#787 – Hércules Alicante CF : Blanquiazules

Les blanc et bleu. Cette année, le club fête dignement son centenaire, enflamant les débats entre historiens. En effet, si l’enregistrement officiel fut effectué en 1922, certains estiment que le club d’Alicante entamait ses premiers pas doucement dès 1919 (voire 1914). Le club commença son activité en portant des chemises rayées rouges et blanches accompagnées d’un short noir et de chaussettes à l’image du maillot. L’explication du choix est inconnue mais la ressemblance avec les maillots de l’Athletic Bilbao et de l’Atlético de Madrid, clubs bien établis et bénéficiant d’une certaines réputation, n’est peut-être pas un hasard. Hércules évolua avec ce kit jusqu’en 1928 où la direction prit la décision d’opter pour des maillots rayés bleus et blancs. Alors pourquoi ?

Pendant les premières années d’existence du club, une autre association attirait toute la lumière d’Alicante, le Club Natación Alicante. Concentré au départ sur la natation, ce club se développa et devint omnisport, avec notamment une section football. Ses joueurs évoluaient en bleu et blanc. Son ascension fut fulgurante, avec en apogée la saison 1923-1924. Lors de cette année, l’équipe de football du club de natation jouait dans la catégorie régionale la plus élevée (Groupe A) et parvint à remporter le championnat, devenant le premier club d’Alicante à gagner ce titre régional. Mais, sa chute fut tout aussi rapide. Le 28 avril 1927, face à des difficultés économiques et au refus de la Federación Levantina de les admettre en raison d’incidents qui se déroulèrent lors d’un match, le Club Natación Alicante disparut. Club historique d’Alicante et l’un des plus aimés, il laissa un vide qui fut comblé par Hércules, les deux rivaux s’affrontant régulièrement par le passé. Le 4 novembre 1928, lors du premier match de championnat de deuxième catégorie contre Albacete, Hércules joua ce match dans l’enceinte du Campo de La Florida, ancienne antre des nageurs, et décida donc de changer son kit rouge et blanc pour le bleu et blanc en mémoire du club de natation d’Alicante. Par ce geste, Hércules s’inscrivait comme l’héritier du club de natation, espérant bénéficier de sa réputation et de sa popularité. En outre, ce match fut l’occasion également de rendre hommage à José Muñoz Gómis, un professeur de gymnastique et premier promoteur du football à Alicante. Il créa le premier terrain de football d’Alicante qu’il inaugura le 5 avril 1903 en faisant s’affronter deux équipes, dénommée Blanco (blanc) et Azul (bleu), couleurs de la ville d’Alicante. Double raison pour désormais porter ces couleurs. Dans un communiqué de presse daté du 31 octobre 1928, il était indiqué : « la activa directiva « herculana » acordó anoche dedicar el encuentro entre « herculanos » y « albacetenses » a nuestro querido don José. Muy de veras celebramos este acuerdo, así como el de cambiar los colores del « jersey », hoy rojiblanco por los gloriosos colores del antiguo Club Natación Alicante. En el partido homenaje a José Muñoz, los « equipiers » del Hércules saldrán luciendo la camiseta blanquiazul, colores que un día llegaron a ostentar el preciado título de campeones de levante. Esta modificación de cambiar los colores, de ello estamos plenamente convencidos, será recibida con muestras de simpatía por los aficionados alicantinos. » (le conseil d’administration de la « herculana » a accepté hier soir de dédier le match entre « herculanos » et « albacetenses » à notre cher Don José. Nous nous félicitons de cet accord, ainsi que de celui qui consiste à changer les couleurs du maillot, aujourd’hui rouge et blanc, pour les couleurs glorieuses de l’ancien club de natation d’Alicante. Pour ce match d’hommage à José Muñoz, les « équipiers » d’Hercules porteront le maillot bleu et blanc, couleurs qui ont autrefois porté le titre très prisé de champions de Levante. Nous sommes pleinement convaincus que ce changement de couleurs sera accueilli avec sympathie par les supporteurs d’Alicante).

Le drapeau d’Alicante se découpe en deux morceaux égaux avec l’écusson de la ville en son milieu. A gauche, une bande blanche. A droite, une bande bleue. Un arrêté royal du 30 juillet 1845 établissa des pavillons nautiques permettant d’identifier les navires en fonction de leur province maritime d’attache. Ainsi, le ministère de la Marine attribua à la province d’Alicante un drapeau blanc et bleu séparé verticalement. Finalement, le 31 octobre 1857, ce système fut aboli mais, passé dans les usages, il perdura jusqu’au XXème siècle. Même les bateaux de pécheurs qui n’avaient pas à l’utiliser en 1845 arborer ce pavillon. Le 1er février 1893, le conseil municipal d’Alicante adopta ce drapeau comme celui officiel de la ville.

