#228 – EC Bahia : Esquadrão de Aço

L’équipe d’acier. Bahia gagna ce surnom lors d’un match contre le São Paulo FC en 1946. Le club du Nord-Est brésilien le remporta 7 buts à 2, dominant le match de bout en bout. L’ancien joueur et membre fondateur du club, Aristóteles Góes, devenu journaliste au quotidien local A Tarde, titra son article résumant le match « Esquadrão de Aço« , marquant ainsi la force et la solidité que dégagea l’équipe lors de ce match. Toutefois, ce fut éphémère car le reste de la saison fut plus difficile pour le club, voyant même son rival, Guarany, remporter son premier championnat de l’Etat. En 1947, le surnom fut plus justifié, le club remportant le championnat d’Etat avec 14 victoires en 19 matches, trois nuls et seulement deux défaites. En 1979, le dessinateur Ziraldo créa la mascotte du club, ressemblant à Superman. D’une part, Superman est surnommé l’homme d’acier. D’autre part, il porte un uniforme bleu et rouge, couleurs du club de Bahia. En 2015, Penalty, l’équipementier du club, sortit un maillot du club version third de couleur argenté (Camisa de Aço). Ce fut un véritable succès, les ventes enregistrant des records dès son lancement : 3.000 pièces vendues en 24 heures et plus de 7.500 en une semaine.

#220 – SC Internacional : Colorados

Les rouges. Depuis la fondation, le club évolue en rouge et blanc. Le journaliste brésilien Henrique Poppe Leão, avec ses frères Luiz Madeira Poppe et José Eduardo Poppe, avaient déménagé de São Paulo à Porto Alegre en 1901 mais rencontraient depuis des années des difficultés dans la pratique du football. En effet, les principaux clubs de la ville, à l’époque, étaient réservés aux personnes d’origine allemande, ce qui n’était pas le cas des frères Poppe. Le 4 avril 1909, ils décidèrent donc de fonder leur propre club de football. Ils optèrent pour le nom « International » afin de montrer, contrairement aux autres clubs de la ville, leur ouverture à toutes les nationalités. Il s’agissait également d’un hommage à l’Internacional São Paulo, club de football dont avaient fait partie les frères Poppe.

A la 3ème réunion des membres fondateurs, au mois d’Avril 1909, le choix des couleurs fut aussi discuté. Tous les membres étaient naturellement des adeptes du carnaval de Porto Alegre et soutenaient un des deux groupes principaux qui animaient le défilé : Venezianos (les vénitiens) aux couleurs rouges et blanches et Sociedad Esmeralda (la société émeraude) aux couleurs vertes et blanches. Les Venezianos étant majoritaires lors de cette réunion, le rouge et le blanc furent donc adoptées comme couleurs du nouveau club. Comme pour le nom, les 3 frères Poppe essayèrent également de faire référence à leur club d’origine, Internacional São Paulo qui évoluait en noir et rouge, mais leur proposition d’intégrer la couleur noire fut refusée par les autres membres.

Le premier fut donc rayé verticalement en rouge et blanc. En 1912, pendant quelques mois, une tenue intégralement blanche fut adoptée. Mais, finalement, en 1913, un maillot rouge accompagné d’un short blanc fit son apparition et à l’exception de la saison 1915 (où les joueurs portèrent de nouveau un maillot rayé), le club évolue dans ce kit.

#205 – Santos FC : Alvinegro

Les blancs et noirs. Lorsque le club de Santos fut fondé en 1912, le premier choix des couleurs se portèrent sur le blanc, le bleu et l’or. Le maillot était alors rayé bleu et blanc, avec de fines bandes dorées. Mais, après à peine un an d’existence, le 31 mars 1913, les membres décidèrent de changer pour opter pour un maillot rayé noir et blanc, fixant alors définitivement les couleurs du club. Les raisons du changement étaient simples. Il est probable que les joueurs constatèrent que les couleurs bleus et dorées passaient assez vite après quelques lavages. Il fallait donc refaire régulièrement des maillots. Or, les finances du club ne devaient pas le permettre. Surtout, la couturière de l’équipe, connue sous le nom de Dona Didi, se plaignait de ne pas réussir à trouver les tissus nécessaires (en particulièrement celui doré) pour réaliser le maillot du club. Lors de cette réunion du 31 mars 1913, Paulo Peluccio, membre du club, suggéra de retenir un maillot à rayures blanches et noires. Le noir aurait représenté la noblesse et le blanc symbolisait la paix. Surtout, ces couleurs étaient plus simple à trouver à l’époque.

