#1339 – RB Bragantino : Linguiça Mecânica

Les saucisses mécaniques. Le club de Bragantino intégra le giron de la galaxie Red Bull en Mars 2019, avec pour objectif de revenir dans l’élite brésilienne. Objectif rempli dès l’année suivante. Depuis, les supporteurs espèrent revivre l’âge d’or du club qui se déroula à la fin des années 1980 et au début des années 1990. Et cette période donna le nom de linguiça mecânica.

A cette époque, le CA Bragantino se trouvait bien loin de Red Bull. L’équipe enchainait les saisons en seconde division pauliste jusqu’au début de la grande aventure. En 1988, le CA Bragantino remporta le championnat pauliste de seconde division, lui donnant accès à l’élite de l’État mais surtout à l’anti-chambre de l’élite brésilienne (la Série B). En octobre 1988, alors qu’il avait été recruté pour entrainer l’équipe réserve de Bragantino, l’entraineur Vanderlei Luxemburgo convainquit la direction de lui laisser prendre la tête de l’équipe première. Avec son jeu léché et une équipe composée de joueurs jusqu’alors inconnus, mais qui intégrèrent ensuite l’équipe nationale brésilienne, comme Gil Baiano, Mauro Silva et Silvio, il obtint d’excellents résultats. En 1989, son équipe remporta, notamment, dès sa première année la Série B. Promu en première division brésilienne en 1990 où il terminait à une très prometteuse 6ème place, Bragantino devint cette année là champion de l’État de São Paulo en battant Novorizontino pour la première fois de son histoire. L’année suivante, l’expérimenté Carlos Alberto Parreira succéda à Luxemburgo sur le banc et poursuivit son oeuvre. Après avoir terminé 2ème de la première phase du Championnat du Brésil 1991, l’équipe élimina en demi-finale le Fluminense et échoua de justesse à conquérir le titre suprême face au São Paulo FC de Telê Santana. La période dorée s’acheva en 1994 avec une relégation. Pendant ces années, l’équipe développa un jeu ciselé et il n’était pas rare qu’elle s’imposât face aux plus grandes équipes comme les Corinthians, Santos, Palmeiras et São Paulo FC. Au point qu’elle fut comparée à la grande équipe des Pays-Bas des années 1970 qui avait reçu le surnom d’Orange mécanique (en hommage au film de 1971 et en référence à son uniforme orange et la mécanique chirurgicale et efficace de son fameux football total).

Mais, évoluant en noir et blanc, le terme orange fut remplacé par saucisse. Pourquoi ? Au début du siècle dernier, Bragança Paulista constituait l’un des plus grands centres d’élevage porcin du Brésil et accueillait une grande communauté d’immigrés italiens. L’histoire raconte que Palmira Boldrini, une Italienne d’origine, préparait une saucisse maison à base de cuisse de porc, de vin et d’épices, qui conquit le palais de l’ensemble du Brésil. La ville devint ainsi connu grâce à cette charcuterie et gagna le nom de Terra da Linguiça (Pays de la saucisse). Aujourd’hui, la ville compte douze fabricants.

#1282 – Preston Athletic FC : the Panners

Dans le dictionnaire, ce terme se traduit par « orpailleurs » et pan, dont il est dérivé, correspond à une poêle pour cuisiner mais désigne aussi cette grande assiette qui sert à séparer par gravité les paillettes d’or des sédiments. Seulement, si la région de Prestopans possède des richesses naturelles, l’or ne brille pas par sa présence. En fait, le terme panners s’utilise comme le gentilé des habitants de Prestopans et se comprend comme ceux des marais salants (ou qui les exploitent). Le nom de la ville, Prestopans, se traduit du vieil anglais et de l’écossais par « le village des prêtres (priest) près des marais salants (pans) ». Il fait référence à une ancienne importante activité économique de la région, l’exploitation du sel.