#773 – NK Istra 1961 : Zeleno-žuti

Les vert et jaune. Le surnom appelle à la simplicité en faisant référence aux couleurs des maillots du club. Pourtant, la confusion fait parti intégrante de l’histoire de ce club de la ville de Pula, dans la région de l’Istrie. En 1948, au sein du puissant chantier naval Uljanik émergea un club nommé NK Uljanik. En 1961, ce dernier fusionna avec le NK Pula pour donner naissance au NK Istra. Alors que le NK Istra tentait de survivre en seconde division yougoslave, en 1964, le NK Uljanik renaquit de ses cendres pour évoluer en division régionale.

Pendant les 40 années suivantes, les deux clubs eurent des histoires croisées avec toutefois une domination locale du NK Istra, soutenu par les autorités. Par exemple, en 1978, le NK Uljanik accéda à la Ligue inter-républicaine yougoslave (une ligue inter-régionale comprenant la Slovénie, Zagreb, l’Istrie, Rijeka et une partie de la Bosnie-Herzégovine) où évoluait déjà le NK Istra. La municipalité de Pula considéra qu’elle ne pouvait supporter financièrement deux clubs à ce niveau de compétition. Appréciant plus l’organisation et l’équipe du NK Istra, la ville privilégia ce dernier et demanda au NK Uljanik de se retirer de cette ligue, ce que le club fit. Rebelote en 1983 quand NK Uljanik remporta le championnat régionale et accéda de nouveau dans le championnat dans lequel jouait NK Istra. Même décision de la municipalité. Mais, le NK Uljanik refusa cette fois de s’y plier et évolua donc dans la même division que son rival.

L’indépendance de la Croatie en 1992 donna naissance à une nouvelle organisation des championnats dans le pays. NK Istra rejoignit la première division tandis que le NK Uljanik joua en seconde. Au début des années 2000, le NK Uljanik entama son ascension qui le fit suplanter finalement et définitivement son rival du NK Istra. En 2003, les deux clubs se retrouvèrent en seconde division et le NK Uljanik remporta le derby lors de la dernière journée du championnat. Cette même année, ce dernier réussit l’exploit d’atteindre la finale de la Coupe de Croatie, aucun club de seconde division n’étant auparavant parvenu à se hisser si haut. Après 40 ans de domination du NK Istra, l’autre club de la ville était enfin reconnu et reprenait le flambeau de meilleure équipe de la ville.

Par la suite, NK Uljanik eut du mal à se stabiliser (changement de nom, problèmes financiers …) malgré sa présence dans l’élite croate. En 2007, le club descendit en seconde division tandis que le NK Istra se débattait en troisième division. Les deux associations tentèrent d’unir leur force mais le projet de fusion échoua. Déçus, les supporteurs du NK Istra, regroupés sous le nom de Demoni (les démons), proposèrent leur service au NK Uljanik (alors renommé à l’époque NK Pula) si ce dernier acceptait de changer ses couleurs. En effet, depuis sa fondation, le NK Uljanik évoluait en bleu, couleur de la société Uljanik, propriétaire du chantier naval. Le NK Istra portait des équipements jaune et vert, aux couleurs de la ville de Pula. Le NK Pula, qui ne disposait pas d’une large et organisée base de supporteurs accepta la proposition. Les dirigeants changèrent également le nom du club en NK Istra 1961. Depuis, NK Istra 1961 est le club de la ville de Pula, évoluant toujours au sein de l’élite croate, en ayant subtiliser l’aura, les couleurs ainsi que le nom de l’autre club de la ville, le NK Istra, qui depuis joue au 5ème niveau national.

Les armoiries de Pula, qui représente une croix jaune sur fond vert, ressemblent à bien d’autres en Istrie, mais la combinaison de couleurs utilisée est plutôt unique. La municipalité de Pula a commencé à utiliser un sceau avec un bouclier ovale avec une croix au début du XIXème siècle, tandis que le bouclier vert avec une croix dorée surmontée d’une couronne murale a été confirmé en 1846.

