#667 – FC Spartak Moscou : мясо

La viande. Certes, dans ce football business du XXIème siècle, les joueurs peuvent être considérés comme de la viande par les plus mercantilistes agents mais ce n’est pas cette raison qui conduit à ce surnom des joueurs du Spartak. Au contraire, pour comprendre la création de ce surnom, il faut remonter à une époque où le football demeurait encore une activité récréative, dans les années 1920, et sous un régime qui s’opposait au capitalisme, le communisme soviétique. Le club fut fondé en 1922, sous le nom de МКС (cercle sportif de Moscou), et sur les ruines dans un ancien club omnisport attaché au mouvement panslave Sokol. En 1923, les autorités communistes décidèrent que les clubs sportifs devaient s’identifier à un lieu géographique. Moscou étant une grande ville, le club prit le nom du quartier où il résidait (Presnenski) et s’appella Красная Пресня (Rouge Presnenski). Puis, en 1926, nouvelle intervention des autorités qui intimèrent aux clubs de se lier avec des administrations ou des syndicats ou coopératives de travailleurs. Les autres grands clubs moscovites étaient alors déjà patronnés par les grandes administrations centrales : le Dynamo Moscou était soutenu par la police politique, le CSKA Moscou par l’armée rouge et le Lokomotiv Moscou par la compagnie des chemins de fer. Le futur Spartak était alors supporté par Nikolai Pashintsev, président du comité central du syndicat de l’industrie alimentaire, et ce dernier mit le club sous la direction et le parrainage d’une coopérative de bouchers et de commerçants alimentaires. Le club prit donc le nom de Пищевики (Travailleurs de l’alimentation) de 1926 à 1931. Après 1931, le club changea de partenaire et de nom (Промкооперация – Coopérative de production).

Jusqu’aux années 1970, les groupes de supporteurs étaient plutôt rares et donc les surnoms des clubs existaient peu. De même, les rivalités liées à des derbys étaient inexistantes. La première association de supporteurs du Spartak apparût en 1972 et les rivalités avec ceux des autres clubs naquirent à la fin des années 1970. Les supporteurs du CSKA auraient alors qualifié les joueurs et fans du Spartak de мясо. Ce surnom faisait référence aux liens historiques du club avec la coopérative des bouchers et commerçants. Surtout, comme ce sobriquet était donné par les supporteurs du CSKA, il se devait être péjoratif. Or, quel aliment faisait le plus défaut dans les rayons des magasins soviétiques ? La viande. Ce qui faisait penser que les bouchers étaient des escrocs. Pour certains fans du Spartak, ce surnom demeure encore une insulte mais pour la majorité s’est aujourd’hui une fierté. En 2002, l’attaquant Dmitry Sychev réalisa une sacrée performance en marquant 8 buts lors de ces 12 premiers matchs pour le Spartak. Il montrait alors après ses buts un maillot où il était marqué : Кто мы? Мясо (Qui sommes nous ? La viande). Ce geste ancra définitivement le surnom.

#664 – Hapoël Beer-Sheva : האדומים מהדרום

Les rouges du Sud. En 1949, Zalman Caspi, un ancien joueur de football du club du Hapoël Ramat Gan mit en place un système de scouting pour trouver de jeunes talents dans les camps de transit de la région de Beer Sheva, afin de créer éventuellement une équipe de football. Le club fut alors fondé, sous l’égide de Hapoël, une organisation sportive qui dépendait du syndicat de travailleurs הסתדרות (Histadrout – Fédération générale des travailleurs de la Terre d’Israël).

