. Quatre jeunes cariocas (Henrique Ferreira Monteiro, Luis Antonio Rodrigues, José Alexandre d’Avelar Rodrigues et Manuel Teixeira de Souza Júnior) avec 58 autres jeunes hommes issus de la communauté portugaise de Rio de Janeiro créèrent un club d’aviron le 21 août 1898. Cette année-là était célébré le quatre-centenaire de la découverte par Vasco de Gama, le navigateur portugais, de la voie maritime entre l’Europe et l’Inde. Vasco de Gama quitta le Tage le 8 juillet 1497 avec 200 hommes d’équipage à bord de quatre navires, longea toute la côte africaine, passa par le cap de Bonne-Espérance, pour atteindre le 28 mai 1498 les Indes (la cité-État de Calicut). Même si le voyage fut un échec commercial, Vasco de Gama gagna sa légende avec cette expédition et fut nommé Amiral des Indes. Vasco de Gama étant un marin portugais, les fondateurs donnèrent son nom à leur club d’aviron. La section football, quant à elle, naquit le 26 novembre 1915.

#126 – SE Palmeiras : Porcos

Les porcs. Vous vous doutez que ce surnom n’était pas apprécié par les supporteurs du club car il s’agissait d’une insulte donnée par les adversaires. Même s’il est consommé, le cochon a souvent eu une image dégradée dans nos cultures. Du fait que l’animal pouvait manger ses petits, qu’il était porteur de certaines maladies transmissibles à l’homme, qu’il apprécie de se vautrer dans la boue et qu’il se nourrit d’ordures et de charognes, il fut associé, chez les Egyptiens, au dieu mauvais Seth et les religions juives et musulmanes le proscrivirent de la nourriture. Chez les Romains, Pline l’Ancien le considéra comme le plus stupide des animaux. Au Moyen Âge, les autorités religieuses virent le cochon comme un attribut du diable car ce dernier grogne et se vautre dans l’ordure comme l’animal. Pourtant, avec le temps, il est devenu un symbole, un élément de l’identité du club et de ses supporteurs.

Au Brésil, dans le langage populaire, le terme désignait déjà et de manière péjorative les descendants des Italiens qui vivaient à São Paulo. Or, Palmeiras était le club de la communauté italienne de São Paulo. Il avait été fondé en 1914 par 4 italiens et s’était initialement nommé Societá Sportiva Palestra Italia, en reprenant comme couleurs celles du drapeau italien (vert, blanc, rouge). Si l’immigration italienne en Argentine est très connue (cf. #1 et #1335), elle fut quasiment tout aussi importante au Brésil (point culminant entre 1874 et 1930, avec environ 1,6 million d’immigrants), et en particulier dans l’État de São Paulo. Aujourd’hui, les différentes études démontrent qu’entre 10% et 20% de la population brésilienne est d’origine italienne. L’ambassade d’Italie au Brésil a estimé qu’en 2013 30 millions de brésilien étaient des descendants d’immigrants italiens (environ 15 % de la population brésilienne), dont la moitié dans l’État de São Paulo.

Mais, outre ce lien établi avec une communauté raillée, le club a également été directement comparé au cochon suite à un évènement arrivé en 1969. Pendant le championnat pauliste, deux joueurs du club rival des Corinthians moururent dans un accident de voiture. Les Corinthians souhaitèrent les remplacer par ce que l’on appellerait aujourd’hui des « jokers médicaux ». Pour le permettre, il fallait obtenir l’approbation unanime des autres clubs participants. Tous acceptèrent sauf Palmeiras. Les supporteurs des Corinthians considérèrent alors que les dirigeants de Palmeiras avaient un esprit de porc (ce qui signifiait qu’il n’était pas fair play). Lors du derby suivant entre les deux équipes, les supporters de Corinthians lâchèrent un cochon sur le terrain et scandèrent que Palmeiras était des porcs. Après s’être longtemps senti offensé par ce surnom, les supporteurs de Palmeiras acceptèrent ce surnom, aidé par une stratégie élaborée par l’un des directeurs du club, João Roberto Gobatto, directeur du Marketing. Pour faire taire ces moqueries, il eut l’idée dans les années 80 de faire adopter le cochon comme mascotte du club. Les supporteurs emboîtèrent le pas en créant un chant « Hé, Cochon ! Hé, le cochon ! » qui aujourd’hui enflamme le stade. En novembre 2016, juste avant le match contre l’Internacional, Palmeiras donna le nom Gobatto à la mascotte, en hommage à son Directeur Marketing qui eut cette idée de transformé une insulte en force du club.

