#1123 – Macarthur FC : the Bulls

Les taureaux. La grande ville de Sydney comprend deux franchises en A-League. Depuis 2018, profitant du projet d’extension de la ligue, deux clubs, United for Macarthur et South West Sydney FC, s’unirent pour présenter un projet d’une nouvelle franchise, avec la volonté de représenter les quartiers du Sud-Ouest de Sydney. Le 15 mai 2019, la nouvelle entité annonça son nom, son logo et ses couleurs. Le club prit le nom de Macarthur FC, les couleurs noir et ocre et fut surnommé les Bulls, une tête de taureau apparaissant sur son blason.

Souhaitant s’ancrer dans sa zone de chalandise (le Sud-Ouest de Sydney), le club puisa dans les vieilles histoires de la région pour déterminer son symbolisme. Dans le pays aborigène des Dharawals, où se situe le club, l’ocre était utilisée pour les peintures, les dessins et les pochoirs à main sur les surfaces rocheuses. Le nom MacArthur provient directement de celui qui colonisa ses terres au XIXème siècle, le britannique John Macarthur, considéré comme le père de l’industrie lainière australienne. Or, MacArthur participa également à cette histoire de taureaux dans la région, origine du surnom. En 1788, les colons de Sydney importèrent du Cap un troupeau de vaches et de taureaux. 5 mois après leur débarquement, 2 taureaux et 4 vaches s’échappèrent de la colonie. En 1795, les autorités constatèrent que des bovins sauvages prospéraient au Sud-Ouest de Sydney, région qu’ils appelèrent alors Cowpastures (pâturages de vache). En 1801, le bétail sauvage comptait entre 500 et 600 têtes. En 1803, pour protéger le bétail sauvage, une autorisation du gouvernement était nécessaire pour entrer dans les Cowpastures et le bétail devint la propriété du gouvernement. Résultat, un an plus tard, on dénombrait entre 3 000 et 5 000 bovins sauvages dans les Cowpastures, avec une exploitation mesurée de cette ressource. Mais, bien alimentées en eau par la rivière Nepean, ces terres constituaient de beaux pâturages et attirèrent les convoitises de John Macarthur qui souhaitait lancer son élevage de moutons et sa production de laine. Il obtient 5 000 acres de terres. A partir de 1815, le gouvernement de Nouvelle-Galles du Sud mena une politique pour réduire le troupeau sauvage de bovins. En 1824, le bétail, qui avait été en grande partie apprivoisé, fut déplacé afin que John Macarthur puisse prendre possession de 10 400 acres de terre supplémentaire. Et les moutons remplacèrent les taureaux et les vaches … jusqu’au moment de réapparaître avec le club de football.

#1115 – CD Guadalajara : el Rebaño Sagrado

Le troupeau sacré. Tout d’abord, l’équipe de Guadalajara est vu comme un troupeau car l’un de ses surnoms les plus communs est las chivas (les chèvres). Au départ, ce surnom leur avait été attribué car évidemment le jeu produit lors d’un match en 1948 n’emballa pas les spectateurs et la presse. Repris par les fans adverses comme une moquerie, les supporteurs du CD Guadalajara se l’approprièrent finalement et aujourd’hui, il s’agit d’une fierté, pour un ultra du club, d’être comparé à une chèvre. Pour en savoir plus, je vous invite à lire l’article #361.

Mais, il ne s’agit pas de n’importe quel troupeau car en l’occurrence, celui-ci est sacré. En 1957, le club et ses supporteurs s’étaient récemment réappropriés le surnom de chivas et dans la ville de Guadalajara officiait un évêque du cru, José Garibi y Rivera. Né dans la Perla de Occidente (la perle de l’occident est le surnom de Guadalajara) en 1889, il fit ses études au séminaire de Guadalajara et, en tant que prêtre, favorisa la construction de la basilique du Saint-Sacrement de Guadalajara. Sa carrière ecclésiastiques se poursuivit dans sa ville natale : évêque auxiliaire le 16 décembre 1929, vicaire général de l’archidiocèse en 1933, évêque coadjuteur en 1934, archevêque de Guadalajara le 12 août 1936 et enfin cardinal le 15 Décembre 1958. Homme d’Eglise certes mais aussi homme passionné de football et supporteur du CD Guadalajara. Ainsi, lorsque le club remporta son premier championnat mexicain lors de la saison 1956-1957, l’archevêque Garibi donna une messe, au cours de laquelle il entonna un Te Deum (chanté à l’occasion de messe solennelle célébrant une victoire, lors de fêtes nationales, de naissances monarchiques, de processions …) pour célébrer le titre de champion. Puis, Garibi reçut tout l’équipe de chivas et montra aux joueurs, que sous sa soutane, il portait le maillot de Guadalajara.