Ce syndicat avait été fondé en 1920, porté par des mouvements socialistes, et avait pour objectif de permettre l’installation des juifs en Palestine, qui était sous mandat britannique, ainsi que la promotion et la défense des travailleurs juifs. Il investit alors toutes les sphères d’activité des ouvriers : éducation, construction de logements, santé, banque, entreprises coopératives, protection sociale, culture et donc sport. Ainsi, Histadrout fit naître en 1926 le mouvement sportif Hapoël (הפועל), ce nom étant dans la tradition de gauche du syndicat, signifiant « l’ouvrier ». Etant donné les orientations politiques du syndicat et le fait que le Comité olympique israélien était contrôlé par le rival du Maccabi, Hapoël rechercha des liens avec des organisations sportives des partis socialistes similaires et devint ainsi membre du Socialist Workers’ Sport International et de l’International Workers and Amateurs in Sports Confederation. Hapoël reprit également les codes internationaux de l’époque des mouvements de gauche : fossile et marteau dans son blason et couleur rouge pour ses tenues.

Le rouge est la couleur de tous les mouvements de gauche depuis le XVIIIème siècle, quand les premiers mouvements prolétaires émergèrent et utilisèrent le drapeau rouge comme bannière. Ce symbole proviendrait de la Marine, qui utilisait le drapeau rouge avant une bataille pour signifier qu’il ne sera pas fait de prisonnier lors du combat. Ainsi, il était un signe d’un esprit combatif sans concession, du sang prêt à couler. Et cet état d’esprit séduisit les premiers mouvements de révolte d’ouvriers (qui jaillirent dans les villes portuaires), prêts à lutter au prix de la vie jusqu’à l’abdication de leurs adversaires. Ainsi, les ouvriers du port de Londres, lors de leur grève de 1768, auraient été les premiers à utiliser le drapeau rouge. Il apparût ensuite lors de différentes révolutions en France et devint la bannière des mouvements socialistes lors de la révolution de 1848 et surtout pendant la Commune de Paris en 1871. Depuis, il s’imposa comme drapeau (avec quelques attributs) des différents pays communistes (URSS, Chine, Vietnam, Mongolie …) et des parties politiques de gauche.

Beer-Sheva copia donc les symboles de l’Hapoël et ses maillots devinrent rouge. Enfin, Beer-Sheva, 6ème ville d’Israël, est la plus grande cité du Neguev et le centre administratif pour le sud d’Israël. Résultat, afin de le distinguer des autres clubs existant sous l’égide de l’Hapoël et portant également du rouge, au surnom classique fut rajouté la localisation géographique de la ville de Beer-Sheva.

#541 – RNK Split : Crveni

Les rouges. Le surnom fait effectivement référence à la présence de la couleur dans le blason du club comme sur le maillot du club (aujourd’hui, le kit du club est même intégralement rouge). Mais, ce surnom fait également le lien avec l’orientation politique du club dont la couleur résulte. Le club fut fondé en 1912 sous le nom de HRŠD Anarch. HRŠD était l’acronyme de Hrvatsko Radničko Sportsko Društvo (Société Sportive des Travailleurs Croate) et Anarh, diminutif de Anarchiste. On comprend immédiatement que le club représentait des idées très à gauche de l’échiquier politique et avait le soutien de la classe ouvrière de la ville (notamment des travailleurs du chantier naval). Le fondateur du club, Šimun Rosandić, déclara « Mi učenici Muške zanatske škole – maranguni – odlučili smo osnovati nogometni klub. Igrali smo za gušt, ali i iz protesta prema svakom zlu. Dugo smo smišljali kako dati ime klubu, meni je prvome palo napamet ime – Anarhist! Poslin smo ga skratili u Anarh. Učinilo mi se da je to najbolje ime, jer je ono u sebi imalo i – ništo drugo! A šta drugo? E, neka to drugi misle! » (Nous, étudiants de l’école d’artisanat pour hommes – Maranguni – avons décidé de fonder un club de football. Nous jouerons pour le plaisir, mais aussi par protestation contre tous les maux. Nous avons longtemps réfléchi à comment nommer le club, j’ai été le premier à penser au nom – Anarchiste !. Il me semblait que c’était le meilleur nom, parce qu’il était tout et rien d’autre ! Et quoi d’autre ? Eh bien, que les autres pensent ça !). Cet engagement politique n’était pas de vains mots. Pendant la guerre civile espagnole, les membres du club tentèrent de monter un bataillon de volontaires pour combattre aux côtés de la coalition antifasciste contre Franco. Lors de la Seconde Guerre Mondiale, de nombreux joueurs et membres du club répondirent à l’appel des communistes pour combattre les occupants.