En 1913, le maillot fut donc rayé verticalement en noir et blanc. Mais, en 1915, en même temps qu’il dut changer de nom pour participer au tournoi de Santos, le club porta un maillot intégralement blanc, marqué seulement de son blason. Ce fut une réussite avec le titre au bout. En 1925 et en 1935 (pour le premier titre dans le championnat de l’Etat de São Paolo), le maillot fut une nouvelle fois intégralement blanc. Dans la version de 1925, le maillot intégrait toutefois au niveau de la taille une bande noire, comme une ceinture. Pour celle de 1935, tout l’équipement était blanc, les chaussettes ayant quelques détails noirs. Au milieu des années 1930, Santos porta l’uniforme le plus inhabituel de son histoire. En effet, si le short était blanc, le maillot était dans une couleur surprenante pour le club, rouge. Cet uniforme fut utilisé que dans quelques matchs. Au début des années 1940, Santos avait pour équipement une chemise à larges rayures noires et blanches mais cette fois horizontales. Lors de la grande période du Santos de Pelé, l’uniforme redevint complètement blanc, à l’exception de la taille où la ceinture était noire. Toutefois, en 1963, la direction tenta un nouveau maillot blanc à fines rayures noires, le short et les chaussettes demeurant blancs. Ce fut un échec auprès des supporteurs et le club revint au kit blanc. Dans les années 1970, l’équipement se stabilisa avec comme premier uniforme, un kit intégralement blanc, et en maillot extérieur, celui rayé noir et blanc. Enfin, dans les années 1990, le club céda à la mode des tenues extravagantes et si les couleurs demeurèrent, les shorts affichèrent des damiers, des étoiles, des traits …

Comme d’autres équipes ont adopté ces couleurs et ont donc gagné ce surnom d’Alvinegro, celui de Santos a été enrichi par la suite en Alvinegro da Vila et Alvinegro Praiano. Le premier se réfère au stade dans lequel évolue Santos, le stade Urbano Caldeira, mieux connu sous le nom de Vila Belmiro, quartier où il se situe. Enfin, Praiano est un adjectif pour désigner un objet, un lieu ou une personne situé sur le littoral. Ce qui est le cas de la ville de Santos, située sur la côte de l’ État de São Paulo et qui est le plus grand port d’Amérique Latine.

#194 – Club de Regatas Vasco da Gama : Almirante

L’amiral, à la fois le surnom du club et le nom de sa mascotte. Ce surnom fait évidemment référence au nom du club qui rappelle celui du célèbre navigateur Vasco de Gama. A la fin du XIXème siècle, l’aviron était un sport en vogue au Brésil. Quatre jeunes cariocas (Henrique Ferreira Monteiro, Luis Antonio Rodrigues, José Alexandre d’Avelar Rodrigues et Manuel Teixeira de Souza Júnior) avec 58 autres jeunes hommes issus de la communauté portugaise de Rio de Janeiro créèrent un club d’aviron le 21 août 1898. Cette année-là était célébré le quatre-centenaire de la découverte par Vasco de Gama, le navigateur portugais, de la voie maritime entre l’Europe et l’Inde. Vasco de Gama quitta le Tage le 8 juillet 1497 avec 200 hommes d’équipage à bord de quatre navires, longea toute la côte africaine, passa par le cap de Bonne-Espérance, pour atteindre le 28 mai 1498 les Indes (la cité-État de Calicut). Même si le voyage fut un échec commercial, Vasco de Gama gagna sa légende avec cette expédition et fut nommé Amiral des Indes. Vasco de Gama étant un marin portugais, les fondateurs donnèrent son nom à leur club d’aviron. La section football, quant à elle, naquit le 26 novembre 1915.

