#448 – Cork City FC : Rebel Army

L’armée rebelle. Cork, situé dans le plus grand et le deuxième comté le plus peuplé d’Irlande, est connu comme une ville (et un comté) où de nombreux soulèvements sont nés. Notamment lors de la guerre d’indépendance (1919-1922) et de la guerre civile (1922-1923), le comté et la ville furent des points focaux. Michael Collins, l’un des importants leaders indépendantistes, est né dans le comté de Cork, et un autre bien connu, Tom Barry, y mena une guerrilla avec ses Flying column. Pourtant, sa réputation ne s’est pas construite à cette époque mais les racines de ce sentiment rebel remontent bien plus tôt. Au IXème siècle, les vikings s’installèrent en Irlande et les chroniques de l’époque rapportent déjà que les comtés de Waterford et de Cork se rebellèrent en détruisant un château viking et tuant le chef nordique connu sous le nom de Gnimbeolu. Au XIIème siècle, l’ambitieux clan MacCarthy de Cork réussit à établir un royaume indépendant, en rébellion du royaume de Munster de la famille O’Brien. Mais, c’est au XVème siècle que la ville et le comté gagnèrent définitivement ce surnom. A la fin de ce siècle, Henry VII, de la maison royale de Lancastre, remporta la guerre des roses, face à la maison royale d’York et s’empara de la couronne anglaise. Evidemment, les partisans des York ne baissèrent pas pavillon et espéraient pouvoir reprendre la couronne. Mais il leur manquait un candidat autour duquel s’unir, les hommes de la famille York ayant pour la plupart été tués durant la guerre. Or, à Cork prit naissance deux mouvements en moins de 6 ans qui soutinrent deux prétendants au trône anglais, qui se revendiquaient issus de la famille York. Les deux personnages, Lambert Simnel et Perkin Werbecque, étaient des usurpateurs et leurs rebellions s’effondrèrent rapidement. Mais ces contestations et insoumissions récurrentes soutenues par les habitants de Cork convainquirent la monarchie anglaise d’appeler la ville, la cité rebelle.

#447 – SC Fribourg : Breisgau-Brasilianer

Les brésiliens du Breisgau. Fribourg (dont le nom officiel est Fribourg en Brisgau) est la ville principale de la région historique du Brisgau, située dans le land de Bade-Wurtemberg, à 9.000 km du Brésil. S’il existe quelques « colonies » allemandes au Brésil, il n’y a en revanche pas de forte immigration brésilienne dans le Brisgau. Alors d’où vient cette comparaison avec le Brésil.

Lorsque le SC Fribourg, qui jusqu’alors n’avait joué qu’au niveau amateur, apparut en Bundesliga pour la première fois en 1993, il surprit les autres clubs ainsi que le public. Sous la houlette de son entraineur, Volker Finke, arrivé deux ans plus tôt, le SC Fribourg développa un jeu attrayant basé sur du pressing, couverture des espace, passes courtes et changements rapides de rythme. Lors d’une défaite face au Bayern Munich, Lothar Matthäus déclara « Die Freiburger haben mich tief beeindruckt » (Les fribourgeois m’ont profondément impressionné). Ainsi, au fil des matchs, ce style de jeu séduisit et l’équipe gagna alors ce surnom. La première partie de saison fut plutôt réussie, avec une onzième place à la trêve hivernal. Les matchs retours furent plus difficiles, le club échappant, au final, à la relégation au bénéfice de la différence du but. Toutefois, à noter une victoire 3 buts à 1 face à l’ogre munichois.

La saison suivante, le club réussit à atteindre la 3ème place à seulement trois points du champion, le Borussia Dortmund. Pendant 16 ans, Volker Finke dirigea l’équipe, lui donnant un esprit et un style de jeu particulier, même si le club connut des relégations. Ce style plutôt offensif trouva sa comparaison avec le Brésil, celui des années 1970-1990 qui fit tant rêvé les amateurs de football. Depuis, dès que le club connait des succès, développe du beau jeu, le surnom revient parmi les supporteurs.