#101 – RCD Espanyol Barcelone : Pericos

Pericos (comme l’autre surnom Periquitos) signifie les perruches. L’animal est devenu la mascotte du club. Pourtant, le chat aurait dû être l’animal qui représente le deuxième club de Barcelone. Mais chat et perruche ne font pas bon ménage. Tout commença en 1922 dans l’hebdomadaire sportif satirique et populaire, Xut !. Valentí Castanys, dessinateur et directeur de la publication, prit le parti de représenter les fans de l’Espanyol comme quatre chats noirs. Ceci faisait allusion au faible nombre de supporteurs et membres que comptait le club et, également, à leur malchance. Il faut rappeler que le club suspendit ses activités entre 1906 et 1909 faute de joueurs. A la même époque, à la fin des années 20, Félix le chat, qui avait pour surnom en espagnol Gato Perico ou Periquito (car il était l’un des premiers personnages de dessin animé à parler grâce à l’introduction du son au cinéma), connût un grand succès en Espagne. Ce fut le moment où les deux images s’associèrent dans l’esprit des gens pour parler de l’Espanyol. Le 26 août 1930, la couverture de Xut ! qui était consacré au transfert du joueur de l’Espanyol dénommé Zamora au Real Madrid, présentait quatre Gato Perico au lieu des habituels chats noirs. La même année, une autre publication, El Látigo Deportivo croqua une caricature des quatre premiers clubs du championnat : un lion apparaissait avec une chemise rayée (Atlético Madrid), un grand-père portait la chemise du Barça, un homme vêtu de blanc se lamentait (Real Madrid) et enfin un chat noir sous les traits de Felix et qui s’appelait Perico représentait l’Espanyol. Avec le temps, le chat disparut de l’imaginaire pour ne laisser que le terme Perico et l’animal associé.

Toutefois, ce n’est pas la seule histoire. En 1923, le club déménagea pour jouer ses matchs au Stade Sarriá. Le stade était bordé de palmiers et d’arbres où les perruches étaient nombreuses à vivre. Selon la légende, les vendeurs ambulants autour du Stade proposaient des graines aux supporteurs pour nourrir les oiseaux.

Avec l’avènement du franquisme, l’image des perruches disparut. Mais, au milieu des années 70, à l’occasion du 75ème anniversaire de l’Espanyol, le club imprima des autocollants avec la silhouette de l’oiseau et ce dernier réapparu comme surnom.

#78 – Cruzeiro EC : Raposa

Le renard. Le club fut caricaturé sous la forme d’un renard par Fernando Pieruccetti (mieux connu sous le pseudonyme de Mangabeira) en 1945. Álvares da Silva, secrétaire du quotidien Folha de Minas, qui délivrait l’une des pages sportives les plus importantes et dynamiques de la presse du Minas Gerais à cette époque, décida d’imiter son confrère de Rio de Janeiro, Jornal dos Sports, qui avait décidé quelques années auparavant de personnaliser les équipes cariocas au travers de personnages de bande dessiné. Flamengo était Popeye, Fluminense était Pó-de-arroz, Vasco était Almirante, Botafogo était Donald Duck et America était le Diable. Álvares da Silva confia à Fernando Pierucetti, professeur de dessin et illustrateur du supplément littéraire et de la page pour enfants du journal, la réalisation de ces mascottes qui devaient puiser leur source dans l’univers des fables d’Ésope et de La Fontaine, mais en utilisant des animaux de la faune brésilienne. Pierucetti dessina alors la mascotte des 3 grands clubs de la ville : Atlético, Cruzeiro et América.

L’inspiration pour trouver les animaux représentatifs des clubs vint d’éléments qui faisaient déjà partie de l’imagerie populaire. Club de la communauté italienne de la ville, Cruzeiro s’était appuyé sur ces dirigeants italiens au sens des affaires aiguisé pour se développer. A l’image de l’ascension laborieuse et astucieuse des habitants d’origine italienne vers les plus hautes couches sociales de Belo Horizente, le club véhiculait l’image d’une trajectoire croissante linéaire, marquée par la simplicité, le gout du travail constant et répété et la ruse et dont l’accumulation des efforts, au fil du temps, avait forgé la grandeur du club. Ces qualités étaient d’autant plus en vrai en 1945 que le club était alors présidé par Mário Grosso. D’origine italienne, directeur sportif, trésorier et entraineur par intérim à compter de 1935, il accéda à la présidence de Cruzeiro le 17 décembre 1942. Connu pour son intelligence, il usa de ruse et de persévérance dans la direction des affaires du club. Grâce à ses méthodes, il parvint à chiper plusieurs jeunes talents au nez et à la barbe de l’Atlético. L’ingéniosité de Grosso furent mises en avant par Pieruccetti pour justifier le choix du renard. En outre, cette manière se retrouvait dans l’équipe de Cruzeiro de 1945, triple championne d’État, qui comptait des joueurs expérimentés et connaissant les ficelles du football.