Vous connaissez le fameux sel de Guérande ou l’ancienne cité de Brouage en Charente Maritime qui fit sa richesse avec le sel ou encore les Saline royale d’Arc-et-Senans. Vous allez maintenant découvrir le sel de l’Ecosse. Rappelons en premier lieu qu’au Moyen-Age, le sel était essentiel pour nos ancêtres puisqu’il permettait de conserver les aliments tels que la viande, le poisson et le fromage durant de longue période. Ainsi, alors que Prestopans était à l’origine un petit hameau de pêcheurs dénommé Aldhamer, les moines de l’abbaye de Newbattle, arrivèrent dans la région en 1198 et obtinrent le droit d’exploiter les marais, qui étaient inondés par l’eau salée de la rivière Forth, pour produire du sel. Avec le charbon, qui était abondant et à fleur du sol, le sel devint l’activité économique importante de la ville pour des siècles. Toute la chaîne se développa à Prestopans : d’un côté, les bassins où était extraite la saumure et de l’autre, les salines qui, alimentées en combustible avec le charbon local, chauffaient l’eau pour extraire par évaporation le sel. Il fallait huit tonnes de charbon pour produire une tonne de sel.

Avec le départ des moines, l’industrie du sel ne connut pas de déclin et le XVIème et le XVIIème siècle correspondirent au pic de l’activité. Cette richesse se concentraient dans les mains de quelques familles, tandis que la majorité de la population qui y travaillait y était exploitée. Au XVIIIème siècle, le sel devenait l’un des produits d’exportation écossais dont la croissance était la plus rapide. Mais, au XIXème siècle, avec l’amélioration des moyens de conservation, des voix de communication et une demande en sel qui se tourna uniquement vers l’utilisation en condiment, la production du sel écossais s’effondra face à la concurrence du sel anglais, plus fin et moins cher. En 1900, Prestonpans ne comptait plus qu’une seule saline avec deux cuves en état de marche et en 1959, le dernier bassin cessa de produire.

#971 – FC León : los Panzas Verdes

Les ventres verts. Evidemment, comme les joueurs du FC León portent une belle tunique verte, l’origine du surnom semble évidente. Mais, en réalité, il s’agit également d’un « gentilé » pour les habitants de la ville de l’état de Guanajuato. La couleur du maillot de l’équipe n’a donc pas inspiré ce surnom mais le hasard fait bien les choses. L’explication de ce sobriquet est multiple car je parviens à trouver au moins 3 versions.

Une des histoires les plus connues reposent sur une des activités phares de la ville qui en fait sa fierté : le travail du cuir et en particulier la production de chaussures. Afin de préparer la peau à la maroquinerie, les tanneurs passaient par divers processus chimiques. Puis, ils transportaient les peaux d’un endroit à l’autre en les soutenant, vu leurs poids, avec leur abdomen. Or, les substances chimiques utilisées laissaient des traces vertes sur les tabliers des ouvriers. Le mythe veut que les ouvriers partaient directement au stade avec leurs tabliers tachés.

L’autre version se base sur une autre production locale : la laitue. Deux histoires cohabitent avec toutefois le même cadre. Avant d’arriver en ville, les voyageurs en train pouvaient contempler les vastes champs de culture de cette salade qui entouraient la ville dans les premières décennies du XXème siècle. Leur couleur verte aurait alors inspiré tout d’abord l’équipe de baseball de la ville dans les années 1940. Le club de football aurait suivi. Puis, dans les années 1970, l’équipe de basket reprit la couleur mais également se dénomma Lechugueros (nom local de la laitue). Cette légende demeure plus méconnue que la suivante. Dans l’ancienne gare de León, les marchands étalaient leurs marchandises comme des fruits et des bonbons qu’ils tentaient de vendre aux voyageurs en transit et en attente. L’un des produits populaires que les voyageurs raffolaient étaient la laitue préparée avec du piment moulu, du sel et du citron. En manipulant la laitue, les mains des vendeurs se salissaient et ils les frottaient contre leurs tabliers blancs qu’ils portaient pour ne pas tacher leurs vêtements. En raison de la chlorophylle libérée par la laitue, les tabliers devenaient verts au niveau de l’abdomen et la poitrine.

#934 – NK Radomlje : Mlinarji

Les meuniers. Radomlje est une petite ville slovène de 1 500 habitants, située à proximité de Domžale, banlieue de la capitale Ljubljana. Autant dire que généralement, dans une si petite commune, les associations sportives sont limitées et évoluent dans les ligues régionales au mieux. Pourtant, la première ligue slovène accueille le NK Radomlje, le club de cette petite ville. Depuis 50 ans (le club fut fondé en 1972), le club de football est pratiquement la seule association sportive de Radomlje avec une si longue histoire et surtout il fait la fierté de la cité.