Mais, l’action de Garibi ne s’arrêta pas là. En effet, il fit envoyer le 3 Janvier 1957 au Pape un télégramme pour l’informer que le CD Guadalajara dédicaçait au Saint-Père le championnat gagné. Monseigneur Garibi demandait en retour une bénédiction pour l’équipe de football. Ce que le Pape Pie XII fit en invoquant les grâces célestes et en leur envoyant sa bénédiction.

Résultat, le fait que l’équipe puisse être soutenu par d’aussi importants hommes d’Eglise donna lieu dans la presse à l’utilisation du surnom rebaño sagrado.

#1114 – Stade Lausanne Ouchy : les Lions

Créé en 2000 suite à la fusion entre le FC Ouchy et le FC Stade Lausanne, le club découvre l’élite suisse cette saison alors qu’il y a moins de 10 ans, il végétait encore en ligue interrégionale (D5). En réalité, il s’agissait d’une absorption de Ouchy par le Stade. Ce dernier fut fondé en 1901 (Ouchy étant un peu plus ancien avec une fondation en 1895) et adopta comme blason et couleurs, ceux de la ville de Lausanne. Et aujourd’hui encore, les deux demeurent. Vous avez certainement noté la présence de deux lions qui entourent l’écusson. Ces derniers donnèrent naissance au surnom.

Les origines des armoiries de la ville de Lausanne doivent se chercher dans les bannières des 5 quartiers (Le Pont, La Palud, La Cité, Bourg, St Laurent) de la ville moyenâgeuse. Ces bannières, qui remontaient au XIVème siècle, avaient le point commun d’être divisé en deux parties, dont une était rouge (gueule en langage héraldique) et l’autre blanche (argent). Lors de la fusion des 4 quartiers avec celui de La Cité en 1481, cette similitude fut le dénominateur commun qui s’imposa sur les armes de la nouvelle cité de Lausanne et copiait les armoiries de l’évêque et du chapitre de Lausanne, qui de 1032 à 1536 dominaient un petit État ecclésiastique autours de Lausanne. Ce partage rouge et blanc des armoiries de l’évêque se fixèrent également au XIVème siècle. Sur des façades de l’Hotel de Ville apparaissent les armoiries de l’évêque avec des anges les portant (elles datent de 1455-1460). Au XVème siècle, l’ange episcopale fut remplacé par un aigle sur les armes de la ville. En effet, en 1483 le Duc de Savoie accorda à Lausanne de coiffer ses armoiries d’un aigle, en raison du statut impériale de la cité. Cette sentence fut confirmée par Charles III de Savoie en 1517. L’aigle laissa sa place à deux lions (en support, ie entourant les armes) au milieu du XVIème siècle, avec l’idée d’exprimer la puissance de la cité. Ces animaux tiennent souvent l’un le sceptre et l’autre l’épée.

L’écusson du Stade peut d’ailleurs vous rappeler celui d’un autre club suisse, le FC Zurich. Etonnement, s’il n’y a aucun lien entre les deux, il n’en demeure pas moins que leur histoire est semblable (cf. #553).

#1108 – Royal Olympic Charleroi : les Dogues

Dans le Pays noir, l’agglomération de Charleroi rassemble plus de 425 000 habitants et constitue son centre névralgique. La pratique du football, à Charleroi, a toujours été illustrée et dominée par deux formations. D’un côté, le Sporting, fondé en 1904, et de l’autre l’Olympic, fondé en 1912. Si les deux clubs arborent les mêmes couleurs, noir et blanc, ils nourrissent une vieille rivalité et la cité est séparée entre les pro-Sporting et les pro-Olympic. Tout au long de leur histoire, les deux formations bataillèrent souvent dans les différentes divisions belges pour s’imposer comme le fer de lance de la ville. Mais, le dernier face-à-face entre les deux clubs, en tant que pensionnaires de l’élite belge, remonte à 1975 et se solda par une victoire nette et sans bavure du Sporting (7-1), marquant le début du déclin sportif de l’Olympic. Ce derby enflammé offrait un match animalier puisque d’un côté, les joueurs du Sporting sont surnommés les zèbres (cf. #268), tandis que ceux de l’Olympic sont des dogues.