La première couleur du club n’était pas le rouge. Certains défendent que le maillot était noir (couleur des anarchistes) tandis que d’autres prétendent qu’il était rayé bleu et blanc. Toutefois, dès les années 1920 ou 1930, pour réaffirmer son appartenance aux mouvements ouvriers, le club opta pour le rouge. Tout au long de son histoire, Split modifia le design de son maillot relativement souvent au gré des changements de nom du club, du manque d’argent (qui ne permettait pas d’acheter le maillot souhaité) mais le rouge demeurait la couleur prédominante. Dans la décennie qui a suivi l’indépendance de la Croatie en 1991, la nouvelle direction souhaita imprimer une nouvelle marque et, en 1996, ils optèrent pour un maillot bleu et blanc à rayures verticales, sur le modèle du premier maillot du club. Mais, après quelques années, en 2001, la direction revint à la célèbre couleur rouge du club.

#443 – Club Cerro Porteño : Azulgrana

Les bleus et grenats (rouges). Quand le club fut fondé le 1er octobre 1912, le Paraguay connaissait une période politique trouble. Coincé entre le Brésil et l’Argentine, le pays connut une fin de XIXème siècle difficile où il perdit une guerre et devint quasiment un état vassal du Brésil. Puis, sous le gouvernement de Bernardino Caballero (1880-1886), le pays se redressa et deux partis politiques naquirent en 1887 : le Parti Liberal (symbolisé par la couleur bleu) et le Parti Colorado (rouge). Au cours des années suivantes, le Parti libéral dirigea le pays mais il était divisé en fractions, ce qui conduisit à une instabilité politique constante. En outre, les révolutions successives menées à la fois par les libéraux dissidents et les Colorados déstabilisèrent également les institutions. Le pays était fractionné en deux parties qui s’affrontaient régulièrement et pas uniquement dans les urnes.

La maison familiale des Núñez en était la parfaite illustration. Une partie de la famille dont la mère supportait les libéraux tandis que l’autre emmenée par le père était pour les colorados. Or, ce fut dans cette maison avec le support de Mme Susana Núñez et de certains de ces enfants que le club fut créé. Mme Núñez décida alors que la toute nouvelle institution devait être un havre de paix où les supporteurs devaient être unis derrière leur équipe, quelque soit leurs origines et orientations politiques, et seul le sort de celle-ci était important. Elle souhaitait reproduire au sein du club la solidarité de sa famille malgré les différences politiques qui la composait et ainsi démontrer dans la pratique que les Paraguayens, quel que soit leurs opinions politiques, étaient capables de faire de grandes choses quand ils étaient unis. Pour cette raison, elle cousit un drapeau aux couleurs des deux partis politiques, bleu et rouge, mais ces dernières étaient intercalées donc étroitement liées. Ces deux couleurs furent alors adoptées par le club.