#752 – Club de Regatas Vasco da Gama : Camisas Negras

Les chemises noires. Le maillot de Vasco da Gama est sujet à quelques débats au Brésil. En effet, malgré les efforts des équipes de marketing pour réinventer les équipements chaque année, les grandes équipes conservent leur maillot principal, au moins pour ce qui est des couleurs (car même la Juventus ou le FC Barcelone ont dû sacrifier leurs célèbres rayures aux sirènes trompeuses du merchandising). Pour Vasco, le maillot principal peut-être noire avec une bande blanche ou blanc avec une bande noire, chacun étant aussi important. Pourtant, leur surnom rappelle un de leur premier kit qui était alors intégralement noir.

Les membres du Vasco da Gama, à sa fondation en 1898, ne pratiquaient que l’aviron et reprirent donc les principaux symboles de la mer pour leur nouveau club : un amiral portugais pour nom (cf #194), la croix du Christ comme écusson (symbole des navires portugais) et un maillot devant rappeler les grandes heures des navigateurs. Pour son président-fondateur, Francisco Gonçalves Couto Junior, qui proposa ses couleurs, le noir symbolisait les tempêtes maritimes, les mers inconnues et les marins morts lors des grandes expéditions. La bande diagonale blanche représentait la lumière et les routes ouvertes par les grands navigateurs portugais.

Pour autant, ce ne fut pas le premier maillot choisi par la section football. En effet, cette dernière naquit au sein du club en 1915 en absorbant un club existant, Lusitânia Futebol Clube. Ces membres voulurent certainement se distinguer des rameurs, tout en respectant les symboles du nouveau club, et optèrent pour un maillot noir, avec le col et les poignets blancs. Dans la foulée, l’équipe s’installa petit à petit dans le gratin footballistique en battant les équipes de Rio telles que Flamengo, Fluminense, América et Botafogo. L’apogée fut la victoire en 1923, premier championnat carioca remporté, avec onze victoires, deux nuls et une défaite. Les journalistes surnommèrent alors le club camisas negras, en l’honneur de leur maillot.

Mais, peut-être pas uniquement car Vasco était également le porte-étendard des classes populaires, laborieuses et colorées du Nord de Rio. Alors que le football était réservé à une élite blanche qui vivait dans les quartiers Sud et étaient représentaient par Flamengo, Fluminense et Botafogo (América était du nord mais était le club des élites de Tijuca), Vasco était le premier club à puiser ses membres et ses supporteurs parmi les populations défavorisées et généralement métissées. Alors quand Vasco gagna ce premier championnat pour sa première participation, vexés, les grands clubs du Sud se retirèrent du championnat en 1924 pour créer une ligue concurrente. Mais, en 1925, face aux succès et à la popularité du Vasco, ils reculèrent et acceptèrent d’affronter de nouveau les pauvres mulâtres du Vasco. Ainsi, dans cette société raciste, cette épisode contribua à élargir l’accès de ce sport d’élite aux noirs et aux pauvres et marqua un tournant dans l’ère du professionnalisme dans le football brésilien. Aujourd’hui, cette réciprocité entre le maillot blanc et le maillot noir serait aussi le symbole de l’égalité des races prônées par le club.

#750 – Brighton & Hove Albion FC : the Seagulls

Les mouettes. En matière de surnom, le football anglais demeure l’un des plus engagés, développés, et ce dès les premières années de son existence. Fondé en 1901, le pensionnaire actuel de Premier League n’a pas adhéré facilement à cette tradition. Lambs (agneaux) et Shrimps (crevettes) se succédèrent pendant les premières années mais se diffusèrent peu parmi les supporteurs. En 1950, le Brighton Standard, organe non officiel des fans, organisa un concours pour trouver un nouveau surnom mais celui plébiscité, Brovion, dérivé du nom du club, ne rencontra pas plus de succès. A l’été 1972, le club lança un vote pour trouver un surnom. Parmi les suggestions, les références à la situation maritime de la ville furent nombreuses (Coasters, Seasiders et Mariners). D’autres mettaient en avant l’âge d’or de Brighton sous le Prince Régent à la fin du XVIIIème siècle et au début du XIXème (Regents, Sovereigns, Bucks, Royals). Enfin, les oiseaux furent une autre source d’inspiration (Bluebirds, Swifts, Seagulls et Martlets). Mais le choix le plus populaire se porta sur dolphins (dauphins). Un delphinarium avait ouvert ses portes à Brighton en 1968, ce qui avait certainement influencé le choix. Surtout, les armoires de la ville de Brighton affichaient deux dauphins. Ces derniers marquèrent la longue histoire de Brighton mais il n’est pas facile de retracer leur origine. Par une conclusion hâtive, on pourrait penser que les dauphins ont été adoptés afin de rappeler le lien entre cette cité côtière et la mer (en l’occurence la Manche). Mais, les dauphins pourraient provenir des armoiries de deux familles qui firent parti des notables de la ville : la famille Scrase, associée au manoir de Brighton et la famille Lashmar. Le surnom plut en tout cas, au point que l’animal intégra le nouvel écusson du club en 1974. Mais, il ne resta que 3 ans et fut remplaçé rapidement (en 1977) par les mouettes.