Selon la légende, le surnom serait né dès les premières années d’existence de l’Olympic. Lors d’un match joué par l’Olympic à la Plaine des Manœuvres, parmi les spectateurs se trouvaient une femme accompagnée de ses chiens, des dogues. Avec les mouvements de la balle et des joueurs ainsi que les encouragements bruyant des fans, les chiens s’agitaient et aboyaient. Le lendemain, un journaliste décrivait la rencontre dans son quotidien et, ayant remarqué le manège des chiens, compara le style de jeu agressif et le caractère irascible des joueurs de l’Olympic avec le comportement des dogues. Résultat, ce surnom fut repris et demeura au fil des années. Au point qu’un dogue s’installa sur le blason du club dès les années 1920 et perdura jusqu’à aujourd’hui, malgré les changements.

#1102 – Shirak FC : Սև հովազներ

Les panthères noires. Shirak est connu pour être l’un des plus anciens clubs de football d’Arménie, le club ayant été fondé en 1958 à une époque où l’Arménie était une république de l’Union Soviétique. Seule équipe à avoir participé à toutes les saisons de la première division arménienne depuis sa création en 1992, le club compte un des plus riches palmarès d’Arménie, avec 4 titres de champion national, 2 Coupes d’Arménie et 5 Super Coupe d’Arménie. Basé dans la ville de Gyumri, deuxième ville d’Arménie, Shirak s’est inscrit dans les traditions de la ville. Tout d’abord, les couleurs du maillot sont le noir et l’orange. Ces deux teintes se retrouvent dans de nombreux bâtiments de Gyumri, en particulier les murs de l’Église du Saint-Sauveur et du Musée Dzitoghtsyan. En outre, le blason de l’équipe reprend un des éléments des armoiries de la ville et de son drapeau, une panthère surmontée d’une croix.

Au IXème siècle, l’Arménie était un état vassal des arabes omeyyades puis abbassides. Mais, les arméniens profitèrent de l’affaiblissement des omoyades et de la concentration des abbassides à défendre leur territoire face aux Byzantins pour créer un état indépendant au début des années 880, le Royaume bagratide d’Arménie. Achot Ier de la dynastie Bagratide et ses descendants furent à la tête de cet Etat jusqu’en 1080 et firent de la ville d’Ani, dans la banlieue Nord de Gyumri, la capitale de ce Royaume. Le bannière de ce dernier représentait probablement une panthère surmontée d’une croix. Ce symbole fut retrouvé sur un bas-relief dans les ruines d’Ani.

Ce nom est également celui du principal groupe de supporteurs du club.

#1100 – Brisbane Roar FC : the Roar

Le rugissement. Surnom assez logique quand il s’agit du nom du club et que son écusson fait apparaître un lion. Les origines du club actuel remontent à 1957 et au club dénommé Hollandia-Inala Soccer Club fondé par des immigrants néerlandais. Durant 20 ans, ce dernier évolua sous ce nom, représentant la communauté hollandaise. Car, depuis le début de l’importation du football en Australie, il s’agit d’une pratique sportive des immigrants, les australiens d’origine anglo-saxonnes préférant se concentrer sur des sports australiens comme le football australien (un mélange de rugby et un peu de football). Les grecs, les italiens, les croates et les autres communautés créèrent ainsi leurs équipes de soccer. Mais, en dépassant leur simple rôle sportif (puisqu’ils étaient aussi un lieu d’entraide et de maintien de l’identité), ces derniers entretenaient la séparation entre les nouveaux arrivants et les australiens anglo-saxons et fournissaient des munitions aux politiciens pas favorables à l’immigration et « défenseurs de la culture australienne » . Ainsi, en 1970, un mouvement fut entrepris pour dé-ethniciser les clubs et cela passait par un changement de nom. Hollandia-Inala accéda à cette demande sans pour autant perdre totalement son identité. Ainsi, le club évoluait en orange et prit pour nom Brisbane Lions. Orange et Lion … deux des symboles des Pays-Bas. Puis, en 2004, les Lions obtinrent le droit de participer à la nouvelle A-League (la première ligue australienne) en opérant sous le nom de Queensland Roar (car Brisbane comptait un club de football australien dénommé Lions).