#446 – FC Admira Wacker Mödling : Admiraner

Le surnom est dérivé du nom du club, Admira. Il s’agit du terme latin pour « admirer ». Comme nous en avons parlé dans plusieurs articles, le nom des clubs de football fondés à la fin du XIXème siècle et au début du XXème associait souvent un terme anglais, pour rappeler la patrie d’origine du football ou s’inspirer des noms des clubs anglais, ou un terme latin pour rendre le nom plus chic ou aristocrate (cf article #111). Ce fut peut-être le cas du club créé à Vienne et qui émigra dans les années 1960 à Mödling. En 1905, un nouveau club fut fondé dans le quartier viennois de Jedlesee, par la fusion de deux anciennes associations, Burschenschaft Einigkeit et Sportklub Vindobona. Il s’avéra difficile de trouver un nom lors de la première réunion du club. Finalement, un homme qui revenait des Etats-Unis proposa de retenir le nom du navire sur lequel il fit son voyage transatlantique, « Admira ». Cette suggestion remporta une large approbation et cloua le débat.

#445 – Stade Brestois : les Ti’Zefs

Ce surnom se limitait initialement qu’à certains habitants de Brest mais au fil des années s’est étendu à l’ensemble des brestois. Le pont de la Recouvrance sur la Penfeld réunit la rade mais les deux rives sont bien différentes. A gauche, se trouve le quartier originel et distinctifs des ti-zefs, qui ont un parlé si typique, mélange de breton, de l’argot des ouvriers et des marins et de vieux français, et où des syllabes sont avalées.

L’origine de ce sobriquet n’est pas connu avec certitude. La version la plus répandue repose sur un vent doux qui ramenait les bateaux au port. Ce vent serait un petit zéphyr, qui avec la prononciation particulière des habitants du quartier devient ti’zef.

Mais d’autres estiment que le surnom serait plutôt lié au prénom des habitants. En effet, il y aurait eu dans ce quartier de nombreux enfants prénommés Joseph, des petits joseph, abrégés en ti’zef. Aujourd’hui, le terme a dépassé ce quartier pour s’imposer comme le surnom des brestois et particulièrement dans les travées du Stade Francis-Le Blé.

#444 – CD Primeiro de Agosto : os Militares

Les militaires. Le club fut fondé le 1er août 1977, quelques mois après l’indépendance du pays (11 novembre 1975). Après une longue guerrilla (1961-1975), le pays obtint son indépendance du Portugal et constitua un régime communiste sous l’emprise du Mouvement populaire de libération de l’Angola. Naturellement, les grandes administrations du pays (armée, force policière …) participèrent à consolider le régime et structurer les institutions, notamment au travers du sport. Chacun créa sa structure omnisports. Ainsi, la fondation du 1º de Agosto était due à une stratégie de promotion et de développement du sport définie par les Forces armées populaires pour la libération de l’Angola (FAPLA), à travers le Comité national des sports militaires. Dirigé par les militaires, l’association est le club des forces armées angolaises qui est également son principal sponsor.

#443 – Club Cerro Porteño : Azulgrana

Les bleus et grenats (rouges). Quand le club fut fondé le 1er octobre 1912, le Paraguay connaissait une période politique trouble. Coincé entre le Brésil et l’Argentine, le pays connut une fin de XIXème siècle difficile où il perdit une guerre et devint quasiment un état vassal du Brésil. Puis, sous le gouvernement de Bernardino Caballero (1880-1886), le pays se redressa et deux partis politiques naquirent en 1887 : le Parti Liberal (symbolisé par la couleur bleu) et le Parti Colorado (rouge). Au cours des années suivantes, le Parti libéral dirigea le pays mais il était divisé en fractions, ce qui conduisit à une instabilité politique constante. En outre, les révolutions successives menées à la fois par les libéraux dissidents et les Colorados déstabilisèrent également les institutions. Le pays était fractionné en deux parties qui s’affrontaient régulièrement et pas uniquement dans les urnes.