Les supporteurs de Cruzeiro s’approprièrent vite cette image, tout comme le club qui créa par la suite une mascotte officielle de renard. Il faut dire que Pieruccetti avait choisi pour le rival de l’Atlético le coq. Or, le renard est l’animal qui attaque les poulaillers. On raconte que Zé do Monte, l’idole de l’Atlético dans les années 1940 et 1950, entrait sur le terrain avec un coq sous le bras. En réponse, les fans de Cruzeiro promettaient de lâcher un renard sur le terrain, pour chasser l’animal de Zé do Monte.

#7 – CR do Flamengo : Urubu

Les vautours. Là encore, l’animal, mascotte du club, a naturellement donné son surnom au club. Néanmoins, pour Flamengo, ce surnom n’était pas au départ admis par les supporteurs du club. Dans les années 1960 , les fans rivaux commencèrent à appeler les supporteurs de Flamengo, les « vautours ». Il s’agissait d’une allusion raciste à la grande masse des fans du club, descendants des africains et provenant plutôt des classes populaires. Evidemment, le surnom était offensant et donc pour les fans de Flamengo, il s’agissait d’une insulte … jusqu’au 31 mai 1969.

Ce jour-là, Flamengo affrontait son rival de Botafogo qu’il n’avait plus vaincu depuis 4 ans. Pendant la semaine qui précédait la rencontre, les fans de Botafogo s’en donnèrent à cœur joie en traitant les supporteurs de Flamengo d’Urubu. Quatre amis âgés de 18 à 20 ans (Victor Ellery, Romilson Meirelles, Luiz Octávio Vaz et Erick Soledade), habitants de Leme, dans la zone sud de Rio, étaient déterminés à se venger, en captivant un vautour et en relâchant le jour du match. Dimanche après-midi, jour du match, les fans de Botafogo reprirent leur insulte et scandèrent que Flamengo était une équipe de « vautours ». Dans un Maracanã bondé, les 4 amis accrochèrent un drapeau du Flamengo au pattes de l’animal et le laissèrent alors prendre son envol. Fatigué, le vautour fit un petit tour au-dessus des travées, mais suffisant pour surprendre les supporters de Botafogo. Du côté de Flamengo, les tribunes vibraient en criant « É urubu, é urubu! » (C’est le vautour, c’est le vautour !). Flamengo gagna le match 2-1. Le lendemain du match, le quotidien « Globo » titrait « Urubu pousa na sorte do Botafogo » (Le vautour se pose sur la chance de Botafogo). Le journaliste Nelson Rodrigues raconta l’épisode de l’oiseau dans sa chronique et, dans le journal « Jornal dos Sports », le caricaturiste Henfil dessina, sous des traits vivants, l’animal en symbole du club. Malheureusement, le vautour fut abandonné à son sort et retrouvé sans vie le lendemain du match. Deux jours après son apparition acclamée, O Globo rapporta « Urubu que a torcida elegeu não teve sorte: morreu de fome. […] Quem realmente ficou triste foram os serventes do Maracanã, que ontem faziam a limpeza do estádio. Quase todos são torcedores do Flamengo, e gostariam que o novo símbolo da torcida ficasse vivo, para ser solto em triunfo diante da sede da Gávea, se o clube for campeão » (Le vautour choisi par les supporters n’a pas eu de chance : il est mort de faim. […] Ce sont les ouvriers du Maracanã qui nettoyaient le stade hier qui étaient vraiment tristes. Presque tous sont des supporters de Flamengo, et ils aurait aimé que le nouveau symbole des supporters reste en vie, pour être libéré en triomphe devant le siège de Gávea si le club remporte le championnat). Toutefois, la tradition fut perpétuée au match suivant puisqu’un nouveau vautour fut relâché lors du match face à Vasco.

Jusqu’à cette date, le célèbre marin Popeye était la mascotte du club. Créée en 1942 par le dessinateur Lorenzo Molas pour le « Jornal dos Sports », qui avait dessiné un personnage pour représenter chaque club participant au championnat Carioca, Popeye rappelait le sport qui donna naissance au club, l’aviron. En outre, pour Molas, Popeye représentait la bravoure et la capacité de Flamengo à renverser des situations presque impossibles. Alors que Popeye tirait sa force des épinards, celle de Flamengo provenait de ses supporters. Suite au vol du vautour, l’oiseau fut consacré comme mascotte du club, prenant la place de Popeye, et le surnom fut accepté par les fans.