#420 – Beitar Jérusalem FC : המנורה

La menorah, le chandelier à sept branches des Hébreux, dont la fabrication est prescrit dans la Bible (le livre de l’Exode). Il devint un des objets cultuels et sacrés du Tabernacle et plus tard du Temple de Jérusalem. Fondé en 1936, le premier nom de l’équipe fut « la Menorah » . Le choix de ce nom n’était pas le fait du hasard car le fondateur du club, David Horn, était également à la tête de la branche du Beitar à Jérusalem. Or, le mouvement sioniste avait opté pour cette Menorah comme symbole. Et le club de Jérusalem était finalement une émanation du mouvement politique. Ce dernier, comme d’autres associations sionistes, souhaitait offrir aux juifs une structure politique, militaire, culturelle et sportive. Les fondateurs du mouvement voulaient sortir de l’image du Juif en exil avec une nouvelle figure du Juif, un homme avec des capacités militaires, courageux. Ainsi, en s’inspirant de cette idéologie et également des bataillons hébreux (bataillons composés de Juifs incorporés dans l’armée britannique pendant la Première Guerre Mondiale), le Beitar adopta l’idée de créer des légions paramilitaires comme une pierre angulaire de sa vision du monde, en tant que force qui conduirait le sionisme à l’indépendance politique. A ce titre, le Beitar choisit comme emblème celui des bataillons hébreux, une Menorah. Ce symbole dépassait le cadre des bataillons car il s’agit également de l’emblème le plus vieux du judaïsme et le plus fort (bien avant l’étoile de David).

#397 – Hapoël Tel Aviv : הפועל

L’ouvrier. Le club de Tel Aviv appartient à un mouvement sportif nationale en Israël, dénommé הפועל (Hapoël) qui signifie l’ouvrier. Durant les années 1920, plusieurs mouvements politiques ou syndicalistes tels que le Maccabi ou le Beitar naquirent. Ce fut le cas du syndicat הסתדרות (Histadrout – Fédération générale des travailleurs de la Terre d’Israël) fondé en 1920 par des partis socialistes pour unir les travailleurs juifs d’Israël. Les objectifs étaient de faciliter l’aliyah des immigrants et défendre les travailleurs juifs dans la Palestine sous mandat britannique, ceci dans un cadre socialiste. Son développement offrit des structures économiques et politiques au futur état (banque, indemnisation du chômage et bureau de placement, système éducatif, caisse d’assurance-maladie, coopératives agricoles, et une armée clandestine).

En 1924, son secrétaire général, Ben Gourion, convainquit le syndicat de proposer également des activités culturelles ou sportives à ses membres, afin de cimenter la nation juive. Ainsi, le mouvement sportif Hapoël apparut, comme émanation du syndicat de gauche. De nombreux clubs sportifs dénommés Hapoël se créèrent dans tout le pays, à Tel Aviv, Jérusalem, Beer-Sheva, Petah-Tikvah ou encore Ramat Gan. Toutefois, pourquoi celui de Tel Aviv s’appropria le nom du mouvement, Hapoël, comme surnom ? Pourquoi est-il LE représentant du mouvement ? Tout simplement car le premier club sportif de l’association Hapoël fut celui de Tel Aviv, créé à l’été 1923. Malheureusement, l’association se dissout un an et demi plus tard. Une nouvelle tentative de création de l’Hapoel Tel Aviv échoua en 1925. Puis, un an plus tard, le troisième essai fut le bon et le club réussit à s’établir. En outre, en 1934, l’Hapoël Tel-Aviv remporta le championnat de Palestine de football, premier titre majeur d’un club juif.