Situé dans le Sussex, Brighton se retrouve isolé de la plupart des autres équipes de football, les laissant sans véritable derby à disputer. Pourtant, une rivalité va se construire avec un club situé à plus de 80 km de Brighton. En 1976, Alan Mullery fut nommé manager de l’équipe de Brighton tandis que Terry Venables débutait sa carrière d’entraineur dans le club londonien de Crystal Palace. En 3ème division, les deux clubs bataillèrent toute la saison 1976-1977 pour la montée (ils se recontrèrent 5 fois lors de cette saison) et leurs entraineurs nourrissaient en plus une certaine hostilité (qui remontait à leur passage en tant que joueur à Tottenham). Cette rivalité se renforça les deux saisons suivantes, les deux clubs évoluant dans les mêmes divisions et partageant les mêmes objectifs. Et finalement, bien que séparé de 80 km, l’autoroute A23 reliait aussi directement la ville à ce quartier sud de Londres. Or, Crystal Palace étant connu sous le nom de eagles (aigles), les fans de Brighton ne furent pas séduits de leur opposer un dauphin. Ainsi, face aux supporteurs de Crystal Palace qui scandaient « Eagles, Eagles! » , ceux de Brighton répondirent par des cris de mouettes et des chants « Seagulls, Seagulls! » (un oiseau courant sur la côte). Le surnom prit rapidement et s’imposa donc dès 1977 sur le blason du club.

#686 – Ruch Chorzów : Niebiescy

Les bleus. Deuxième club le plus titré de Pologne, avec 14 titres de champion à son actif entre 1933 et 1989, Ruch constitue, depuis un siècle, une véritable vitrine de la ville de Chorzów mais également de la Haute-Silésie et évolue dans un kit bleu et blanc. Il n’existe pas d’explication officielle justifiant ce choix de couleurs. Plusieurs histoires circulent même si une apparaît dominante et remonte à la création du club.