La maison familiale des Núñez en était la parfaite illustration. Une partie de la famille dont la mère supportait les libéraux tandis que l’autre emmenée par le père était pour les colorados. Or, ce fut dans cette maison avec le support de Mme Susana Núñez et de certains de ces enfants que le club fut créé. Mme Núñez décida alors que la toute nouvelle institution devait être un havre de paix où les supporteurs devaient être unis derrière leur équipe, quelque soit leurs origines et orientations politiques, et seul le sort de celle-ci était important. Elle souhaitait reproduire au sein du club la solidarité de sa famille malgré les différences politiques qui la composait et ainsi démontrer dans la pratique que les Paraguayens, quel que soit leurs opinions politiques, étaient capables de faire de grandes choses quand ils étaient unis. Pour cette raison, elle cousit un drapeau aux couleurs des deux partis politiques, bleu et rouge, mais ces dernières étaient intercalées donc étroitement liées. Ces deux couleurs furent alors adoptées par le club.

#442 – Royale Union Saint-Gilloise : les Apaches

La tournée de Buffalo Bill en Europe et en Belgique qui donna le surnom au club de Gent (cf article #69) et qui illustrait les luttes avec les indiens au Far West n’est pas directement à l’origine de ce sobriquet donné aux joueurs de l’Union. S’il fait bien référence au peuple indien, il est surtout lié aux bandes criminelles du Paris de la Belle Époque qui étaient surnommées les Apaches. Au début du XXème siècle, dans les classes populaires habitant l’Est parisien naquirent des bandes de délinquants qui se différenciaient du grand banditisme par leurs actes de violence gratuite et leurs habits distinctifs (pull rayé, foulard rouge, casquette à visière). Ce surnom, écrivait un juge au tribunal de la Seine en 1907, « est depuis quelques années une façon de désigner tous les individus dangereux, ennemis de la société, sans nation ni famille, déserteurs de tous les devoirs, prêts aux affrontements les plus audacieux, et à toutes sortes d’atteintes aux personnes et aux biens ». Ces bandes, qui faisaient face à une police dépassée en nombre et en moyen, firent trembler la bourgeoisie parisienne. Ce surnom fut attribué par la presse à ces bandes à partir de 1900 afin d’assimiler les mœurs de ces voyous à celles supposées des apaches du Far West. En effet, à l’époque, les récits erronés, empreints de brutalités et de faits sanglants, sur le Far West et les terrifiants Peaux-Rouges circulaient en Europe, la tournée de Buffalo Bill véhiculant ces fantasmes.

Comment le surnom arriva à Bruxelles ? Il semble que dans les mêmes années, l’Union développait un jeu brutal où il arrivait fréquemment que l’équipe adverse se retrouvait avec des joueurs blessés à l’issue du match. Le lien fut donc établi avec les délinquants violents parisiens et les joueurs de l’Union. Toutefois, d’autres avances que le lien serait les origines modestes communes aux malfrats parisiens et aux joueurs de l’Union.

#441 – Paysandu SC : Papão

Le papão est un personnage populaire au Portugal et au Brésil (ainsi que dans certaines régions espagnoles) similaire au père fouettard. Il s’agit d’un monstre mangeur d’enfants désobéissants. Les parents n’hésitent pas à dire à leurs enfants de suivre les consignes sinon le papão va venir les manger. Le terme papão dérive de papar qui signifie manger, dévorer. Comment est né ce surnom ? En 1948, le journaliste Everardo Guilhon, du journal A Vanguarda, créa la mascotte du club sous l’image d’un loup. Il s’inspira pour cela du surnom de l’équipe à l’époque qui était Escuadrão de Aço (Escadron d’Acier). Dans les années 40, le club avait gagné ce surnom car l’équipe dégageait une certaine force, inspirait la crainte qui lui avait permis de remporter de nombreux championnats régionaux (6 titres). Pour amplifier la peur que devait représenter cette mascotte, il l’appela bicho papão, en souvenir de sa mère qui lui disait quand il était jeune « dorme logo, pois lá vem o bicho-papão ! » (dors vite, car le père fouettard arrive). La mascotte comme le surnom furent immédiatement adoptés par les supporteurs.

A partir de ce surnom, d’autres furent créés : bicho papão naturellement. Mais également, papão da curuzu en référence au stade du club dont le surnom est curuzu, papão da Amazônia et papão do Norte, le club résidant à Belém do Pará, situé sur le delta de l’Amazone, au nord du pays.