#367 – Widzew Łódź : Czerwona Armia

L’armée rouge. Le club polonais joue en rouge depuis sa fondation. Le 24 janvier 1922, le Parti Socialiste Polonais fonda un nouveau club à Łódź, le Robotnicze Towarzystwo Sportowe Widzew Łódź (l’Association Sportive des Travailleurs Widzew Łódź), sur les ruines d’un club ouvriers créé en 1910, par des employés de l’usine textile Heinzel and Kunitzer Cotton Products, dans le quartier populaire de Widzew. La ville de Łódź était un grand centre de production textile entre le XIXème siècle et les années 1990, ce qui conduisit la population à passer de 13 000 habitants en 1840 à plus de 500 000 en 1913. Juste avant la Première Guerre mondiale, Łódź était devenue l’une des villes industrielles les plus densément peuplées au monde (avec 13 280 habitants par km). Les idées socialistes se diffusèrent donc rapidement et avec enthousiasme au sein de la classe ouvrière de la ville et le Parti Socialiste y développa un bassin d’adhérents importants. Avec ce club, il souhaitait « propager la culture physique et l’exercice corporel parmi les masses ouvrières ». Comme une émanation du Parti Socialiste, la couleur rouge s’imposa donc naturellement. D’autant plus que le précédent club ouvriers, qui s’arrêta avec la Première Guerre Mondiale, évoluait également en rouge. En 1913, le terme czerwoni (rouge) était déjà utilisé par la presse pour évoquer l’équipe de football de Widzew. En 1914, la presse locale qualifiait aussi les spectateurs du Widzew, les czerwonymi (les rouges), et parfois également les biało-czerwonymi (les blancs et rouges). Aujourd’hui, les termes de czerwona armia (l’armée rouge), czerwoni (les rouges) et czerwono-biało-czerwoni (les rouges-blancs-rouges) sont généralement utilisés come synonyme du Widzew Łódź.

#201 – Argentinos Junior : el Bicho, los Bichos Colorados

La punaise, les punaises rouges. Ce surnom fut attribué par un journaliste au club dans les années 50. Club amateur reconnu et triomphant, Argentinos Junior négocia mal le virage du professionnalisme dans les années 30. Participant à la création du championnat professionnel, les charges salariales des joueurs plongèrent le club dans les difficultés économiques et connut le déclin sportif en sombrant en seconde division argentine. De 1937 à 1955, le club se débâtât dans les divisions inférieures. En 1956, Argentinos Junior remonta enfin en première division et commença à titiller les 5 grands argentins (Boca, River, Racing, Independiente ou San Lorenzo) qui trustaient tous les titres. L’apothéose demeura la saison 1960 où le club atteignit la finale face à River Plate. Cette renaissance se fit grâce à une génération de jeunes joueurs tels que Pederzoli, Pando, Oscar Distéfano, Sciarra, Ditro, Sainz, Moreno et Nappe et un style de jeu offensif et flamboyant. Au lendemain d’une victoire face à Boca Juniors (1-0 le dimanche 4 août 1957, but de Héctor Tedeschi), le journaliste Diego Lucero publia une tribune dans le quotidien Clarín où il utilisa pour le première fois le terme de « bichitos colorados » pour désigner le club. En fait, son style de jeu fit penser à des insectes qui piquaient son adversaire à chaque attaque.

Le rouge faisait évidemment référence à la couleur des maillots. Le club fut fondé en 1904 par l’union de deux associations sportives dont les membres étaient anarchistes ou socialistes. Pour honorer l’élection d’Alfredo Palacios à la députation (le premier député socialiste élu en Argentine), les membres décidèrent d’opter pour la couleur rouge du Parti Socialiste, en remplacement du vert et du blanc.

Parfois, le surnom est complété par « La Paternal » , référence au quartier dont est originaire le club.

#193 – Stade Rennais : les Rouge et Noir

Fondé en 1901 par des étudiants de l’Université de Rennes, le club arborait un maillot rayé bleu ciel et bleu marine, s’inspirant des teintes du Havre AC. En 1902 débuta le championnat régional dont le premier vainqueur fut le FC Rennais. Puis, le Stade Rennais remporta la seconde édition. Mais, un troisième club l’US Servannaise, club malouin principalement composé de joueurs britanniques, s’avérait être de plus en plus un redoutable rival. Afin de concurrencer l’équipe de Saint-Malo, le Stade Rennais et le FC Rennais décidèrent d’unir leurs forces en 1904 pour devenir le Stade Rennais Université Club. Le nouveau club opta pour son maillot pour les rayures du Stade Rennais et les couleurs du FC Rennais, le rouge et le noir.