Le surnom du club provient de ses supporteurs. Ce n’est pas les supporteurs qui attribuèrent ce surnom au club mais le club qui s’appropria le nom de son association de supporteurs. Connu sous le nom de FC Mlinar (FC Meunier), l’association de supporteurs, la première du nom, naquit le 24 avril 2009, lors d’un match à l’extérieur contre Dob, considéré comme le plus grand derby de la région. Selon son leader, Matic Gorza, le nom du groupe de fans est étroitement lié à l’histoire économique de la ville « Sprva je bil Radomelje, šest ali sedem mlinov je bilo včasih v kraju. Zato je kar logično, da smo Mlinarji, pa še izvirno je, in hitro gre v uho » (Au début, à Radomelje, il y avait six ou sept moulins dans la ville. Il est donc logique que nous soyons les meuniers, et c’est original, et ça accroche vite l’oreille). Radomelje fut un lieu connu pour ses tavernes et surtout pour ses nombreux moulins à eau. La ville fut mentionnée pour la première fois en 1353 et, pour certains, son nom proviendrait de la présence de moulins. Le nom serait tiré de l’expression rado melje, signifiant « il aime moudre ». Néanmoins, la présence de moulins à cette époque demeure peu probable (elle est attestée seulement au XVème siècle). Le nom du lieu dériverait alors du nom de personne slave Rado(m). Toutefois, la minoterie fut une activité importante de la région. La cité est traversée par l’affluent Kamniška Bistrica et le ruisseau artificiel Mlinščica mais d’autres cours d’eau furent également aménagés pour les moulins. A son apogée, on compta près d’une trentaine de moulins le long du Kamniška Bistrica et plus d’une dizaine autour de Radomlje spécifiquement. Les meuniers, en particulier au tournant des XIXème et XXème siècles, étaient des villageois très influents et respectés. Après la Seconde Guerre mondiale, la plupart des minoterie furent nationalisées. Aujourd’hui, il est possible d’apercevoir les vestiges de deux moulins, les moulins de Kovačko et de Jašoč, Un seul moulin du nom de Kraljevega mlina (Moulin royal) demeure en activité, qui démarra en 1872.

#931 – Deportivo Alavés : los Babazorros

Les porteurs de fèves mais souvent aussi traduit par les mangeurs de fèves. Parler d’Alavès, c’est se plonger 20 ans en arrière et se remémorer cette fabuleuse finale de la Coupe de l’UEFA 2001 où le petit poucet basque, emmené par Jordi Cruyff, s’arrachait les tripes pour défier l’ogre Liverpool. Certes, les basques s’étaient à la fin inclinés mais quelle fraicheur. Outre cette performance, le club est aussi connu en Espagne pour ce surnom original et unique. Il est utilisé pour la formation d’Alavés mais aussi pour tous les habitants de la province d’Alava. Pour le club, il apparut dès les années 1930, 9 ans après sa fondation. Le quotidien « La Libertad » annonçait en novembre 1930 que « el Athletic vendrá a medir sus fuerzas con los babazorros » (l’Athlétic [Bilbao] viendra mesurer ses forces avec les babazorros). L’ « Heraldo Alavés » qualifiait le match Real Sociedad-Alavès de décembre 1931 de « encuentro del domingo entre donostiarras y babazorros » (rencontre dominicale entre Saint-Sébastien et babazorros).

Son origine et sa signification sont un peu mystérieuses. La version la plus répandue, comme l’indique le Dictionnaire général basque de Koldo Mitxelena, est que le mot babazorro vient du basque et résulte du mariage du terme baba qui signifie haricot et zorro qui signifie sac. La raison est que la culture de ce légumineux était importante dans cette région. En 1745, l’écrivain prête, Manuel Larramendi, promoteur de la langue et de la culture basques, écrivait « Llamamos jocosamente a los alabeses babazorros, por la mucha haba que ahí se coge, y come » (Nous appelons en plaisantant les Alabeses babazorros, à cause des nombreux haricots qui y sont cultivés et mangés). Certains avancent une légende où un jeune homme dénommé Juan Gaztea de Arbulo se maria à une jeune demoiselle. La famille de la mariée le surnomma babacorro parce qu’il était de la province d’Alava et que sa nourriture principale était les fèves. Au-delà de ce conte, des ordonnances de la ville d’Espejo au XVIIIème siècle mentionnaient cette légumineuse à plusieurs reprises mais parmi d’autres éléments culinaires. Car, la place des fèves dans l’agriculture et dans la cuisine traditionnelle d’Alava n’est pas aussi importante que le prétend ce surnom. Le terme prit aussi une tournure négative puisqu’au sens figuré, il fut utilisé comme un synonyme de idiot. Ainsi, le Diccionario de la Real Academia Española (Dictionnaire de l’Académie Royale Espagnole) le définit comme un synonyme péjoratif d’Alavés et souligne qu’il dérive peut-être du catalan varvassor (vassal).