#440 – MTK Budapest : MTK

Le surnom est simpliste quand il reprend simplement les initiales du nom du club. Mais ce MTK a une forte portée symbolique lors de la création du club et perdura pendant quasiment toute la vie de l’association. A la fin du XIXème siècle, l’activité sportive était monopolisée par l’aristocratie chrétienne de Budapest. Du fait de leurs origines juives et/ou non-aristocrates, de nombreux pratiquants ne pouvaient pas franchir les portes des associations sportives existantes. Dans l’appartement de Kálmán Szekrényessy, une nouvelle association fut créée le 16 novembre 1888, le MTK. La renommée nationale et internationale de l’athlète Szekrényessy ainsi que ses aspirations démocratiques et son origine noble hongroise constituaient une garantie pour la légalisation de ce nouveau club en dehors des cercles chrétiens. Pour le nom, les fondateurs voulurent éviter de faire référence à leur confession juive aussi bien pour signifier que le club était ouvert à tous que pour ne pas subir de répression antisémite. En outre, dans une montée des nationalismes au sein de l’Empire Austro-Hongrois, ils retinrent un nom à consonnance hongroise Magyar Testgyakorlók Köre (Cercle des praticiens physiques hongrois). C’était une innovation pour l’époque alors que les clubs de gymnastiques étaient sous l’influence allemande et ceux d’athlétisme sous domination anglaise. Malgré quelques évolutions au fil du temps, le trigramme MTK demeura quasiment pendant toute la vie du club à l’exception du début des années 1950. De 1950 à 1956, suite à sa renaissance après la seconde guerre mondiale, les autorités communistes placèrent d’abord le club sous la tutelle du Ministère de l’Intérieur puis du Syndicat des ouvriers textiles, ce qui conduit à changer le nom du club et ses couleurs. Mais, la puissance du nom et des couleurs de l’un des plus grands clubs hongrois l’emportèrent et le MTK redevint le MTK en 1956.

#439 – Tout Puissant Mazembe : les Corbeaux

L’oiseau à la robe noire fait indéniablement penser au maillot noir de l’équipe. Mais pas que. En 1939, les moines bénédictins de l’Institut Saint-Boniface souhaitaient occuper leur scout avec une activité sportive. Ainsi fut fondé le Tout Puissant sous le nom de FC Saint-Georges, saint patron des scouts. Le choix des couleurs noires et blanches n’est pas expliqué mais on ne peut s’empêcher de penser qu’il est lié à l’ordre des moines. Saint Benoît, fondateur de l’ordre, créa une règle basée sur la rigueur, le travail, le silence, l’humilité, la pauvreté et la charité. Ainsi, Saint Benoît choisit une tenue sobre, noire (la couleur était un artifice inutile), pour ses moines, qui se distingue des autres ordres. Les bénédictins, appelés logiquement frères ou moines noirs, portent donc généralement une tunique noire serrée par une ceinture noire, leur tête recouverte par une capuche de même couleur qui finit en pointe. Cette couleur noire ne déplut certainement pas au repreneur du club dans les années 40, l’entreprise Englebert, fabriquant de pneumatique. Pour en revenir au surnom, le corbeau rappelle donc la couleur du maillot mais il pourrait aussi s’agir d’un rappel à l’histoire de Saint Benoît. Alternant entre vie érémitique et monastique, Saint Benoît attira de nombreuses personnes et vit ainsi sa renommée croître. Forcément, il suscita la jalousie, notamment d’un prêtre voisin. Ce dernier lui envoya un pain empoisonné. Mais, se doutant de la supercherie, Saint Benoît ordonna à un corbeau, qui lui rendait régulièrement visite lors des repas, d’aller discriminer ce pain à des endroits où il serait introuvable, ce que l’oiseau réalisât. Ainsi, l’épisode est souvent résumé en indiquant que le corbeau sauva Saint Benoît de l’empoisonnement. Il n’empêche que ce n’est pas le corbeau qui apparaît sur le blason du club mais le crocodile, invention apparu dans les années 80, certainement pour symboliser la puissance d’un animal endémique.