Au début du XXème siècle, la Haute-Silésie, et donc Chorzów, se situait au sein de l’Empire Allemand bien que sa population était majoritairement polonaise (60% vs 40% de germanophone). Forcément, il existait des tensions entre les deux communautés, sur des bases ethniques, religieuses et sociales, et dès la fin du XIXème siècle, les habitants polonais de Chorzów s’animèrent d’un sentiment nationaliste. Le traité de Versailles de 1919 offrit l’opportunité à cette population polonaise de rallier la République de Pologne, de nouveau indépendante depuis 1918. En effet, un référendum connu sous le nom de Plébiscite de Haute-Silésie fut organisé sous l’égide des alliés pour connaître à quel pays souhaitaient être incorporés les habitants de cette région : la République Allemande de Weimar ou la République de Pologne, de nouveau indépendante en 1918. Ce processus conduisit à la division de la Silésie, une partie étant rattachée au territoire polonais en 1922. Durant cette période, les silésiens d’origine polonaises menèrent de nombreux mouvements et soulèvements pour emporter la décision. Ainsi, le Commissariat du Plébiscite polonais (organisme nationaliste pro-Pologne) s’inquiéta de la germanisation de la jeunesse silésienne au travers des associations sportives allemandes et lança un appel le 27 janvier 1920 à la création de nouveaux clubs sportifs polonais en Haute-Silésie (ceci afin d’éveiller la jeunesse à la cause nationaliste). L’appel fut entendu avec, à l’été 1920,112 clubs déjà fondés, rassemblant plus de 15 000 adhérents. Dans ce contexte, le représentant du Commissariat à Chorzów créa le club le 20 avril 1920. Le nom Ruch, qui signifie mouvement en polonais, était censé faire référence aux mouvements insurrectionnels silésiens (mais les autres clubs créés lors de l’appel affichèrent des références plus explicites tels que Polonia (Pologne en Latin), Powstaniec (Insurgés), …). La couleur devait donc être un choix politique également et les membres auraient opté pour le bleu et blanc, couleurs des armes de la Haute-Silésie. Ces dernières se composent d’un aigle jaune sur fond bleu et proviennent directement des armoiries de la Maison Piast. Les Piast étaient la première dynastie régnante historique de la Pologne à compter du Xème siècle. Si le règne royal des Piast en Pologne prit fin en 1370 avec la mort du roi Casimir III le Grand, d’autres branches de la famille dominèrent encore des duchés, en particulier ceux de Mazovie et de Silésie (basse et haute). Toutes ces branches avaient pour armoirie un aigle, seuls les couleurs changées. En Basse-Silésie, l’aigle était noir sur fond jaune et donc en Haute-Silésie, jaune sur fond bleu. Pour la Haute-Silésie, ces armes sont affirmés dès 1222. Quand aux teintes, la plus ancienne représentation en couleur des armoiries est conservée dans le château de Lauf près de Nuremberg, où 114 armoiries des principautés, des évêchés et des villes d’Europe furent sculptées dans la pierre en 1353. Celles du duché d’Opole, dépendant de la Haute-Silésie, présentent encore aujourd’hui des traces de jaune sur l’aigle et de bleu sur l’écu. Cette palette de couleurs est confirmée dans l’Armorial de Gueldre (établi entre 1370 à 1395). Seulement, vous aurez noté une différence de taille : les armes sont de couleurs jaune et bleu tandis que le club évolue en blanc et bleu. Comment expliquer cette différence alors que le jaune figure sur les armoiries des Piasts de Haute-Silésie depuis au moins le XIVème siècle ? Certains prétendent que la couleur jaune ne fut pas permanente sur les armes et qu’il arriva qu’elle fusse remplacée par du blanc. Cela aurait été le cas dans l’entre-deux guerres. Ce qui vient corroboré cette hypothèse est l’Etoile de Haute-Silésie. Il s’agit d’une distinction militaire polonaise établie en 1925 pour décorer les insurgés de Silésie. Elle se composait notamment d’un aigle en argent (ici la matière mais en héraldisme l’argent correspond au blanc) sur une croix bleue et blanche. D’autres avancent que le club aurait remplacé le jaune par du blanc car le mariage du bleu et jaune aurait pu faire référence aux couleurs de l’Ukraine voisine, avec qui les relations n’étaient pas au beau fixe. Dans la même veine, la Basse-Silésie était la région voisine (mais très majoritairement germanophone) dont les armes étaient un aigle noir sur fond jaune. Les populations polonaises de Haute-Silésie n’auraient donc pas souhaité partager une couleur commune avec leur voisin « honni » . Enfin, l’explication la plus simple serait qu’à l’époque, les gardes-robes des joueurs, qui constituaient la « réserve » vestimentaire du club, étaient simples et ne comptait pas de jaune mais plutôt du blanc.

D’autres versions ont fleuri parmi les fans. Tout d’abord, le bleu du club ferait référence aux bleus de travail portés par les joueurs et les supporteurs qui travaillaient majoritairement dans les usines, notamment l’aciérie Huta Bismarck. Sauf que beaucoup indiquent que les employés de Huta dans les années 1920 ne travaillaient pas en uniforme bleu, mais avec ce qu’ils avaient dans leur garde-robe.

Une autre légende se rapporte aux soulèvements de Silésie de l’entre-deux guerres, au cours desquels les insurgés auraient porté des brassards bleus sur leurs manches et les populations les appelaient niebiescy. Résultat, la couleurs et le surnom se seraient reportés vers le club et ses joueurs. Seulement il semble que les insurgés portaient des brassards de différentes couleurs : blanc, blanc et rouge, blanc et bleu.

Une autre histoire fait appel à la rivalité avec le club germanophone de l’AKS Królewska Huta (aujourd’hui AKS Chorzów) qui évoluait en vert. Par opposition, le Ruch aurait opté pour le bleu. Mais, dans ce cas pourquoi pas le rouge, le blanc ou toute autre couleur qui par définition s’oppose au vert ?