#178 – America FC : Sangue

Le sang, rappelant ainsi la couleur rouge du maillot du club. Fondé le 18 septembre 1904, les dirigeants du club optèrent d’abord pour un maillot intégralement noir. Puis, en 1906, en raison de difficulté d’approvisionnement, le maillot devint noir et rouge. Enfin, en 1908, João Evangelista Belfort Duarte qui était joueur de l’America (et qui deviendra capitaine (1911), entraîneur, directeur général du football et trésorier du club) suggéra de porter un maillot rouge, à l’image du club d’Associação Atlética Mackenzie College, que l’America avait récemment affronté lors d’un match amical. Belfort Duarte avait été l’un des fondateurs de l’Associação Atlética Mackenzie College, premier club de football formé par des Brésiliens.

#142 – Santos FC : Peixe

Poisson. La référence au poisson est bien entendu lié à la qualité de ville portuaire de Santos. Son port est un lieu de commerce important, en concentrant plus du quart des échanges de la balance commerciale brésilienne. Le complexe portuaire s’est développé à partir de 1867 avec l’ouverture d’une ligne ferroviaire de 79 kilomètres reliant São Paulo au Port de Santos qui permit l’exportation de la production de café. En 1912, année de fondation du club, le port de Santos était le premier au monde pour le commerce de café. Aujourd’hui, il écoule la plus grande partie de la production des États céréaliers comme ceux de Sao Paulo, du Minas Gerais (sud-est), de Goias et du Mato Grosso do sul (centre-ouest). Le port de Santos est classé au 38ème rang mondial pour le trafic de conteneurs et le 1er en Amérique latine.

Le surnom fit son apparition en 1933. Le 12 mars 1933, le premier match de football professionnel eut lieu au Brésil, entre Santos et l’ancêtre du Sao Paolo FC. Les fans de l’équipe de São Paulo da Floresta décidèrent de provoquer les supporteurs de Santos en les appelant péjorativement peixeiros (les poissonniers). Ces derniers répondirent fièrement en criant « peixeiros, sim com muita honra » (les poissonniers, oui avec grand honneur). A la même époque, le dessinateur João Brito, dans les pages de « A Gazeta Esportiva » , représentait Santos sous la forme d’un poisson. Qui influença l’autre ? En tout cas, les supporteurs comme João Brito s’inspirèrent peut-être du premier dessin où Santos fut représenté sous la forme d’un poisson. C’était en 1921 dans le journal pauliste, « Ítalo Paulista, IL Pasquino Coloniale », où un supporteur du club de Palestra Itália (le futur Palmeiras) était au bord de la mer et admirait un poisson, représentant l’équipe de Santos.

Si son surnom rappelle le lien entre la ville et le mer, sa naissance ne le plaçait pas sous les meilleures auspices maritimes. Le club fut fondé à l’initiative de 3 sportifs de la ville, Francisco Raymundo Marques, Mário Ferraz de Campos et Argemiro de Souza Júnior, le Dimanche 14 Avril 1912. Or, ce jour là, un peu plus tard dans la soirée (à 23 h 40), le célèbre paquebot transatlantique Titanic heurtait un iceberg et entamait sa longue descente vers les entrailles de la mer.

#126 – SE Palmeiras : Porcos

Les porcs. Vous vous doutez que ce surnom n’était pas apprécié par les supporteurs du club car il s’agissait d’une insulte donnée par les adversaires. Même s’il est consommé, le cochon a souvent eu une image dégradée dans nos cultures. Du fait que l’animal pouvait manger ses petits, qu’il était porteur de certaines maladies transmissibles à l’homme, qu’il apprécie de se vautrer dans la boue et qu’il se nourrit d’ordures et de charognes, il fut associé, chez les Egyptiens, au dieu mauvais Seth et les religions juives et musulmanes le proscrivirent de la nourriture. Chez les Romains, Pline l’Ancien le considéra comme le plus stupide des animaux. Au Moyen Âge, les autorités religieuses virent le cochon comme un attribut du diable car ce dernier grogne et se vautre dans l’ordure comme l’animal. Pourtant, avec le temps, il est devenu un symbole, un élément de l’identité du club et de ses supporteurs.