Le lion apparaît sur les armoiries du Royaume des Pays-Bas, un héritage de la Maison de Nassau et de la République des Provinces-Unies. Composées en 1815 et adaptées en 1907, elles représentent un lion d’or sur champ d’azur qui tient une épée et un faisceau de sept flèches. La Maison de Nassau, d’origine de la ville allemande de Nassau, remonte au XIème siècle et dès Dedo de Laurenbourg (1093-1117), l’un des premiers membres de la Maison, le blason était un lion sur fond azur. Du côté des Provinces-Unies (1579–1795), le lion était également son symbole. Constituée de 7 provinces (Hollande, Zélande, Overijssel, Frise, Groningue, Gueldre et Utrecht), la République se référa aux lions héraldiques de la Flandre (noir sur or), du Brabant (or sur noir) et le lion rouge sur or de la Hollande. Ces lions étaient répétés dans les armes de diverses maisons nobles des Pays-Bas.

#1099 – AFC Leopards : Ingwe

Les léopards en langue Luyia. Au Kenya, le football est dominé par deux équipes, Gor Mahia et Leopard, chacune étant le représentant d’une des principales ethnies du pays, respectivement les Luo (11%-13% de la population) qui vivent principalement dans la province de Nyanza, au sud-ouest du pays sur les bords du lac Victoria et les Luyia (14%-15%), établie dans la Province de l’Ouest, au nord du Lac Victoria. Ces deux clubs furent créés pour offrir des possibilités de socialisation et pour forger les identités ethniques des groupes luhya et Luo dans la capitale, Nairobi. A sa création le 12 Mars 1964, peu après l’indépendance du pays (12 Décembre 1963), le club prit le nom de Abaluhya United, Abaluhya étant une autre dénomination anglaise des luyia. Puis, en 1973, après l’assimilation de plusieurs petits clubs, il devint Abaluhya FC. En 1980, le président kenyan, Daniel arap Moi, décida de détribaliser le nom des clubs kenyans afin de développer l’unité nationale. En effet, cette division tribale des clubs football nuisait à la performance sportive (les joueurs ne pouvaient pas changer de club s’il n’appartenait pas à l’ethnie du club) et encourager les rivalités internes aux pays. Ainsi, Abaluhya FC changea de nom pour AFC Leopards. Le « A » signifiait toujours Abaluhya mais le nom principal devint l’animal endémique du pays.

Dans ses parcs naturels, le Kenya compte en effet de nombreuses girafes (plus de 30 000) mais surtout un big five connu mondialement (lion, éléphant, rhinocéros, buffle et donc léopard) qui font le bonheur du pays et des touristes. Mais, le léopard est également un animal-totem sacré du peuple Luyia. Un dicton luyia dit « omwami kafwile ingwe yasalile » (une personne importante est morte, le léopard a accouché). Pour ce peuple, la mort d’une personne importante serait marquée par les dieux en provoquant l’accouchement d’un léopard dans la nature. Pour de nombreux peuples luyia, l’animal symbolise le courage, la noblesse et l’honneur. Un poème « Nise Ingwe » (Je suis un léopard) rappelle que le léopard est invincible, car même provoqué, il demeure calme, sans-pitié et méticuleux. Ainsi, il est interdit de tuer des léopards et ces peuples sont censés préserver son habitat et environnement. Le fait de prendre le léopard comme nom et emblème était un moyen de contourner le décret présidentiel. Car, le peuple Luyia, qui est apparu à compter des années 1940 et qui est composé de plus de 800 clans et 18 dialectes, ne connait l’unité et le succès qu’à travers son équipe de football et il était donc difficile de perdre ce marqueur fort de leur identité qu’est le club de football.