Certains estiment que le surnom est venu plus tard, dans les années 1930. A cette époque, le Ruch Chorzów posait la première pierre de sa légende, en remportant 5 Championnats de Pologne (dont 4 d’affilé, 1933 à 1936 et 1938). Au même moment, un autre club de football en Allemagne s’imposa comme l’équipe dominante, à la popularité immense en Allemagne et grandissante dans le reste de l’Europe, Schalke 04. Après un premier championnat d’Allemagne remporté en 1929, Schalke disputa 14 des 18 finales du championnat d’Allemagne entre 1933 et 1942. Pour décrire son écrasante domination, rappelons que de 1935 à 1939, Schalke ne perdit aucun match de championnat. Les supporteurs de Ruch établirent alors le parallèle avec le club allemand qui évoluait également en bleu et dont le surnom était die königsblauen (les bleus royaux). Par mimétisme, les fans de Ruch adoptèrent le surnom niebiescy et le scandèrent à leurs joueurs.

Enfin, l’histoire la moins crédible mais finalement la plus sympathique. Depuis les cieux, le diable (bies) et l’archange Gabriel (Gabryjel) regardait un match. L’équipe de Ruch jouait un superbe football et les joueurs paraissaient inspirés. Gabryjel déclara à l’attention des joueurs de Ruch « Wyście som Anielscy » (Vous êtes des anges). Ce à quoi Bies répondit « Nie ! » (Non !) et Gabriel dit alors « Biescy » (diabolique). Les supporteurs de Ruch entendirent les deux derniers mots Nie et Biescy et crièrent alors à leurs joueurs « niebiescy » (les bleus).

#681 – CA Rosario Central : los Canallas

Les vauriens, pour traduire le terme de manière plutôt poli. Pour comprendre ce surnom peu agréable, il faut lire en parallèle de cette article, celui consacré à Newell’s Old Boys (#104). Les deux clubs sont les grands rivaux qui se partagent l’amour des fans de la ville de Rosario. En 1920, la commission des Dames de l’Hôpital Carrasco souhaita profiter de cette rivalité pour organiser un match de charité entre les deux clubs afin de collecter des fonds pour les personnes souffrant de la maladie de Hansen, ie la lèpre. Newell’s Old Boys accepta mais le Rosario Central refusa, pour une raison inconnue. Résultat, les supporteurs de Newell’s traitèrent le Rosario de club de vauriens. Il s’agit de la version la plus communément admise mais une autre circule qui se base également sur la rivalité avec un autre club. En 1928, les supporters de Rosario Central auraient mis le feu à une bâche qui se trouvait près du terrain de Belgrano (club avec lequel les fans de Rosario entretenaient une grande rivalité). Quand les supporters de Belgrano virent la situation, ils auraient scandé « ¡Son unos canallas!, ¡son unos canallas! » (ce sont des vauriens, ce sont des vauriens).

#616 – Chievo Vérone : Mussi Volanti

Les ânes volants, en dialecte véronais (parfois traduit en italien en Asini Volanti). J’avais décidé, en ouvrant ce blog, de parler des surnoms des équipes existantes et non celles disparues. J’imaginais peut-être que cela le rendrait plus vivant. Mais, je me rends compte que c’est une erreur. Mon but, au travers de ce site, est de faire connaître les histoires des clubs, leur rendre hommage afin de rappeler aux jeunes fans qu’un club ne se résume pas au carnet de chèque de son propriétaire, à ses stars éphémères et à son équipe de marketing composée de footix. En s’intéressant à l’histoire de ce sport, il me semble désormais obligatoire d’évoquer également les clubs disparus. En particulier, l’actualité m’a rappelé à l’ordre au cœur de l’été quand j’ai découvert que le Chievo Vérone était en faillite et disparaissait définitivement après 92 ans d’existence. Je n’étais pas supporteur de ce club mais il mettait en lumière certaines valeurs du football d’antan.