Toutefois, comme souvent, les personnes offensées s’approprièrent le terme désobligeant qui devint un signe d’identité, de fierté de la province d’Álava. En 1892, Alfredo Laffitte dans la revue « Euskal-Erria » imagina un dialogue comique entre un homme de Vitoria, un homme de Bilbao et un homme de Saint-Sébastien qu’il intitula « Babazorros, chimbos y choriburus » . Au XXème siècle, des articles d’Eulogio Serdán ou de Venancio del Val, entre autres, parurent dans des revues locales avec des titres significatifs tels que « Del buen humor babazorro » (De la bonne humeur babazorro) ou « Soy babazorro, soy vitoriano, como mi pueblo no hay otro igual » (Je suis babazorro, je suis de Vitoria, il n’y a aucune autre ville comme ça). Aujourd’hui, les supporteurs du club n’hésitent pas à porter des maillots où il est écrit « Dejaré de ser uno de Babazorros cuando deje de respirar » (j’arrêterai d’être l’un des babazorros quand j’arrêterai de respirer). Enfin, en 1997, le club organisa un concours pour créer la mascotte de l’équipe. Parmi plus d’une centaine de propositions, l’artiste Iñaki González-Oribe remporta les suffrages du jury avec son renard, qui représentait l’agilité, la rapidité et la ruse, qualités que les footballeurs d’Alavés devaient posséder. Mais, l’artiste joua aussi avec la ressemblance phonétique entre le terme renard en espagnol, zorro, et le surnom de l’équipe babazorro.

#910 – CA Argentino Rosario : los Salaítos

Les petits salés. Honneur au nouveau champion du monde argentin. Son leader technique, Lionel Messi, et son jeune mais fédérateur sélectionneur, Lionel Scaloni, sont parvenus à venir à bout de la France après une finale qui restera dans les annales. Outre le fait de porter le même prénom, les deux ont une autre particularité : ils ont tous deux effectué leur apprentissage dans le club du Newell’s Old Boys. Pour leur rendre hommage, il serait donc logique d’évoque un des surnoms de Newell’s. Mais les deux seuls connus ont déjà été traités (cf. #104 et #340). Je ne pouvais pas en revanche faire un article sur un surnom de son rival de Rosario Central. Comme les deux Lionel sont originaires de la ville de Rosario (où réside le club de Newell’s), je me suis reporté sur le 3ème club de la ville de Rosario, CA Argentino. D’autant plus que son nom met en valeur le pays et son surnom est plutôt original et distinctif. Aucun autre équipe porte un surnom équivalent (bien que finalement, on peut trouver un lien avec celui d’Everton cf. #97). Pour connaître la raison de ce surnom, il faut remonter aux premières années d’existence de ce club centenaire (sa fondation ayant eu lieu le 15 janvier 1912). Autour de l’ancien terrain du club, un marchand ambulant espagnol appelé José Pernía avait l’habitude de vendre des graines de lupins et des biscuits salés. De sa voix grave et très particulière, il criait « A los altramuces ! salaítos los tengo ! » (Lupins ! Petits salés, je les ai – altramuces est l’autre nom hispanique pour lupin). Puis, un après-midi, alors qu’un match décisif se jouait devant une foule compacte, lorsqu’Argentino marqua un but, l’épouse du marchand scanda : « vivan los Salaitos y dulces » (vive les petits salés et les douceurs). C’est ainsi que l’institution fut baptisée. Plutôt ironique sachant que le club naquit dans l’ancien quartier populaire de Refineria (Raffinerie), nommé ainsi car une raffinerie y avait été construite.