Au Brésil, dans le langage populaire, le terme désignait déjà et de manière péjorative les descendants des Italiens qui vivaient à São Paulo. Or, Palmeiras était le club de la communauté italienne de São Paulo. Il avait été fondé en 1914 par 4 italiens et s’était initialement nommé Societá Sportiva Palestra Italia, en reprenant comme couleurs celles du drapeau italien (vert, blanc, rouge). Si l’immigration italienne en Argentine est très connue (cf. #1 et #1335), elle fut quasiment tout aussi importante au Brésil (point culminant entre 1874 et 1930, avec environ 1,6 million d’immigrants), et en particulier dans l’État de São Paulo. Aujourd’hui, les différentes études démontrent qu’entre 10% et 20% de la population brésilienne est d’origine italienne. L’ambassade d’Italie au Brésil a estimé qu’en 2013 30 millions de brésilien étaient des descendants d’immigrants italiens (environ 15 % de la population brésilienne), dont la moitié dans l’État de São Paulo.

Mais, outre ce lien établi avec une communauté raillée, le club a également été directement comparé au cochon suite à un évènement arrivé en 1969. Pendant le championnat pauliste, deux joueurs du club rival des Corinthians moururent dans un accident de voiture. Les Corinthians souhaitèrent les remplacer par ce que l’on appellerait aujourd’hui des « jokers médicaux ». Pour le permettre, il fallait obtenir l’approbation unanime des autres clubs participants. Tous acceptèrent sauf Palmeiras. Les supporteurs des Corinthians considérèrent alors que les dirigeants de Palmeiras avaient un esprit de porc (ce qui signifiait qu’il n’était pas fair play). Lors du derby suivant entre les deux équipes, les supporters de Corinthians lâchèrent un cochon sur le terrain et scandèrent que Palmeiras était des porcs. Après s’être longtemps senti offensé par ce surnom, les supporteurs de Palmeiras acceptèrent ce surnom, aidé par une stratégie élaborée par l’un des directeurs du club, João Roberto Gobatto, directeur du Marketing. Pour faire taire ces moqueries, il eut l’idée dans les années 80 de faire adopter le cochon comme mascotte du club. Les supporteurs emboîtèrent le pas en créant un chant « Hé, Cochon ! Hé, le cochon ! » qui aujourd’hui enflamme le stade. En novembre 2016, juste avant le match contre l’Internacional, Palmeiras donna le nom Gobatto à la mascotte, en hommage à son Directeur Marketing qui eut cette idée de transformé une insulte en force du club.

#106 – SC Corinthians : Campeão dos Campeões

Champion des champions. Pour obtenir un tel surnom, il faut connaître une sacrée suprématie sur le football brésilien. Celle-ci remonte à quelques années tout de même. Il existe deux versions à ce surnom. Il faut se rappeler que, dans les premiers temps du football brésilien, les championnats étaient locaux et parfois multiples. C’était le cas à São Paulo en 1915 où deux championnats existaient : la LPF (Liga Paulista de Futebol) et l’APEA (Associação Paulista de Esportes Atléticos). En raison de divergences politiques, les Corinthians quittèrent la LPF pour rejoindre l’APEA. Mais son inscription fit l’objet d’un veto. Le club tenta de revenir au sein de la LPF qui lui refusa son accès. Résultat, le Corinthians participa en 1915 à aucun championnat et ne prit part qu’à des matchs amicaux. Le 1er mai, ils affrontèrent AA Palmeiras (à ne pas confondre avec l’actuel Palmeiras) et gagnèrent 3-0. Quelques mois plus tard, AA Palmeiras devint le champion de l’APEA. En 1916, les Corinthians battirent Germânia, qui fut champion LFP en 1915. Le peuple corinthians se convainquit alors que si le club avait pu disputer les deux championnats, il les aurait gagné inévitablement et était donc le Campeão dos Campeões. Ce sentiment de prestige était renforcé par le fait que le club remporta d’autres matchs amicaux en 1915 (5-0 contre les Wanderers, 4-1 contre Ideal Club, 2-0 contre Guarani). En outre, l’année précédente, le Corinthians avait marqué le championnat LFP en le remportant aisément (10 victoires en 10 matches, 37 buts marqués et 9 buts encaissés). Il réédita l’exploit de remporter le championnat LFP en 1916 en demeurant invaincu.