La comparaison avec un âne est généralement peu flatteur et relève de l’ironie (cf article #337 sur Naples). Dans les années 80 et 90, le Hellas Vérone était le club phare de la ville de Roméo et Juliette. Finaliste de la Coupe d’Italie en 1983 et 1984, l’équipe atteint le graal en 1985 en remportant le championnat d’Italie avec le danois Preben Elkjaer Larsen et de l’Allemand Hans-Peter Briegel. A l’opposé, le Chievo Vérone, modeste club d’un quartier de la ville comptant 4 000 âmes, montait péniblement les différentes marches des divisions inférieures. En 1985, alors que la ville fêtait le titre, le Chievo évoluait en série C interrégional (5ème division). A la fin des années 1980 et au début des années 1990, les supporteurs du Hellas se moquèrent de leur faux « rival » en affichant dans les travées du Stade Marcantonio-Bentegodi des banderoles où on pouvait lire « Quando i mussi i volerà faremo el derby in serie A » (quand les ânes voleront, nous ferons le derby en Série A). A l’époque, il n’y avait jamais eu de derby entre les deux clubs de la ville et ceux d’Hellas voulaient rappeler qu’il n’y en aurait jamais vu la différence entre les deux clubs. Sauf, comme seule le sport en réserve, la magie va opérer. Suite au titre de 1985, le Hellas connut quelques bonnes années mais assez vite redescendit en Série B à l’issue de la saison 1990. Hellas s’établit principalement alors au second échelon professionnel dans les années 1990. A contrario, le club ouvrier du Chievo poursuivit sa progression. Le club accéda au statut professionnel en 1986 avec sa promotion en 4ème division . Quand le Hellas descendit en Série B en 1990, le Chievo monta en 3ème division. Vous me voyez venir ? Ce qui devait rester un évènement impossible, se réalisa le 10 décembre 1994 avec le premier Derby della Scala (en référence à la famille noble qui gouvernait la cité de Vérone au XIVème siècle) en Série B. L’histoire ne s’arrête pas là. En 2001, le Chievo gagna sa première promotion en Série A rejoignant ainsi le Hellas . Les premiers mois du club furent même idéals, le Chievo pointant à la 1ère place du classement quasiment jusqu’à la trêve hivernale. Il n’en fallait pas plus pour les supporteurs du Chievo pour prendre leur revanche. Le club et les fans adoptèrent le surnom de Mussi Volanti. L’âne fit son apparition sur le site du club et les porte-clés et autres objets de merchandising se parèrent de l’animal. Un groupe de supporters se nomma « Calcio Club Mussi volanti« , et un bar « La Tana dei Mussi volanti« . L’animal devint définitivement la nouvel mascotte. Attention sur le blason du club, ce n’est pas un âne sur lequel monte le chevalier. Il s’agit de la reproduction de la statue équestre de Cangrande della Scala, un des membres importants de la dynastie scaligère (qui apporta la prospérité à la cité). Au final, 19 derbys furent joués pour terminer par une égalité parfaite : 7 victoires pour le Chievo, 7 pour le Hellas et 5 matchs nuls.

Malheureusement, le club est désormais redevenu un âne au sens premier avec cette faillite. Un ancien joueur du club, Sergio Pellissier, et des supporteurs vont tenter de redonner naissance au club via le FC Chievo 1929.

#604 – Tonnerre KC Yaoundé : les Kalara Boys

Les garçons du livre. Pas de référence religieuse dans ce surnom, le livre du club n’étant pas la Bible. Tout d’abord, il convient de préciser que le K du nom du club correspond à Kalara et, en langue kóló (parfois nommé aussi ewondo), cela signifie « livre » . Ce dernier apparaît sur l’écusson du club, ouvert en son milieu. L’explication parfois avancée porte sur le style de jeu développé par le club. Connu pour son beau jeu, l’équipe appliquait une stratégie précise, un football sans brutalité et des mouvements harmonieux et offensifs. Un style de jeu qui était parfois qualifié de scientifique et que l’on trouvait que dans les livres. Ce style proviendrait du révérend Père Louis Philippe Mayor. Curé fondateur de la paroisse Saints Anne et Joachim de Nkoabang de Yaoundé, il était également entraineur et attaquant du club du Tonnerre. A sa disposition, des jeunes lycéens qui composaient chaque année la base de l’équipe. Certes, ce recrutement au sein des lycéens conduisait à une certaine instabilité de l’équipe, puisque ces joueurs étudiants partaient régulièrement pour meneur leurs études ou leurs vies professionnelles ailleurs. Mais, ils étaient des joueurs qui appliquaient studieusement les préceptes de beau jeu du Père Mayor.

Pour ma part, j’avancerai aussi une autre explication. A Yaoundé, en 1930, fut créé le club du Canon de Yaoundé avec entre autres Omgba Zing. Confronté à des querelles internes, Omgba Zing décida de quitter le Canon en 1934 et de fonder un nouveau club, le Tonnerre. Ce dernier se caractérisa comme dès sa fondation et constitue encore aujourd’hui un rival du Canon. Or, le symbole du Canon (comme son nom l’indique) est le canon, une arme. Or, l’opposé souvent mis en avant pour le canon est la culture, et plus précisément l’écriture, donc le livre.