#764 – Real Oviedo : los Carbayones

Surnom du club, il s’agit surtout du gentilé des habitants d’Oviedo. Il provient de deux éléments typiques de la région d’Oviedo. Tout d’abord, Carbayón était le nom en asturien (Oviedo étant la capitale de la principauté, de la communauté autonome et de la province des Asturies) d’un chêne centenaire qui se trouvait dans la Calle de Uría, principale artère d’Oviedo ouverte en 1874. Cet arbre, qui atteignaient une hauteur de 30 mètres, dont la cime mesurait 38 mètres de circonférence et agé d’environ 500 ans, était devenu un lieu de loisirs et de promenade pour les habitants d’Oviedo. Mais, il fut abbatu en 1879 car des vers l’avaient colonisé. Une plaque commémorative rappelle aujourd’hui l’emplacement de cet arbre légendaire.

Mais, le Carbayón est aussi une patisserie d’Oviedo, créée dans la première moitié du XXème siècle. Entre 1920 et 1923, José de Blas, propriétaire de la confiserie Camilo de Blas, demanda à son maître boulanger, José Gutiérrez, de confectionner une friandise représentant Oviedo. Il créa une patisserie à base d’une pâte feuilletée renfermant un mélange d’œuf, d’amandes moulues, de cognac ou de vin doux et de sucre, recouverte d’un sirop fait d’eau, de jus de citron, de sucre et de cannelle. Il fut dévoilé lors de la première foire commerciale des Asturies qui se tenait à Gijón en 1924. Comme il devait être symbolique de la région, son nom aurait été tiré de l’arbre.

#667 – FC Spartak Moscou : мясо

La viande. Certes, dans ce football business du XXIème siècle, les joueurs peuvent être considérés comme de la viande par les plus mercantilistes agents mais ce n’est pas cette raison qui conduit à ce surnom des joueurs du Spartak. Au contraire, pour comprendre la création de ce surnom, il faut remonter à une époque où le football demeurait encore une activité récréative, dans les années 1920, et sous un régime qui s’opposait au capitalisme, le communisme soviétique. Le club fut fondé en 1922, sous le nom de МКС (cercle sportif de Moscou), et sur les ruines dans un ancien club omnisport attaché au mouvement panslave Sokol. En 1923, les autorités communistes décidèrent que les clubs sportifs devaient s’identifier à un lieu géographique. Moscou étant une grande ville, le club prit le nom du quartier où il résidait (Presnenski) et s’appella Красная Пресня (Rouge Presnenski). Puis, en 1926, nouvelle intervention des autorités qui intimèrent aux clubs de se lier avec des administrations ou des syndicats ou coopératives de travailleurs. Les autres grands clubs moscovites étaient alors déjà patronnés par les grandes administrations centrales : le Dynamo Moscou était soutenu par la police politique, le CSKA Moscou par l’armée rouge et le Lokomotiv Moscou par la compagnie des chemins de fer. Le futur Spartak était alors supporté par Nikolai Pashintsev, président du comité central du syndicat de l’industrie alimentaire, et ce dernier mit le club sous la direction et le parrainage d’une coopérative de bouchers et de commerçants alimentaires. Le club prit donc le nom de Пищевики (Travailleurs de l’alimentation) de 1926 à 1931. Après 1931, le club changea de partenaire et de nom (Промкооперация – Coopérative de production).

Jusqu’aux années 1970, les groupes de supporteurs étaient plutôt rares et donc les surnoms des clubs existaient peu. De même, les rivalités liées à des derbys étaient inexistantes. La première association de supporteurs du Spartak apparût en 1972 et les rivalités avec ceux des autres clubs naquirent à la fin des années 1970. Les supporteurs du CSKA auraient alors qualifié les joueurs et fans du Spartak de мясо. Ce surnom faisait référence aux liens historiques du club avec la coopérative des bouchers et commerçants. Surtout, comme ce sobriquet était donné par les supporteurs du CSKA, il se devait être péjoratif. Or, quel aliment faisait le plus défaut dans les rayons des magasins soviétiques ? La viande. Ce qui faisait penser que les bouchers étaient des escrocs. Pour certains fans du Spartak, ce surnom demeure encore une insulte mais pour la majorité s’est aujourd’hui une fierté. En 2002, l’attaquant Dmitry Sychev réalisa une sacrée performance en marquant 8 buts lors de ces 12 premiers matchs pour le Spartak. Il montrait alors après ses buts un maillot où il était marqué : Кто мы? Мясо (Qui sommes nous ? La viande). Ce geste ancra définitivement le surnom.