Une autre version, plus connue et reconnue, nous amène en 1930. En cette année, l’association sportive de São Paulo (APEA) décida de promouvoir un défi entre les champions de São Paulo et de Rio de Janeiro, les deux principaux championnats locaux. Ce challenge opposait les Corinthians (São Paulo) au Vasco de Gama (Rio de Janeiro). Le 16 février, les Corinthians remporta le premier match dans son stade 4 buts à 2. Au retour, le 23 février, au stade São Januário, le Vasco de Gama menait 2-0 jusqu’à la 72ème minute. Mais en 18 minutes, les vieux joueurs des Corinthians comme Neco (qui jouait déjà en 1915), Rato, Del Debbio et, Tuffy, rentrèrent en jeu et firent basculer le match. Le club pauliste remporta le match 3-2 et le défi. Il était donc le champion des champions.

En 1953, l’animateur radio Lauro D’Avila composa les paroles d’une chanson titrée « Campeão dos Campeões » qui est devenu l’hymne officiel du club.

#79 – Fluminense : o Pó de Arroz

Poudre de riz. C’est un surnom original pour une équipe de football, sachant que la culture du riz est plutôt faible à Rio de Janeiro. Tout remonte à 1914. Pour le compte du championnat carioca, Fluminense rencontrait America le 13 mai 1914. Le match se solda par un 1-1. Sur le terrain, du côté de Fluminense évoluait Carlos Alberto, un joueur métis âgé de 17 ans qui venait de quitter l’America. Avant le match, il s’était mis de la poudre de riz sur son visage, blanchissant une partie de sa tête. Mais, avec la sueur, ce masque commença à disparaître. Les fans de l’America, mécontents du transfert du joueur, le reconnurent et scandèrent à l’encontre des joueurs de Flu « Pó de Arroz ! Pó de Arroz ! » (Poudre de riz ! Poudre de riz !). Mais pourquoi les supporteurs de Fluminense le prirent très mal au départ ?

Selon la légende, l’affaite ressurgit plus de 30 ans plus tard lorsque, dans une chronique publiée dans le « Jornal dos Sports », le journaliste Mário Filho affirmait que Carlos Alberto utilisa de la poudre de riz pour dissimuler sa peau noire car Fluminense était un équipe élitiste où seul les joueurs blancs étaient appréciés. Il est vrai qu’à sa création, si les fondateurs étaient d’origine ou de nationalité anglaise, suisse ou allemande, ils venaient tous des classes huppées de la ville et étaient tous blancs. Très vite, le club fut supporté par la bourgeoisie et les classes moyennes qui n’étaient pas, à cette époque, ouvertes aux populations noires et métisses. Même le club aujourd’hui reconnaît qu’il existait un racisme institutionnel au sein de sa structure au début du XXème siècle. Cette histoire se renforça par le fait que Carlos Alberto était le seul joueur de couleur du côté de Fluminense lors de ce match. Enfin, la rencontre se déroula un 13 mai, date de commémoration de la loi d’or (en portugais : Lei Áurea), signée le 13 mai 1888 et qui abolit l’esclavage au Brésil (renforçant le symbolisme, la portée de l’insulte de l’America).