#1098 – CD Plaza Amador : los Leones de Cocoliso

Les lions de Cocoliso. Appartenant au club fermé des Cuatro grandes del fútbol nacional (Les 4 grands du football national), qui ont remporté 31 des 33 championnats panaméens, CD Plaza Amador fut fondé le 19 avril 1955 par León Tejada, surnomé le cocoliso (le chauve). Ancien boxeur, il voulut éduquer par le sport les jeunes qui vivaient dans les rues avoisinant la Plaza Amador. Ainsi, le club se concentra d’abord sur la formation des jeunes avant d’avoir une équipe sénior en mesure de s’imposer dans l’élite du pays. Jusqu’à son décès en 1982, León Tejada guida les jeunes de sa voix forte et rauque mais également par sa rigueur et son intransigeance, leur inculquant des valeurs de vie. Il consacra sa vie à promouvoir le sport et l’unité entre les jeunes. Outre le football, il fit la promotion du base-ball, du basketball, du softball … Dans les années 70, le travail de León était déjà reconnu par les autorités gouvernementales. Il représente encore aujourd’hui l’un des grands éducateurs du mouvements sportifs panaméens. La ville de Panama a d’ailleurs créé l’Orden Municipal León « Cocoliso » Tejada pour récompenser des personnes ayant œuvré pour le sport ou la jeunesse. Dans sa chronique du 12 mai 1982, intitulée « Se fue el León del Deporte » (Le lion du sport est parti), le journaliste Mendoza écrivait à propos de la mort de León Tejada « Queda un vacío, un vacío que será difícil reponer en estos momentos, porque como ese personaje no hay dos ni tres ni cuatro ni cinco. Ese era uno solo y con mucho carisma » (Il reste un vide, un vide qui sera difficile à combler en ce moment, parce qu’il n’y en a pas deux ou trois ou quatre ou cinq comme lui. Il était unique avec beaucoup de charisme). Le titre de cette édito jouait sur le mot Léon qui était le prénom de ce leader mais qui signifie également « Lion » en espagnol. Et c’est tout à fait logique puisque le prénom provient du latin leo qui signifie Lion. Résultat, le club prit le roi des animaux pour symbole (il apparaît sur son blason) et pour surnom.

#1094 – Hartlepool United FC : the Monkey Hangers

Les pendeurs de singe. Ce surnom apparaît peu flatteur et il est vrai qu’il fut au départ utilisé pour se moquer des habitants de la ville et en conséquence des supporteurs du club de la ville. Et comme souvent, les locaux se sont appropriés ce sobriquet pour en faire un élément de différenciation, d’identité. Il en faut pour ce club, certes plus que centenaire (1908) et ayant adopté le statut professionnel dès sa fondation, qui ne jouit pas ni d’une grande aura, ni d’un palmarès.

La légende remonte au XIXème siècle, lors des guerres napoléoniennes. A cette époque de forte rivalité entre la perfide Albion et l’Empire Français, les britanniques craignaient une invasion française et l’opinion publique était très préoccupée par la possibilité d’infiltrations d’espions français. Il s’avéra qu’un bateau français (certainement un navire marchand) qui luttait contre les éléments coula au large d’Hartlepool. Le seul survivant était un singe vêtu d’un uniforme militaire (probablement pour divertir les marins). Malheureusement, l’inculture des habitants de la cité anglaise était telle qu’ils s’imaginèrent que l’animal était un espion français. Pour les excuser, il est souvent raconter qu’à l’époque, les journaux britanniques peignaient les français comme des créatures ressemblant à des singes avec des queues et des griffes. Un procès s’improvisa et la peine capitale (la mort) fut déclarée à l’encontre du singe. Le mât d’un bateau de pêche constitua la potence et le singe fut pendu. Malheureusement, il se peut que le singe fusse un enfant. Sur les bateaux, le terme powder-monkey (singe à poudre) était couramment utilisé pour désigner les enfants employés sur les navires de guerre pour amorcer les canons avec de la poudre à canon.

Cette image de pendeur de singe est nettement répandue dans la culture populaire et les références sont nombreuses dans les chansons, films, bandes dessinés et romans britanniques (et même parfois étrangers). La première chanson mentionnant cette légende, « The Monkey Song », remonte au XIXème siècle et était interprétée par l’artiste comique Ned Corvan. Les statuts de singes se multiplièrent également dans la cité. Au niveau sportif, 2 des six clubs de rugby de la ville utilisent des variantes du singe dans leurs symboles. Le club de Hartlepool United capitalisa également sur cette histoire en créant une mascotte appelée « H’Angus the Monkey » en 1999. Enfin, de manière inattendue, Stuart Drummond, qui fit campagne vêtu du costume de H’Angus et en utilisant le slogan électoral « free bananas for schoolchildren » (bananes gratuites pour les écoliers), fut élu Maire en 2002.