#529 – Goiás EC : O Clube dos 33

Le club des 33. Comparativement aux autres États du Brésil, le football s’installa plus tardivement dans l’État de Goiás. Les deux premiers clubs de football fondés dans l’État le furent dans les villes desservies par le chemin de fer de Mogiana, soit la ville de Catalão et celle de Pires do Rio. Ainsi, le Clube Recreativo e Atlético Catalano apparut en 1931 et le Pires do Rio Futebol Clube en 1935. D’autres clubs émergèrent dans les années 30. En 1939, le besoin de structurer cet environnement sportif bouillonnant mais naissant se fit sentir et la fédération régionale de football fut créée. Dans ce mouvement, le Goiás EC se forma encore plus tardivement, le 6 avril 1943.

Sa naissance, poussée par les frères Carlos et Lino Barsi, se fit humblement, sur le trottoir, sous les lumières d’un vieux réverbère. D’autres clubs dans la ville de Goiás existaient déjà (Goiânia Esporte Clube (1936) et Atlético Clube Goianiense (1937)). Résultat, si sa naissance se fit sous un réverbère, les plus anciens clubs de la région faisaient de l’ombre à ce nouveau venu. Sans argent, au structure modeste, sans résultat sportif, Goiás était un petit club, qui n’attirait pas les foules. Ses rivaux commencèrent donc à le surnommer péjorativement O Clube dos 33 pour signifier que Goiás ne comptait que 33 supporteurs, les 33 fondateurs. Pendant ses 20 premières années d’existence, les seuls éclaires de génie de Goiás venaient de son attaquant Tão Segurado qui joua de 1954 à 1961 pour le club. En 1956, il réussit à terminer meilleur buteur du championnat de l’État avec 22 buts et dédia cette performance aux fameux « 33 fans » du club. Dix ans plus tard, Goiás remporta son premier titre et ainsi commença la saga qui ferait de lui aujourd’hui la plus grande équipe de football de l’État. Goiás fit alors du terme, qui était une plaisanterie, une fierté et le nombre 33 est un symbole fort du club.

#500 – West Bromwich Albion FC : Baggies

Il s’agit bien du short large et long que le club a pour surnom. A la mode chez les adolescents dans les années 1990, ce n’est pas ce phénomène à l’origine de ce sobriquet. Mais, la véritable source est inconnue et plusieurs histoires existent. La première version fait référence aux recettes du club et à leur transport. A la fin du XIXème siècle, son stade de The Hawthorns comptait deux entrées, une derrière chaque but. Les jours de matchs, le personnel du stade partaient des guichets avec la recette et traversaient le stade, escortés par des policiers, jusqu’au niveau de la ligne médiane où se trouvait un petit bureau sous la tribune. La recette, issue de la vente des billets d’entrée, s’élevait à des montant importants et était transporté dans de grands sacs en tissu. En passant devant les tribunes, les supporteurs prenaient l’habitude de crier « Here come the bag men ! » (eh ! les hommes aux sacs) et, ce rituel deviendra avec le temps « Here come the baggies ! » . Une autre histoire se concentre sur les accoutrements des supporteurs du club. La ville de West Bromwich se situe dans le Black Country, cette région industrielle du centre de l’Angleterre. Riche de nombreux minerais (charbon, fer …), les mines y fleurirent puis les industries lourdes de transformation (sidérurgie, métallurgie, aciéries). Dans les hauts fourneaux, les ouvriers y travaillant portaient des vêtements robustes, en moleskine, et larges pour résister aux durs labeurs et à la chaleur. Ou alors, selon d’autres, les vêtements étaient réalisés dans un tissu nommé duck. De couleur claire au départ, le vêtement s’assombrissait au fil des lavages. Pour les réparer, une pièce blanche en duck étaient rajoutée. Ceci donnait un effet volumineux au pantalon, qui donnait l’apparence de sacs de farine. Le surnom baggies serait donc né de ces vêtements amples. Certains avancent que le terme fut attribué par les supporteurs rivaux d’Aston Villa. Quand ceux d’Albion se déplaçaient dans le stade des Villans, en nombre et avec ces vêtements, ils étaient accueillis par des cris « Here come the Baggies of Bromwich » . Enfin, la version la moins connue se reporte aux shorts des joueurs de football. Ces derniers étaient amples et auraient donc influer sur le surnom.