Pourtant, aujourd’hui, les supporteurs de Fluminense se sont appropriés le surnom. Certainement car sa connotation ne serait pas raciste. Quand Carlos Alberto évoluait à l’America, il avait déjà cette habitude de se mettre de la poudre de riz. Selon un de ses coéquipiers à Fluminense, également ancien joueur de l’America, Marcos Carneiro de Mendonça, cette poudre de riz n’avait pas pour objectif de cacher sa couleur de peau mais servait à apaiser sa peau après s’être rasé. Et il est vrai qu’à l’époque la poudre de riz était appliquée sur la peau pour cacher les boutons, les tâches et les crevasses ainsi que la soulager après le rasage. D’ailleurs, Carlos Alberto avait seulement 17 ans et certainement un peu d’acné encore.

Coquetterie, honteuse ou curative, cette poudre de riz a laissé une trace indélébile sur la peau de Fluminense. En particulier, à l’entrée des joueurs dans le stade, les supporteurs de Fluminense accueillent leurs joueurs en jetant de la poudre de riz et du talc.

#78 – Cruzeiro EC : Raposa

Le renard. Le club fut caricaturé sous la forme d’un renard par Fernando Pieruccetti (mieux connu sous le pseudonyme de Mangabeira) en 1945. Álvares da Silva, secrétaire du quotidien Folha de Minas, qui délivrait l’une des pages sportives les plus importantes et dynamiques de la presse du Minas Gerais à cette époque, décida d’imiter son confrère de Rio de Janeiro, Jornal dos Sports, qui avait décidé quelques années auparavant de personnaliser les équipes cariocas au travers de personnages de bande dessiné. Flamengo était Popeye, Fluminense était Pó-de-arroz, Vasco était Almirante, Botafogo était Donald Duck et America était le Diable. Álvares da Silva confia à Fernando Pierucetti, professeur de dessin et illustrateur du supplément littéraire et de la page pour enfants du journal, la réalisation de ces mascottes qui devaient puiser leur source dans l’univers des fables d’Ésope et de La Fontaine, mais en utilisant des animaux de la faune brésilienne. Pierucetti dessina alors la mascotte des 3 grands clubs de la ville : Atlético, Cruzeiro et América.

L’inspiration pour trouver les animaux représentatifs des clubs vint d’éléments qui faisaient déjà partie de l’imagerie populaire. Club de la communauté italienne de la ville, Cruzeiro s’était appuyé sur ces dirigeants italiens au sens des affaires aiguisé pour se développer. A l’image de l’ascension laborieuse et astucieuse des habitants d’origine italienne vers les plus hautes couches sociales de Belo Horizente, le club véhiculait l’image d’une trajectoire croissante linéaire, marquée par la simplicité, le gout du travail constant et répété et la ruse et dont l’accumulation des efforts, au fil du temps, avait forgé la grandeur du club. Ces qualités étaient d’autant plus en vrai en 1945 que le club était alors présidé par Mário Grosso. D’origine italienne, directeur sportif, trésorier et entraineur par intérim à compter de 1935, il accéda à la présidence de Cruzeiro le 17 décembre 1942. Connu pour son intelligence, il usa de ruse et de persévérance dans la direction des affaires du club. Grâce à ses méthodes, il parvint à chiper plusieurs jeunes talents au nez et à la barbe de l’Atlético. L’ingéniosité de Grosso furent mises en avant par Pieruccetti pour justifier le choix du renard. En outre, cette manière se retrouvait dans l’équipe de Cruzeiro de 1945, triple championne d’État, qui comptait des joueurs expérimentés et connaissant les ficelles du football.

Les supporteurs de Cruzeiro s’approprièrent vite cette image, tout comme le club qui créa par la suite une mascotte officielle de renard. Il faut dire que Pieruccetti avait choisi pour le rival de l’Atlético le coq. Or, le renard est l’animal qui attaque les poulaillers. On raconte que Zé do Monte, l’idole de l’Atlético dans les années 1940 et 1950, entrait sur le terrain avec un coq sous le bras. En réponse, les fans de Cruzeiro promettaient de lâcher un renard sur le terrain, pour chasser l’animal de Zé do Monte.