#1089 – Brescia Calcio : Leonessa

La lionne. Le vocabulaire animalier sied bien au club lombard puisque le premier surnom expliqué était rondinelle (qui signifie les petites hirondelles – cf #325). Cette fois, nous changeons de dimension en passant à la femelle du roi des animaux. Pourtant, sur l’écusson du club, il s’agit bien d’un lion qui trône depuis le premier blason établi en 1965 (sa crinière est visible). D’où vient cette divergence de genre ?

Le blason du club s’inspire directement des armoiries de la cité qui se décrivent comme « d’argent au lion d’azur, armé, langue et queue de gueule ». Le lion rampant est le symbole de la commune de Brescia depuis au moins le XIIème siècle. Mais, la genèse des armoiries de Brescia est encore inconnue en raison de l’absence de sources et de témoignages fiables. Une chose est sure : même si la commune de Brescia fut durant près de 4 siècles (de 1404 à 1797) intégrée à la république de Venise, son lion rampant ne provient pas des armes de Venise (le fameux lion de St Marc). Sa plus vieille représentation connue apparaît dans une sculpture de la Porta Romana de Milan datant de 1171 (il s’agissait de la principale porte d’entrée de la ville détruite en 1793). La frise du chapiteau montre des soldats de plusieurs villes lombarde dont Brescia en route vers Milan pour reconstruire la ville détruite par l’empereur Frédéric Barberousse en 1167. Le capitaine représentant Brescia porte sur son écu le lion rampant. Une autre représentation se trouve également à Milan sur l’arche funéraire d’Azzone Visconti (Brescia était alors sous domination de la famille Visconti) datant de 1343. Des statues représentant les villes lombardes sous l’influence des Visconti et tenant un bouclier y sont sculptées. Celle de Brescia se présente avec un lion rampant.

Il s’agit donc bien d’un lion sur les armes de la ville et pourtant la commune de Brescia est connue dans toute l’Italie comme la Leonessa d’Italia (lionne d’Italie), tous les italiens ayant appris dans leur jeunesse les vers d’un poème qui désignèrent la ville ainsi. Ces vers concluent la pièce poétique « Alla Vittoria » (A la victoire) de Giosuè Carducci, chantre du Risorgimento (période de l’unité italienne au XIXème siècle), composée en 1877 et partie intégrante de sa grande oeuvre « Odi barbare » (Odes barbares) :

Lieta del fato Brescia raccolsemi, / Heureuse du destin, Brescia me rassemble,
Brescia la forte, Brescia la ferrea, / Brescia la forte, Brescia le fer,
Brescia leonessa d’Italia / Brescia la lionne de l’Italie
beverata nel sangue nemico / ivre du sang de l’ennemi

Ces vers soulignaient le soulèvement et la résistance de la ville durant la période connue sous le nom des Dieci giornate di Brescia (Dix jours de Brescia). Dans le contexte des affrontements entre l’armée piémontaise et les troupes autrichiennes, du 23 mars au 1er avril 1849, les citoyens de Brescia se révoltèrent contre l’oppression autrichienne en résistant vaillamment aux bombardements et aux attaques des forces des Habsbourg. La révolte fut finalement violement réprimée (plus d’un millier de victimes). Malgré la défaite, la fierté manifestée par les insurgés dans les combats valut à la ville de Brescia la médaille d’or en 1899. Un autre poète, 20 ans avant Carducci, avait attribué ce surnom à Brescia suite à cette évènement : Aleardo Aleardi dans son poème « Canti patrii » publié en 1857.

D’un de’ tuoi monti fertili di spade, / De l’une de vos montagnes fertiles en épées,
Niobe guerriera de le mie contrade, / Niobé guerrière de mes terres,
Leonessa d’Italia, / Lionne d’Italie
Brescia grande e infelice / Brescia grande et malheureuse

L’héroïsme et le sacrifice de la population de Brescia, porté au nue par ces vers, contribuèrent à construire une identité italienne qui en était à ses balbutiement dans la seconde moitié du XIXème siècle.