Selon l’historien du club, Claude Loire, ces deux couleurs représentent d’un côté l’esprit laïque (le rouge de la République française) et de l’autre la religion catholique (le noir rappelle la couleur des soutanes), deux courants à la base de l’identité du FC Rennais, fondé par des étudiants de mouvance anarcho-syndicaliste. Tout ceci, un avant la Loi de Séparation de l’Eglise et de l’Etat. Si les couleurs sont désormais traditionnelles, les rayures disparurent assez vite. D’abord blanc et noir (couleur de la ville de Rennes), le logo du club s’aligna avec les couleurs du maillot rouge à partir des années 1960.

Pour la petite histoire, en 2024, alors que le Stade Rennais s’apprêtait à accueillir l’AC Milan, dans le cadre des barrages de la Ligue Europa, la préfecture décida d’interdir de porter des insignes aux couleurs du club italien … sauf que les couleurs du Milan sont celles de Rennes.

L’union des deux club ne donna pas à court terme les résultats escomptés. Si l’US Servannaise et le Stade Rennais UC se partagèrent les titres régionaux jusqu’en 1914, l’équipe malouine remporta la majorité des titres (8 au total). Parfois de manière assez singulière. Lors de la dernière journée de la saison 1904-1905 les deux clubs étaient à égalité. L’US Servannaise joua son dernier match face au Stade Vannetais qui se termina par un résultat nul. Mais les Vannetais refusèrent de jouer la prolongation (pourtant obligatoire), donnant ainsi sur tapis vert la victoire à l’US Servannaise. Avec ses deux points, le club malouin remporta son premier titre. La saison suivante, l’US Servannaise fut suspendu à un match de la fin et termina dernière du championnat. Le nouveau Stade Rennais fut donné vainqueur. Mais, le 9 avril 1906, l’US Servannaise déposa un appel pour obtenir de rejouer le titre. Devant le refus du Stade Rennais, le titre fut donné à l’US Servannaise. Lors de la saison 1906-1907, l’US Servannaise domina haut la main le championnat au point de se permettre de ne pas jouer la dernière journée contre le Stade Rennais.

#96 – Servette Genève : les Grenats

Ce surnom se rattache à la couleur des maillots du club genevois. Mais, l’origine de cette couleur n’est pas vraiment connu. A la création du club en 1890, les premières couleurs furent vertes et rouges, suite au don par un de ses fondateurs, M. Fiala, d’un tissu affichant ces couleurs. Puis, rapidement, les gazettes de l’époque surnommait le Servette, les rouges. Ce fut notamment le cas dans un article du 11 décembre 1903 du « Journal de Genève ».

Mais, ce même journal, 5 ans plus tard (le 6 septembre 1908), dénomma l’équipe, les grenats. Les motivations pour changer de couleur demeurent inconnues et les versions se multiplient. Certains évoquent que les raisons furent politiques. Ainsi, dans certains cantons suisses, les instances du football poussèrent des clubs liés au syndicat à changer leur maillot rouge, couleur trop connoté politiquement, pour d’autre. Toutefois, le Servette n’était pas un club prolétarien mais peut-être que les dirigeants de l’époque suivirent le mouvement et se détachèrent du rouge pour une couleur proche mais plus « noble ».

D’autres avancent une raison de courtoisie. La période 1905-1910 marqua l’émergence des premiers matchs internationaux. Bien que la fédération suisse fut créée en 1895, le premier match officiel de l’équipe nationale suisse se joua contre la France seulement le 12 février 1905 à Paris. Et dès ce premier match, le maillot de la sélection devint rouge, à l’image du drapeau de la Confédération helvétique. Par respect, le club genevois aurait donc délaissé le rouge pour que cette couleur fusse seulement portée par la Nati, l’équipe nationale helvète.

Enfin, la dernière hypothèse serait plus prosaïque et lié à la réalité de nombreuses équipes de l’époque. La qualité des maillots était aléatoire et en 1905, le fournisseur du club leur procura des maillots dont le rouge tiré vers le brun-rouge. Cette couleur sombre plut probablement aux dirigeants qui l’adoptèrent définitivement.