#621- Gimnasia y Esgrima La Plata : los Triperos

Les tripiers, les bouchers. Le football argentin se construisit dans ses villes par une opposition entre deux clubs. A Buenos Aires, Boca s’opposa à River quand Racing combattait Independiente. A Rosario, Central et Newell’s étaient les ennemies intimes. A La Plata, les deux clubs qui émergèrent de leurs quartiers pour régner sur la ville et au-delà furent Gimnasia y Esgrima d’un côté et Estudiantes de l’autre. Ses rivalités locales se traduisirent dans les clubs au travers de la sociologie des supporteurs. En effet, les classes sociales se répartirent naturellement entre les deux clubs.

Au début du XXème siècle, de par son nom, Estudiantes enrôlait ses supporteurs principalement au sein de la communauté étudiante de la ville et s’interdit même en 1916 de recruter ses joueurs hors des murs de La Plata. Résultat, le club limita sa zone d’influence géographiquement et socialement aux couches aisées de la ville. Gimnasia y Esgrima, à l’inverse, s’ouvrit aux autres quartiers tels que El Mondongo et à la banlieue tels que les vieilles villes d’Ensenada et de Berisso. Très vite, les couches populaires de ces quartiers et villes constituèrent le gros du bataillon des supporteurs comme des joueurs du Gimnasia. Au début des années 1920, 25% des joueurs des différentes sections du club provenaient d’Ensenada et de Berisso.

Ses quartiers périphériques se développèrent avec l’industrialisation de la ville. Berisso abritait ainsi les premiers abattoirs et usines de conditionnement de viandes des sociétés « Swift » et « Armour ». Ces industriels employèrent de nombreux ouvriers provenant de Berisso ou de El Mondongo et qui vinrent grossir les rangs des fans de Gimnasia. Avec dédain, les rivaux de Gimnasia surnommèrent ses supporteurs et joueurs de triperos.

#580 – CA San Luis : los Tuneros

Le mot provint du terme tuna qui désigne le fruit issu du cactus connus sous le nom de figuier de barbarie. Cet espèce est originaire du Mexique, où elle est appelée nopal, et est si endémique au pays, qu’elle figure sur le drapeau du Mexique. L’Europe ne connaîtra ce fruit qu’avec la découverte des Amériques. La région de San Luis Potosí est l’un des grands centres de production de la figue au Mexique. Selon le Ministère du Développement Agricole et des Ressources Hydrauliques (Sedarh), à fin 2020, San Luis Potosí se positionnait comme la 5ème région productrice de figue de barbarie de tout le pays avec 17 045 tonnes par an, soit 5% de la production nationale. On dénombre 710 producteurs de figues de barbarie (sur 20 000 fermes au Mexique, représentant 48 000 hectares) dans 20 municipalités situées principalement dans l’Altiplano et la zone centrale de San Luis Potosí. La gastronomie de cet Etat propose également quelques plats à base de figue. Le queso de tuna (fromage de figue) est un dessert fabriqué à la main en utilisant le jus de la figue comme seul ingrédient. Cuit pendant 12 heures ou plus, le jus est réduit et épaissi, sous la surveillance d’un cuisiné équipé d’une pelle en bois pour que la substance ne colle pas ou ne brûle pas. Autre douveur : El colonche. Il s’agit d’une boisson fermentée traditionnelle qui se déguste entre juillet et octobre (la saison de récolte du tuna) et qui existait dans le monde préhispanique.

Ce surnom qualifiait l’ancienne équipe de la ville, San Luis FC, fondé en 1957 et disparu en 2013. Dès cette disparition, le nouveau club du CA San Luis se créa, en transférant à San Luis Potosí le club de Veracruz. Le CA ne reprit pas totalement les symboles de l’ancien club, notamment pour le surnom. En particulier, quand le club espagnol de l’Atlético de Madrid prit une participation dans le CA qui amena à changer les couleurs du club, les surnoms du club espagnol s’imposèrent à San Luis. Toutefois, même si le fait d’utiliser los Tuneros fit débat, il reflète tellement la région et est si associé au football local qu’il continue à être utilisé.